Les faits et la procédure
M. Y., né en 1976, a été victime, le 29 septembre 2008, d’un accident de la circulation, qui lui a causé un grave traumatisme crânien. Il est hospitalisé au centre hospitalier universitaire de … où, en raison de son état de tétraplégie et de complète dépendance, il est alimenté et hydraté de façon artificielle.
Le 11 janvier 2014, son médecin a décidé de mettre fin à son alimentation et à son hydratation artificielles, décision suspendue par le tribunal administratif le 16 janvier 2014. Le 24 juin suivant, le Conseil d’Etat a dit que la décision du 11 janvier 2014 ne pouvait être tenue pour illégale.
Par jugement du 10 mars 2016, le juge des tutelles a placé M. Y. sous tutelle pour une durée de cent vingt mois, désignant Mme Y., son épouse, en qualité de tutrice pour le représenter dans l’administration de ses biens et la protection de sa personne, et l’UDAF … en qualité de subrogé tuteur. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt ayant confirmé ce jugement par arrêt du 8 décembre 2016.
Le 12 août 2016, M. et Mme Y., les parents de M. Y., M. A, l’un de ses demi-frères, et Mme Z., l’une de ses sœurs (les consorts Y.) ont saisi le juge des tutelles d’une requête aux fins de transfert de M. Y. dans un autre établissement hospitalier. Par ordonnance du 20 octobre 2016, le juge des tutelles a déclaré cette requête irrecevable.
Le 19 août 2016, les consorts Y. ont saisi le juge des tutelles d’une requête tendant à l’organisation des visites des membres de la famille auprès du majeur protégé.
L’arrêt de la Cour de cassation
1. Sur le fondement de l’article 1222 du code de procédure civile, les consorts Y. avaient demandé d’accéder au dossier de tutelle de M. Y., conservé au greffe du juge des tutelles. Cette demande avait été rejetée. La Cour retient que « la décision par laquelle le juge se prononce sur une demande de consultation du dossier, formée en application de l’article 1222 du même code, est une mesure d’administration judiciaire, non sujette à recours ».
2. Sur l’organisation des visites, la Cour de cassation confirme que la cour d’appel a « souverainement déduit, sans faire preuve de partialité ni statuer par des motifs généraux, que l’organisation prévue par le premier juge devait être confirmée ». Elle relève que l’arrêt de la cour d’appel a développé « par motifs propres et adoptés, l’existence d’une difficulté liée à la contestation, par les consorts Y., des restrictions imposées par le centre hospitalier universitaire et aux conflits entre les membres de la famille, exprimés lors des auditions ; qu’il retient, ensuite, qu’il importe, dans une perspective d’apaisement, de réglementer les visites, en fonction du bien-être du patient et de la sérénité qui doit lui être assurée dans sa chambre d’hôpital, mais également des nécessités d’un service de soins où sont pris en charge plusieurs autres patients dans des situations complexes, et des contraintes professionnelles des équipes soignantes, tout en préservant les liens familiaux ; qu’ayant constaté que l’ordonnance contestée permettait, au total, à une vingtaine de proches de visiter le patient, l’arrêt relève, enfin, que ce dispositif n’empêchera pas des demandes ponctuelles d’élargissement, qui pourront être soumises au juge des tutelles ».
3. Toutefois, concernant la demande des consorts Y. tendant au transfert de l’établissement de soins dans lequel est hospitalisé M. Y., la cour de cassation relève que « l’arrêt retient qu’aucun texte ne précise les personnes habilitées à saisir le juge des tutelles sur le fondement de l’article 459-2 du code civil, de sorte que les membres de la famille et proches doivent pouvoir saisir le juge des difficultés relatives au lieu de vie de la personne protégée ». Pour autant, « en statuant ainsi, alors qu’au regard de l’état de santé de M. Y., son transfert dans un autre établissement de soins constituait un acte grave, au sens de l’article 459, alinéa 3, du code civil, de sorte que seule la tutrice était recevable à présenter la requête, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».
Ainsi, la cour de cassation casse et annule la décision du juge des tutelles relative au choix du lieu de vie.