La chambre criminelle de la Cour de cassation a, par un arrêt rendu en date du 29 juin 2010, rejeté le pourvoi contre un arrêt de la Cour d’appel de Lyon en date du 11 février 2009 ayant condamné un médecin gynécologue pour escroquerie au préjudice de la sécurité sociale et mise en danger de la vie des patientes ayant reçu des traitements de stimulation ovarienne susceptibles d’entraîner des risques mortels et subi des actes d’assistance médicale à la procréation (AMP) dans des conditions irrégulières. En l’espèce, un gynécologue a assuré pendant plusieurs années le suivi de patientes qui présentaient des troubles de la fécondité et leur a appliqué des traitements aux fins de stimulation ovarienne. A la suite de la plainte d’une patiente pour mise en danger de la vie d’autrui et escroquerie, une information a été ouverte puis ce professionnel de santé a été poursuivi devant la juridiction pénale pour avoir notamment mis en danger la vie de six personnes.
Concernant l’infraction de mise en danger de la vie d’autrui, la Cour de cassation relève que « la prise en charge et le suivi du dossier médical des patientes n'avaient pas été réalisés conformément aux règles de l'art et que les soins pratiqués avaient constitué pour elles un danger certain ». Elle indique que « les infractions sont constituées dès lors qu'en méconnaissance de l'article L. 2141-1 du code de la santé publique et de l'arrêté du 12 janvier 1999, la réalisation des AMP a été faite sans évaluation préalable d'une équipe pluridisciplinaire, sans un bilan clinique complet des deux partenaires et sans un bilan sanitaire et diagnostique » et « que les traitements de stimulations ovariennes réalisées à de fortes posologies pouvaient entraîner un risque mortel d'hémorragie, un risque d'épanchement liquidien intra-abdominal, de phlébite ou d'embolie pulmonaire ». Elle approuve ainsi la cour d'appel d’avoir déduit de ces constatations que ce médecin a, par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, exposé autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente.
Concernant l’infraction d’escroquerie au préjudice de la sécurité sociale, la Cour relève notamment que ce praticien avait, à de maintes reprises, fait signer des patientes au verso de leurs ordonnances, multiplié les factures subrogatoires sur la base d’une même ordonnance et utilisé des feuilles de remboursement vierges portant l’empreinte du tampon de plusieurs pharmacies afin d’obtenir la délivrance de médicaments indûment payés par la sécurité sociale pour se constituer un stock.
chambre criminelle
Audience publique du mardi 29 juin 2010
N° de pourvoi: 09-81661
Publié au bulletin Rejet
M. Louvel , président
Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur
Mme Magliano, avocat général
Me Foussard, Me Spinosi, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, avocat(s)
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Emile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7e chambre, en date du 11 février 2009, qui, pour escroqueries, mises en danger d'autrui et infractions au code de la santé publique et au code de la sécurité sociale, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, cinq ans d'interdiction professionnelle et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ; f
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'Emile X..., médecin gynécologue, a assuré pendant plusieurs années le suivi de patientes présentant des troubles de la fécondité et leur a appliqué des traitements aux fins de stimulation ovarienne ; qu'à la suite de la plainte de l'une d'elles pour mise en danger d'autrui et escroquerie, une information a été ouverte à l'issue de laquelle il a été renvoyé devant le tribunal correctionnel, notamment pour avoir mis en danger la vie de six personnes et pour avoir, à de nombreuses reprises, fait signer des patientes au verso de leurs ordonnances, multiplié les factures subrogatoires sur la base d'une même ordonnance et utilisé des feuilles de remboursement vierges portant l'empreinte du tampon de plusieurs pharmacies afin d'obtenir la délivrance de médicaments payés par la caisse primaire d'assurance maladie ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 70 du décret du 6 septembre 1995 (devenu R. 4127-70 du code de la santé publique), de l'arrêté du 12 janvier 1999, des articles 223-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a déclaré Emile X... coupable de mise en danger de la vie d'autrui ;
" aux motifs qu'une expertise a été diligentée par les professeurs B... et Y... et les docteurs M... et N..., aux termes de laquelle les hommes de l'art ont conclu que la prise en charge et le suivi du dossier médical de certaines patientes n'avaient pas été réalisés conformément aux règles de l'art et que les soins pratiqués avaient constitué pour ces patientes, un danger certain ;
a) le cas d'Odile Z... épouse A... : que, s'agissant d'Odile Z..., les experts judiciaires ont reflevé qu'Emile X... a pratiqué sur celle-ci, de février 1997 à fin octobre 1999, de multiples traitements enchaînés rapidement ayant consisté en des stimulations d'ovulation créant un risque d'hyperstimulation susceptible d'entraîner une infirmité permanente, ainsi qu'en des actes d'insémination artificielle avec sperme du conjoint et de fécondation in vitro, outre en des examens par coelioscopie ; que les experts ont indiqué que de tels traitements, relevant d'un acharnement thérapeutique, ont été mal conduits et inutiles, dès lors qu'ils n'étaient pas de nature à permettre d'éviter la survenance de fausses couches répétées, spécialement en raison de l'absence de bilan étiologique préalable propre à en établir la cause ; que les experts ont également estimé que de tels traitements ont été dangereux pour la patiente, laquelle a été exposée à un risque vital, en raison de la mise en oeuvre d'une thérapeutique anticoagulante en début de grossesse, destinée à en favoriser l'évolution, par l'administration d'héparine à des doses non reconnues par la profession médicale dans une telle situation, créant ainsi un risque hémorragique vital, susceptible de provoquer une embolie pulmonaire mortelle ; que les premiers juges en ont conclu " qu'Emile X..., en s'abstenant d'établir le diagnostic approprié, préalablement à la mise en oeuvre d'actes d'assistance médicale à la procréation, et en appliquant des traitements inutiles et dangereux ayant exposé directement Odile Z... à un risque injustifié et immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une infirmité permanente, a manifestement violé de manière délibérée les obligations particulières de prudence imposées au médecin par les articles R. 4127-33, R. 4127-37 et R. 4127-40 du code de la santé publique " ; que si, comme le souligne le défenseur d'Emile X..., aucun des textes visés par le tribunal n'édicte des obligations particulières de sécurité ou de prudence, au sens de l'article 223-1 du code pénal, il n'en demeure pas moins que le docteur X... a méconnu des obligations particulières de prudence et de sécurité ; que tout d'abord, s'agissant de la coelioscopie, l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 stipule " tout médecin est, en principe, habilité à pratiquer tous les actes de diagnostic, de prévention et de traitement, mais, il ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles, entreprendre ou poursuivre des soins, ni formuler des prescriptions dans des domaines qui dépassent ses connaissances, son expérience et les moyens dont il dispose " ; que ces prescriptions ne sont pas de simples recommandations, mais des règles de droit qui s'imposent à ceux qui y sont assujettis ; que l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 édicte une règle objective qui constitue une obligation particulière au sens de l'article 223-1 du code pénal ; que seule la qualification de gynécologue obstétricien autorise les actes chirurgicaux, notamment les coelioscopies et les hystéroscopies ; qu'en l'espèce, les experts ont pu relever que le docteur Emile X... n'avait pas la compétence pour effectuer des actes de chirurgie ; que, pour pouvoir les faire, il aurait dû être inscrit auprès du conseil de l'ordre comme spécialiste en gynécologie ou comme chirurgien ; que le docteur Y... précise que " la coelioscopie est classéef par la CNAM parmi les actes chirurgicaux sanglants ; que, pour pouvoir les pratiquer, il faut une formation initiale Internat CHU, ce que n'avait pas le docteur X... " ; que, nonobstant ce défaut de qualification, il a pratiqué, sur la personne d'Odile Z..., des coelioscopies ; qu'en ayant entrepris des soins dépassant ses connaissances, et sans qu'il puisse se prévaloir de circonstances exceptionnelles, il a sciemment méconnu l'obligation particulière de prudence et de sécurité que lui impose l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 ; qu'en outre, qu'Emile X... a délibérément violé les obligations résultant de l'arrêté du 12 janvier 1999, relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en matière d'aide médicale à la procréation, entré en vigueur le 28 février 1999 ; que l'article L. 152-1 du code de la santé publique, issu de la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994, dispose que " l'assistance médicale à la procréation s'entend des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, le transfert d'embryons et l'insémination artificielle, ainsi que toute technique d'effet équivalent permettant la procréation en dehors du processus naturel ; qu'en l'espèce, les techniques de stimulation ovarienne entrent dans le cadre de l'assistance médicale à la procréation et sont donc soumises également aux dispositions de l'arrêté du 12 janvier 1999 ; que l'article 1-1-1 de l'arrêté du 12 janvier 1999 précise notamment qu'aucun patient ne peut être pris en charge en vue d'une assistance médicale à la procréation dans les établissements autorisés sans cette évaluation préalable par l'équipe pluridisciplinaire ; qu'en l'espèce, aucune équipe pluridisciplinaire n'est intervenue dans la prise en charge d'Odile Z... ; que cette équipe pluridisciplinaire a pour objectif de réunir plusieurs praticiens avant de déterminer quel est le traitement le plus adapté au cas de la patiente ; que cette équipe pluridisciplinaire aurait pu éviter les traitements inutiles et dangereux prodigués à Odile Z... : héparine et corticoïdes pouvant entraîner un risque mortel d'hémorragie ; que de plus, il lui a administré de la calciparine, pour fluidifier le sang, ce qui accroît encore le risque d'hémorragie, à laquelle elle est devenue allergique ; que selon l'article 1-2-1 dudit arrêté : " l'assistance médicale à la procréation doit toujours répondre à une demande parentale, pour remédier à une infertilité " ; qu'en l'espèce, Odile Z... consultait le docteur X... non pas pour une infertilité mais du fait qu'elle subissait de nombreuses fausses couches et pour déterminer les raisons de ces fausses couches et trouver une solution à ces problèmes ; qu'aux termesf de l'article 1-2-2, certaines indications sont relatives, notamment toutes celles qui correspondent à une simple hypofertilité, et doivent être jugées en fonction du bilan diagnostique, de l'âge des patients et de la durée d'infécondité ; qu'en cas d'indication relative, il est recommandé d'observer un délai raisonnable avant la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation, délai dont l'importance dépend de l'âge des patients et du temps écoulé depuis qu'ils essaient d'obtenir une grossesse ; qu'en effet, dans ce cas, la plus grande partie des couples concevront spontanément ; qu'en l'espèce, en l'absence de bilan diagnostique, le docteur X... ne pouvait être en mesure de constater l'existence d'une de ces conditions relatives, et a, de plus, commencé l'assistance médicale à la procréation immédiatement, ceci ayant notamment comme résultat une hyper stimulation consécutive d'un surdosage ;
que, toujours selon l'article 1-2-2 : " il n'est pas raisonnable de proposer une fécondation in vitro à un couple dont la femme a moins de 35 ans sans une durée d'infécondité d'au moins 2 ans " ; qu'en l'espèce, lorsque Odile Z..., née en 1967, a commencé à consulter le docteur X... en 1997, elle avait alors 30 ans, que les techniques de fécondation in vitro n'étaient pas raisonnablement envisageables pour cette patiente sur deux points : son âge et l'absence de problème d'infécondité ; que l'article 1-2-2 de l'arrêté énonce que : " la réalisation d'une assistance médicale à la procréation chez un couple infertile ne peut être envisagée sans un bilan comprenant au moins les examens suivants : examen clinique complet des deux partenaires " ; qu'en l'espèce, aucun bilan complet n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de maîtriser parfaitement les produits à administrer, les doses et le déroulement du traitement ; que l'article 1-2-4 de l'arrêté énonce que, dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation intraconjugale, il est nécessaire de rechercher des marqueurs biologiques d'infection et, lorsque cela est techniquement possible, d'infectivité par VIH 1, VIH 2, les virus des hépatites B et C et la syphilis chez les deux membres du couple ; que cette recherche doit être réalisée avant la première tentative et, pour les autres tentatives, si le délai depuis la dernière détermination est supérieur à douze mois ; qu'en l'espèce, aucun bilan sanitaire n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de déterminer si un risque de contamination par un virus existait ; f
b) le cas de Myriam C..., épouse D... : que, s'agissant de Myriam C..., épouse D..., les experts judiciaires ont relevé qu'Emile X... a pratiqué sur celle-ci, de manière quasi permanente, à la fin de l'année 1997 et jusqu'au mois de novembre 2000, une stimulation de l'ovulation avec insémination artificielle avec sperme du conjoint à raison de trente cycles ; qu'ils ont estimé que de telles stimulations ont été réalisées à de fortes et excessives posologies exposant la patiente aux risques tant de grossesse multiple que d'hyperstimulation ovarienne, potentiellement dangereuse en raison de la possibilité de survenance de torsion ou de rupture ovarienne, d'épanchement liquidien intra-abdominal ou thoracique, de phlébite ou d'embolie pulmonaire ;
que, concernant les traitements appliqués postérieurement au 28 février 1999, les experts ont relevé qu'Emile X... s'est abstenu de procéder à un bilan étiologique complet, propre à l'établissement d'un diagnostic d'infertilité ou de stérilité du couple, avant de procéder à des stimulations de l'ovulation préalables à plusieurs inséminations artificielles avec sperme du conjoint, et a omis de recourir à la consultation obligatoire de l'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article 1-1-1 de l'arrêté précité et compétente pour discuter au préalable les indications de l'insémination et, plus généralement, le choix de la technique d'assistance médicale à la procréation appropriée, ainsi que les modalités de stimulation, de surveillance de l'ovulation et de prévention du risque de grossesse multiple ; qu'en conclusion, le collège d'experts concluait au fait que la prise en charge de Myriam D... et le suivi du dossier médical de celle-ci n'ont pas été réalisés conformément aux règles de l'art et aux données actuelles de la science ; que les soins pratiqués et les médicaments prescrits ont constitué un danger pour la femme ; que le docteur X... a procédé, courant mai 1999, à une coelioscopie sur la personne de Myriam D..., et ce, alors qu'il n'avait pas de compétence pour procéder à cet acte chirurgical, ce qui constitue un manquement délibéré à une obligation particulière de prudence et de sécurité, par violation des dispositions de l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 ; que, concernant Myriam D..., le prévenu a délibérément méconnu les dispositions de l'arrêté du 12 janvier 1999 ; que contrairement à l'article 2-1-2 qui précise : " sauf exception, une insémination artificielle par cycle est suffisante, le nombre de cycles d'inséminations ne devrait pas dépasser 6 ; que Myriam D... a notamment subi plus que trente cycles d'insémination en 1997 ; que contrairement aux dispositions de l'article 1-2-2, selon lesquelles, " la réalisation d'une assistance médicale à la procréation chez un couple infertile ne peut être envisagée sans un bilan comprenant au moins les examens suivants : examen clinique complet des deux partenaires ", aucun bilan complet n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de maîtriser parfaitement les produits à administrer, les doses et le déroulement du traitement ; qu'en outre, l'article 1-2-2 énonce : certaines indications sont relatives, notamment toutes celles qui correspondent à une simple hypofertilité, et doivent être jugées en fonction du bilan diagnostique, de l'âge des patients et de la durée d'infécondité ; qu'en cas d'indication relative, il est recommandé d'observer un délai raisonnable avant la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation, délai dont l'importance dépend de l'âge des patients et du temps écoulé depuis qu'ils essaient d'obtenir une grossesse ; qu'en effet, dans ce cas, la plus grande partie des couples concevront spontanément ; qu'en l'espèce, en l'absence de bilan diagnostique, le docteur X... ne pouvait être en mesure de constater l'existence d'une de ces conditions relatives, et a, de surcroît, commencé l'assistance médicale à la procréation immédiatement ; que, de plus, Myriam D... avait en l'espèce 22 ans et a dû être hospitalisée pour une hyperstimulation ovarienne consécutive au surdosage de médicament ; que l'article 1-2-4 dispose que dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation intraconjugale,''il est nécessaire de rechercher des marqueurs biologiques d'infection et, lorsque cela est techniquement possible, d'infectivité par VIH 1, VIH 2, les virus des hépatites B et C et la syphilis chez les deux membres du couple ; que cette recherche doit être réalisée avant la première tentative et, pour les autres tentatives, si le délai depuis la dernière détermination est supérieur à douze mois " ; qu'en l'espèce, aucun bilan sanitaire n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de déterminer si un risque de contamination par un virus existait ; que l'article 1-1-1 de l'arrêté du 12 janvier 1999 dispose notamment qu'aucun patient ne peut être pris en charge en vue d'une assistance médicale à la procréation dans les établissements autorisés sans cette évaluation préalable par l'équipe pluridisciplinaire ; qu'en l'espèce, aucune équipe pluridisciplinaire n'est intervenue dans la prise en charge de Myriam D... ; que cette équipe pluridisciplinaire qui a pour objectif de réunir plusieurs praticiens avant de déterminer quel est le traitement le plus adapté au cas de la patiente, aurait pu éviter les hyperstimulations ovariennes, que, de plus, Myriam D... a dû être hospitalisée pour un épanchement liquidien intra-abdominal du fait des hyperstimulations ; qu'en conséquence, que la preuve est bien rapportée de manquements délibérés de la part du docteur X... à des obligations particulières de prudence et de sécurité ayant exposé Myriam D..., à tout le moins, à des risques de blessures de nature à entraîner une infirmité permanente ;
c) Le cas de Catherine E... : que, s'agissant de Catherine F... G..., épouse E..., les experts ont relevé qu'Emile X... a pratiqué sur celle-ci, courant août et septembre 2000, une stimulation ovarienne prématurée, en l'absence de troubles du cycle menstruel et sans établir un diagnostic préalable suffisant d'infertilité ou de stérilité du couple, et qu'il a ainsi administré de fortes posologies de produits inducteurs, à des doses préconisées uniquement pour réaliser une fécondation in vitro, sur une patiente particulièrement exposée, tant au risque d'hyperstimulation, en raison de la présence d'ovaires micro-polykystiques, et de grossesse multiple ou très multiple, que de phlébite potentiellement mortelle, en raison de l'existence d'un précédent récemment survenu en février 2000 ; que de tels risques se sont au surplus réalisés, en suite de la naissance de quatre enfants prématurés, à vingt-huit semaines d'aménorrhée, et de la survenance d'une phlébite consécutive à une hyperstimulation ovarienne grave, ayant nécessité un long traitement anticoagulant par injection d'héparine pendant six mois, ainsi qu'une hospitalisation d'une durée de sept jours ; que, quelle que soit la réalité, invoquée par Emile X..., du désir d'enfant de la patiente, qui le conteste, les experts ont estimé que les traitements ainsi appliqués par celui-ci ont gravement exposé celle-ci à un danger vital ; qu'Emile X..., en s'abstenant d'établir le diagnostic approprié, préalablement à la mise en oeuvre d'un traitement de stimulation ovarienne, sur une patiente particulièrement sujette à un risque de récidive de phlébite, et en exposant ainsi directement Catherine F... G..., épouse E... un risque injustifié et immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une infirmité permanente, a manifestement violé de manière délibérée les obligations particulières de prudence imposées par l'arrêté du 12 janvier 1999 ; qu'en premier lieu, et contrairement à l'article 1-1-1 du dit arrêté, aucune équipe pluridisciplinaire n'est intervenue dans la prise en charge de Catherine E..., alors que cette équipe pluridisciplinaire aurait pu adapter le traitement aux risques de phlébite que présentait Catherine E... et tenter de solutionner le trouble de l'ovulation qu'elle présentait avant de commencer les stimulations ovariennes ; qu'en second lieu, qu'il n'est pas raisonnable de proposer une fécondation in vitro à un couple dont la femme à moins de 35 ans sans une durée d'infécondité d'au moins deux ans, article 1-2-2 ; qu'en l'espèce, Catherine E... avait 27 ans quand elle a commencé à consulter le docteur X... en 1997 ; que les techniques de fécondation in vitro n'étaient pas raisonnablement envisageables pour cette patiente en raison de son âge et de la durée insuffisante d'infécondité Catherine E... ayant eu un premier enfant naturellement ; qu'en troisième lieu, que " la réalisation d'une assistance médicale à la procréation chez un couple infertile ne peut être envisagée sans un bilan comprenant au moins les examens suivants : examen clinique complet des deux partenaires " article 1-2-2 ; qu'en l'espèce, aucun bilan complet n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de maîtriser parfaitement les produits à administrer, les doses et le déroulement du traitement notamment compte tenu des risques de phlébite qu'elle présentait ; qu'en quatrième lieu, que certaines indications sont relatives, notamment toutes celles qui correspondent à une simple hypofertilité, et doivent être jugées en fonction du bilan diagnostique, de l'âge des patients et de la durée d'infécondité ; qu'en cas d'indication relative, il est recommandé d'observer un délai raisonnable avant la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation, délai dont l'importance dépend de l'âge des patients et du temps écoulé depuis qu'ils essaient d'obtenir une grossesse ; qu'en effet, dans ce cas, la plus grande partie des couples concevront spontanément article 1-2-2 ; qu'en l'espèce, en l'absence de bilan diagnostique, le docteur X... ne pouvait être en mesure de constater l'existence d'une de ces conditions relatives, et a, de plus, commencé l'assistance médicale à la procréation immédiatement, ceci ayant notamment comme résultat une hyperstimulation et une hospitalisation de Catherine E... pour une phlébite ; enfin que selon l'article 1-2-4, que dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation intraconjugale, il est nécessaire de rechercher des marqueurs biologiques d'infection et, lorsque cela est techniquement possible, d'infectivité par VIH 1, VIH 2, les virus des hépatites B et C et la syphilis chez les deux membres du couple ; que cette recherche doit être réalisée avant la première tentative et, pour les autres tentatives, si le délai depuis la dernière détermination est supérieur à douze mois ; qu'en l'espèce, aucun bilan sanitaire n'a été effectué par le docteur X..., lui permettant de déterminer si un risque de contamination par un virus existait ; f
d) le cas de Malika H..., épouse I... : que, concernant Malika H..., épouse I..., les experts judiciaires ont relevé qu'Emile X... a pratiqué sur celle-ci, d'avril 1997 à mai 2000, une stimulation de l'ovulation avec inséminations artificielles avec sperme du conjoint, à neuf reprises et quasiment chaque mois ; qu'ils ont estimé que de telles stimulations ovariennes ont été réalisées à de fortes posologies potentiellement dangereuses pour la patiente ; que, concernant les traitements appliqués postérieurement au 28 février 1999, date d'entrée en vigueur de l'arrêté du 12 janvier 1999 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en matière d'assistance médicale à la procréation, les experts ont relevé qu'Emile X... s'est abstenu de procéder à un bilan étiologique complet propre à l'établissement d'un diagnostic d'infertilité ou de stérilité du couple, avant de procéder à des stimulations de l'ovulation préalables à plusieurs inséminations artificielles avec sperme du conjoint, et a omis de recourir à la consultation obligatoire de l'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article 1-1-1 de l'arrêté précité et compétente pour discuter, au préalable, les indications de l'insémination et, plus généralement, le choix de la technique d'assistance médicale à la procréation appropriée, ainsi que les modalités de stimulation, de surveillance de l'ovulation et de prévention du risque de grossesse multiple ; que les experts ont indiqué, en outre, que le docteur X... avait pratiqué sur Malika I..., le 30 avril 1999, une hystéroscopie avec coelioscopie, deux actes chirurgicaux réservés aux gynécologues obstétriciens, qualification dont le docteur X... ne peut se prévaloir ; que le prévenu, là encore, n'a pas respecté les dispositions de l'article 1-1-1 de l'arrêté du 12 janvier 1999, dans la mesure où aucune équipe pluridisciplinaire n'est intervenue dans la prise en charge de Malika I... ; qu'aucun bilan complet n'a été effectué en violation de l'article 1-2-2 de l'arrêté, selon lequel " la réalisation d'une assistance médiale à la procréation chez un couple infertile ne peut être envisagée sans un bilan comprenant au moins les examens suivants : examen clinique complet des deux partenaires ; qu'au mépris de l'article 1-2-2 qui dispose que compte tenu de la faible efficacité des techniques au-delà de 37 ans, il est recommandé de ne prendre en charge des femmes plus âgées que dans les cas où la fonction ovarienne a été jugée satisfaisante ; qu'en l'espèce, il n'est fait mention d'aucun contrôle quant à la fonction ovarienne de Malika I..., née le 15 janvier 1960 ; que l'arrêté, en son article 1-2-2 dispose encore que certaines indications sont relatives, notamment toutes celles qui correspondent à une simple hypofertilité, et doivent être jugées en fonction du bilan diagnostique, de l'âge des patients et de la durée d'infécondité ; qu'en cas d'indication relative, il est recommandé d'observer un délai raisonnable avant la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation, délai dont l'importance dépend de l'âge des patients et du temps écoulé depuis qu'ils essaient d'obtenir une grossesse ; qu'en effet, dans ce cas, la plus grande partie des couples concevront spontanément ; qu'en l'espèce, en l'absence de bilan diagnostique, le docteur X... ne pouvait être en mesure de constater l'existence d'une de ces conditions relatives, et a, de plus, commencé l'assistance médicale à la procréation immédiatement, ceci ayant notamment comme résultat une hyperstimulation ; qu'enfin, selon l'article 1-2-4 dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation intraconjugale, il est nécessaire de rechercher des marqueurs biologiques d'infection et, lorsque cela est techniquement possible, d'infectivité par VIH 1, VIH 2, les virus des hépatites B et C et la syphilis chez les deux membres du couple ; que cette recherche doit être réalisée avant la première tentative et, pour les autres tentatives, si le délai depuis la dernière détermination est supérieur à douze mois ; qu'en l'espèce, le bilan sanitaire n'a été effectué par le docteur X... que deux ans après la première visite de Malika I... ;
e) le cas de Jeannette J..., épouse K... : que, s'agissant def Jeanfnette J... épouse K..., les experts judiciaires ont relevé qu'Emile X... a appliqué à celle-ci, de courant 1996 à fin août 1997, un traitement aux fins de stimulation ovarienne suivie d'un déclenchement d'ovulation, ce de manière prématurée et en l'absence d'un bilan étiologique complet propre à l'établissement d'un diagnostic d'infertilité ou de stérilité ; que les experts ont estimé qu'un tel traitement, pratiqué par l'injection de produits stimulants à des doses surévaluées, et même supérieures à celles uniquement préconisées pour une fécondation in vitro, a exposé la patiente aux risques vitaux et fonctionnels d'hyperstimulation ovarienne, ainsi que de grossesse multiple ou très multiple ; que ce dernier risque s'étant, au surplus, réalisé, la patiente a donné naissance, à vingt-six semaines d'aménorrhée plus six jours, et après réduction embryonnaire d'un embryon, à trois enfants très prématurés dont l'un est décédé à la naissance, vraisemblablement en raison d'une déficience de la surveillance bactériologique vaginale et urinaire rendue indispensable par la rupture prématurée d'une membrane amniotique à vingt semaines d'aménorrhée, et un autre, gravement handicapé, en raison de la survenance d'une hémorragie intra-ventriculaire droite et de lésions ischémo-hémorragiques pariétales droites ayant entraîné une displégie spastique à prédominance gauche ; qu'au terme de leurs minutieuses investigations, les experts concluent ainsi : la prise en charge de madame Jeannette K... et le suivi du dossier médical de celle-ci n'ont pas été réalisés conformément aux règles de l'art et aux données actuelles de la science ; que les soins pratiqués et les médicaments prescrits constituent, et ont constitué, un danger vital pour la femme et les foetus ; que là aussi, il convient de rappeler que l'article L. 152-10 du code de la santé publique, issu de la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 dispose que la mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation doit être précédée d'entretiens particuliers des demandeurs avec les membres de l'équipe pluridisciplinaire ; qu'en l'espèce, aucune équipe pluridisciplinaire ne s'est entretenue tant avec Jeannette J... qu'avec son mari, afin de déterminer le traitement le plus adapté au cas de la patiente ;
f) le cas d'Hayat L... ; que, s'agissant d'Hayat L..., prise en charge par le docteur X..., de juillet 1998 à juillet 2000, les experts ont relevé la stimulation ovarienne par injection de Gonadotrophine et l'insémination intra-utérine réalisée sans bilan médical complet des deux conjoints (il manque notamment la réalisation d'une hystérosalpingographie préalable à toute stimulation de l'ovulation devant permettre d'affirmer la perméabilité des trompes), l'absence de renouvellement des examens sérologiques chez les deux conjoints, la poursuite pendant un nombre de cycles significatifs d'inséminations avec préparation du sperme, contrairement aux données législatives figurant dans l'arrêté du 12 janvier 1999 et relatif aux couples dont le conjoint présente une séropositivité pour l'hépatite C, la pratique de cette technique d'assistance médicale à la procréation, réalisée sans respect de l'obligation au consentement éclairé et signé des conjoints avant chaque insémination et la réalisation de cette technique hors d'une prise en charge à 100 % ainsi que pouvait en bénéficier le couple, soumettant ainsi les pratiques médicales du docteur X... au contrôle des médecins conseils de l'assurance maladie, la réalisation d'une coelioscopie par le docteur X... en juin 1999, reposant le problème d'une pratique médicale sans compétence reconnue ; qu'il s'en suit qu'Emile X... a délibérément violé des obligations particulières de prudence et de sécurité, imposées par l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 et de l'arrêté du 12 janvier 1999 ; que le tribunal, après avoir constaté de tels manquements, a cru devoir relaxer Emile X..., au motif que si les traitements pratiqués et les médicaments prescrits, ont constitué un danger pour Hayat L..., il n'est cependant pas établi que cette dernière ait été exposée à un risque de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ; que cette motivation ne saurait être adoptée, en ce que la pratique de la coelioscopie, acte chirurgical sanglant, par une personne n'ayant pas compétence à cet égard, est de nature à exposer la patiente à des conséquences mortelles ; que, dès lors, la cour infirmera, à cet égard, le jugement entrepris en déclarant le docteur Emile X... coupable d'avoir exposé directement Hayat L... à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'obligations particulières de sécurité ou de prudence imposées par les règlements ; qu'en revanche, la cour confirmera, au besoin par substitution de motifs en ce qui concerne les obligations particulières de sécurité et de prudence délibérément méconnues par Emile X..., la culpabilité de ce dernier à l'égard d'Odile Z..., épouse A..., Myriam C..., épouse D..., Catherine E..., Malika H..., épouse I... et Jeannette O..., épouse K... ;
" 1°) alors que le délit de mise en danger d'autrui n'est caractérisé qu'en cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement ; que l'article 70 du décret du 6 septembre 1995 (devenu R. 4127-70 du code de la santé publique) ainsi que l'arrêté du 12 janvier 1999, en ce qu'ils se bornent à ordonner au médecin de dispenser les soins les mieux adaptés à l'aide du diagnostic le plus précis possible et n'imposent donc pas un modèle de conduite circonstanciée précisant très exactement la conduite que les médecins doivent avoir dans une situation donnée, n'édictent pas d'obligation particulière de sécurité ou de prudence au sens de l'article 223-1 du code pénal, qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de ce texte ;
" 2°) alors que l'article 223-1 réprime le fait d'exposer autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ; qu'en se bornant à affirmer que le docteur X... n'avait pas la compétence pour accomplir ou n'a pas accompli certains actes (coelioscopie, stimulation ovarienne, absence de bilan sanitaire avant PMA ou d'évaluation préalable par l'équipe pluridisciplinaire), sans rechercher si ces actes avaient effectivement exposé les patientes d'Emile X... à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale " ;
Attendu que, pour déclarer Emile X... coupable de délits de mise en danger d'autrui, l'arrêt attaqué énonce que, selon les experts, la prise en charge et le suivi du dossier médical des patientes n'avaient pas été réalisés conformément aux règles de l'art et que les soins pratiqués avaient constitué pour elles un danger certain ; que les juges relèvent que les infractions sont constituées dès lors qu'en méconnaissance de l'article L. 2141-1 du code de la santé publique et de l'arrêté du 12 janvier 1999, la réalisation des assistances médicales à la procréation a été faite sans évaluation préalable d'une équipe pluridisciplinaire, sans un bilan clinique complet des deux partenaires et sans un bilan sanitaire et diagnostique ; qu'ils ajoutent que les traitements de stimulations ovariennes réalisées à de fortes posologies pouvaient entraîner un risque mortel d'hémorragie, un risque d'épanchement liquidien intra-abdominal, de phlébite ou d'embolie pulmonaire ; que la cour d'appel déduit de ces constataftions qu'Emile X... a, par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, exposé autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-3 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour d'appel a déclaré Emile X... coupable d'escroquerie au préjudice de la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon ;
" aux motifs que l'information a mis en évidence l'existence d'une véritable entente entre le docteur X... et les époux P... en vue de la délivrance au docteur X... de médicaments en grande quantité, permettant à ce dernier de se constituer gratuitement un stock de médicaments, payés indûment par la caisse primaire d'assurance maladie, à l'aide de procédés délictueux ; que, dans cette entente, le docteur X... apparaît comme un " pivot " et que s'il n'y avait pas eu les demandes, les initiatives d'Emile X..., il n'y aurait pas eu d'escroqueries ; que c'est lui, directement ou par l'intermédiaire de sa collaboratrice et maîtresse, Claudette Q... qui a sollicité les époux P..., puis Brigitte R... puis enfin la pharmacie S... à Valence ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon, après recherches approfondies a relevé :
- une inadéquation entre les dates de traitement et les dates de délivrance des spécialités, ce qui implique qu'Emile X... disposait irrégulièrement d'un stock de produits ;
- des différences entre les quantités utilisées pour les soins et celles délivrées au préjudice de la caisse, ce qui pouvait permettre au docteur X... de constituer un stock de produits et caractériser une escroquerie ;
que Guy Nathan P... a expliqué qu'il n'avait pas " osé refuser " de rendre service au docteur X... et qu'il s'était cependant rendu compte que le docteur X... sortait du cadre de l'urgence en demandant la délivrance immédiate non d'une quantité limitée de produits mais de l'ensemble des spécialités inscrites sur les ordonnances ; qu'il préférait, en novembre 1998, mettre un terme à cette pratique qu'il savait irrégulière ; que, pour sa part, Brigitte R... déclarait avoir agi à la demande de Claudette Q..., compagne du docteur X..., qui lui avait demandé de lui fournir les ampoules de Gonal F pour le traitement de ses patientes et avait accepté de lui rendre ce service, le transport des ordonnances et des produits étant fait par Claudette Q..., voire sa fille Aurélie, employée de juin à août 1999 ; que Brigitte R... déclarait, cependant, avoir cessé au bout de huit mois sa collaboration avec le docteur X..., après avoir constaté que certaines ordonnances étaient signées au verso avant même l'impression de la facture subrogatoire, mécanisme révélateur des escroqueries d'Emile X... ; qu'elle constatait, par ailleurs, la disparition d'un tampon de son officine, au début de l'année ; que, par ailleurs, les résultats de la perquisition opérée au domicile de Claudette Q... sont instructifs au regard du délit d'escroqueries ; qu'en effet, les policiers ont saisi plusieurs boîtes de Gonal F et de nombreuses vignettes pharmaceutiques se rapportant à ce médicament, à de la Gonadotrophine et de la Métrodine ainsi que des feuilles de remboursement vierges portant des vignettes de Gonal F ou de Métrodine et l'empreinte du tampon des pharmacies P... et R... mais également de la pharmacie de Mme S... de Valence ;
que les vignettes ne pouvaient provenir que de la vente de produits par une officine qui aurait dû soit les coller sur les factures subrogatoires soit les annuler dans le cadre de télétransmission étant ici rappelé que l'utilisation de vignettes aux fins de double remboursement, alors qu'il y a eu remboursement par télétransmission, est constitutive de l'escroquerie ; que Claudette Q... expliquait sans la moindre gêne, compte tenu des quantités concernées, que le Gonal F lui était destiné car elle était suivie par le docteur X... qui était son amant et voulait un enfant, et était propriétaire des documents saisis à son domicile ; que cette explication, émanant d'une femme de 45 ans, ne pouvait que laisser sceptique ; que Claudette Q... ajoutait qu'elle remettait du Gonal F aux patientes, sur les instructions du docteur X..., précisant qu'il s'agissait de produits non utilisés et restitués par certaines patientes au terme de leur traitement, ce qui laisse supposer qu'ils pouvaient être remboursés plusieurs fois ; qu'enfin, elle expliquait qu'il lui arrivait, sur instructions du docteur X..., de faire signer les patientes au dos des ordonnances et d'aller chercher les produits à la pharmacie P... ; que, de l'instruction, il apparaissait que le docteur X..., dès le mois de mars 1997, avait mis en place sa pratique de fourniture directe des produits en contactant ses patientes afin qu'elles lui restituent les médicaments non utilisés dans le cadre de leur traitement et en sollicitant les pharmaciens ; qu'il en avait ainsi établi un stock ; que Claudette Q... avait insisté auprès des pharmaciens pour que les médicaments soient remis avec des vignettes pharmaceutiques vierges, ce qui, à l'époque de la télétransmission, ne peut qu'être constitutif d'escroquerie puisque permettant un double remboursement tout comme le voulait le docteur X... qui souhaitait, en les conservant, savoir combien de boîtes il consommait et combien il en remettait ; que le docteur X... n'hésitait pas à soutenir qu'il conservait les vignettes, dans un esprit de collectionneur, comme on collectionne les timbres ; que l'information a établi également que le docteur X... disposait des tampons des pharmacies P... et R..., Guy Nathan P... ayant affirmé qu'il n'utilisait plus le tampon concerné depuis des années tandis que Brigitte R... précisait que le sien lui avait été dérobé et avait été utilisé à son insu ;
que de nombreuses patientes du docteur X... bénéficiant du régime du tiers payant sans avance de frais et avec télétransmission étaient entendues et confirmaient les pratiques illicites des signatures en blanc au dos des ordonnances ; qu'à titre d'exemple, Huguette T..., patiente du docteur X..., indiquait que le docteur X... l'avait pourvue en Gonal F à compter de l'année 1999 ; qu'ayant toujours eu un traitement pour une dizaine de jours, de deux à trois ampoules / jour, voire exceptionnellement quatre ampoules / jour en début de stimulation, elle n'avait donc jamais obtenu de la secrétaire du docteur X... plus de 10 boîtes de Gonal F par stimulation ; qu'Huguette T... a été catégorique sur cette posologie, arguant qu'elle avait toujours veillé aux recommandations du laboratoire sur les conséquences de surdoses hormonales et qu'elle n'aurait d'ailleurs jamais admis une prescription supérieure à quatre ampoules / jour ; qu'elle a donc dénoncé comme fausses les deux ordonnances du docteur X..., figurant à l'appui des deux factures R..., en date des 16 août et 22 septembre 1999, consignant des dosages de six et cinq ampoules / jour sur treize et douze jours, d'autant que la seconde prescription avait été initialement rédigée sur la base de trois ampoules / jour ; qu'à l'égard de la première stimulation, elle confortait sa position par un achat de trois boîtes supplémentaires effectué cette fois par ses soins le 24 août 1999 auprès de la Pharmacie du Parc, ce qui aurait conduit à un dosage ahurissant de dix ampoules / jour ; que, toujours à titre d'exemple, Sonia U..., autre patiente du docteur X..., à qui les enquêteurs ont montré les factures subrogatoires (non signées par ses soins et portant la mention P. O.) et les ordonnances du docteur X... la concernant, a souligné l'incohérence des quatre factures de la Pharmacie pour le mois d'octobre 1998, mais aussi les fausses posologies des ordonnances à trois ampoules / jour alors qu'elle s'était toujours plainte auprès du docteur X... de ne pas pouvoir supporter un dosage supérieur à deux ampoules du fait d'une concentration du produit rendant l'injection par trop douloureuse ; que le docteur X... n'a pu donner d'explication plausible sur l'existence de deux originaux d'ordonnances, datées initialement du 11 mai 1999 et qui avaient été, chacune, produites par les pharmacies P... et R..., pour la délivrance d'un même traitement de Gonal F à Mme V..., ni à l'égard des quatre prescriptions et délivrances des 10 et 16 octobre 1998, vis à vis de l'assurée U... toujours pour un même traitement de Gonal F sur treize jours, médicaments censés avoir été délivrés par les deux pharmacies en cause ; qu'interrogé sur les éléments retrouvés lors de la perquisition chez Claudette Q..., éléments contenant tous les ingrédients pour la commission d'escroqueries avec réutilisation notamment des vignettes de Gonal F et Métrodine, à partir de feuilles de remboursements vierges pré-tamponnées par les pharmacies P..., R... et S..., accompagnées ou non d'ordonnances vierges pré-tamponnées par les officines, Emile X... s'est cantonné à répondre notamment qu'il possédait là " une collection unique au monde " en vignettes de médicaments ; que c'est donc une véritable organisation en vue d'un enrichissement illicite aux dépens de l'assurance maladie, qui fonctionnait autour du docteur X... et que, sans les pratiques parfaitement réfléchies et constitutives d'escroqueries de ce dernier, la situation génératrice du lourd préjudice de la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon n'aurait jamais existé ; qu'en définitive, il convient de réformer le jugement entrepris, en déclarant Emile X... coupable d'escroqueries au préjudice de la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon ;
" alors que, en se bornant à indiquer qu'une véritable organisation en vue d'un enrichissement illicite aux dépens de l'assurance maladie fonctionnait autour du docteur X..., sans adopter de motifs de nature à contredire ceux des premiers juges selon lesquels il n'est pas prouvé qu'Emile X... ait établi ses prescriptions de GonaL F dans le but et avec la conscience de permettre à Nathan P... de procéder à des surfacturations au préjudice des organismes sociaux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. "
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'escroqueries, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme qu'Emile X... devra payer à Petar A... et à Odile A... épouse Z... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
FIXE à 2 000 euros la somme qu'Emile X... devra payer au conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
FIXE à 2 000 euros la somme qu'Emile X... devra payer au conseil national de l'ordre des pharmaciens au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
FIXE à 2 000 euros la somme qu'Emile X... devra payer à la à la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Harel-Dutirou conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Publication :
Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon du 11 février 2009
Titrages et résumés : MISE EN DANGER DE LA PERSONNE - Risques causés à autrui - Eléments constitutifs - Violation délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence -
Obligation particulière de sécurité ou de prudence - Cas
Justifie sa décision la cour d'appel qui, pour déclarer un médecin coupable de mise en danger d'autrui, retient qu'en réalisant des assistances médicales à la procréation en méconnaissance des
dispositions de l'article L. 2141-1 du code de la santé publique et de l'arrêté du 12 janvier 1999 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en assistance médicale à la
procréation, alors que les traitements de stimulations ovariennes réalisées à de fortes posologies peuvent entraîner un risque mortel d'hémorragie, d'épanchement, de phlébite ou d'embolie
pulmonaire, il a par la violation manifestement délibérée d'obligations particulières de sécurité ou de prudence imposées par la loi et le règlement, exposé plusieurs patientes à un risque
immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente
PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin-chirurgien - Mise en danger de la personne - Risques causés à autrui - Eléments constitutifs - Violation délibérée d'une obligation
particulière de sécurité ou de prudence - Cas
Précédents jurisprudentiels : Sur la notion d'obligation particulière de sécurité ou de prudence au sens de l'article 223-1 du code pénal, à rapprocher :Crim., 18 mars 2008, pourvoi n°
07-83.067, Bull. crim. 2008, n° 67 (cassation sans renvoi), et l'arrêt cité
Textes appliqués :
article 223-1 du code pénal ; article L. 2141-1 du code de la santé publique ; arrêté du 12 janvier 1999 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en assistance médicale à la
procréation