Par décision du 13 septembre 2012, la Cour d’appel de Lyon a rejeté les demandes de parents suite à de graves séquelles de leur enfant, né par césarienne. La juridiction a estimé qu’en l’absence de tracé du rythme cardiaque fœtal pendant plusieurs minutes, ainsi qu’au regard des grandes difficultés d’interprétation des enregistrements, le gynécologue avait été immédiatement appelé dès que le rythme cardiaque enregistré avait été considéré comme pathologique, et qu’il était intervenu dans un délai rapide. La Cour de Cassation casse et annule cette décision au motif que : « faute d’enregistrement du rythme fœtal pendant plusieurs minutes, il incombait à la clinique d’apporter la preuve qu’au cours de cette période, n’était survenu aucun événement nécessitant l’intervention du médecin obstétricien ».
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 13 décembre 2012
N° de pourvoi: 11-27347
Publié au bulletin Cassation
M. Charruault (président), président
SCP Baraduc et Duhamel, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Gatineau et Fattaccini, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 1315 et 1147 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de M. et Mme X..., agissant tant en leur nom personnel qu'au nom de leurs filles mineures, tendant à engager la responsabilité du Centre hospitalier privé de la Loire, venant aux droits de la Clinique Michelet, à la suite des graves séquelles dont leur fille, née par césarienne dans cet établissement le 17 juin 1994, dans un état d'hypoxie avancée, demeure atteinte, l'arrêt retient tout d'abord que l'absence de tracé du rythme cardiaque foetal entre 14 heures 33 et 14 heures 38, ne permettait pas de connaître l'état foetal pendant cette période, puis que les enregistrements entre 14 heures 38 et 14 heures 48, d'interprétation particulièrement difficile, révélaient des alternances de ralentissement du rythme cardiaque et des retours à la normale, que le rythme était considéré comme pathologique entre 14 heures 45 et 14 heures 52, avec une bradycardie majeure et une perte des oscillations apparaissant à 14 heures 54 et se poursuivant jusqu'à 15 heures 01, que le gynécologue avait alors immédiatement été appelé, et que l'enfant était née par césarienne à 15 heures 10, ce qui est un délai particulièrement rapide après le diagnostic ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, faute d'enregistrement du rythme foetal pendant plusieurs minutes, il incombait à la clinique d'apporter la preuve qu'au cours de cette période, n'était survenu aucun événement nécessitant l'intervention du médecin obstétricien, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne le Centre hospitalier privé de la Loire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Centre hospitalier privé de la Loire à payer à M. et Mme X... la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur et Madame X..., agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'administrateur des biens de leurs filles de leurs demandes en réparation du préjudice subi par l'enfant à la suite de l'accouchement du 17 juin 1994 ;
AUX MOTIFS QU’aucune faute n'a été relevée par les deux collèges d'experts judiciaires successivement désignés à l'encontre du Docteur Y... ; que la première expertise a conclu à la parfaite conformité aux règles de l'art et aux données acquises de la science des soins prodigués à Madame X... pendant sa prise en charge en vue de son accouchement ; que le Professeur Z... a conclu à l'absence de mauvaise organisation du service et à l'absence de retard de diagnostic comme de retard à l'extraction ; que le deuxième collège n'a pas plus retenu de faute ou manquement dans l'organisation du service ni dans le fait que la sage-femme n'ait pas été présente en permanence dans la salle de travail ; que le collège d'experts désigné ultérieurement a procédé à une analyse de l'enregistrement du rythme cardiaque foetal et du tracé des contractions utérines (ERCF) à partir d'une photocopie de cet enregistrement ; que les experts considèrent que l'ERCF est strictement normal jusqu'à 12H40 puis présentant des petites anomalies très mineures ne nécessitant pas d'intervention jusqu'à 14H30 ; qu'il relèvent l'absence de tracé de 14H33 à 14H38 pour laquelle ils ne parviennent pas à trouver d'explication sauf l'hypothèse d'une perturbation de l'enregistrement liée à la pose d'un capteur intra-utérin par Madame XX ..., la sage-femme ; que des anomalies du rythme cardiaque foetal majeures sont objectivées à partir de 14H38 répétitives et prolongées nécessitant une extraction foetale rapide, due à la compression du cordon procident qui interrompt la circulation sanguine materno-foetale et prive le foetus d'oxygène ; que les experts considèrent que la prise en charge du travail par la sage-femme est conforme aux bonnes pratiques cliniques malgré le manque de précisions sur l'administration des ocytociques ; qu'ils n'expliquent pas l'interruption de l'ERCF de 14H33 à 14H38 ; que s'agissant de la mise en place du capteur intra-utérin, les experts s'expliquent mal son indication de pose mais considèrent qu'elle ne constitue pas une erreur dans la prise en charge de la surveillance du travail ; qu'ils notent également une discordance entre les dires de la sage-femme concernant la découverte de la latérocidence et le diagnostic de procidence qui situent à 14H51 ou 52 cette découverte de l'examen clinique de 14H35 reporté sur le partogramme qui n'a cependant pas été rédigé en temps réel ; qu'ils relèvent qu'à partir du moment où le diagnostic réel est fait par la sage-femme à 14H50, le Docteur Y.. est immédiatement appelé et que l'enfant est né à 15H10 par césarienne, ce qui est un délai particulièrement rapide et performant après le diagnostic de procidence du cordon ; qu'ils font état d'une hypothèse de la bradycardie foetale entre 14H38 et 14H46 qui aurait dû inciter Madame XX... à appeler le Docteur Y... même si le diagnostic de la cause des anomalies du RCF n'était pas fait à ce moment-là, qu'ils indiquent cependant qu'il s'agit d'une hypothèse non démontrable compte tenu de l'absence d'enregistrement pendant cette période de 6 minutes ; que l'expert gynécologue a insisté sur la rareté de la complication survenue lors de cet accouchement, le diagnostic de procidence du cordon étant difficile à poser, rare chez une femme primipare comme l'était Madame X..., sur présentation céphalique fixée et à distance des membranes ; que l'absence de tracé du rythme cardiaque foetal sur une période de quelques minutes entre 14H35 et 14H38 ne permet pas de connaître l'état foetal pendant cette période ; que les experts estiment que l'interprétation des enregistrements de rythme cardiaque foetal, entre 14H38 et 14H48 est particulièrement difficile ; que l'enregistrement mentionne en effet des alternances de ralentissement du rythme cardiaque et des retours à la normale ; qu'ils considèrent le rythme entre 14H45 et 14H52 comme pathologique et indiquent que la bradycardie majeure avec perte des oscillations apparaît à 14H54 et se poursuit jusqu'à 15H01 soit une durée de 7 minutes ; que le Docteur Y.. a alors immédiatement été appelé ; que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il ne résulte pas de ce déroulement chronologique des faits une faute ou un retard de diagnostic, les experts ayant précisé expressément que « la sage-femme a porté le diagnostic de latérocidence puis de procidence au vu d'une anomalie de l'ERCF dans des circonstances et des délais qui ont été discutés mais qui n'apparaissent pas anormaux dans ce contexte » ; que les experts indiquent au surplus ne pas pouvoir affirmer qu'un gain de dix minutes sur l'intervention pratiquée pour libérer l'enfant et remédier à son hypoxie aurait permis d'atténuer les séquelles préjudiciables dans une proportion quelconque, indépendamment d'une appréciation purement théorique ;
ET AUX MOTIFS adoptés du jugement, QU'étant observé que le Docteur Y..., gynécologue obstétricien, qui a réalisé le 17 juin 1994 la césarienne indispensable à l'extraction de la jeune enfant X..., alors victime d'une hypoxie par l'effet d'une procidence du cordon ombilical, exerçait à titre libéral au sein de la Clinique MICHELET aux droits de laquelle se trouve actuellement la SA CHPL, suivant les éléments constants du dossier, spécialement ceux qui ont été recueillis à l'occasion d'une réunion d'expertise contradictoire le 30 janvier 2006 (pp. 5 et 10 du rapport des experts D... et E...), et qu'en toute hypothèse, ce médecin n'a pas été appelé personnellement à l'instance, conformément aux prescriptions de l'article 14 du Code de procédure civile, aucune condamnation ne s'avère envisageable à son encontre, fût-ce in solidum avec l'établissement de soins ; que corollairement, ce centre hospitalier privé ne peut être rendu responsable des actes médicaux accomplis par un praticien qui ne lui était pas subordonné, alors même que les époux X... ont fait essentiellement grief à ce dernier d'avoir « négligé de revoir la parturiente durant tout le travail, après avoir déclenché son accouchement … » ; que c'est donc pour l'essentiel en qualité d'employeur de Madame XX..., l'une des deux sages-femmes attachées à la salle de naissance de l'établissement et dirigées par une sage-femme cadre en 1994 (p. 7 du rapport d'expertise et p. 1 de l'avis du sapiteur), qui avait assuré la surveillance et la prise en charge clinique de Madame X... mais qui n'a pas été non plus appelée à l'instance, que la recherche de la responsabilité de la SA CHPL s'avère juridiquement concevable ; qu'en effet, l'organisation de la salle de naissance de la Clinique MICHELET au mois de juin 1994, telle qu'elle a été décrite par le Docteur Y.. et la sage-femme Madame XX.. aux experts désignés par le tribunal le 4 mai 2005, n'a pas suscité de la part de ces derniers de remarque critique particulière, en considération du nombre de naissances enregistrées dans l'établissement par an, alors qu'en cas de nécessité, était prévue une sage-femme supplémentaire d'astreinte pour venir assister la sage-femme de garde, que le 17 juin 1994, jour de la naissance de l’enfant X..., l'activité de la salle de naissance était limitée à un autre accouchement réalisé dès 11 heures 05, soit avant l'arrivée de Madame X..., outre un troisième accouchement qui n'a eu lieu qu'à 18 heures 05, que l'obstétricien, présent dans son cabinet au rez-de-chaussée de la clinique, à proximité de la salle des naissances située au premier étage et du bloc opératoire, a bien examiné la mère en début de matinée et que ce praticien a surtout pu, dès qu'il a été fait appel à lui, se rendre au chevet de la parturiente, prendre la décision d'intervenir et réaliser la césarienne qui s'imposait dans un délai considéré comme extrêmement performant par les experts (p. 20 du rapport) ; que par ailleurs, l'expert gynécologue obstétricien a déclaré ne pouvoir se prononcer sur l'absence de personnel médical pendant 15 à 20 minutes, à un moment qui n'a pu être déterminé mais qu'il n'est pas établi ni même allégué que cette solution de continuité dans la surveillance d'un travail qui se présentait initialement dans de bonnes conditions de présentation céphalique, d'absence de souffrance foetale et de croissance normale du foetus (p. 2 du rapport) et qui s'est déroulé sans signe alarmant jusqu'à 14 h 30 environ, puisse être imputée à un dysfonctionnement du service et surtout qu'elle ait pu survenir au cours de la période litigieuse située postérieurement à 14 heures 33, heure à laquelle la sage-femme était de nouveau présente pour poser un capteur intra-utérin, de telle sorte qu'une telle interruption dans le suivi effectif de cet accouchement ne peut être considérée avec certitude, en l'absence de signe clinique inquiétant jusqu'à 14 heures 38, suivant l'analyse la plus défavorable aux personnels soignants (p. 13 du rapport in fine), comme la cause d'une insuffisante réactivité aux signes annonciateurs d'une souffrance foetale objectivement préjudiciable à l'enfant, qui se sont multipliés par la suite, surtout à partir de 14 heures 49 ; qu'une défaillance technique du cardiotecographe, appareil permettant l'enregistrement du rythme cardiaque foetal, a été exclue par les experts judiciaires, dans la mesure où le même appareil a de nouveau fonctionné après six minutes d'interruption et où l'hypothèse d'une influence du déplacement de l'un des capteurs, néfaste sur le déroulement du tracé des enregistrements, est considéré comme vraisemblable ; qu'il s'ensuit que la recherche de la responsabilité de l'établissement de soins se circonscrit à une appréciation des initiatives prises par la sage-femme en présence des signes révélateurs de l'état foetal de l’enfant X.., étant admis qu'une petite alerte, survenue à 13 heures 35 et manifestée par une décélération du rythme cardiaque pendant une minute et demie environ n'impliquait pas d'intervention et que le rythme cardiaque foetal a repris normalement de 13 heures 40 à 14 heures 32, avec des oscillations normales et une réactivité correcte, notamment après la pause de l'analgésie péridurale située à 14 heures 20 (p. 13 du rapport d'expertise) ; qu'il a été relevé successivement par les experts désignés par le tribunal le 4 mai 2005 :- qu'à 14 heures 35, Mme XX... a constaté des ralentissements des bruits du coeur foetal, identifiés comme décélérations encore limitées, dites DIP 1 (sur une échelle de 2) et posé alors un capteur intra-utérin destiné à obtenir une meilleure mesure de l'intensité des contractions utérines (p. 8 du rapport) mais que cette manipulation a vraisemblablement déréglé l'enregistrement du rythme cardiaque foetal ;- qu'à partir de 14 heures 38, heure de reprise du tracé de l'enregistrement, un ralentissement d'une durée de sept minutes du rythme cardiaque de base, synonyme de bradycardie, est observable, sans que cet incident puisse être interprété comme une véritable bradycardie foetale plutôt que comme une perte de signal ou même que l'enregistrement transitoire du pouls maternel et alors que cette même période est entrecoupée d'une phase de 30 secondes de rythme normal à 120 battements minutes à 14 heures 39 (p. 13 et p. 28 du rapport) ;- que la reprise d'un enregistrement correct de 14 heures 47 à 14 heures 49 permet d'observer un ralentissement à 90 battements minute ;- qu'à 14 heures 49 et pendant une minute un ralentissement profond descendant plus bas que la limite inférieure était associé à une perte complète des oscillations et à une accélération compensatrice et présentait ainsi un aspect compatible avec une compression funiculaire (du cordon ombilical) passagère ;- que toutefois et au cours des trois minutes suivantes le rythme cardiaque foetal est redevenu normal ;- qu'une bradycardie permanente majeure avec perte des oscillations est apparue à 14 heures 54, évocatrice d'une procidence du cordon ombilical, qui était alors coincé entre la paroi utérine et la tête de l'enfant et n'assurait plus ainsi l'alimentation en oxygène du bébé, en raison de l'interruption de la circulation sanguine materno foetale ; que l'expert gynécologue obstétricien a insisté sur la rareté de la complication observée à l'occasion de cet accouchement, alors qu'un tel risque était faible chez une femme primipare, dont le travail se déroulait normalement, sur présentation céphalique fixée, à distance de la rupture des membranes (p. 30 du rapport), mais l'hypothèse d'un glissement prématuré du cordon, favorisé par la manoeuvre effectuée pour poser le capteur dans la cavité utérine à 14 heures 35, qui aurait pu mobiliser la présentation de l'enfant, n'a pu être vérifiée et retenue avec certitude, alors que Mme XX.. a démenti en cours d'expertise avoir alors constaté l'apparition du cordon, suivant la note portée de sa main sur un partogramme qui n'a pas été rédigé en temps réel, et que surtout, l'absence de tracé du rythme cardiaque foetal ne permettait pas d'objectiver une souffrance foetale, à défaut de pouvoir poser un diagnostic malaisé au prix d'une manipulation difficile (p. 17, 18 et 19 du rapport) ; qu'or, il importe de situer le moment auquel la sage-femme se trouve tenue de faire appel aussitôt à un médecin en raison d'une pathologie susceptible de mettre en danger la vie de la parturiente ou de l'enfant, si les circonstances dépassent les limites légales de sa capacité professionnelle, conformément aux dispositions des articles 23 et 28 du Code de déontologie des sages-femmes ou aux prescriptions de l'article L. 369 ancien, alors applicables, du Code de la santé publique, relatives aux cas d'accouchements dystociques ; qu'en considération des réserves formulées par les experts eux-mêmes sur les difficultés d'interprétation des enregistrements de rythme cardiaque foetal, entre 14 heures 38 et 14 heures 48, qui ne leur permet pas de conclure à la nécessité d'une extraction par césarienne pendant ce laps de temps, et compte tenu des alternances entre périodes de ralentissement du rythme cardiaque et retour à la normale, il apparaît que le ralentissement profond, descendant plus bas que la limite inférieure avec perte complète des oscillations et accélérations compensatrices, survenu à 14 heures 49, à la suite d'une premier ralentissement à 90 battements minutes de 14 heures 47 à 14 heures 49, devait incontestablement inciter la sage-femme à réagir, sans attendre la bradycardie majeure et permanente observée cinq minutes plus tard ; que cependant, dans la mesure où les experts se sont déclarés incapables de préciser si un gain de 10 minutes sur l'intervention pratiquée pour libérer l'enfant et remédier à l'hypoxie dont il souffrait aurait permis d'atténuer les séquelles préjudiciables dans une proportion quelconque, indépendamment d'une appréciation purement théorique, il ne peut se déduire de ces conclusions extrêmement prudentes que l'attentisme relativement regrettable dont Mme XX.. a fait montre, dans un contexte marqué par la difficulté de la problématique surprenante et brutale à laquelle elle était confrontée, ait entraîné avec certitude la disparition de l'éventualité favorable d'une intervention salvatrice, d'autant moins que la vingtaine de minutes qui correspondait en toute hypothèse au délai incompressible entre la constatation de la situation de souffrance foetale et la césarienne, anesthésie générale comprise, était malheureusement incompatible avec une absence de séquelles asphyxiques viscérales (p. 30 du rapport d'expertise) ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la clinique, dans le cadre de son obligation à fournir les moyens nécessaires à la bonne exécution des soins qu'elle prodigue et au contrôle de cette bonne exécution, doit procéder, dans le cadre d'un accouchement, à un enregistrement monitoring permanent au cours de l'accouchement, et est gardienne responsable de la conservation des enregistrements du monitoring, qui seuls permettent d'établir le moment précis où la souffrance foetale survient, ce qui est déterminant pour apprécier si la sage-femme est intervenue avec la diligence voulue au regard des risques encourus dans ce cas par l'enfant à naître ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que les experts avaient mentionné l'hypothèse de la survenance d'une bradycardie foetale entre 14 h 38 et 14 h 46, ce qui aurait dû alors conduire la sage-femme à appeler immédiatement le médecin obstétricien, mais que cette hypothèse n'était pas vérifiable « compte tenu de l'absence d'enregistrement pendant cette période de 6 minutes », dès lors que « l'absence de tracé du rythme cardiaque foetal sur une période de quelques minutes entre 14 h 35 (en réalité 14 h 33) et 14 h 38 ne permet pas de connaître l'état foetal pendant cette période » ; qu'ainsi, la Cour d'appel qui tout en constatant la carence de la clinique à produire les enregistrements du monitoring, ce qui rendait en conséquence impossible le contrôle du respect par la sage-femme de son obligation de surveillance de la parturiente, alors pourtant que des alertes sérieuses étaient apparues entre 12 h 30 et 13 h 30, ce qui aurait dû justifier une vigilance accrue du personnel de la clinique, n'a tiré aucune conséquence de cette faute, a violé les articles 1147 et 1382 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'absence de production par la clinique des enregistrements permanents de monitoring, dès lors qu'ils rendaient impossible la preuve du moment précis où la souffrance foetale était survenue, et partant la preuve du respect par la sage-femme de son obligation de surveillance de la parturiente, devait entraîner à tout le moins un renversement de la charge de la preuve, faisant peser sur la clinique l'obligation de prouver que la sage-femme avait appelé le médecin obstétricien dès que la souffrance foetale avait pu être constatée, et faisant bénéficier le doute éventuel sur ce point aux victimes du dommage, si bien que l'arrêt attaqué est privé de toute base légale au regard des articles 1315, 1147 et 1382 du Code civil ;
ET ALORS ENFIN QU'en se bornant à énoncer que les experts n'avaient pu « affirmer qu'un gain de dix minutes sur l'intervention pratiquée pour libérer l'enfant et remédier à son hypoxie aurait permis d'atténuer les séquelles préjudiciables dans une proportion quelconque, indépendamment d'une appréciation purement théorique », sans rechercher si la jeune enfant X... n'avait pas à tout le moins été privée d'une chance d'éviter les lésions dont elle avait été atteinte, ou à tout le moins de les atténuer, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1147 et 1382 du Code civil.