Le 18 décembre 1992, Mme Y. est victime d'une phlébite cérébrale à la suite d'un accouchement, que M. X., gynécologue obstétricien avait "tardé à diagnostiquer". Statuant sur renvoi, la Cour d'appel a rejeté l'action en garantie de M. X. contre M. Z., anesthésiste, ayant constaté que "la pathologie était une suite de l'accouchement et non de l'anesthésie". Par ailleurs, elle a estimé que "c'est M. X. qui assurait, en sa qualité de gynécologue obstétricien, le suivi de l'intéressée au sein du service de « suites des couches »". La patient restait donc "sous la surveillance du médecin obstétricien seul compétent pour contrôler toutes les suites de l'accouchement, avec leurs conséquences éventuelles, partant, sous sa seule responsabilité au regard, notamment, du diagnostic qui devait être posé plus précocement". Sur le fondement de l'article 64 du Code de déontologie médicale, la Cour de cassation précise que "l'obligation de tout médecin de donner à son patient des soins attentifs, consciencieux et conformes aux données acquises de la science emporte, lorsque plusieurs médecins collaborent à l'examen ou au traitement de ce patient, l'obligation pour chacun d'eux, d'assurer un suivi de ses prescriptions afin d'assumer ses responsabilités personnelles au regard de ses compétences". C'est pourquoi elle décide que la Cour d'appel "n'a pas tiré les conséquences de ses constatations" au regard de ce texte, "quand elle avait constaté que M. Z. avait été appelé au chevet de Mme Y. en raison de la survenance de céphalées et lui avait prescrit un neuroleptique pour les soulager, de sorte qu'il lui incombait de s'informer de l'effet de ce traitement, notamment aux fins de déterminer, en collaboration avec le gynécologue obstétricien, si ces troubles étaient en lien avec l'anesthésie ou avec l'accouchement, ce qui aurait pu permettre un diagnostic plus précoce". |
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 16 mai 2013
N° de pourvoi: 12-21338
Publié au bulletin
Cassation
M. Charruault (président), président
Me Le Prado, SCP Baraduc et Duhamel, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1147 du code civil, ensemble l'article 64 du code de déontologie devenu l'article R. 4127-64 du code de la santé publique ;
Attendu que l'obligation de tout médecin de donner à son patient des soins attentifs, consciencieux et conformes aux données acquises de la science emporte, lorsque plusieurs médecins collaborent à l'examen ou au traitement de ce patient, l'obligation pour chacun d'eux, d'assurer un suivi de ses prescriptions afin d'assumer ses responsabilités personnelles au regard de ses compétences ;
Attendu que, pour rejeter l'action en garantie de M. X., gynécologue obstétricien, condamné à réparer, à hauteur de 80 %, le préjudice subi par Mme Y., victime, à la suite d'un accouchement le 18 décembre 1992, d'une phlébite cérébrale qu'il avait tardé à diagnostiquer, contre M. Z., anesthésiste, la cour d'appel, statuant sur renvoi après l'arrêt de cassation du 28 avril 2011 (pourvoi n° 10-16. 230), ayant constaté, d'une part, que la pathologie était une suite de l'accouchement et non de l'anesthésie, d'autre part, que c'est M. X. qui assurait, en sa qualité de gynécologue obstétricien, le suivi de l'intéressée au sein du service de « suites des couches », en a déduit que le diagnostic de phlébite cérébrale, qui relevait de sa compétence, incombait à lui seul sans que l'on puisse admettre que ce diagnostic devait être posé par M. Z. au seul motif que lui avaient alors été signalés ces maux, Mme Y. restant sous la surveillance du médecin obstétricien seul compétent pour contrôler toutes les suites de l'accouchement, avec leurs conséquences éventuelles, partant, sous sa seule responsabilité au regard, notamment, du diagnostic qui devait être posé plus précocement ;
Qu'en statuant ainsi, quand elle avait constaté que M. Z. avait été appelé au chevet de Mme Y. en raison de la survenance de céphalées et lui avait prescrit un neuroleptique pour les soulager, de sorte qu'il lui incombait de s'informer de l'effet de ce traitement, notamment aux fins de déterminer, en collaboration avec le gynécologue obstétricien, si ces troubles étaient en lien avec l'anesthésie ou avec l'accouchement, ce qui aurait pu permettre un diagnostic plus précoce, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne M. Z. aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Z.; le condamne à payer à la société Macsf assurances et à Mmes A., X. et B., ès qualités, la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;