La Cour de cassation s’est prononcée dans un arrêt du 27 mai 2010, la Cour de cassation se prononce sur l'application de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 à un recours introduit à l'encontre d'une mesure de curatelle prononcée le 13 mai 2008.
En l'espèce, un juge des tutelles a ouvert en mai 2008 une curatelle simple sur le fondement de l'article 488 ancien du Code civil. Ce jugement a fait l'objet, le 23 mai 2008, d'un recours par l'intéressé et le tribunal de grande instance l’a rejeté au motif que la situation devait s'apprécier au regard de la loi du 5 mars 2007.
Or, la Cour de cassation a cassé et annulé ce jugement au visa des articles 45-I et 45-II-3° de la loi du 5 mars 2007. En effet, en application de ce deuxième article, l'appel et le pourvoi en cassation sont jugés selon les règles applicables lors du prononcé de la décision de première instance. La Cour de cassation a ainsi considéré que le recours introduit à l'encontre de la mesure de curatelle prononcée le 13 mai 2008 devait être jugé selon les règles applicables à cette date, c'est-à-dire selon la législation antérieure à la loi du 5 mars 2007, entrée en vigueur le 1er janvier 2009.
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 27 mai 2010
N° de pourvoi: 09-16094
Publié au bulletin Cassation
M. Charruault (président), président
SCP Bénabent, SCP Didier et Pinet, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 45-I et 45-II-3° de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 ;
Attendu qu'en application du premier de ces textes, la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 est entrée en vigueur le 1er janvier 2009, et qu'en application du second, l'appel et le pourvoi en cassation sont jugés selon les règles applicables lors du prononcé de la décision de première instance ;
Attendu que par jugement du 13 mai 2008, un juge de tutelles a ouvert une curatelle simple à l'encontre de M. Robert X... sur le fondement des dispositions de l'article 488 ancien du code civil ; que le 23 mai 2008, M. Robert X... a saisi le tribunal de grande instance d'un recours ;
Attendu que pour rejeter le recours de M. Robert X... et prononcer la mise sous curatelle renforcée, le jugement retient que la situation doit s'apprécier au regard de la loi du 5 mars 2007, applicable au 1er janvier 2009 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la mesure de curatelle avait été prononcée le 23 mai 2008, ce dont il se déduisait que le recours introduit à l'encontre de cette décision devait être jugé selon les règles applicables à cette date, le tribunal de grande instance a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 19 juin 2009, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Montbrison ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Saint-Etienne ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir prononcé la mise sous curatelle renforcée de Monsieur Robert X... ;
AUX MOTIFS QUE « la situation de Monsieur X... doit s'apprécier au regard de la loi du 5 mars 2007, applicable au 1er janvier 2009 ; qu'aux termes de ce texte et de l'article 440 du Code civil, la personne qui, sans être hors d'état d'agir elle-même, a besoin, pour l'une des causes prévues à l'article 425 du Code civil, d'être assistée ou contrôlée d'une manière continue dans les actes importants de la vie civile peut être placée en curatelle ; que l'article 425 dispose que toute personne dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté, peut bénéficier d'une mesure de protection juridique ; que les conditions de prodigalité, d'intempérance ou d'oisiveté n'ont plus à être réunies ; qu'en l'espèce, le médecin expert indique qu'à ce jour, les traits de personnalité de Monsieur X... sont dominés par la psychorigidité, l'autoritarisme et des traits du registre de la paranoïa avec des constructions défensives malhabiles, parfois primaires, parfois fixées dans de l'entêtement et surtout avec des capacités d'analyse alors éloignées de toute appréhension normale de la réalité ; que s'ajoutent à ce tableau clinique certains déficits cérébraux liés à un processus involutif avec troubles de la mémoire, des difficultés d'analyse et de raisonnement ; que l'expert précise que la dynamique actuelle de l'intéressé conduit à ce qu'il puisse se mettre en danger dans la prise de décisions non appropriées ;
qu'il doit être aidé, conseillé et contrôlé dans les actes de la vie civile ; que le rapport de l'UDAF vient parfaitement illustrer les difficultés décrites par l'expert ; qu'il démontre que les facultés intellectuelles de Monsieur X... sont fortement diminuées et empêchent ce dernier de gérer ses affaires ; qu'il apparaît ainsi que Monsieur X... évoque avec le curateur des difficultés de gestion des nombreux papiers qu'il reçoit mais se trouve dans l'incapacité de produire ces documents lors de la visite de l'UDAF ; qu'il ne paye pratiquement aucune facture concernant ses deux résidences principale et secondaire ou s'oppose à ce que son épouse règle les factures, ce qui aboutit à le priver de chauffage pendant plusieurs mois, à faire couper son téléphone ou interrompre sa mutuelle ; qu'il découle de ce comportement une difficulté sur son environnement immédiat puisqu'il ne fait plus appel à personne pour l'entretien de son domicile et qu'il en découle un problème d'hygiène et de dégradation des lieux ; qu'il apparaît en conséquence que Monsieur X... présente une altération de ses facultés mentales et doit être conseillé et contrôlé dans les actes de la vie civile ; qu'en application de l'article 1228 du Code de procédure civile, le Tribunal peut, même d'office, substituer une décision nouvelle à celle du juge des tutelles ou à la délibération du conseil de famille ; qu'en l'espèce, au regard de l'incapacité de Monsieur X... d'assumer simplement le règlement des factures pour son quotidien et de son incapacité à prendre des décisions appropriées concernant son patrimoine, il convient d'ordonner une curatelle renforcée » ;
ALORS QUE, D'UNE PART, aux termes de l'article 45-I de la loi du 5 mars 2007, la présente loi entrera en vigueur le 1er janvier 2009 ; que l'article 45-II-3° dispose que l'appel et le pourvoi en cassation sont jugés selon les règles applicables lors du prononcé de la décision de première instance ; qu'en jugeant que, sur le recours formé contre la décision du 13 mai 2008, « la situation de Monsieur X... doit s'apprécier au regard de la loi du 5 mars 2007 applicable au 1er janvier 2009 » et en fondant sa décision sur l'article 425 du Code civil issu de cette loi, ce tribunal a violé les textes susvisés ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, en se fondant sur « le rapport de l'UDAF », après avoir constaté que celle-ci n'était pas comparante, et sans vérifier que ce document aurait été versé aux débats ou communiqué à Monsieur Robert X..., le Tribunal a violé l'article 16 du Code de procédure civile.
Publication :
Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montbrison du 19 juin 2009