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Instruction interministérielle du xxxxx 1972 Gestion des biens des majeurs protégés hospitalisés en secteur public

PREAMBULE

Le nouveau régime de protection des incapables majeurs institué par la loi du 3 janvier 1968 est maintenu en vigueur depuis deux ans. Son application aux malades hospitalisés en secteur public a suscité un certain nombre de questions, concernant pour la plupart, les institutions nouvelles que sont la «tutelle en gérance» et la «sauvegarde de justice».

La présente instruction a un double objet:
-- apporter des précisions nécessaires quant au fonctionnement de ces institutions au triple aspect juridique, administratif et comptable;
-- prescrire un certain nombre de mesures intéressant des points particuliers relatifs à la gestion et à la protection des deniers des malades en traitement dans les hôpitaux psychiatriques.

CHAPITRE Ier
TUTELLE EN GERANCE ET SAUVEGARDE DE JUSTICE

Section I. -- Tutelle en gérance.

L'article 499 du code civil prévoit que le gérant de tutelle peut être soit un préposé de l'établissement de traitement, soit un administrateur spécial, choisis dans les conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat.

Le choix est exercé par le juge des tutelles conformément aux dispositions du décret n° 69-195 du 15 février 1969 (instruction n° 69-39 M 2 du 16 avril 1969, annexe n° 1).

A. -- Gérant de tutelle «préposé d'établissement».

I. -- DESIGNATION

1. Aux termes de l'article 1er du décret précité, les établissements hospitaliers choisissent parmi leurs préposés la personne la plus qualifiée pour être désignée, le cas échéant, comme gérant de la tutelle.

Il s'ensuit que:
-- le directeur de l'établissement ne peut choisir qu'un seul préposé;
-- ce choix est obligatoire pour tout établissement recevant habituellement des incapables majeurs;
-- au sein de l'hôpital, le juge des tutelles ne peut désigner que le préposé de l'établissement choisi par le directeur; il ne peut le récuser;
-- il serait éminemment souhaitable que cette désignation soit faite ès qualités et non nominativement.

En effet, le préposé engageant la responsabilité de l'hôpital, les tiers doivent être à même de distinguer si le gérant de tutelle a cette qualité ou non; (la désignation nominative devrait être pratiquée uniquement lorsque le gérant de tutelle exerce ces fonctions en qualité d'administrateur spécial) (cf. infra B).

Au surplus, la désignation ès qualités présente «l'avantage d'éviter d'avoir à solliciter du juge une nouvelle décision de nomination si, pour une raison quelconque: décès, retraite, changement de fonctions, révocation, etc., le préposé de l'établissement vient à changer. Il serait en effet quelque peu absurde, dans une telle hypothèse, d'être obligé de rouvrir des dizaines, peut-être même des centaines de dossiers de tutelle en gérance, pour prendre une décision de pure forme tendant à la désignation d'un nouveau gérant» (cf. J. Massip, La Réforme du droit des incapables majeurs, p. 240).

Cependant, il convient de ne pas confondre désignation ès qualités avec désignation, sans plus de précision, du «préposé de l'établissement» soignant le malade. En effet, si le malade passe définitivement dans un nouvel établissement, le préposé de celui-ci se trouverait automatiquement saisi sans qu'il soit nécessaire de recourir au juge des tutelles.

Cette procédure ne saurait être retenue: le changement d'établissement entraîne un transfert de responsabilité qui suppose une reddition de comptes faite au juge. <Il est indispensable que le juge apprécie s'il y a lieu de faire confiance à ce nouvel établissement et qu'il vérifie les comptes du premier». On notera, en outre, que le changement d'établissement de soins entraîne un « changement de domicile du majeur en tutelle et, dans certains cas, une modification du juge des tutelles compétent» (J. Massip, ouvrage précité, p. 240).

2. Le préposé doit appartenir au personnel administratif de l'établissement hospitalier à l'exclusion, par conséquent, du personnel médical ou para-médical (art. 499 du code civil).

Bien entendu, les termes «personnel administratif» doivent être entendus au sens strict; ainsi, le receveur de l'établissement, qui appartient au personnel «financier», ne peut être désigné; celui-ci, fonctionnaire de l'Etat et non préposé de l'hôpital, ne peut exercer des fonctions administratives sans contrevenir au principe de la séparation des ordonnateurs et des comptables.

Par ailleurs, les directeurs, médecins directeurs et directeurs économes, qui sont éventuellement tenus d'accomplir certains actes conservatoires au titre de la gestion d'affaires (art. 491 - 4 du code civil), ne peuvent se proposer eux-mêmes pour exercer les fonctions de gérant de tutelle «préposé».

Il est précisé que rien ne s'oppose à ce que le préposé de l'établissement soit un agent «contractuel». Dans cette hypothèse cependant, il conviendra qu'une mention spéciale soit insérée dans la police d'assurance de l'établissement, de manière à couvrir les actes de cet agent.

II. -- COMPETENCE ET POUVOIRS

1. Le gérant de tutelle ne peut en principe exercer ses fonctions en qualité de préposé qu'au bénéfice des malades soignés dans l'établissement auquel il appartient (cf. infra, «Administrateurs spéciaux». Cas du préposé exerçant des fonctions de gérant de tutelle en qualité d'administrateur spécial).

Bien entendu, ce principe doit être appliqué avec discernement; le gérant de tutelle ne saurait être dessaisi de ses fonctions lorsque, par exemple, le malade est appelé à suivre un traitement temporaire dans un établissement spécialisé.

Quoi qu'il en soit, lorsqu'il y a changement d'établissement de traitement, le gérant de tutelle n'est pas dessaisi automatiquement; seul le juge qui l'a désigné peut mettre fin à sa mission.

Dans tous les cas, le comptable de l'hôpital doit être avisé de toutes les décisins du juge des tutelles concernant le gérant de tutelle «préposé»: désignation, modification des pouvoirs, fin de gérance, etc. (communication d'une ampliation des pièces correspondantes).

Il découle de ces observations que, sauf modification éventuelle du régime initial de protection et désignation d'un nouveau gérant de tutelle, le receveur de l'établissement public auprès duquel est accrédité le préposé reste compétent pour recevoir ou payer les sommes pour le compte de la personne protégée, quelles que soient les modifications intervenues dans la domiciliation de cette personne.

Il en est ainsi même si la personne protégée quitte l'établissement public:
-- pour aller dans un autre établissement public;
-- pour aller dans un établissement privé;
-- pour rejoindre son domicile.

2. Le préposé d'un hôpital psychiatrique peut être appelé à poursuivre ses fonctions au bénéfice d'incapables transférés de l'établissement de traitement dans un établissement public ne comportant pas de gérant de tutelle (maison de retraite par exemple).

Dans cette hypothèse, le gérant doit être considéré comme étant le préposé de l'établissement de transfert.

Il peut paraître souhaitable, en effet, que, pour des motifs d'opportunité, un service organisé dans un établissement de traitement important soit commun à plusieurs établissements publics relativement peu éloignés les uns des autres.

Une convention règle alors les rapports entre les divers établissements et prévoit notamment la participation que doivent verser les autres établissements, à titre de contribution aux charges du service (traitement du gérant de tutelle, etc.).

L'établissement de transfert est responsable -- sauf son recours éventuel pour faute personnelle contre le préposé du dommage qui pourrait être causé à ses malades, à la suite d'une mauvaise gestion du gérant de tutelle (cette responsabilité doit être couverte par une assurance).

Le maniement des fonds des malades de l'établissement de transfert incombe au receveur de cet établissement.

3. Le rôle du gérant de tutelle préposé ayant été brièvement évoqué dans l'instruction n° 69-39/M/2 du 16 avril 1969, certaines précisions apparaissent nécessaires:

L'article 500 du code civil, qui définit la mission du gérant de tutelle, opère une distinction entre les actes que le gérant peut accomplir seul et ceux qui nécessitent une autorisation du juge.

Les premiers sont limités:
-- perception des revenus (1);
-- affectation de ceux-ci à l'entretien et au traitement du malade: frais médicaux, primes d'assurance, dépenses courantes;
-- gestion courante du patrimoine: loyers, réparations courantes aux biens, conservation et entretien de ceux-ci; paiement des dépenses engagées par le malade antérieurement à son incapacité; obligation alimentaire de l'incapable, etc.;
-- placement de l'excédent pouvant apparaître chez le receveur, chez un dépositaire agréé.

(1) S'agissant du préposé, les opérations d'encaissement, de décaissement et de conservation des fonds sont assurées par le receveur de l'établissement.

Tous les autres actes -- quelle que soit leur nature -- requièrent l'autorisation du juge: acte de disposition acceptation ou renonciation à une succession, vente d'immeubles ou de meubles meublants, participation à un partage, paiement de dépenses en capital, a etc.); emploi des capitaux (acquisition de biens meubles ou immeubles, placements en valeurs mobilières, etc.).

L'autorisation du juge est requise chaque fois qu'il s'avère nécessaire d'accomplir, pour le compte de l'incapable un acte excédant les pouvoirs d'administration du gérant préposé.

Toutefois une interprétation trop étroite de ces dispositions peut être source d'inconvénients:
-- multiplication des demandes pour des affaires de peu d'importance, entraînant des retards nuisibles au bon fonctionnement du service des tutelles;
-- gêne pour la prise de décisions rapides dans l'intérêt du malade (emprunt contingenté, par exemple).

Or, il n'est pas interdit au juge des tutelles, dans l'ordonnance désignant le gérant préposé, d'accorder à celui-ci une autorisation permanente visant certains actes de portée restreinte, appelés à se renouveler fréquemment.

Une telle solution paraît particulièrement souhaitable, s'agissant par exemple des placements à court terme, qui permettent d'utiliser immédiatement des liquidités passagères sans se priver de la possibilité de faire un emploi plus lucratif de ces liquidités lorsque celles-ci atteignent un certain montant.

Cependant, les limites de l'autorisation permanente devraient être étroitement déterminées, afin qu'elle n'aboutisse pas à une délégation de compétence de la part du juge; celui-ci pourrait, par exemple, fixer un plafond des placements à court terme au-delà duquel le préposé ne pourrait faire seul l'emploi des fonds.

B. -- Préposé exerçant les fonctions de gérant de tutelle en qualité «d' administrateur spécial».

Parmi les catégories de personnes aptes à remplir les fonctions d'administrateur spécial, l'article 2 du décret n° 69-195 du 15 février 1969 cite les préposés des établissements d'hospitalisation, de soins ou de cure publics ou privés.

En ce qui concerne les préposés d'établissements publics, les précisions suivantes sont apportées:

1. Le gérant de tutelle exerce ses fonctions en qualité d'administrateur spécial à «titre personnel» et non au titre de préposé de l'établissement qui l'emploie.

Sous réserve de l'appréciation des tribunaux, la responsabilité de sa gestion est donc entièrement personnelle (il serait souhaitable qu'il contracte une assurance), contrairement à la solution retenue lorsque le gérant exerce ses fonctions en qualité de préposé. Dans cette dernière hypothèse, en effet, l'établissement de traitement est responsable -- sauf son recours contre le préposé -- du dommage qui peut résulter pour l'incapable d'une mauvaise gestion.

2. Le gérant de tutelle ne peut exercer ses fonctions en qualité d'administrateur spécial qu'au bénéfice de malades extérieurs à l'établissement qui l'emploie.

3. Le comptable de l'établissement auquel appartient l'administrateur spécial n'a pas à intervenir; ce dernier a le maniement des fonds.

Cependant, il ne peut percevoir des émoluments au titre de cette activité que dans les limites prévues par l'arrêté interministériel du 4 mars 1970, modifié par l'arrêté du 8 janvier 1971 (cf. infra, sections III et II).

Section II. -- Sauvegarde de justice.

L'application aux malades hospitalisés en secteur public de l'institution originale qu'est la sauvegarde de justice soulève parfois des difficultés et pose souvent des questions nouvelles.

Pour pallier les premières et répondre aux secondes, des commentaires et instructions sont apportés sur les points regroupés autour des paragraphes suivants:
-- institution de la mesure, renouvellement et fin de la sauvegarde de justice;
-- fonctionnement de l'institution.

I. -- INSTITUTION DE LA MESURE RENOUVELLEMENT ET FIN DE LA SAUVEGARDE DE JUSTICE

1. Il est rappelé que la sauvegarde de justice suppose toujours l'existence d'une déclaration médicale et parfois l'intervention d'une décision judiciaire (le juge, saisi d'une procédure de tutelle ou de curatelle, décide de placer le malade sous la sauvegarde de justice pendant la durée de l'instance).

En ce qui concerne les établissements de soins et de cure publics, la déclaration du médecin de l'établissement au procureur de la République est obligatoire s'il constate que le malade hospitalisé a besoin, pour l'une des causes prévues à l'article 470 du code civil, d'être protégé dans les actes de la vie civile (art. 326-1 du code de la santé publique).

La responsabilité civile du praticien peut éventuellement être engagée.

2. Selon l'article 490 précité du code civil, le malade doit être protégé lorsque ses facultés mentales sont altérées ou lorsque l'altération de ses facultés corporelles empêche l'expression de sa volonté.

La loi s'exprime en termes généraux et sa portée ne saurait être réduite par certaines interprétations qui tendent à limiter le placement sous sauvegarde aux seuls malades qui ont des biens ou des intérêts à administrer ou qui doivent être protégés dans leurs contrats ou leurs engagements; de telles interprétations présentent de graves inconvénients pour les malades empêchés d'exprimer leur volonté et qui, dépourvus de biens «à administrer», peuvent cependant avoir besoin de protection pour la passation de certains actes extrapatrimoniaux.

3. La déclaration établie par le médecin (sur le modèle en annexe à l'instruction Santé publique n° 143 du 29 septembre 1969) doit obligatoirement être remise au directeur de l'établissement, qui:
-- l'adresse au procureur de la République en recommandé avec accusé de réception;
-- en transmet un exemplaire au receveur de l'établissement appelé à assurer le maniement des fonds du majeur protégé.

Lors de l'envoi de la demande de sauvegarde au procureur de la République, le directeur communique à celui-ci tous les renseignements qu'il peut posséder sur la situation du malade et donne, en particulier, son avis sur le régime de protection qui lui paraîtrait le plus approprié.

4. L'article 326-1 du code de la santé publique précise que «la déclaration a pour effet de placer le malade sous sauvegarde de justice».

Par ailleurs, aux termes de l'article 895-2 du code de procédure civile, la déclaration se périme par deux mois et, en cas de renouvellement, par six mois.

Sous réserve de l'appréciation des tribunaux, le point de départ du délai de péremption doit être considéré comme étant celui du jour où l'accusé de réception a été signé par le procureur de la République (cependant, le directeur de l'établissement est tenu de prendre, éventuellement, des mesures conservatoires dès qu'il est en possession du certificat du médecin portant demande de sauvegarde).

Il est recommandé aux directeurs de veiller tout particulièrement aux renouvellements des déclarations de sauvegarde, une interruption dans la protection accordée aux malades risquant d'entraîner de graves complications contentieuses.

5. L'établissement du certificat médical portant demande de sauvegarde fait partie des obligations de service des praticiens hospitaliers. Il ne donne donc lieu à aucune perception d'honoraires.

6. L'article 491-1 (2e alinéa) du code civil permet au juge, saisi d'une procédure de tutelle ou de curatelle, de placer le malade sous la sauvegarde de justice pendant la durée de l'instance.

La décision de sauvegarde prend effet le jour de la décision du juge.

Celui-ci transmet sa décision au procureur de la République de son ressort, qui en avise le procureur du lieu de traitement du malade.

En tout état de cause, le directeur de l'établissement de traitement doit également être informé comme, d'une manière générale, il doit être informé de toute déclaration de sauvegarde concernant les malades soignés dans son établissement (1).

(1) L'attention a été appelée sur les inconvénients résultant pour les services administratifs et les médecins du fait qu'ils sont généralement tenus dans l'ignorance des procédures de tutelle ou de curatelle des malades hospitalisés dans les établissements et à l'égard desquels des déclarations de sauvegarde ont pu être faites au parquet.

Il serait donc indispensable que soient portés à la connaissance des directeurs des hôpitaux les jugements de tutelle ou de curatelle ainsi que les décisions de mise sous sauvegarde prises à l'occasion de l'ouverture d'une procédure concernant les incapables majeurs hospitalisés dans leurs établissements.

Ces avis permettront, d'une part, d'éviter des déclarations ou des renouvellements de déclarations de mise sous sauvegarde devenus inutiles et, d'autre part, de tenir informées les autorités administratives de la situation juridique exacte de ces malades.

Il est indispensable en effet que, en raison des obligations qui lui sont imposées par l'article 491-1 du code civil, le directeur puisse éventuellement justifier de ses pouvoirs envers les tiers et rapporter la preuve des mesures de sauvegarde.

Bien entendu, le directeur doit immédiatement porter les déclarations de sauvegarde à la connaissance du receveur.

II. -- FONCTIONNEMENT DE LA SAUVEGARDE DE JUSTICE

Ainsi qu'il a déjà été indiqué dans l'instruction n° 69-39/M/2 du 16 avril 1969 (circulaire Santé publique n° 57 du 2 avril 1969), la sauvegarde de justice n'est pas une véritable incapacité, puisque le majeur y conserve l'exercice de ses droits.

Cependant, dans un certain nombre de cas, c'est un tiers qui agira pour le compte du majeur sous la sauvegarde de justice, soit en vertu de l'obligation qui lui est faite par la loi d'accomplir des actes conservatoires, soit comme gérant d'affaires (art. 491-4 du code civil), soit comme mandataire.

L'intervention d'un tiers mandataire paraissant devoir présenter dans la pratique une importance particulière et ayant déjà suscité certaines difficultés, il paraît opportun d'apporter des précisions quant au fonctionnement du mandat dans le cadre de la sauvegarde de justice.

Deux cas se présentent: le mandat volontaire (art. 491-3 du code civil) et le mandat judiciaire (art. 491-5).

1. Le mandat volontaire.

Le malade «protégé» peur instituer un mandataire ou a pu le faire avant d'être l'objet de la mesure de la sauvegarde: ces mandats reçoivent exécution.

Cependant, l'article 491-3 distingue suivant que la procuration n'a pas ou a été donnée en considération de la sauvegarde de justice.

Dans la première hypothèse, on se trouve en présence d'un mandat ordinaire soumis en principe à toutes les règles du droit commun. Les seules dérogations à ces règles résultent des dispositions des troisième et quatrième alinéa de l'article 491-3 du code civil, aux termes desquels le juge des tutelles peut révoquer le mandat ou exiger que les comptes du mandataire lui soient soumis pour approbation.

Cependant, ces dérogations ne modifient pas les droits du mandant, qui conserve notamment le droit de révoquer librement le mandat qu'il a donné; il lui sera toujours possible d'agir lui-même, malgré l'existence du mandat.

Ainsi, «si une personne mariée a donné une procuration à son conjoint sur son compte en banque ou sur son compte chèque postal (ou encore si elle l'a mandaté pour toucher une pension de retraite), elle conserve, qu'elle soit ou non sous la sauvegarde de justice, le droit de révoquer la procuration ou de faire elle-même toutes les opérations relatives au fonctionnement de son compte courant» (ou à l'ensaissement de sa pension). De même, si le majeur sous la sauvegarde de justice a -- avant ou après avoir fait l'objet de la mesure de protection --désigné un mandataire général à l'effet de gérer ses biens, il lui sera possible de reprendre en mains la gestion de son patrimoine (ainsi, par exemple, de percevoir des loyers) (J. Massip, Répertoire du notariat, Defrenois, année 1970, n° 6).

Lorsque le mandat a été donné en considération de la période de sauvegarde, le deuxième alinéa de l'article 491-3 apporte une limitation importante aux droits du mandant, puisque celui-ci ne pourra mettre fin aux pouvoirs du mandataire qu' avec l'autorisation du juge des tutelles; cette limitation s'applique aussi bien à la révocation expresse qu'à la révocation tacite.

Il en résulte notamment que le mandant ne peut reprendre en mains la gestion de ses affaires et accomplir des actes entrant dans les pouvoirs du mandataire (ce qui s'analyserait en une révocation tacite) sans l'intervention du juge.

Ainsi, lorsque le malade a désigné, en considération de la sauvegarde de justice, un mandataire avec mission de percevoir des loyers qui lui sont dus ou les arrérages d'une pension, on doit admettre qu'il a renoncé par là à procéder lui-même à leur encaissement ou à les faire percevoir par des tiers. S'il s'agit d'un mandat général, il y a lieu de considérer que le mandant a renoncé à l'administration personnelle de ses biens.

Les tiers devront s'abstenir de payer le majeur protégé ou de traiter avec lui sous peine d'engager leur responsabilité; le débiteur d'une pension, par exemple, pourrait être obligé, s'il la versait indûment à son titulaire, de payer une seconde fois au mandataire (sauf à exercer l'action en répétition). Mais, bien entendu, il ne saurait en être ainsi que si le débiteur a connaissance de la désignation du mandataire. A défaut, l'acte fait avec le titulaire apparent devrait être maintenu.

On voit ainsi que le mandat particulier prévu par l'article 491-3 (alinéa 2) du code civil aboutit, pour le temps limité de la sauvegarde, à une sorte d'incapacité librement consentie. En effet, si la personne sous la sauvegarde de justice a expressément mentionné dans la procuration que celle-ci était donnée en considération de la période de sauvegarde, c'est qu'elle a entendu, pendant ce délai, se dessaisir au profit du mandataire de l'administration de tout ou partie de ses biens (et non point se donner un suppléant en la personne de ce dernier).

2° Le mandat judiciaire.

Aux termes de l'article 491-5 du code civil, le juge des tutelles peut désigner un mandataire spécial à la personne sous la sauvegarde de justice.

Il existe une double limitation aux pouvoirs de ce mandataire:
-- le mandat ne peut être général;
-- il ne peut concerner les actes de disposition.

Il y a lieu de noter également que la désignation d'un mandataire de justice aboutit, elle aussi, à restreindre les droits du majeur sous sauvegarde. Le mandat donné par le juge ne peut, en effet, être révoqué que par lui.

Dès lors on est conduit à admettre, comme pour le mandat donné en considération de la période de sauvegarde de justice, que le majeur protégé, sous peine de méconnaître la décision du juge, et de la priver de tout effet, se trouve privé du droit de désigner un mandataire ayant des pouvoirs concurrents ou de faire lui-même les actes au lieu et place du mandataire désigné.

3. Les fonctions de mandataire spécial, désigné par le juge, on de mandataire particulier, désigné par le malade, peuvent être théoriquement confiées à un fonctionnaire ou agent de l'administration hospitalière appartenant à l'établissement de traitement.

L'exercice de telles fonctions par ces agents -- hormis le gérant de tutelle, bien entendu -- n'est pas souhaitable; en outre, ces fonctions sont difficilement compatibles avec les dispositions, d'une part, du règlement intérieur des hôpitaux psychiatriques garantissant la bonne gestion des établissements et les intérêts privés des malades, d'autre part, du statut général du personnel des établissement d'hospitalisation, de soins ou de cure publics.

En effet, aux termes de l'article 202 du règlement intérieur des hôpitaux psychiatriques (à valeur réglementaire) il est interdit aux personnes attachées au service administratif ou médical de recevoir, sous aucun prétexte, des sommes d'argent soit comme rémunération des services particuliers, soit comme dépôts pour le compte et à l'usage des pensionnaires et des hospitalisés.

Les dépôts d'argent ne peuvent être reçus que par le comptable.

En outre, l'article L. 796 du code de la santé publique interdit à tout agent d'exercer une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit; il peut cependant être dérogé à cette interdiction, dans les conditions prévues par la réglementation sur les cumuls.

Il résulte de la combinaison de ces textes que, dans l'hypothès où un agent hospitalier est désigné en qualité de mandataire à l'effet d'accomplir des actes pour le compte d'un malade en traitement dans l'établissement où cet agent exerce ses fonctions:
-- le maniement des fonds appartient au seul comptable hospitalier;
-- aucune rétribution ne peut être perçue au titre de cette activité.

La situation du gérant de tutelle «préposé» est différente; il existe, en sa faveur, dans la loi du 3 janvier 1968 et l'arrêté interministériel du 8 janvier 1971 (annexe n° 2), une dérogation à l'interdiction ci-dessus visée.

Il peut exercer les fonctions de mandataire rétribué des malades hospitalisés dans l'établissement (cf. art. 2 de l'arrêté du 8 janvier 1971 précité), dans les conditions décrites à la section ci-après.

Cependant, il n'a pas le maniement des fonds; celui-ci appartient au comptable seul.

Section III. -- Frais supportés par les malades pour la gestion de leurs biens.

La gérance de tutelle n'est pas bénévole.

Un arrêté ministériel du 4 mars 1970 (annexe n° 1), modifié le 8 janvier 1971 (annexe n° 2) a fixé les émoluments dus au gérant de tutelle; ils sont supportés par l'incapable et, lorsque le gérant de tutelle est un préposé, versés à la caisse de l'établissement public.

Dans ce dernier cas, les émoluments sont répartis entre:
-- l'établissement public employeur, qui obtient ainsi une contrepartie des frais qu'il supporte au titre de la gestion des biens des malades (charges de personnel, enquête, etc.).
Sur cette part, sont imputés les frais d'actes conservatoires accomplis au titre de la gérance d'affaires du directeur ou du gérant ou tuteur et qui n'ont pu, en définitive, être recouvrés sur les malades que ces frais concernent;
-- le préposé lui-même.

I. -- CONSTITUTION D'UNE MASSE DES SOMMES PRELEVEES SUR LES COMPTES DES MALADES

1. Le comptable de l'établissement auquel appartient le préposé constitue une masse annuelle des sommes prélevées sur les comptes des malades au titre des remboursements de frais de gestion et des émoluments du gérant de tutelle exerçant soit les fonctions de gérant de tutelle en qualité de préposé ou d'administrateur spécial, soit des fonctions de mandataire spécial désigné par le juge, pour les malades sous sauvegarde de justice soignés dans l'établissement (art. 491-5 du code civil).

Cette masse comprend:

a) Les sommes prélevées au titre de l'article 1er de l'arrêté du 8 janvier 1971 sur les comptes de chaque malade soigné dans l'établissement auquel appartient le préposé, et placé sous gérance de tutelle ou, éventuellement, sous sauvegarde de justice (mandat spécial confié au préposé par le juge).

Ces prélèvements sont opérés sur les revenus annuels après l'arrêté des comptes particuliers au 31 décembre.

b) Les sommes prélevées sur les comptes des malades soignés dans le même établissement, au titre des activités excédant les pouvoirs normaux du gérant de tutelle et spécialement autorisées par le juge (art. 3 de l'arrêté du 4 mars 1970) .

Ces sommes sont prélevées en cours d'année, dans chaque cas d'espèce, au vu d'états visés par le juge des tutelles et remis au comptable par le gérant de tutelle.

Toutes les sommes prélevées à ce titre après le 31 décembre de l'année de référence sont considérées comme encaissées au titre de l'exercice courant.

c) Les sommes prélevées sur les comptes des malades soignés dans des établissements publics ayant passé avec l'établissement dont dépend le préposé, une convention en vue de l'application de la loi du 3 janvier 1968 (cf. supra, section I, A, II-2).

Ces prélèvements, qui sont de la nature de ceux visés en a et b, sont effectués par le comptable de l'établissement où sont soignés les malades et globalement transférés par celui-ci, après le 31 décembre, au receveur qui centralise les prélèvements et constitue la masse visée au 1.

Remarque. -- De même que le préposé d'un hôpital peut exercer les mêmes fonctions à l'égard des malades soignés dans des établissements publics ayant passé convention avec l'hôpital, il peut également être désigné comme mandataire spécial de ces malades et rémunéré à ce titre.

d) Les sommes versées au titre des activités exercées par le préposé en qualité «d'administrateur spécial», pour des malades «extérieurs» sous gérance de tutelle.

Ces sommes, calaculées conformément aux dispositions des arrêtés des 4 mars 1970 et 8 janvier 1971, sont versées au comptable centralisateur (en principe par le préposé lui-même) après le 31 décembre de l'année à laquelle elles se rapportent.

Le comptable procède à l'encaissement au vu d'un état établi par le préposé et qui a été visé par le juge des tutelles lors de l'examen du compte de gestion annuel, que doit lui adresser le gérant de tutelle en application de l'article 500 du code civil (1er alinéa).

II. -- EMOLUMENTS DU «PREPOSE»

La masse est considérée comme entièrement constituée à la fin du premier trimestre suivant l'année de référence.

Le comptable centralisateur procède à sa répartition au cours du mois d'avril.

Les émoluments revenant au préposé lui sont versés.

Leur calcul est effectué dans les conditions prévues par les arrêtés des 4 mars 1970 et 8 janvier 1971.

Le préposé ne peut percevoir au titre de son activité globale d'agent hospitalier et de gérant de tutelle, une remise globale supérieure à trois fois le taux moyen de la prime de service hospitalière calculée en prenant en compte son traitement brut au 31 décembre de l'année au titre de laquelle les prélèvements ont été encaissés.

Autrement dit, si l'intéressé a déjà perçu une prime de service, il lui sera versé une remise supplémentaire d'un montant tel que l'ensemble cumulé prime de service et remise ne dépasse pas trois fois le taux moyen de la prime de service prévue par l'arrêté du 24 mars 1967; les sommes qui excèdent ce plafond restent à la masse.

III. -- PAIEMENT DES ACTES CONSERVATOIRES EFFECTUES PAR LE DIRECTEUR DE L'ETABLISSEMENT HOSPITALIER OU SON REPRESENTANT AU TITRE DE L'ARTICLE 491-4 DU CODE CIVIL. -- PART DE L'HOPITAL.

1. Lorsque le malade placé sous la sauvegarde de justice demeure inactif et qu' il n'a pas désigné de mandataire, il devient parfois nécessaire de prendre en sa faveur certaines mesures urgentes afin d'éviter le dépérissement de son patrimoine.

A cet égard, l'article 491-4 du code civil (2e alinéa) fait obligation à certaines personnes -- parmi lesquelles figure le directeur de l'établissement de traitement ou son représentant -- d'accomplir les actes conservatoires que nécessite l'administration du patrimoine de la personne protégée.

2. En outre, il semble bien, qu'en dehors des pouvoirs qui lui sont formellement reconnus par la loi, le gérant de tutelle puisse toujours se constituer gérant d'affaires de l'incapable.

«Il pourrait et même devrait accomplir les actes conservatoires et les actes urgents car, si ses pouvoirs sont limités, il n'en demeure pas moins le représentant de l'incapable.» (J. Massip, op. cit., n° 245, page 240.)

3. L'avance des frais que nécessite l'accomplissement des actes conservatoires est supportée par la masse des prélèvements effectués sur les comptes des malades dans les conditions ci-dessus décrites (IV, Dispositions de comptabilité); ces frais sont remboursés par les malades au profit desquels les actes ont été accomplis.

4. Le solde de la masse des prélèvements, après paiement de la remise au préposé, est versé au budget de l'hôpital.

IV. -- DISPOSITION DE COMPTABILITE

Dans la comptabilité des établissements publics de traitement, un nouveau compte est ouvert pour décrire les opérations se rapportant aux frais payés par les malades protégés, pour la gestion de leurs biens, et à la répartition des sommes ainsi obtenues:

-- 428 «Gestion des biens des malades protégés par la loi du 3 janvier 1968».

Ce compte reçoit des subdivisions suivantes:

a) 4280. -- «Masse des prélèvements opérés sur les ressources des malades protégés.» (Arrêtés des 4 mars 1970 et 8 janvier 1971.)

Cette subdivision est créditée des différents prélèvements opérés sur les comptes des malades au titre des émoluments dont ils sont redevables pour la gestion de leurs biens.

Une distinction est faite entre exercice courant et exercice précédent, car, du 1er janvier à la date de la répartition de la masse, les prélèvements effectués au titre des activités spéciales prévues par l'article 3 de l'arrêté du 4 mars 1970 sont imputés à l'exercice courant même si ces activités ont débuté au cours de l'exercice précédent.

Elle est débitée au mois d'avril, successivement:
-- de la rémunération du préposé;
-- des sommes portées au crédit de la subdivision 4282 visée ci-après, lorsqu' il s'avère impossible d'obtenir le remboursement d'avances consenties pour le financement d'actes conservatoires effectués par le directeur ou son représentant;
-- du solde transféré au crédit du compte budgétaire 762, à ouvrir dans les écritures de l'établissement sous l'intitulé: «Produits de la gestion des biens des malades protégés» (loi du 3 janvier 1968).

b) 4281. -- «Remise du préposé.»

Les émoluments du «préposé», gérant de tutelle ou mandataire spécial, sont portés au crédit de cette subdivision par le débit du compte 4280.

Le compte 4281 est débité lors du paiement effectif.

c) 4282. -- Mesures conservatoires. -- Avance des frais.

Ce compte est débité en cours d'année du montant des avances consenties pour le règlement des frais d'actes conservatoires accomplis par le directeur de l'établissement hospitalier ou son représentant, dans le cas d'urgence et dans l'hypothèse, bien entendu, où ces frais ne peuvent pas être immédiatement supportés par les malades concernés.

Il est crédité lors des remboursements effectués soit directement par les malades, soit par prélèvements sur leur compte.

Au mois d'avril, les avances dont le remboursement apparaît impossible sont soldées par le débit du compte 4280.

Pratiquement, le compte 4282 sera toujours débiteur.

CHAPITRE II
Mesures diverses.

I. -- «BANQUES DES MALADES» ORGANISEES PAR DES ASSOCIATIONS DE LA LOI DE 1901

La Cour des comptes a exprimé un certain nombre de réserves quant à l'intervention d'associations déclarées au titre de la loi du 1er juillet 1901 qui assurent la gestion d'organes d'ergothérapie, sans que soient observées les dispositions prévues par la circulaire du ministre de la santé publique et de la population en date du 4 février 1958.

La haute juridiction ne formule pas d'objection sur le principe même ni sur l'utilité de cette organisation.

La «banque des malades» a généralement pour objet de permettre aux malades de disposer aisément de leur pécule et des ressources remises par les familles à titre d'argent de poche.

Afin de répondre aux remarques de la Cour des comptes, les mesures suivantes devront être observées:

A. -- Travaux à façon.

Dans son rôle d'entrepreneur de travaux à façon, l'association apparaît comme un tiers par rapport à l'établissement; elle traite avec celui-ci en vertu d'une convention et n'a pas à connaître la part des travaux faits par chaque malade dans les objets qui lui sont remis (cf. circulaire du 4 février 1958, chapitre Ier, § 2, 2e hypothèse).

Les travaux réels exécutés par chaque malade sont onstatés chaque jour par les chefs d'ateliers, surveillants et moniteurs et donnent lieu à une inscription sur un état arrêté mensuellement (cf. Réglement intérieur du 5 février 1938, modifié, art. 176).

L'association, comme tout entrepreneur à façon, verse à l'établissement une somme déterminée à l'avance pour chaque catégorie d'objets, en contrepartie des charges que celui-ci supporte: main-d'oeuvre, locaux, petit matériel, amortissement du matériel et de l'outillage, énergie, complément de fourniture (cf. circulaire du 4 février 1958, chapitre Ier, § 2, 2e hypothèse).

Les sommes revenant à l'établissement lui sont versées mensuellement, au vu d'un titre de recettes énonçant le nombre d'objets fournis dans chaque taux unitaire défini par convention. Le montant de ce titre est inscrit en recettes au compte 7675 «Produits de travaux à façon» (cf. circulaire du 4 février 1958, chapitre II, section Ire, § 2, 2°).

B. -- Période complémentaire.

En fin de mois, chaque médecin chef de service arrête l'état des travaux effectués par les malades, état tenu comme il est dit ci-dessus et constate les droits à la rémunération de chaque malade (Règlement intérieur du 5 février 1938, art. 177).

Les sommes revenant aux intéressés sont immédiatement liquidées et font l'objet d'un mandat au titre de la subdivision 650-20 «Pécule complémentaire des malades travaillant dans les ateliers médicaux» à ouvrir au compte 650-2 « Pécule complémentaire». Ce mandat est appuyé d'un état décompté présentant, pour chaque bénéficiaire, le temps de travail exprimé selon l'unité retenue et l'indication du tarif unitaire applicable à l'intéressé.

A la réception de ce mandat, le receveur inscrit son montant au débit du compte 650-2 «Pécule complémentaire» et au crédit du compte 4626 «Pécule».

C. -- Argent de poche (1).

(1) Il s'agit là de l'argent personnel remis aux malades par leurs familles, qui ne doit pas être confondu avec l'argent de poche versé par l'hôpital aux bénéficiaires de l'aide sociale, hospitalisés en hospice ou maison de retraite. En ce qui concerne ce dernier, une solution identique doit toutefois être retenue. L'argent de poche peut être mis à la disposition des malades avec l'autorisation du médecin-chef; de toute manière, l'argent de poche est, par nature, destiné à être dépensé et son utilisation, même abusive, ne saurait en raison de la modicité des sommes allouées, être préjudiciable aux intérêts du malade ni justifier l'application des dispositions prévues par la loi du 3 janvier 1968.

En ce qui concerne les sommes versées par les familles pour procurer de l'argent de poche aux malades, les prescriptions, notamment des articles 201 et 202 du règlement intérieur des hôpitaux psychiatriques, doivent être strictement appliquées.
-- Les malades ne peuvent avoir d'argent de poche à leur disposition qu'avec l'autorisation du médecin-chef de service, qui intervient ès qualités dans l'exercice de son art, les décisions prises sur ce point étant identiques aux prescriptions de médicaments où à la fixation des régimes alimentaires.
-- Il est interdit aux personnes attachées au service administratif ou médical de recevoir des sommes d'argent en dépôt pour le compte, tant des malades placés en service libre que des autres hospitalisés.
-- Dans l'ensemble des établissements hospitaliers, les dépôts d'argent ne peuvent être reçus que par le receveur ou par un préposé intervenant en qualité de régisseur de recettes.

Sous le bénéfice de ces observations, l'argent personnel remis par les familles (ou les malades) doit être porté par le comptable:
-- soit au crédit du compte 4625 «Fonds déposés par les malades», lorsque ces derniers ne sont pas placés sous un régime de protection prévu par la loi du 3 janvier 1968;
-- soit au crédit du compte 4624 «Fonds appartenant aux majeurs protégés par la loi du 3 janvier 1968», dans l'hypothèse inverse.

Si, néanmoins, il était jugé indispensable de faire recueillir certains fonds appartenant aux malades par une association, celle-ci ne pourrait intervenir qu' en qualité de régisseur de recettes pour le compte et sous la responsabilité du comptable de l'établissement.

D. -- Banque des malades.

Simple modalité particulière adoptée pour le versement aux malades du pécule et de l'argent de poche, la «banque des malades» peut être admise.

Elle peut être tenue par une association, qui intervient en qualité de régisseur d'avances, par analogie avec des prescriptions admises pour la gestion des fonds de solidarité (cf. circ. du 4 février 1958, [chap. 3-2°]).

L'association reçoit une avance du comptable pour permettre d'assurer les règlements pendant une période à déterminer. Cette avance est inscrite au débit du compte 581 «Régisseurs de dépenses».

Elle tient, au lieu et place de l'économe, les comptes individuels des malades qui adhèrent à la banque des malades. Elle remet malades et sur leur acquit les fonds que ceux-ci sont autorisés à utiliser sur indication du médecin-chef de service.

Selon une périodicité à déterminer en accord avec le comptable, l'association lui remet les acquits recueillis lors de la remise des fonds aux malades. Le montant de ces règlements est servi au débit des comptes 4625 «Fonds déposés par les malades», 4624 (Fonds appartenant aux majeurs protégés par la loi du 3 janvier 1968» ou 4626 «Pécule» avec crédit au compte 581 «Régisseurs de dépenses».

En fin de gestion, l'association dresse un état présentant la situation du compte de chacun des malades pour lesquels elle est intervenue au cours de l'année. Deux exemplaires de cet état sont remis au comptable pour justification du solde du compte 4626 «Pécule». L'un de ces exemplaires est produit au juge des comptes à l'appui du compte de gestion. Le comptable dresse lui-même, dans les conditions habituelles, l'état du développement des soldes des comptes 4625 et 4626.

L'intervention de l'association ainsi décrite peut d'ailleurs être réduite dans la mesure où les opérations qu'elle effectue peuvent, pour la plupart, être réalisées au guichet ouvert dans l'enceinte de l'établissement et tenu par un agent dépendant du comptable.

II. -- TITRES DE PENSION ET DE RENTE DEPOSES PAR LES MALADES HOSPITALISES AU TITRE DE L'AIDE SOCIALE. -- CAS PARTICULIERS DES MALADES MENTAUX

La circulaire interministérielle finances - affaires sociales publiée par le ministère de l'économie et des finances (direction de la comptabilité publique) le 16 avril 1969, sous le n° 69-39 M 2, et par le ministère des affaires sociales le 2 avril 1969, sous le n° 57, a rappelé que «les personnes admises, dans les établissements hospitaliers au titre de l'aide aux malades mentaux, sont tenues de déposer, préalablement à leur entrée, leurs titres de pension et de rente entre les mains du comptable de l'établissement et donner à celui-ci tous pouvoirs nécessaires à l'encaissement, en leur lieu et place, desdits revenus, sous réserve de la restitution, par le comptable, de la portion non affectée au remboursement des frais d'hospitalisation (art. 2 du décret n° 54-883 du 2 septembre 1954; instruction 58-39 M du 18 février 1958)».

Les termes «aide aux malades mentaux» ont été insérés par erreur et doivent être supprimés.

Les dispositions en question visent les pensionnaires d'établissements qui hébergent, au titre de l'aide sociale, des personnes âgées ou infirmes; elles ne concernent donc pas les malades mentaux en traitement dans les hôpitaux psychiatriques, même si ceux-ci, antérieurement à leur hospitalisation, étaient placés, au titre de l'aide sociale, dans un hospice ou une maison de retraite.

Par suite, ces malades ne sont pas astreints à déposer leurs titres de rente ou de pension au moment de leur admission à l'hôpital psychiatrique.

En outre, les malades mentaux bénéficiaires de l'aide médicale ne doivent pas voir 90 p. 100 de leurs ressources globales affectées au remboursement des frais d'hospitalisation.

En l'espèce, les commissions d'admission conservent toute liberté d'apprécier le montant de la participation du malade en fonction des charges continuant à lui incomber durant son hospitalisation et des sommes qui lui seront nécessaires dès sa sortie, notamment si sa réadaptation ultérieure exige la disposition d'un minimum de ressources (circ. santé publique - sécurité sociale n° 149 du 7 octobre 1969 relative à l'aide sociale).

III. -- DELIVRANCE DES CERTIFICATS MEDICAUX

A. -- Le certificat du médecin spécialiste.

Le certificat du médecin spécialiste destiné à constater l'altération des facultés mentales ou corporelles du malade doit être, même lorsque le praticien est désigné par le juge, nettement distingué de l'expertise judiciaire (mesure d'information décidée quand il y a doute sur l'existence de la maladie).

Le médecin spécialiste n'est donc pas astreint aux formes de l'expertise (par exemple, la prestation de serment) et il peut être valablement saisi par une simple lettre du juge. Son avis prend, en définitive, la forme d'un certificat médical, qui doit être rapproché dans son esprit du certificat de situation établi dans le cadre de la loi du 30 juin 1838 pour justifier un placement d'office. Il peut se borner à décrire les manifestations extérieures de la maladie dont est atteinte la personne protégée et à constater l'altération des facultés mentales ou corporelles du malade.

B. -- Le certificat du médecin traitant.

L'avis du médecin traitant doit être requis avant toute décision du juge des tutelles organisant la protection des intérêts civils du malade (art. 490 du code civil).

Les médecins traitants ne sauraient, en raison du caractère légal de l'obligation qui leur est faite de donner leur avis, s'y soustraire en invoquant les impératifs du secret professionnel (au risque de voir leur responsabilité civile engagée).

Au demeurant, il convient de souligner que l'avis du médecin traitant doit être distingué, comme l'avis du médecin spécialiste, de l'expertise judiciaire. Il ne s'agit pas non plus d'une consultation à donner mais d'un avis sur l'opportunité de la mesure décidée par le judge, avis qui peut tout aussi bien être exprimé verbalement ou par le moyen d'1n certificat (cf. Massip, Réforme du droit des incapables majeurs, T.I., 2e édition, n° 314-315); ce certificat, comme celui du médecin spécialiste, doit être rapproché du certificat de situation, de telle sorte qu'une description clinique de l'état de santé du malade ne s'impose pas.

Enfin, il est à noter que, si le médecin traitant est un spécialiste figurant sur la liste prévue par l'article 493-1 du code civil, il sera bien évidemment habilité à délivrer le certificat demandé et à donner l'avis requis par l'article 490-1, le cas échéant, par un seul et même acte (Cf. Massip, op. cit. , n° 140-143).

IV. -- SOMMES RECUES EN DEPOT PAR LES REGISSEURS RESTITUTION AUX FAMILLES

1. La règle selon laquelle l'économe ou le directeur économe ne doit, en aucun cas, restituer aux familles des sommes d'argent reçues en dépôt (instruction interministérielle financestuer aux familles des sommes d'argent reçues en dépôt (instruction interministérielle finances - affaires sociales n° 69-39/M/2 du 16 avril 1969, chap. II, section I, § I - a) peut recevoir une atténuation limitée dans les cas d'extrême urgence suscitée par des circonstances excevoir une atténuation limitée dans les cas d'extrême urgence suscitée par des circonstances exceptionnelles. Il en est ainsi lorsqu'un chef de famille, admis d'urgence à l'hôpital, se trouve détenir la totalité des sommes d'argent de la famille qui ont fait l'objet d'un dépôt d'office en raison de l'état du détenteur et de l'imposibilité où il est de pouvoir s'exprimer.

Dans une telle circonstance, l'agent qui reçoit les fonds peut remettre au conjoint ou à l'un de ses mandants ou ascendants qui accompagne l'hospitalisé, les sommes nécessaires pour permettre aux intéressés de regagner leur domicile et de subvenir à leurs besoins jusqu'au moment où ils pourront se mettre en rapport avec le comptable.

La quittance reçue pour le montant des sommes remises devra relater les circonstances qui ont justifié le versement. Les deux opérations de dépôt et de remise des fonds doivent être décrites dans les écritures du comptable.

2. La règle exposée ci-dessus à propos de la restitution des dépôts aux familles ne s'oppose pas à ce que les fonds figurant au compte 4625, «Fonds déposés par les malades», soient remis aux intéressés, sur ordre du comptable, par l'intermédiaire de l'économe, du directeur économe ou d'un préposé habilité à cette fin. Celui-ci reçoit du comptable soit des ordres de paiement individuels, soit un état d'émargement collectif, indiquant l'objet du versement, l'identité des intéressés, les sommes revenant à chacun d'eux ainsi que les espèces correspondant au total des sommes à payer.

La remise de ces documents et espèces s'effectue au plus tard la veille du jour prévu pour le versement des fonds. Dès que l'acquit des intéressés a été recueilli, l'économe, le directeur économe ou le préposé restitue au comptable les ordres de paiement et états d'émargement acquittés.

Lorsque les intéressés ne se présentent pas au jour fixé, le comptable doit être mis en possession des documents et fonds correspondant aux impayés.

V. -- COMPTES POSTAUX ET BANCAIRES

Il appartient au préposé de l'établissement d'apprécier si, compte tenu notamment de la durée de séjour prévisible des malades hospitalisés, les comptes postaux ou bancaires dont ceux-ci sont titulaires doivent être clôturés ou non.

Dans cette dernière hypothèse, et afin d'assurer le respect des dispositions de l'article 500 du code civil, d'une part, et de l'article 2 du décret n° 69-196 du 15 février 1969, d'autre part, le minimum de fonds prévus par la réglementation postale ou bancaire doit être maintenu aux comptes, le surplus étant, à la diligence du préposé, soit transféré chez le comptable de l'établissement de traitement pour être affecté à l'entretien des malades, soit, s'il s'agit d'un excédent non utilisable à court terme, placé chez un dépositaire agréé.

VI. -- RENSEIGNEMENTS CONCERNANT LES MALADES HOSPITALISES

Il est rappelé que la circulaire de la santé publique n° 143 du 29 septembre 1969 précitée comporte, à titre indicatif, un modèle de questionnaire à adresser au maire de la commune du domicile du malade lors de l'hospitalisation de ce dernier.

Ce document est de nature à donner tous renseignements concernant le malade, sa famille, ses ressources et ses biens.

VII. -- FIN DU REGIME DE L'ADMINISTRATION DES BIENS

Les dispositions qui ont fait l'objet de la circulaire du ministère de la santé publique et de la sécurité sociale en date du 15 janvier 1971 sont rappelées.

Le régime de l'administration des biens prévu par les articles 31 à 36 de la loi du 30 juin 1838 ne sera plus applicable à compter du 15 novembre 1973. Il appartient aux directeurs des hôpitaux psychiatriques d'examiner, dès maintenant, la situation de chaque malade en vue de l'application éventuelle des dispositions prévues par la loi du 3 janvier 1968.

En particulier, il devrait être procédé d'ores et déjà au transfert progressif des dossiers des malades aux juges des tutelles compétents, de telle sort que la situation de tous les malades soit réglée avant le 1er novembre 1973, afin d'éviter toute solution de continuité entre le régime ancien et le régime nouveau. C'est afin de faciliter ce transfert que le législateur a prévu la survie des dispositions de la loi du 30 juin 1838 pendant un délai de cinq ans et il serait absolument inopportun d'attendre les derniers mois ou même les derniers jours de ce délai pour saisir en bloc le juge de l'ensemble des dossiers.

Ont été publiés:
-- La loi n° 68-5 du 3 janvier 1968, en partie, sous les rubriques J 2 et O 9, du titre I a, au bulletin juridique n° 5-1968 (feuillets blancs) et à l'ancien bulletin médico-social n° 3-1968, sous les rubriques 3.3 et 7.4.0.
-- Le décret n° 69-195, du 15 février 1969, à l'ancien bulletin médico-social n° 10-1969, sous la rubrique 7.4.0.
-- L'arrêté du 8 janvier 1971, au bulletin juridique n° 25-1971, sous la rubrique 7.4.0.

Le ministre de la santé publique, Pour le ministre et par délégation: Le maître des requêtes au Conseil d'Etat, directeur des hôpitaux, Jacques BAUDOUIN. Le ministre de l'économie et des finances, Pour le ministre et par délégation: Pour le directeur de la comptabilité publique et par délégation du ministre: Le chef de service, Pierre LADURE.

ANNEXES

ANNEXE N° 1

ARRETE DU 4 MARS 1970 pris pour l'application de l'article 3 du décret n° 69-195 du 15 février 1969 relatif aux émoluments dus par les incapables majeurs aux gérants de tutelle.5. 3.