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L’indemnisation des accidents médicaux (Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, Titre 4 Réparation des conséquences des risques sanitaires)


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Schéma simplifié[/doc]
Voir aussi :
Gazette du palais du 4 juin 2003, pages 2-10, par Christine Bou

En adoptant ce titre lors du vote relatif à la loi sur les droits des malades et la qualité du système de santé, Le législateur a souhaité mettre fin aux disparités d’indemnisation des accidents médicaux pouvant exister entre les juridictions civiles compétentes pour les médecins libéraux et les cliniques privées et les juridictions administratives compétentes pour les établissements publics de santé.

1. l’obligation d’assurance responsabilité civile.

Le mécanisme principal de ce nouveau dispositif repose sur l’assurance responsabilité civile obligatoire pour les professionnels de santé (art L 1142-2 csp). Cette obligation d’assurance responsabilité civile est générale. Elle vise tous les professionnels de santé exerçant à titre libéral ainsi que toute personne morale ( établissement de santé) à l’exception de l’Etat, exerçant des activités de prévention, de diagnostic ou de soins. Précisons que les préposés des établissements de soins sont couverts par l’assurance responsabilité civile souscrite à cet effet par lesdits établissements. Le défaut d’assurance est passible de 45.000 euros d’amende (art L 1142-25 csp) pour les personnes physiques (ce montant est fixé au quintuple pour les établissements de soins), ainsi que des sanctions disciplinaires à la discrétion de l’instance ordinale (art L 1142-2 al 5 csp) . Néanmoins lorsque le professionnel de santé se voit opposer deux refus d’assurance, il peut saisir le Bureau central de la tarification (art L 252-1 code des assurances), à charge pour ce dernier de fixer le montant de la prime par laquelle la compagnie d’assurance est tenue de garantir le risque proposé. Il peut en complément fixer le montant de la franchise à la charge de l’assuré ( art L 252-1 al 2 code des assurances).

2. les principes généraux d’indemnisation des accidents médicaux.

2.1 l’affirmation de la responsabilité pour faute

L’article L 1142-1-I du code de la santé publique énonce que les professionnels de santé ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels, de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins, qu’en cas de faute. Ainsi, la loi du 4 mars 2002 distingue trois cas de responsabilité : la responsabilité pour faute concernant les actes de prévention, de diagnostic ou de soins, la responsabilité du fait des produits défectueux (non visée en l’espèce par ce texte) et la réparation de l’aléa médical par la solidarité nationale.

Cependant, l’article L 1142-1 du code de la santé publique prévoit deux exceptions au principe de la responsabilité pour faute : le régime des infections nosocomiales, la réparation des accidents médicaux non fautifs.
1) les infections nosocomiales. Le régime des infections nosocomiales repose sur une présomption de faute. Les infections nosocomiales entraînent la responsabilité du professionnel de santé à moins qu’il ne puisse rapporter la preuve d’une cause étrangère (art L 1142-1-I al 2)
2) La réparation des accidents médicaux non fautifs repose, quant à elle sur le mécanisme de la solidarité nationale auprès de l’office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (art L 1142-1-II).

2.2 la réparation de l’aléa médical par la solidarité nationale

En l’absence de responsabilité pour faute d’un professionnel de santé, d’un établissement ou d’un producteur de produits, l’aléa médical ouvre droit à réparation au titre de la solidarité nationale. L’article L 1142-1-II du code de la santé publique détermine les conditions d’indemnisation dans cette hypothèse.
- un lien de causalité direct entre le dommage et l’acte de prévention, de soins ou de diagnostic
- un dommage présentant des conséquences anormales au regard de l’état de santé ou de l’évolution prévisible du patient
- un dommage d’une certaine gravité au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle (gravité fixée par décret en fonction d’un taux d’incapacité permanente).

3. la procédure de règlement amiable des accidents médicaux.

Première démarche avant tout règlement amiable, l’information du patient. L’article L 1142-4 du code de la santé publique fait obligation aux professionnels de santé d ‘informer le patient ou ses ayants droit en cas de décès, des circonstances et causes du dommage dans les 15 jours de sa découverte ou sa demande expresse. L’information est délivrée au cours d’un entretien individuel pour lequel la personne peut se faire assister par un médecin ou une personne de son choix.

3.1 le règlement amiable devant la commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux.

La loi met en place une procédure amiable de règlement en créant des commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux. Ces commissions ont pour objet principal de “ faciliter le règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux, aux affections iatrogènes et aux infections nosocomiales ” (article L 1142-5 csp). A cette fin, la commission siège sous deux formes, soit en formation de conciliation pour laquelle elle peut déléguer tout ou partie de ses compétences à un ou plusieurs médiateurs ( article L 1142-5 al 3 csp) ; soit en formation de règlement amiable des accidents médicaux.

La commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux est saisie par toute personne victime ou s’estimant victime (article L 1142-7 csp) ou par ses ayants droit en cas de décès, d’un dommage imputable à une activité médicale ( acte de prévention, de soins, de diagnostic). La saisine de la commission a pour effet de suspendre les délais de prescription et de recours contentieux.

Si les dommages rapportés par le patient présentent un certain degré de gravité, la commission de conciliation rend un avis sur les causes, circonstances, nature et étendue du dommage dans un délai de six mois à compter de sa saisine ( article L 1142-8 csp). Cet avis est transmis au demandeur, à toute personne intéressée par le litige ainsi qu’à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux. A cette fin, la commission régionale de conciliation diligente une expertise médicale auprès d’un collège d’experts choisis sur la liste nationale des experts médicaux (article L 1142-9 et s csp), dans des conditions d’indépendance et d’impartialité vis à vis des parties.

3.2 l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux

Après expertise médicale, la commission régionale de conciliation rend son avis sur l’origine fautive ou non fautive du dommage médical (article L 1142-14 csp)

- Si le dommage est imputable à une activité médicale fautive, il revient à l’assureur qui garantit la responsabilité civile de la personne considérée comme responsable par la commission, de faire une offre à la victime ou à ses ayants droit en cas de décès. L’assureur doit dans un délai de quatre mois à compter de la réception de l’avis, faire une offre d’indemnisation intégrale des préjudices subis par la victime .

L’acceptation de l’offre par la victime ou ses ayants droit vaut transaction avec paiement intervenant dans le délai d’un mois après acceptation de l’offre ( article L 1142-14 al 6, al 7). En cas de silence ou de refus explicite de l’assureur ou lorsque le responsable du dommage n’a pas souscrit de contrat d’assurance responsabilité civile, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux est substitué à l’assureur dans le paiement de l’indemnisation. En outre, l’Office national est subrogé dans les droits de la victime contre le responsable du dommage ou l’assureur du responsable ( article L 1142- 15 al 1, al 2, al 4 csp).

- Lorsque la commission de conciliation estime que le dommage relève d’un aléa médical, il revient à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux de faire une offre d’indemnisation intégrale à la victime ou à ses ayants droit en cas de décès, et ce dans des conditions identiques à celles sus-énoncées (article L 1142-17 et s. csp). Afin d’unifier les règles de fonctionnement des commissions régionales de conciliation, est crée une commission nationale des accidents médicaux (article L 1142-10 csp) avec pour principales missions al rédaction de recommandations sur la conduite des expertises et la formation des experts en responsabilité médicale.

In fine, l’intervention de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux sera primordiale, soit pour pallier les carences ou refus de l’assureur du responsable dans le régime de la responsabilité pour faute (régime fondée sur une assurance responsabilité civile obligatoire), soit à titre principal pour les dommages non fautifs consécutifs à une activité médicale. En outre, si la loi s’applique aux instances en cours n’ayant pas donné lieu à une décision irrévocable, une dernière disposition a pour objet d’harmoniser la règle de prescription en matière médicale. En effet, l’article L 1142-28 du code de la santé publique énonce que : “ les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissement de santé publics ou privés à l’occasion d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage ”.

On le perçoit, si les dispositions de ce titre 4 sont novatrices et marquent une volonté clairement affirmée de faciliter l’indemnisation des accidents médicaux, les décrets d’application n° 2002-638 du 29 avril 2002, n° 2002-656 du 29 avril 2002 et n° 2002-886 du 3 mai 2002 ont d’ores et déjà pour tâche d’expliciter ce nouveau régime de responsabilité médicale.