La présente note a pour objet de porter à votre connaissance la circulaire du garde de sceaux, ministre de la justice, en date du 17 juin 1999, relative aux réponses judiciaires aux toxicomanies et à rappeler le dispositif sanitaire et social mis en place pour l'accompagnement de ces mesures.
Cette circulaire définit des orientations arrêtées après une concertation interministérielle.
Ces orientations s'appuient notamment sur des études scientifiques et rapports récents, qui ont permis une meilleure connaissance de la nature des drogues et de leurs effets sur la santé, une meilleure appréhension des nouveaux comportements des usagers, notamment des jeunes. Ces travaux ont également permis l'émergence d'une approche commune des différents partenaires.
La circulaire du 17 juin 1999 rappelle que, si l'usage de drogues illicites est un délit, il s'agit également d'une conduite à risque qui nécessite une prise en compte sanitaire et sociale, le cas échéant éducative pour les mineurs.
Le recours aux peines d'emprisonnement doit donc être exceptionnel et il convient de rechercher des réponses diversifiées et adaptées tout au long du processus judiciaire, de l'interpellation jusqu'à l'exécution des peines : alternatives aux poursuites, incitation aux soins, contrôle judiciaire socio-éducatif, alternatives à l'incarcération...
Ces orientations de politique pénale sont en cohérence avec l'action développée par le ministère de l'emploi et de la solidarité depuis de nombreuses années et il importe que les acteurs locaux en charge de l'accueil, des soins et de l'insertion se mobilisent pour les relayer et les accompagner avec toute l'efficacité nécessaire.
Il s'agit de mieux définir, programmer, développer, coordonner ou de faire connaître des actions encore diffuses et permettre de développer le recours au secteur médico-social pour ces personnes.
La circulaire rappelle que les tribunaux n'ont pas suffisamment recours aux mesures alternatives aux poursuites judiciaires et à l'incarcération.
Le recours au secteur sanitaire en ce qui concerne les injonctions thérapeutiques est mieux défini et étendu à d'autres catégories d'usagers dans le cadre d'un classement avec orientation ou d'une incitation aux soins.
Le rôle de la DDASS est prépondérant pour assurer la coordination des actions locales entre les différents partenaires concernés.
La généralisation du dispositif des conventions départementales d'objectifs doit permettre de développer la prise en charge sanitaire et sociale des toxicomanes relevant de la justice par la mise en place d'actions concertées correspondant à des besoins locaux non satisfaits.
1. Redéfinir le suivi des injonctions thérapeutiques
Les DDASS sont déjà impliquées dans la prise en charge des personnes sous main de justice puisqu'elles constituent le pivot du dispositif d'injonctions thérapeutiques actuellement en place.
Le bilan 1997, établi à partir des questionnaires remplis par les DDASS, a permis de montrer que seulement 36,6 % des mesures prononcées concernent des usagers d'héroïne.
Cette mesure, qui permet de proposer une alternative sanitaire aux usagers de drogues interpellés, doit s'adresser en priorité et principalement aux usagers dépendants.
2. Organiser un dispositif de bilan et d'orientation médico-social
Les DDASS devront désormais assurer l'orientation d'autres usagers sous main de justice pour une prise en charge médicale ou sociale appropriée. Elles doivent s'assurer de la mise en oeuvre de différentes modalités de prise en charge et de leur effectivité.
a) Classement avec orientation
En effet, les parquets ont la possibilité de procéder au classement d'une procédure sous la condition que l'usager interpellé ait un entretien d'orientation médico-sociale.
A l'inverse de l'injonction thérapeutique, cette disposition s'adresse aux usagers qui ne présentent pas, a priori, une dépendance avérée.
b) Incitation aux soins
De même, en cas de poursuites, l'usager qui désire s'engager dans une démarche de soins ou d'insertion avant sa comparution devant le tribunal correctionnel doit pouvoir être utilement orienté par le même dispositif : c'est l'incitation aux soins, démarche volontaire sans mandat judiciaire mais dont le tribunal tiendra compte lors du prononcé de la peine.
Cette fonction de diagnostic et d'orientation est parfois déjà assurée dans l'enceinte même de certains tribunaux par une permanence toxicomanie.
En l'absence de convention, c'est la cellule en charge des injonctions thérapeutiques qui sera chargée de l'orientation médico-sociale des personnes relevant de la justice. Il conviendra donc que le dispositif d'injonction thérapeutique mis en place et financé soit diversifié et utilisé pour des vacations médico-psychosociales en vue d'une aide à l'orientation.
Le cas échéant, en absence d'un tel dispositif, une structure volontaire et reconnue par la DDASS peut être un lieu référent permanent.
Un rapport d'activité semestriel non nominatif récapitulant le nombre de personnes reçues et les services vers lesquels elles ont été orientées sera adressé au parquet uniquement dans le cadre des classements avec orientation.
Les orientations doivent être adaptées aux besoins de chaque personne. Pour cela, le dispositif d'orientation doit avoir une bonne connaissance du tissu sanitaire et social. Des relais pourront se faire vers les établissements hospitaliers en informant dès que possible les équipes de liaison, les structures spécialisées, les médecins des réseaux ville-hôpital, les centres d'hébergement et de réadaptation sociale. D'autres dispositifs relevant des collectivités territoriales pourront également être des relais de prise en charge (mission locale, services sociaux...
Des fiches de suivi permettant de quantifier les besoins vous seront adressées ultérieurement.
3. Participer à l'élaboration et au suivi des conventions départementales d'objectifs
Ce dispositif contractuel mis en place dans certains départements par circulaire de la MILDT va être généralisé à l'ensemble du territoire en l'an 2000 (note de la MILDT du 12 février 1999).
Les contrats départementaux d'objectif ont initialement privilégié deux axes :
- l'hébergement des personnes sous main de justice ou sortants de prison combiné à des modalités d'accompagnement sanitaire et social adapté ;
- la complémentarité des réponses sanitaires et judiciaires.
Ils comportent dorénavant des nouveaux axes de travail essentiels, à savoir :
- la diversification des alternatives aux poursuites ;
- les interventions en détention afin d'assurer la continuité des soins, préparer la sortie et développer les mesures d'aménagement de peine ;
- les réponses spécifiques pour l'accompagnement des jeunes consommateurs de produits ;
- et, enfin, le développement de permanences toxicomanie dans les tribunaux destinées à faciliter le diagnostic de la situation des usagers de drogues et leur orientation.
Démarche partenariale d'évaluation des besoins et des ressources, le dispositif triennal, qui fonctionne sous l'égide d'un magistrat et du préfet, est animé par un chef de projet (souvent DDASS) et constitue ainsi le dispositif privilégié de coordination des actions menées par les services de la justice et de la santé.
Le financement des projets élaborés localement sera assuré par la MILDT.
Je vous demande d'assurer la mise en oeuvre optimale de ces nouvelles orientations, en facilitant le travail de partenariat et en évaluant l'impact des nouvelles prises en charge sur le fonctionnement des structures existantes.
Je vous saurais gré de bien vouloir me faire connaître les difficultés d'application que pourrait susciter l'application de la présente circulaire.
Date d'application : immédiate.
Références :
Circulaire interministérielle du 14 janvier 1993 relative à la mise en oeuvre de conventions d'objectifs de la lutte contre la toxicomanie ;
Circulaire n° 4 du 11 janvier 1995 relative aux orientations dans le domaine de la prise en charge des toxicomanes en 1995 ;
Circulaire DGS/SP 3/95 n° 29 du 31 mars 1995 relative au traitement de substitution pour les toxicomanes dépendants aux opiacés ;
Circulaire DGLDT/CRIM/DGS n° 20 C du 28 avril 1995 relative à l'harmonisation des pratiques relatives à l'injonction thérapeutique ;
Circulaire DGS/DH/96 n° 96-239 du 3 avril 1996 relative aux orientations dans le domaine de la prise en charge des toxicomanes en 1996 ;
Circulaire du Premier ministre du 9 juillet 1996 relative à la lutte contre la drogue et la toxicomanie au niveau départemental ;
Circulaire n° 739 DGS/DH/DAP du 5 décembre 1996 relative à la lutte contre l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) en milieu pénitentiaire : prévention, dépistage, prise en charge sanitaire, préparation à la sortie et formation des personnels ;
Note d'orientation n° 98-659 DGS du 5 novembre 1998 relative à la révision des projets thérapeutiques des centres spécialisés de soins aux toxicomanes ;
Note d'orientation interministérielle du 12 février 1999 pour la mise en oeuvre des conventions départementales d'objectifs de lutte contre la toxicomanie ;
Circulaire DGS/SP 3/DH/EO 2/99 n° 346 du 15 juin 1999 relative à l'organisation des soins hospitaliers pour les personnes toxicomanes ;
Circulaire NOR : JUSA9900148C du 17 juin 1999 relative aux réponses judiciaires aux toxicomanies ;
Plan triennal de lutte contre la drogue et de prévention des dépendances de la MILDT - Juin 1999.
Direction générale de la santé, Sous-direction de la santé des populations, Bureau de la santé mentale, des toxicomanies et des dépendances DGS/SP 3.
Texte non paru au Journal officiel.