Inscrit dans le cadre du Pacte européen, le plan psychiatrie et santé mentale 2011-2015 (PPSM) est le premier plan de santé publique postérieur à la réforme de l’organisation territoriale des politiques de santé portée par la loi HPST du 21 juillet 2009. Il s’agit d’un plan de nouvelle génération qui pose un cadre stratégique afin notamment de servir de référence à tous les acteurs de la psychiatrie et de la santé mentale ; la déclinaison opérationnelle sera réalisée au niveau régional, pilotée et formalisée par les ARS, qui ont un rôle central au sein de ce PPSM.
Ce plan comprend 3 parties : la première concerne l’exposé des motifs, la seconde traite des objectifs collectifs : « prévenir et réduire les ruptures pour mieux vivre avec des troubles psychiques » et la troisième précise le mode opératoire du plan et la traduction des objectifs collectifs en des changements concrets.
Le PPSM définit une stratégie à la fois :
- nationale : les administrations centrales et opérateurs nationaux feront connaitre la contribution de chacune de leurs feuilles de routes aux objectifs du plan avant juillet 2012.
- régionale : les ARS déclineront les orientations nationales du plan dans un plan régional opérationnel qu’elles feront remonter à la DGS avant juillet 2012 (en tenant compte du calendrier d’adoption des PRS).
Partie 1 : Préambule – exposé des motifs
¤ Ce plan d’orientations stratégiques sur la psychiatrie et la santé mentale est réalisé au motif :
- qu’il s’agit d’un enjeu de société et de santé publique majeur,
- qu’il existe encore trop souvent des inégalités d’accès aux soins,
- que les maladies mentales peuvent troubler la capacité à demander de l’aide, à consentir et à s’engager durablement dans des soins,
- que les personnes souffrent encore trop souvent de stigmatisation et de discrimination, aggravant leur vulnérabilité.
¤ Ce plan vise les patients vivant avec la maladie, leur entourage, les professionnels quel que soit leur champ d’intervention et l’ensemble de la population dans la mesure où toute action tend à préserver ou à restaurer une bonne santé bénéficie à l’ensemble des individus.
¤ Définition de certains termes tels que :
- La santé mentale qui comporte 3 dimensions :
· La santé mentale (qui s’intéresse à l’ensemble des déterminants de santé mentale conduisant à améliorer l’épanouissement personnel)
· La détresse psychologique réactionnelle qui correspond aux situations éprouvantes et aux difficultés existentielles
· Les troubles psychiatriques qui se réfèrent à des classifications diagnostiques renvoyant à des critères, à des actions thérapeutiques ciblées et qui correspondent à des troubles de durée variable plus ou moins sévères et handicapants
- La psychiatrie qui est une discipline médicale prenant en charge les affections psychiatriques caractérisées et les aspects pathologiques de la souffrance psychique. Elle comprend des spécificités lorsqu’elle s’adresse à certains âges de la vie (ex. : psychiatrie infanto-juvénile).Elle s’inscrit dans une dimension globale du soin, incluant la prévention, le repérage des troubles et l’insertion, en partenariat étroit de l’ensemble des personnels intervenant dans le soin (personnels soignants, socio-éducatifs, psychologues,…) avec les professionnels intervenant dans le champ social, médico-social et des collectivités locales. La psychiatrie développe des axes de recherche dans plusieurs domaines impliquant de nombreuses collaborations soit avec d’autres spécialités médicales (neurologie, imagerie,…) ou d’autres disciplines par exemple les sciences humaines et sociales, soit avec les acteurs sociaux et médico-sociaux.
¤ Le PPSM précise que, grâce à la loi HPST, la logique territoriale est confirmée dans l’ensemble du champ sanitaire, pour mieux adapter les réponses aux spécificités et aux besoins locaux, améliorer la répartition territoriale de l’offre et lutter contre les inégalités de santé. Dans cette perspective, le PPSM rappelle que la loi crée une gouvernance régionale (ARS), le projet régional de santé, et a renforcé les outils de pilotage (SROS, SROSM, SRP, CPOM). Il indique que les missions de service public ont également été réalisées dans cette même logique de couverture territoriale des besoins et indique qu’il est souhaitable que la psychiatrie bénéficie d’une deuxième mission de service public à définir dans le Code de la santé publique par une mesure législative.
¤ Les territoires d’action compétents en psychiatrie peuvent être schématisés de la manière suivante :
- L’unité de base : le territoire de proximité comprend l’ensemble des acteurs hospitaliers et libéraux, médico-sociaux et sociaux. Au sein de ce territoire de proximité, le secteur définit une responsabilité institutionnelle et clinique claire associant soins, prévention. Celle-ci est articulée avec les autres acteurs sanitaires, et les dispositifs d’accompagnement social et médico-social.
- Le territoire de santé et l’organisation départementale : le territoire de santé est défini par les ARS. A ce jour, 54 territoires de santé recouvrent précisément un département. Pour les autres, le territoire de santé est infra ou supra départemental
- Le niveau régional : qui est à la fois un niveau de planification et un niveau de définition des politiques. Il correspond à un territoire pertinent d’évaluation des besoins de santé et, le cas échéant, de rééquilibrage de l’offre, mais également utile pour mettre en œuvre certaines ressources spécialisées de soins et d’accompagnement, des services médico-psychologiques régionaux (SMPR), des structures de recherche en santé mentale en partenariat avec les services universitaires des CHRU, mais aussi des structures de formation.
- Le niveau inter-régional correspond notamment à des dispositifs très spécialisés comme les Unités pour Malades Difficiles (UMD), les Unités Hospitalières Spécialement Aménagées (UHSA).
¤ En fonction de ces éléments, chaque établissement définit la structuration interne qui lui est la plus adaptée, en fonction de ses choix et de ses projets, en conformité avec la loi HPST.
Partie 2 : Les objectifs collectifs : "prévenir et réduire les ruptures pour mieux vivre avec des troubles psychiques"
Dans cette perspective, le PPSM se décline autour de quatre « axes stratégiques » à savoir :
¤ Axe 1 : la prévention et la réduction des risques au cours de la vie de la personne en :
- en poursuivant et en développant des programmes en faveur de la santé mentale : cet objectif peut être mis en œuvre grâce à des actions de promotion de santé mentale via des programmes notamment (ex : programme de soutien à la parentalité ou programme de réduction de l’isolement chez les personnes âgées).
- en améliorant l’accès des personnes aux soins psychiatriques et somatiques et en renforçant la continuité des soins crise/post crise : en ce sens, les acteurs doivent élaborer des organisations sur le repérage, la réponse à une demande de soins programmés ou programmable, la réponse aux appels et situations d’urgence et la réponse aux besoins de soins somatiques.
- en améliorant la continuité des soins et l’accompagnement aux différents âges de la vie de la personne : à chaque niveau, il convient de développer des mesures qui visent à éviter pour les patients des ruptures de prises en charge aux âges de transition.
- en développant le partenariat avec les aidants, en identifiant une modalité de réponse repérable à leur intention
- en développant l’accès et le maintien au logement par une offre de logement accompagné, adaptée et diversifiée :
- en améliorant la prise en charge des addictions
- en améliorant la qualité de vie des personnes, la participation sociale et l’exercice professionnel
- en améliorant l’accès des personnes souffrant de troubles psychiques aux droits et ce, quel que soit leur mode de soin et d’accompagnement y compris en cas de soins libres : il s’agit également d’assurer un suivi et une évaluation de la loi du 5 juillet 2011, en lien avec les professionnels et les associations, afin de fluidifier les procédures et améliorer la cohérence du dispositif
¤ Axe 2 : la prévention et la réduction des ruptures selon les publics et les territoires afin de garantir l’égalité d’accès à des soins de qualité et à un accompagnement social et médico-social en :
- en faisant évoluer le secteur et en organisant une offre assurant la responsabilité et la continuité des soins : il doit devenir un outil au service d’un territoire
- en rééquilibrant l’intensité et la variété de l’offre de soin et l’accompagnement sur chaque territoire, et en allouant les ressources en fonction des besoins de la population (par l’intermédiaire notamment de mesures et de dispositifs incitatifs encourageant l’exercice dans des zones sous-denses)
- en structurant sur chaque territoire les coopérations et les complémentarités entre l’ensemble des professionnels, services et établissements sanitaires, médico-sociaux, sociaux et associations (grâce notamment aux conventions prévues par la loi HPST) : le PPSM indique qu’il sera proposé une évolution législative permettant à un établissement de santé d’être membre de 2 communautés hospitalières de territoire (une CHT psychiatrique et une CHT MCO). Les offres sanitaires et médico-sociales seront ainsi à articuler notamment par des coopérations structurées, des réseaux, des regroupements de coopération.
- en procédant sur chaque territoire à des expérimentations destinées à compléter l’offre de soins en ville
- en encourageant les démarches qualité grâce au déploiement du développement professionnel continu (DPC) notamment
- en faisant disparaître les conditions inacceptables d’hospitalisation en psychiatrie
- en améliorant l’accès à l’information pour tous et la lisibilité des dispositifs et ce par le renforcement de la gouvernance locale de la santé mentale
- en rendant plus accessibles les soins aux populations qui rencontrent des obstacles supplémentaires pour se faire aider
¤ Axe 3 : la prévention et la réduction des ruptures entre la psychiatrie et son environnement sociétal :
- en augmentant la culture générale sur la santé mentale, les soins et les dispositifs psychiatriques, lutter contre les images négatives véhiculées sur et par la psychiatrie
- en luttant contre les discriminations, en renforçant l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap psychique
- en prévoyant des espaces et des temps de dialogue et de réflexion entre la société et le système de soins psychiatriques
- en luttant contre la surmédicalisation du mal-être et des difficultés d’ordre social et mieux adapter notamment la consommation des psychotropes
- en repensant la sécurité en psychiatrie, à travers le fil conducteur de la bientraitance
¤ Axe 4 : la prévention et la réduction des ruptures entre les savoirs
- en encourageant, en recueillant et en faisant connaître les travaux de recherche et les expériences réussies, à l’étranger et sur notre territoire, en poursuivant le développement de recommandations de bonnes pratiques
- en améliorant la formation de certains professionnels clé.
- en adaptant les pratiques de gestion des ressources humaines aux spécificités de l’exercice en psychiatrie
- en encourageant la formation pluridisciplinaire, l’évaluation des pratiques tout au long de la vie, y compris sur la question des passages à l’acte et des droits, et le développement des pratiques avancées
- en entretenant les réseaux de professionnels et en consolidant les dispositifs d’appui aux établissements et services sanitaires et médico-sociaux
- en améliorant la formation des usagers et de leur entourage
Partie 3 : Le mode opératoire du plan et la traduction des objectifs collectifs en des changements concrets
En résumé, les ARS doivent s’assurer du fonctionnement de trois échelons :
- une commission régionale, de concertation avec les usagers, les professionnels et les élus pour le suivi des politiques de psychiatrie et de santé mentale ;
- un échelon spécifique départemental en lien avec les conférences de territoire ;
- un échelon de proximité basé sur la sectorisation.
Ce plan confie aux ARS le soin de traduire ces orientations en mesures opérationnelles dans les 26 Projets régionaux de santé (PRS) en cours d’élaboration. Le pilotage national est confié à la Direction Général de la santé » (DGS) afin de s’assurer de sa bonne mise en œuvre par les administrations et les ARS et de la définition des indicateurs de suivi.
Une conférence de suivi de la mise en œuvre de ce plan sera organisée annuellement et présidée par le ministre de la santé et le ministre chargé des solidarités. Un bilan est également annoncé en 2015 à partir d’une liste restreinte d’indicateurs en cours de finalisation.