Mme X, âgée de 41 ans, a contacté le service d’aide médicale urgente (SAMU) qui relève du centre hospitalier universitaire Y après avoir présenté à son domicile le 4 octobre 2010, vers 22h20, des fourmillements au niveau de la main, associés à des troubles de l’élocution et à un déficit hémi corporel droit. Le médecin régulateur du SAMU a considéré qu’elle était ivre ou dépressive et n’a pas mobilisé de moyens médicaux. Les voisins de Mme X, alertés par cette dernière, ont appelé les pompiers et le SAMU à 23h02, lesquels ont déterminé la gravité de l’état de l’intéressée qui a été prise en charge au CHU vers 00h30. Mme X est restée hospitalisée jusqu’au 8 novembre 2010 avant d’être transférée dans un service de rééducation et de réadaptation où elle est restée jusqu’au 21 avril 2011 avant de poursuivre sa rééducation en hospitalisation de jour à l’hôpital Z du 26 avril 2011 au 15 mai 2012. Mme X a repris son activité professionnelle à temps partiel à 20% le 1er juin 2013.
Mme X demande au Tribunal administratif de Nantes de condamner le CHU à lui verser la somme de 295 672, 95 euros en réparation des préjudices patrimoniaux et extra patrimoniaux qu’elle a subis et 100 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Sur la responsabilité du CHU : le tribunal retient la faute du CHU résidant dans l’erreur de diagnostic du médecin régulateur et dans la prise en charge tardive de la patiente. En effet, le tribunal considère qu’il résulte des dispositions du code de la santé publique que « le médecin régulateur placé auprès de chaque SAMU est chargé d’évaluer la gravité de la situation et de mobiliser l’ensemble des ressources disponibles (médecins généralistes, SMUR, ambulances), en vue d’apporter la réponse la plus appropriée à l’état du patient et de veiller à ce que les soins nécessaires lui soient effectivement délivrés ; qu’il doit, pour ce faire, se fonder sur une estimation du degré de gravité avérée ou potentielle de l’atteinte à la personne concernée, ainsi que de l’état et des délais d’intervention des ressources disponibles ». Or, en l’espèce, il résulte de l’avis de la CRCI, saisie par Mme X, que l’intervention de l’assistant de régulation médicale et du médecin régulateur a été « totalement inadaptée », le premier s’étant « limité au strict interrogatoire administratif » et le second ayant « spontanément orienté l’interrogatoire sur la dépression et la prise d’alcool sans rechercher un motif d’appel avec une cause organique ni un éventuel signe de gravité », et « qu’un interrogatoire correctement effectué aurait permis de suspecter un problème neurologique et aurait évité l’erreur concernant l’heure de début des symptômes. La CRCI en a conclu que les soins délivrés par le CHU n’ont pas été conformes aux règles de l’art et ont été à l’origine d’un retard de prise en charge, position suivie par le tribunal.
Sur les préjudices subis par Mme X : le tribunal rappelle que « dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d’un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d’obtenir une amélioration de son état de santé ou d’échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l’établissement, et qui doit être intégralement réparé, n’est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d’éviter que ce dommage soit advenu ». En l’espèce, le retard dans la prise en charge de Mme X lui a fait perdre une chance d’éviter les conséquences de son accident qui est évaluée à 30%.
En outre, le tribunal juge que Mme X est fondée à demander réparation d’autres préjudices (patrimoniaux et extra patrimoniaux) à hauteur des sommes qu’il détermine.