Mme X est hospitalisée du 1er au 8 décembre 2004 à l'hôpital Y en raison de douleurs lombaires et chutes réitérées, sans qu'aucune pathologie physiologique ne soit détectée. Le 8 mars 2005, une IRM révèle une discopathie dégénérative ainsi qu'une hernie discale. Mme X a donc subi plusieurs interventions chirurgicales à la suite de ce diagnostic. Ayant estimé que les examens pratiqués en décembre 2004 étaient insuffisants et avaient entrainé un retard fautif dans sa prise en charge, elle a saisi l'hôpital Y d'une demande d'indemnisation préalable qui a été rejetée puis introduit une requête devant le Tribunal administratif de Paris. Ce dernier rejette sa requête en considérant que l'expert nommé "a estimé d'une part que les diagnostics établis, les traitements, interventions et soins prodigués et leur suivi ont été conformes aux données acquises de la science et d'autre part qu'il n'y avait pas eu de mauvais fonctionnement ou de mauvaise organisation du service ; l'expert relève que si une imagerie du rachis faite lors de l'hospitalisation ou prescrite en examen de sortie aurait pu préciser le diagnostic, il précise également que le traitement proposé n'aurait pas nécessairement été modifié, une opération chirurgicale pouvant être réfutée par certaines équipes médicales du fait de la difficulté de cerner les pathologies du rachis ; qu'il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que la discopathie dégénérative diagnostiquée en avril 2005 était décelable en décembre 2004". Les juges du fond considèrent également que l'indemnisation de Mme X au titre de la solidarité nationale ne doit pas être retenue. |
TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PARIS
N° 0610621/6-3 |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE |
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Mme Pascale L. |
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Mme Bories Rapporteur |
(6ême Section - 3ème Chambre) Rapporteur public
Audience du 24 novembre 2011 Lecture du 8 décembre 2011
Vu le jugement avant dire droit du 6 juillet 2010 par lequel le tribunal administratif a, avant de statuer sur la requête présentée pour Mme Pascale L. tendant à la condamnation de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices consécutifs à son hospitalisation à l'hôpital …. du ter 8 décembre 2004 ainsi que la somrne de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ordonné une expertise ;
Vu l'ordonnance du président du tribunal administratif de Paris du 1" septembre 2010 désignant Mme Goldberg en qualité d'expert ;
Vu le rapport d'expertise, établi par Mme Goldberg, déposé au greffe du tribunal le 29 juillet 2011 ;
Vu l'ordonnance du président du tribunal administratif de Paris du 7 septembre 2011 liquidant et taxant les frais et honoraires de l'expert à la somme de 1 657,60 euros ;
Vu l'ordonnance du 9 septembre 2011 fixant la clôture d'instruction au 10 octobre 2011, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 3 octobre 2011, présenté pour Mme L., qui conclut aux mêmes fins que sa requête et porte à 4 000 euros le montant de ses conclusions relatives aux frais irrépétibles ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 octobre 2011, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, qui conclut à sa mise hors de cause, au motif que les conditions d'indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies ;
Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu l'arrêté du 18 mars 2009 du Vice-président du Conseil d'Etat fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2011 ; - le rapport de Mme Bories ;
- et les conclusions de Mme Nikolic, rapporteur public ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête ;
Considérant que Mme L. a été hospitalisée du l' au 8 décembre 2004 à l'hôpital … en raison de douleurs lombaires et chutes réitérées, sans qu'aucun pathologie physiologique ne soit détectée ; que le 8 mars 2005, l'analyse d'une imagerie par résonance magnétique (IRM) a révélé une discopathie dégénérative ainsi qu'une hernie discale ; que Mme L. a subi une première opération chirurgicale le 23 mars 2005 puis, après la mise en évidence d'un méningocèle le 15 avril 2005, trois reprises chirurgicales ; qu'estimant que les examens pratiqués lors de son hospitalisation de décembre 2004 avaient été insuffisants et avaient entraîné un retard fautif de diagnostic et d'intervention chirurgicale, l'intéressée a saisi le 12 décembre 2005 l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) d'une demande d'indemnisation préalable, rejetée par décision du 28 juin 2006 ; que Mme L. a par suite introduit la présente requête ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi du 4 mars 2002 : « L - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute./ Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. / II. -Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'incapacité permanente supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret. » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que Mme L. se plaignait, lors de son hospitalisation de décembre 2004, de douleurs lombosciatiques, de chutes à répétition et de troubles urinaires pouvant être reliés à un syndrome de la queue de cheval ; qu'ont été mis en place, à son arrivée à l'hôpital, un traitement pour la douleur, des soins de kinésithérapie et des examens cliniques ; que l'avis d'un médecin neurologue et d'un médecin psychiatre a été demandé ; que l'expert a estimé d'une part que les diagnostics établis, les traitements, interventions et soins prodigués et leur suivi ont été conformes aux données acquises de la science et d'autre part qu'il n'y avait pas eu de mauvais fonctionnement ou de mauvaise organisation du service ; que l'expert relève que si une imagerie du rachis faite lors de l'hospitalisation ou prescrite en examen de sortie aurait pu préciser le diagnostic, il précise également que le traitement proposé n'aurait pas nécessairement été modifié, une opération chirurgicale pouvant être réfutée par certaines équipes médicales du fait de la difficulté de cerner les pathologies du rachis ; qu'il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que la discopathie dégénérative diagnostiquée en avril 2005 était décelable en décembre 2004 ; qu'il suit de là que la responsabilité de l'AP-HP ne saurait être engagée en raison. de fautes médicales ;
Sur l'indemnisation au titre de la solidarité nationale :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique dans sa version alors en vigueur : « IL - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'incapacité permanente supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret. » ; que l'article D. 1142-1 du même code dispose que : « Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %./ Un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale présente également le caractère de gravité mentionné à l'article L. 1142-1 lorsque la durée de l'incapacité temporaire de travail résultant de l'accident médical, de l'affection iatrogène ou de l'infection nosocomiale est au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois [...] » ; qu'enfin, l'article L. 1142-21 du code de la santé publique : « Lorsque la juridiction compétente, saisie d'une demande d'indemnisation des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins dans un établissement de santé, estime que les dommages subis sont indemnisables au titre du II de l'article L. 1142-1 ou au titre de l'article L. 1142-1-1, l'office est appelé en la cause s'il ne l'avait pas été initialement. Il devient défendeur en la procédure » ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme L. n'établit ni incapacité supérieure à six mois, ni inaptitude à reprendre une activité professionnelle, ni troubles particulièrement graves en lien avec sa prise en charge à l'hôpital …. du 1 au 8 décembre 2004 ; qu'en conséquence, les préjudices invoqués par Mme L. ne sauraient, en tout état de cause, être indemnisés au titre de la solidarité nationale ; que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux doit dès lors être mis hors de cause ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge définitive de Mme L. les frais et honoraires de l'expertise, liquidés à la somme de 1 657,60 euros par ordonnance du 7 septembre 2011 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Assistance publique hôpitaux de Paris les sommes demandées par Mme L. au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE:
Article 1er :La requête de Mme L. est rejetée.
Article 2 : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux est mis hors de cause.
Article 3 : Les frais de l'expertise liquidés et taxés à la somme de 1 657,60 euros (mille six cent cinquante-sept euros et soixante centimes) par l'ordonnance du 7 septembre 2011 sont mis à la charge définitive de Mme L..
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme Pascale L., à la Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, au Directeur général de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2011, à laquelle siégeaient :
M. Samson, président,
Mme Bories, premier conseiller, M. Dayan, premier conseiller,
Lu en audience publique le 8 décembre 2011.
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.