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Cour administrative d’appel de Lyon, 10 juin 2008, n°05LY01218 (comportement fautif d’un des parents – convictions religieuses)

En l’espèce, une patiente a accouché de son quatrième enfant au terme d’une grossesse normale dans un centre hospitalier. L’accouchement se déroulant dans des conditions difficiles, la sage-femme a voulu appelé un interne de garde mais l’époux de la parturiente s’est opposé physiquement à toute présence masculine dans la salle d’accouchement notamment des médecins obstétriciens et anesthésistes et de l’interne de garde en invoquant ses convictions religieuses. Lorsque le mari ne s’est plus opposé à l’intervention des médecins masculins, il était trop tard pour débuter la césarienne. Par la suite, cet enfant a conservé de graves séquelles neurologiques et un taux d’incapacité de 100%. La cour administrative d’appel a considéré que l’état de l’enfant était totalement imputable à l’attitude du mari et que le centre hospitalier n’a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité en ne faisant pas appel immédiatement aux forces de police. La responsabilité pour faute ou sans faute du centre hospitalier ne peut pas, par conséquent, être recherchée.

COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON

N° 05LY01218
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre - formation à 5
M. QUENCEZ, président
M. Vincent-Marie PICARD, rapporteur
Mme MARGINEAN-FAURE, commissaire du gouvernement
DAMIANO ISABELLE, avocat

lecture du mardi 10 juin 2008

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu, enregistrée le 26 juillet 2005, la requête présentée pour M. et Mme X, en leur nom propre et en celui de leur fils mineur X, domiciliés (...) ; Ils demandent à la Cour :

1°) l'annulation du jugement n° 0306165 du Tribunal administratif de Lyon du 26 mai 2005 qui a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse en réparation des préjudices dont a été victime l'enfant Mohammed lors de sa naissance le 8 novembre 1998 ;

2°) d'ordonner une expertise afin de déterminer le préjudice subi par l'enfant Mohammed et ses parents ;

3°) de condamner le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse à leur verser, en leur qualité de représentant légaux de leur fils Mohammed, une indemnité provisionnelle de 100 000 euros et, à titre personnel, une somme de 10 000 euros ;

Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2008 : - le rapport de M. Picard, premier conseiller ; - les observations de Me Damiano, avocat de M. et Mme X, et de Me Regnoux, avocat du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ; - et les conclusions de Mme Marginean-Faure, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 8 novembre 1998 Mme X a été admise à 5h40 à la maternité du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse pour accoucher, au terme d'une grossesse normale, de son quatrième enfant ; que l'expulsion de l'enfant s'est déroulée dans des conditions difficiles, le jeune X étant alors victime d'une dystocie des épaules, à l'origine d'une anoxie foetale, dont il a conservé de graves séquelles neurologiques ; que M. et Mme X ont demandé au Tribunal administratif de Lyon la condamnation du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse à les indemniser des préjudices subis par eux et leur enfant, atteint d'un taux d'incapacité de 100 % ; que, par un jugement du 26 mai 2005, le Tribunal a rejeté leur demande ;

Considérant que Mme X, qui a accouché de ses trois premiers enfants par voie basse, ne présentait à son entrée à l'hôpital aucun symptôme justifiant d'emblée l'intervention d'un médecin et le choix d'une césarienne ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise et des témoignages du personnel alors en service, que, dès les premiers épisodes de bradycardie foetale apparus vers 9h40, la sage femme a appelé l'interne de garde et, qu'invoquant ses convictions religieuses, M. X s'est, jusqu'à 10h10, physiquement opposé à toute présence masculine dans la salle d'accouchement, notamment des médecins obstétriciens et anesthésistes et de l'interne de garde, malgré les demandes instantes de ces derniers ; que lorsque vers 10h10, après négociation, M. X ne s'est plus opposé à l'intervention des médecins masculins, il était trop tard pour commencer une césarienne et l'extraction de l'enfant a dû être effectuée par application de forceps ; que M. X a ainsi fait obstacle aux examens nécessaires qui, malgré le caractère totalement imprévisible de la dystocie des épaules, auraient permis de constater la survenue d'une anoxie foetale et de prévenir, par une césarienne prophylactique, les graves complications neurologiques dont a été victime le jeune Mohammed ; qu'en ne faisant pas appel immédiatement aux forces de police pour expulser M. X, l'hôpital n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'ainsi l'état de l'enfant est totalement imputable à l'attitude de M. X et M. et Mme X ne peuvent rechercher la responsabilité pour faute ou sans faute du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ; que, par suite, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les fins de non recevoir opposées par le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ni d'ordonner une nouvelle expertise, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté leur demande ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. et Mme X le paiement d'une somme de 1 000 euros au centre hospitalier de Bourg-en-Bresse ; DECIDE : Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : M. et Mme X verseront une somme de 1 000 euros au centre hospitalier de Bourg-en-Bresse en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. 1 3 N° 05LY01218