REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 6 mai et 6 septembre 1994, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE DRAGUIGNAN ; le CENTRE HOSPITALIER DE DRAGUIGNAN demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 8 mars 1994 de la cour administrative d'appel de Lyon, qui, d'une part, a porté à 30 000 F la somme qu'il avait été condamné par un jugement du tribunal administratif de Nice du 6 décembre 1991 à payer à Mme X. en réparation du préjudice moral que lui a causé le licenciement de son emploi de secrétaire médicale, et décidé que cette somme serait assortie des intérêts au taux légal, à compter du 23 mars 1987, qui produiront eux-mêmes intérêt à partir du 16 avril 1988, année par année, déduction des sommes déjà versées à Mme X. dans l'hypothèse où le jugement du 6 décembre 1991 aurait déjà été exécuté, d'autre part, l'a condamné à payer une somme de 4 000 F à Mme X., au titre des frais non compris dans les dép
ens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Struillou, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Garaud, avocat du CENTRE HOSPITALIER DE DRAGUIGNAN,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme X. a été recrutée en mars 1977 par le CENTRE HOSPITALIER DE DRAGUIGNAN pour y occuper un emploi de secrétaire médicale ; que ces fonctions la faisait participer à l'exécution du service public hospitalier ; qu'elle avait ainsi la qualité d'agent de droit public ; que, peu de temps après qu'il eut été informé qu'elle était enceinte, le directeur du centre hospitalier a, par lettre du 9 décembre 1980, informé Mme X. de sa décision de la licencier et de ce que cette mesure prendrait effet le 16 février 1981, après l'expiration de ses droits à congé de maternité ;
Considérant qu'à la date de ce licenciement, les dispositions relatives à la situation des agents non titulaires des établissements publics hospitaliers ne comportaient aucune garantie du maintien des femmes enceintes dans leurs emplois ;
Mais considérant que le principe général dont s'inspire l'article L. 122-25-2 du code du travail, selon lequel aucun employeur ne peut, sauf dans certains cas, licencier une salariée en état de grossesse médicalement constaté et pendant une période de quatorze semaines suivant l'accouchement, s'applique aux femmes employées dans les services publics, lorsqu'aucune nécessité propre à ces services ne s'y oppose, et a pour effet d'interdire toute notification de licenciement à un agent féminin pendant une grossesse et les quatorze semaines suivant l'accouchement, alors même que ce licenciement ne prendrait effet qu'après l'expiration de ces quatorze semaines ;
Considérant que la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir souverainement estimé, sans dénaturer les pièces du dossier qui lui était soumis, que le CENTRE HOSPITALIER DE DRAGUIGNAN, qui soutenait avoir licencié Mme X. au motif qu'elle ne possédait pas les diplômes permettant de la titulariser, ne fournissait cependant aucun élément sur les raisons qui l'avaient conduit à prendre cette décision, précisément au moment où l'intéressée, qui exerçait ses fonctions depuis plus de trois ans, était enceinte, et que, dans ces conditions, il devait être tenu pour établi que son licenciement avait été prononcé pour le seul motif qu'elle était en état de grossesse, alors qu'aucune nécessité propre au service ne le justifiait, a pu juger, sans erreur de droit, que ce licenciement, même s'il ne devait prendre effet qu'à l'issue du congé de maternité de Mme X., était entaché d'illégalité et constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier à l'égard de l'intéressée ;
Considérant que la cour administrative d'appel a souverainement apprécié le montant de l'indemnité due à Mme X. pour réparer le préjudice moral qu'elle a subi du fait de son licenciement en l'évaluant à 30 000 F ; que cette appréciation n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER DE DRAGUIGNAN n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER DE DRAGUIGNAN est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER DE DRAGUIGNAN, à Mme X. et au ministre de l'emploi et de la solidarité.