Le tribunal administratif a prononcé l’annulation des notations pour 2005 et 2006 d’une aide-soignante qui exerçait au sein d’un centre hospitalier , au motif qu’il avait commis une erreur de droit en se bornant à relever l’absence de contact de l’agent avec les hospitalisés sans porter d’appréciation sur la qualité de ces contacts. La Haute juridiction administrative estime qu’en fondant l'un des éléments de la notation de cet agent sur le profil du poste dans lequel il l'avait affectée, alors qu'un tel critère était étranger à la valeur professionnelle de l'intéressée, le centre hospitalier a fait une inexacte application des dispositions des articles 17 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et 65 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, en vertu desquelles les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires expriment leur valeur professionnelle. Le Conseil d’Etat considère ainsi que cette motivation, qui ne précise pas suffisamment la nature de l’erreur de droit censurée par les juges du fond, ne met pas le juge de cassation à même d’exercer son contrôle et que la requérante est par conséquent fondée à demander l’annulation des notations attribuées pour 2005 et 2006.
Conseil d'État
N° 303549
Inédit au recueil Lebon
5ème sous-section jugeant seule
Mme Hubac, président
M. Xavier de Lesquen, rapporteur
M. Thiellay Jean-Philippe, commissaire du gouvernement
SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP BACHELLIER, POTIER DE LA VARDE, avocats
lecture du mercredi 25 mars 2009
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu, 1°) sous le n° 303549, l'ordonnance du 5 mars 2007, enregistrée le 12 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour pour le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES ;
Vu le pourvoi sommaire, enregistré le 2 février 2007 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, et le mémoire complémentaire, enregistré le 14 juin 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES, dont le siège est BP 80195 à Arles Cedex (13637) ; le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 novembre 2006 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a annulé la notation de Mme Julia A pour l'année 2005 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de Mme A une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, 2°) sous le n° 305802, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mai et 21 août 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES, dont le siège est BP 80195 à Arles Cedex (13637) ; le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 mars 2007 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a annulé la notation de Mme Julia A pour l'année 2006 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif ;
3°) de mettre à la charge de Mme A une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu ;
Vu l'arrêté ministériel du 6 mai 1959 relatif à la notation du personnel des établissements d'hospitalisation, de soins et de cure publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Xavier de Lesquen, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES et de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de Mme A,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, Rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES et à la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de Mme A ;
Considérant que les pourvois n° 303549 et 305802 du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES sont relatifs à la notation d'un même fonctionnaire pour les années 2005 et 2006 ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Considérant que, pour prononcer l'annulation des notations pour 2005 et 2006 de Mme A, aide soignante au CENTRE HOSPITALIER D'ARLES, le tribunal administratif de Marseille, dans chacun des deux jugements attaqués, a jugé que le centre hospitalier avait commis une erreur de droit en se bornant à relever l'absence de contacts de l'intéressée avec les hospitalisés sans porter d'appréciation sur la qualité de ces contacts ; que cette motivation, qui ne précise pas suffisamment la nature de l'erreur de droit censurée par les juges du fond, ne met pas le juge de cassation à même d'exercer son contrôle ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des pourvois, le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES est par suite fondé à demander l'annulation des jugements du tribunal administratif de Marseille des 28 novembre 2006 et 20 mars 2007 en tant qu'ils annulent les notations de Mme A pour les année 2005 et 2006 ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler les affaires au fond dans la mesure de la cassation prononcée ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : « Les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires et exprimant leur valeur professionnelle leurs sont communiquées » ; qu'aux termes des dispositions de l'article 65 de la loi du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière : « Le pouvoir de fixer les notes et appréciations générales exprimant la valeur professionnelle des fonctionnaires dans les conditions définies à l'article 17 du titre 1er du statut général est exercé par l'autorité investie du pouvoir de nomination, après avis du ou des supérieurs hiérarchiques directs... » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les notes chiffrées de 11 sur 25 et de 11,50 sur 25 attribuées à Mme A respectivement pour les années 2005 et 2006 résultent notamment de ce que l'autorité investie du pouvoir de notation s'est fondée sur la circonstance que le poste qu'elle occupait ne comportait que de façon exceptionnelle des contacts avec les hospitalisés pour ne lui attribuer que la note de 0,25 sur 5 au titre d'un critère d'appréciation relatif au comportement des aides soignants envers les hospitalisés ; qu'ainsi, en fondant l'un des éléments de la notation de Mme A sur le profil du poste dans lequel il l'avait affectée, alors qu'un tel critère était étranger à la valeur professionnelle de l'intéressée, le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES a fait une inexacte application des dispositions des articles 17 de la loi du 13 juillet 1983 et 65 de la loi du 9 janvier 1986, desquelles il résulte que les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires expriment leur valeur professionnelle, sans que le centre hospitalier puisse utilement invoquer les dispositions de l'arrêté ministériel du 6 mai 1959 relatif à la notation du personnel des établissements d'hospitalisation, de soins et de cure publics, lesquelles ne sauraient prévaloir sur ces dispositions législatives ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de ses demandes, Mme A est fondée à demander l'annulation des notations que le CENTRE HOSPITALIER D'ARLES lui a attribuées pour les années 2005 et 2006 ; que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Marseille des 28 novembre 2006 et 20 mars 2007 sont annulés en tant qu'ils annulent les notations de Mme A pour les années 2005 et 2006.
Article 2 : Les notations de Mme A pour les années 2005 et 2006 sont annulées.
Article 3 : Le surplus des conclusions du CENTRE HOSPITALIER D'ARLES est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER D'ARLES et à Mme Julia A.