Le ministre de l'intérieur, le ministre délégué à la santé et le secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la vie quotidienne à Messieurs les préfets de région (directions régionales des affaires sanitaires et sociales) (pour information), Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales, directions départementales des polices urbaines) (pour exécution). Mesdames et Messieurs les directeurs d'établissement public de santé.
La multiplication d'actions menées par des groupes qui occupent ou tentent d'occuper les unités chargées d'appliquer la loi n° 75-17 du 17 janvier 1975 relative à l'interruption volontaire de grossesse a déjà conduit le ministre de la santé à adresser le 11 janvier 1991 aux préfets de région, préfets de département et directeurs d'établissement une circulaire relative aux mesures à prendre en cas d'occupation des locaux hospitaliers où se pratiquent les interruptions volontaires de grossesse.
Cette circulaire recommandait aux directeurs d'établissement :
- d'informer l'ensemble du personnel médical et hospitalier de l'éventualité de tels incidents ;
- de mettre en place un système de sécurité assurant la protection des patientes et des locaux ;
- de rappeler à l'ensemble de l'encadrement de leur établissement les différentes procédures judiciaires applicables en l'espèce ;
- de faire immédiatement appel aux forces de l'ordre afin de rétablir le fonctionnement du service, de faire constater la nature des faits et relever l'identité des fauteurs de troubles ;
- de porter plainte systématiquement pour toutes les infractions commises telles que destruction ou détérioration du matériel et d'apporter toutes informations utiles aux personnes désireuses de porter plainte.
- de noter que des actions civiles en réparation pouvaient être envisagées.
Cette circulaire demandait en outre aux préfet d'adresser un rapport sur chacun des incidents pouvant survenir sous le double timbre de la direction des hôpitaux et de la direction générale de la santé, tout en veillant à la transmission des instructions contenues dans la circulaire aux établissement privés agréés.
Un certain nombre de difficultés ont continué à se manifester, tenant à l'enregistrement des plaintes, à l'identification des auteurs ou à la qualification pénale des fait commis.
Il convient de réaffirmer que les agissements de ces groupes sont intolérables et que ces derniers ne sauraient empêcher l'application d'une loi.
La présente circulaire a pour objet de coordonner l'action de toutes les autorités administratives concernées par ces manifestations en préconisant les mesures à mettre en oeuvre pour faire cesser les troubles soit par des mesures préventives, soit par des instructions précises en cas d'incident.
S'agissant des mesures préventives, les recommandations rappelées plus haut de la circulaire du 11 janvier 1991 demeurent valables et doivent continuer à s'appliquer.
Les directeurs d'établissement devront accentuer leur effort d'information et de sensibilisation de tous les personnels pouvant être confrontés à ces groupes : personnel médical et hospitalier, mais aussi personnel de sécurité et d'entretien. Ils devront en particulier attirer leur attention sur l'importance et la précision des témoignages qu'ils pourront avoir à donner ultérieurement à la police lors de l'identification des manifestants et de la détermination des responsabilités pénales.
Les directeurs devront renforcer les dispositifs de sécurité et d'alerte destinés à protéger les personnels, les patientes, les locaux et le matériel.
En cas d'irruption d'un groupe de manifestants dans un établissement, les directeurs d'établissement devront faire immédiatement appel aux forces de l'ordre pour faire évacuer les locaux et rétablir le fonctionnement du service en communiquant, dès cet appel, le maximum de renseignements utiles à une intervention rapide et appropriée.
Les directeurs d'établissement devront déposer plainte systématiquement pour ce genre d'actions au commissariat ou auprès des parquets. Il est en effet utile de rappeler que la constatation des infractions incombe aux officiers de police judiciaire et que leur qualification ou leur appréciation sera faite par les autorités judiciaires. Les directeurs d'établissement apporteront toutes informations utiles aux personnes victimes de préjudice désireuses de porter plainte et à toutes celles souhaitant témoigner. Ils devront cependant prendre toutes précautions utiles pour préserver l'anonymat des femmes venues subir une interruption volontaire de grossesse.
Pour leur information, les directeurs d'établissement auront copie des instructions adressées par le garde des sceaux, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République. Il leur sera loisible de prendre l'attache des procureurs de la République pour leur demander conseil sur la meilleure façon de donner juridiquement suite sur le plan civil, soit sur le plan pénal.
L'intervention des forces de l'ordre se fera dans les meilleures conditions de célérité. Elles adapteront leur action à la nature des établissements concernés de manière à rétablir rapidement le fonctionnement normal du service.
Les parquets seront immédiatement avisés de ces manifestations, afin de leur permettre de prendre toutes dispositions utiles.
Il convient de rappeler qu'en dehors de la voie pénale, des actions en responsabilité pourront être intentées devant les juridictions civiles, pour obtenir réparation des préjudices subis soit contre une personne physique, soit contre l'association ou le groupe qui a organisé la manifestation.
Les destinataires de la présente circulaire sont chargés d'en porter les dispositions à la connaissance des responsables des services concernés et de leurs collaborateurs, de veiller à la transmission des présentes instructions aux établissements privés agréés
Paris, le 27 février 1992.