REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête enregistrée le 19 juin 2000 au greffe de la cour administrative d'appel, présentée pour Mme Corinne X, demeurant ... par Me Courchinoux, avocat ; Mme X demande à la cour :
1) d'annuler le jugement en date du 20 avril 2000 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite du directeur du centre hospitalier André Bouron portant refus de titularisation en qualité d'infirmière en anesthésie et de reconstitution de carrière et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à l'établissement de la titulariser à compter du 1er décembre 1988 ou, subsidiairement, du 16 juillet 1991 et de reconstituer sa carrière ;
2) de faire droit à ses conclusions de première instance ;
3) de condamner le centre hospitalier André Bouron à lui verser une somme de 25 000 F au titre de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la ;
Vu le décret n° 92-75 du 21 janvier 1992 ;
Vu le décret n° 88-1077 du 30 novembre 1988 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2004 :
- le rapport de Mme Jayat, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Boulard, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 117 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 : Les agents non titulaires qui occupent un emploi permanent à temps complet ... dans les établissements mentionnés à l'article 2 ont vocation à être titularisés sur leur demande, dans des emplois de même nature qui sont vacants ou qui seront créés, sous réserve : 1° D'être en fonction ou en congé à la date de publication de la présente loi ; 2° D'avoir accompli, à la date de dépôt de leur candidature, des services effectifs d'une durée équivalente à deux ans au moins de services à temps complet dans un des emplois sus-indiqués ; 3° De remplir les conditions énumérées à l'article 5 du titre 1er du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales ; que l'article 119 de la même loi dispose : Par dérogation aux dispositions de l'article 29, des décrets en Conseil d'Etat peuvent organiser pour les agents non titulaires mentionnés aux articles 117 et 118 l'accès aux différents corps ou emplois de fonctionnaires suivant l'une des modalités ci-après ou suivant l'une et l'autre de ces modalités : 1° Par voie d'examen professionnel ; 2° Par voie d'inscription sur une liste d'aptitude établie en fonction de la valeur professionnelle des candidats ; 3° Par intégration directe dans le cas de nominations dans un corps ou emploi créé pour l'application de l'article 117 ... ; qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 92-75 du 21 janvier 1992 : La titularisation des agents mentionnés à l'article 1er s'effectue dans les conditions suivantes : 1° En ce qui concerne les agents occupant un emploi de même nature que celui qui correspond à l'un des corps régis par le décret du 30 novembre 1988 susvisé ... par voie d'inscription sur une liste d'aptitude établie par l'autorité investie du pouvoir de nomination après avis de la commission administrative paritaire compétente. Peuvent être inscrits sur cette liste les titulaires d'un diplôme ou titre exigés des candidats aux concours ouverts pour le recrutement dans le corps d'accu
eil ... ;
Considérant que Mme X, infirmière aide-anesthésiste contractuelle en fonction au centre hospitalier André Bouron de Saint-Laurent du Maroni, a demandé, par lettre du 2 juillet 1997, sa titularisation dans le corps des infirmiers spécialisés en anesthésie-réanimation au 1er décembre 1988, date de publication du décret du 30 novembre 1988 portant statuts particuliers des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière ou, subsidiairement, au 16 juillet 1991, date d'effet de son dernier contrat, et la reconstitution de sa carrière à compter de l'une de ces deux dates ; que, pour justifier le refus implicitement opposé à l'intéressée, l'établissement fait valoir que celle-ci ne remplit pas les conditions d'âge pour être admise à concourir en vue d'un recrutement dans le corps dont s'agit et que son comportement n'est pas compatible avec les obligations incombant à un fonctionnaire ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions précitées que la titularisation dans l'un des corps régis par le décret n° 88-1077 du 30 novembre 1988 est subordonnée non à la condition d'avoir satisfait aux épreuves d'un concours mais à l'inscription sur une liste d'aptitude et n'est soumise à aucune condition d'âge ; que, dans ces conditions, l'administration ne pouvait, sans erreur de droit, fonder sa décision sur la circonstance que Mme X ne remplirait pas la condition d'âge pour être admise à concourir ; que, d'autre part, le centre hospitalier ne produit aucun élément de nature à établir le caractère incompatible avec le service du comportement de l'agent ; que, par suite, et alors même que le centre hospitalier André Bouron n'était pas dans une situation de compétence liée pour prononcer la titularisation de Mme X, la décision implicite par laquelle il a rejeté la demande de titularisation de l'intéressée est entachée d'excès de pouvoir ; que, dès lors, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Considérant, en revanche, qu'alors même que l'intéressée aurait été recrutée par contrat en méconnaissance des règles posées à l'article 9 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, cette circonstance n'est pas de nature à créer à son profit un droit à titularisation aux dates dont elle fait état, un tel droit étant notamment subordonné à la vacance d'un poste et à l'inscription sur une liste d'aptitude ; que, par ailleurs, l'annulation par le présent arrêt de la décision par laquelle le centre hospitalier a rejeté la demande de titularisation de l'intéressée, si elle fait obligation à l'établissement de procéder rapidement à un nouvel examen de la demande de Mme X, n'implique pas nécessairement qu'elle prononce la titularisation demandée ; que, par suite, Mme X n'est fondée ni à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus implicite de l'administration de reconstituer sa carrière avec effet à l'une des dates qu'elle avance, ni à demander qu'il soit enjoint au centre hospitalier de prononcer sa titularisation à compter de l'une de ces dates ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le centre hospitalier André Bouron à verser à Mme X la somme de 1 300 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la requérante, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à l'établissement la somme que celui-ci demande en application des dispositions dudit article ;
DECIDE :
Article 1er : La décision implicite par laquelle le centre hospitalier André Bouron de Saint-Laurent du Maroni a rejeté la demande de titularisation de Mme Corinne X est annulée.
Article 2 : Le jugement en date du 20 avril 2000 du tribunal administratif de Cayenne est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le centre hospitalier André Bouron de Saint-Laurent du Maroni versera à Mme X la somme de 1 300 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions du centre hospitalier André Bouron tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.