Par cet arrêt, le Conseil d’Etat considère que « l’hôpital de jour, qui est un mode de prise en charge hospitalier destiné à assurer des soins polyvalents mis en œuvre par une équipe pluridisciplinaire en un lieu ouvert à la journée selon une périodicité déterminée pour chaque patient, ne constitue pas une méthode thérapeutique créant un risque spécial pour les tiers susceptible d'engager sans faute la responsabilité de l'administration ». En l’espèce, la Haute juridiction administrative a été saisie pour annuler un arrêt d’une cour administrative d’appel confirmant un jugement du tribunal administratif qui a rejeté une demande de condamnation d’un centre hospitalier suite à l’agression par un mineur de sa mère. Or, le Conseil d’Etat estime que l’admission de ce mineur suivi pour des troubles psychiques en hôpital de jour au sein du centre hospitalier « n'a pas eu pour effet de transférer à cet établissement la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie de ce mineur qui se trouvait, à la sortie de l'hôpital de jour, sous la garde légale de son père ». La responsabilité sans faute de l'hôpital du fait du manquement à l'obligation de garde d'un patient mineur ne peut ainsi être engagée. Par ailleurs, il relève que les médecins du centre hospitalier ont mis en œuvre des traitements adaptés à la pathologie du malade et conformes aux données de la science et considère que l'agression commise par le mineur était imprévisible. |
Conseil d'État
N° 334766
Publié au recueil Lebon
5ème et 4ème sous-sections réunies
M. Christian Vigouroux, président
Mme Anissia Morel, rapporteur
Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public
SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON ; LE PRADO, avocats
Lecture du vendredi 17 février 2012
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 décembre 2009 et 18 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE MAAF ASSURANCES dont le siège est à Chauray, Niort Cedex 9 (79036) et pour M. Michel A, demeurant à ... ; la SOCIETE MAAF ASSURANCES et M. A demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 08BX00922 du 15 octobre 2009 en tant que par cet arrêt la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation du jugement n°0601200 du 31 janvier 2008 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Brive-la-Gaillarde et de la société hospitalière d'assurances mutuelles à réparer les conséquences dommageables des faits commis par Dimitri B le 21 décembre 2000 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Brive-la-Gaillarde et de la société hospitalière d'assurances mutuelles le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anissia Morel, Auditeur,
- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la SOCIETE MAAF ASSURANCES et de M. A et de Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Brive la Gaillarde,
- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la SOCIETE MAAF ASSURANCES et de M. A et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Brive la Gaillarde ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le 21 décembre 2000, vers 20 heures 15, Dimitri B, alors âgé de 17 ans, qui faisait l'objet d'un suivi médical en hôpital de jour au centre hospitalier de Brive la Gaillarde en raison de troubles psychiques, a grièvement blessé sa mère lors d'une crise de démence ; que M. A son père et l'assureur de celui-ci, la société MAAF ASSURANCES, se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 15 octobre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a confirmé le jugement du tribunal administratif de Limoges du 31 janvier 2008 rejetant leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Brive-la-Gaillarde à réparer les conséquences dommageables des faits ainsi commis par Dimitri B ;
Considérant, en premier lieu, que l'hôpital de jour, qui est un mode de prise en charge hospitalier destiné à assurer des soins polyvalents mis en oeuvre par une équipe pluridisciplinaire en un lieu ouvert à la journée selon une périodicité déterminée pour chaque patient, ne constitue pas une méthode thérapeutique créant un risque spécial pour les tiers susceptible d'engager sans faute la responsabilité de l'administration ; que, par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en ne retenant pas l'existence d'une telle responsabilité ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'admission de Dimitri B en hôpital de jour au sein du centre hospitalier de Brive-la-Gaillarde n'a pas eu pour effet de transférer à cet établissement la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie de ce mineur qui se trouvait, à la sortie de l'hôpital de jour, sous la garde légale de son père ; qu'il suit de là que la cour n'a pas davantage commis d'erreur de droit en ne retenant pas l'existence d'une responsabilité sans faute de l'hôpital du fait du manquement à l'obligation de garde d'un patient mineur qui lui aurait incombé ;
Considérant, en troisième lieu, que, s'appuyant sur les conclusions de l'expert désigné par le tribunal administratif, la cour a relevé que si Dimitri B souffrait depuis 1998 de troubles psychiques importants ayant nécessité un suivi médical et plusieurs hospitalisations, les médecins du centre hospitalier de Brive avaient mis en oeuvre des traitements, notamment médicamenteux, adaptés à la pathologie du malade et conformes aux données de la science et que le traitement en hospitalisation de jour dans cet établissement, avec retour quotidien dans la famille, mis en place en août 2000 après une période d'essai, se poursuivait sans incident depuis près de quatre mois, l'état du patient étant en voie d'amélioration, sans qu'il ait manifesté de signes d'agressivité à l'égard de son entourage ou ait tenté de passer à l'acte ; que la cour a pu, par une qualification juridique exacte, déduire de ces constatations qu'aucune faute dans la prise en charge de Dimitri B et les soins qui lui ont été apportés ne pouvait être reprochée au centre hospitalier de Brive-la-Gaillarde et que l'agression imprévisible commise par l'intéressé le 21 décembre 2000 n'était pas de nature à engager la responsabilité de cet établissement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE MAAF ASSURANCES et M. A ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE MAAF ASSURANCES et de M. A est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE MAAF ASSURANCES, à M. Michel A, au centre hospitalier de Brive-la-Gaillarde, à la société hospitalière d'assurances mutuelles, à l'association de tutelle et d'intégration d'Aquitaine et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Corrèze.