Séance du 18 mars 2005
Considérant, d’une part :
- l’incidence de la leptospirose, de l’ordre de 0,5/100 000 en France métropolitaine (entre 300 et 400 cas par an) au regard de l’importance des populations exposées dans le cadre d’activités professionnelles ;
- la proportion de leptospiroses dues au sérogroupe Icterohaemorrhagiae, de l’ordre de 30 % depuis une dizaine d’années en métropole ;
- la spécificité étroite qui existe entre la protection induite par le vaccin disponible, et la maladie due à ce sérogroupe Icterohaemorrhagiae ;
- la lourdeur du schéma vaccinal concernant la vaccination contre la leptospirose (trois injections initiales puis rappels tous les deux ans),
et d’autre part :
- que l’évaluation du risque en milieu professionnel, conduite par le médecin du travail sous la responsabilité de l’employeur, ne doit pas se faire au seul vu de l’intitulé de la profession, mais qu’elle doit prendre en compte :
- l’activité spécifique exposant durant le travail à un risque de contact fréquent ou étroit avec des lieux infestés par les rongeurs ;
- tout facteur individuel capable de majorer le risque d’exposition ou de sensibilité à la maladie ;
- que l’information sur les risques professionnels est réglementairement prévue par le code du travail ;
- que les mesures de protection collectives et individuelles sont inégalement applicables selon les postes de travail.
Le Conseil supérieur d’hygiène publique de France recommande :
1. L’utilisation de mesures individuelles de protection dès lors qu’une activité professionnelle fait courir le risque d’un contact régulier avec des urines de rongeurs, ou un environnement infesté de rongeurs, qui comportent :
- le port de gants, de bottes, de cuissardes, de vêtements protecteurs, voire de lunettes anti projections si nécessaire ;
- la désinfection à l’eau potable et au savon ou à l’aide d’une solution antiseptique de toute plaie ou égratignure, ainsi que la protection ultérieure de cette plaie ou égratignure par un pansement imperméable.
2. Une information à l’embauche régulièrement renouvelée ciblée sur la maladie, sur l’importance des mesures de protection individuelles et la nécessité de consulter rapidement un médecin (à qui il signalera son activité à risque) en cas d’apparition d’un syndrome grippal.
3. La vaccination par le vaccin actuellement disponible dans certaines indications restreintes, posées au cas par cas par le médecin du travail, après une évaluation individualisée prenant en compte les critères suivants :
- l’existence de cas documentés de la maladie pour des personnes ayant occupé le même poste dans des conditions et pour des activités identiques ;
- l’existence sur le lieu de travail de protections collectives ou de mesures de lutte contre les rongeurs ;
- une activité professionnelle exposant spécifiquement au risque de contact fréquent avec des lieux infestés par les rongeurs, notamment « Rattus norvegicus », telle qu’elle peut se présenter dans les cadres suivants :
- curage et/ou entretien de canaux, étangs, lacs, rivières, voies navigables, berges ;
- activités liées à la pisciculture ;
- travail dans les égouts, dans certains postes exposés des stations d’épuration ;
- certaines activités spécifiques en eaux douces telles que pratiquées notamment par pêcheurs professionnels, plongeurs professionnels, garde pêche ;
- certaines activités spécifiques aux Dom-Tom.
- une prédisposition individuelle du travailleur tendant à majorer le risque d’exposition et/ou sa sensibilité à la maladie.
Le médecin proposera la vaccination après s’être assuré :
1. Qu’ont été mises en oeuvre sur le lieu de travail, lorsque cela est possible, les mesures de protection individuelles et générales (cf. 1.)
2. Que l’information sur la maladie, les comportements à risque, mais aussi sur l’efficacité relative du vaccin a bien été donnée et comprise (en aucun cas le vaccin ne doit être pris comme une « garantie » permettant de se passer des autres moyens de prévention).
Bibliographie
André-Fontaine G., chapitre 79 : Les leptospiroses In Principales maladies infectieuses et parasitaires du bétail, 2 volumes Ed TEC&DOC. 2003.
André-Fontaine G., Baranton G., Leptospiroses animales, la leptospirose humaine en métropole. Bull. épidémiologique. 2004 ; 12 : 1-3.
Anonyme : Calendrier vaccinal 2004 Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire 2004, n° 28-29 : 121-132.
Anonymous. Outbreak of leptospirosis among white-water rafters-Costa-Rica, 1996. MMWR-Morbidity & Mortality Weekly Report 1997 ; 46 :577-579.
Bharti A. R., Nally J. E., Ricaldi J. N., Diaz M. M., Lovett M. A., Levett P. N., Gilman R. H., Willig M. R., Gotuzzo E., Vinetz J. M., Leptospirosis : a zoonotic disease of global importance. Lancet Infect. Dis. 2003 ; 3 : 757-771.
Carrey E., Les leptospiroses en Franche-Comté ; à propos de 34 observations pédiatriques. Th. Med. ; Besançon : 2001 ; 43.
Carter M., Cortes D., Leptospirosis and other infections of Rattus rattus and Rattus norvegicus. New Zealand Veterinary Journal 1980 ; 28 :45-50.
Chen Ting Z., Development and present status of leptospiral vaccine and technology production of the vaccine in China. Annals of Immunology Hungarian 1986 ; 26 :125-151.
Collares-Pereira M., Korver H., Terpstra W.J., Santos Reis M., Ramalhinho M.G., Mathias M.L., Oom M.M., Fons R., Libois R., Petrucci-Fonseca F., First epidemiological data on pathogenic leptospires isolated on the Azorean island. European Journal of Epidemiology 1997 ; 13 : 435-441.
Ermanel C., Ricard C. et Thèlot B., Surveillance épidémiologique des noyades accidentelles en France au cours de l’été 2003. Bulletin Epidémiologique hebdomadaire 2004 ; 10 :37-40.
Faine S., Guide pour la lutte contre la leptospirose. OMS Publication 1987 ; 175 p. Offset n° 67.
Faine S., Adler B., Bolin C. and Perolat P., Leptospira and Leptospirosis 1999 2nd Edition Medisci Melbourne Australia 272pp.
Ferguson I. R., Leptospirosis surveillance : 1990-1992, Comm. Dis. Report 1993 ; 3 :R. 47-48.
Gsell H. O., The changing epidemiology of leptospirosis in Europe. Zentralbl. Bakteriol. 1990 ; 273 : 412-427.
Hathaway S., Blackmore D., Ecological aspects of epidemiology of infection with leptospires of the Ballum serogroup in the black rat (Rattus rattus) and the brown rat (Rattus norvegicus) in new Zealand. Journal of Hygiene Cambridge. 1981 ; 87 : 427-436.
Houpikian P., Perolat P., Baranton G., Brouqui P., Leptospiroses. In Encycl. Méd. Chir. Maladies infectieuses, Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, 2002,8-039-Q-10, 14 p.
Inada R., Ido Y., Hoki R. and Ito H. The etiology, mode of infection and specific therapy of Weil’s disease (Spirochaetosis icterohaemorrhagiae), J. Exp. Med. 1916 ; 23 : 377-402.
Landouzy M., Typhus hépatique. La Gazette des Hopitaux civils et militaires 1883 ; 115 : 913-914.
Letoffe E., Th. Med. ; Reims : 2001.
Levett P., Leptospirosis Clin. Microbiol. Rev. 2001 ;14(2) :296-326.
Mailloux M., Lambert R. et Chenu M., La vaccination humaine contre la leptospirose ictéro-hémorragique Méd. et Hyg. 1983 ; 41 : 1025-1030.
Martin L., Pettit A., Séro-diagnostic de la spirochètose ictero-hémorragique. Bulletin et Mémoires de la Société Médicale des Hôpitaux de Paris 1918 ; 42 : 672-675.
Michel V., Epidémiologie de la leptospirose zoonose : étude comparée du rôle de différentes espèces de la faune sauvage et de leur environnement. Lyon, France : Université Claude Bernard, 2001.223 pp.
Michel V., Ruvoen-Clouet N., Menard A., Sonrier C., Fillonneau C., Rakotovao F., Ganiere JP., André-Fontaine G., Role of the coypu (Myocastor coypus) in the epidemiology of leptospirosis in domestic animals and humans in France. Eur.J.Epidemiol., 2001 ; 17 : 111-121.
Nardone A., Capek I., Baranton G., Campese C., Postic D., Vaillant V., Lienard M., Desenclos J.C., Risk factors for leptospirosis in metropolitan France : the results of a national case-control study, 1999-2000. Clin. In. f. Dis. 2004 ; 39 : 751-753.
Nardone A., Campese C., Postic D., André-Fontaine G., Lienard M., Baranton G., Capek I., Les facteurs de risques de leptospirose en France : une étude cas-témoins nationale. Méd Mal Infect. 2001, suppl 2, 31 : 285-287.
Peslerbe X., Andre-Fontaine G., Ganière J.P. : (1992) Prévalence sérologique de la leptospirose chez le personnel d’entretien des voies navigables en Loire Atlantique et Maine et Loire. Arch. Mal. prof. 53, 50-66.
Perra A., Servas V., Terrier G., Postic D., Baranton G., André-Fontaine G., Vaillant V., Capek I., Clustered cases of leptospirosis in Rochefort, France, june 2001. Eurosurveillance, 2002 ; 7 : 131-136.
Pitangueira Filho JC., Flannery B., Almeida-Fernandes S., Riley LW., Reis MG., Ko AI and the Salvador Leptospirosis Study Group : effectiveness of Beta-Lactam antibiotic therapy in reducing mortality from severe late-stage leptospirosis. In Proceedings of the International Leptospirosis Society meeting (Barbades, 28-30 octobre 2002).
Postic D., Merien F., Perolat P., Baranton G., Diagnostic biologique : Leptospirose - Borréliose de Lyme. Série « Méthodes de Laboratoire », Commission des Laboratoires de Référence et d’Expertise (CLRE), Institut Pasteur, Paris 2000, 2eme Edition.
Rodriguez-Gonzalez I., Fillonneau C., Blanchet B., Suard I., Catilina P., André-Fontaine G., Etude de l’efficacité du vaccin Spirolept contre la leptospirose par la protection passive de rongeurs de laboratoire. Méd. Mal. Infect. 2004 ; 34 : 196-200.
Sehgal SC et coll. Field application of Lepto lateral flow for rapid diagnosis of leptospirosis. J Med Microbiol. 2003 ; 52(10) :897-901.
Sevjar J. et al., Leptospirosis in « Eco-Challenge » Athletes, Malaysian Borneo 2000. Emerging Infect. Dis. 2003 ; 9 : 6.
Takafuji E. et al., An efficacy trial of doxycycline chemoprophylaxis against leptospirosis. JAMA 1987 ; 310 : 497-500.
Terpstra W.J., Human Leptospirosis : Guidance for Diagnosis, Surveillance and Control. WHO/ILS 2003. WHO Library : 109 pp.
Thornley C. N., Baker M. G., Weinstein P. and Maas E. W. Changing, Epidemiology of human leptospirosis in New Zealand. Epidemiol. Infect. 2002 ; 128 :29-36.
Waitkins S., Wanyangu A., Palmer M., The coypu as a rodent reservoir of leptospira infection in Great Britain. J. Hyg. 1985 ; 95 : 409-417.
Webster JP., Ellis W., Macdonald D., Prevalence of Leptospira spp in brown rats (Rattus norvegicus) on UK farms. Epidemiology and Infection 1995 ; 114 :195-201.
Cet avis ne peut être diffusé que dans son intégralité, sans suppression, ni ajout.
Source Bulletin Officiel n° 2006/4 du 15 mai 2006