Références :
Prise en charge des personnes infectées par le VIH, recommandations du groupe d'experts sous la direction du Pr J.F. Delfraissy : rapport 2002 ;
Rapport du CNS 12 octobre 2000 ;
Plan national de lutte contre le sida 2001-2004 ;
Rapport d'expertise de l'AFSSAPS du 17 octobre 2002 ;
BEH n° 36-2002 : évaluation de la prise en charge thérapeutique des expositions au VIH, juillet 1999 décembre 2001 ;
Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;
Circulaire DGS/VS2/DH/DRT n° 99-680 du 8 décembre 1999 relatives aux recommandations à mettre en oeuvre devant un risque de transmission du VHB et du VHC par le sang et les liquides biologiques.
Textes abrogés : circulaire DGS/DH/DRT/DSS n° 98-228 du 9 avril 1998 relative aux recommandations mises en oeuvre d'un traitement antirétroviral après exposition au risque de transmission du VIH.
Le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à Mesdames et Messieurs les directeurs des agences régionales de l'hospitalisation (pour information) ; Mesdames et Messieurs les préfets de région, direction régionale des affaires sanitaires et sociales (pour information et coordination) ; direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (pour mise en oeuvre) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département, direction départementale des affaires sanitaires et sociales (pour mise en oeuvre), direction départementale du travail, de l'emploi et professionnelle (pour information) ; Monsieur le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés ; Monsieur le directeur de la caisse centrale de mutualité sociale agricole ; Monsieur le directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles
Des données nouvelles permettent d'actualiser les indications du traitement antirétroviral après exposition au risque de transmission du VIH, ou traitement post exposition (TPE) et le mode de prise en charge de ces accidents.
Ce sont :
- l'évolution des stratégies thérapeutiques chez les patients séropositifs ;
- l'évaluation nationale réalisée par l'INVS depuis juillet 1999 ;
- les recommandations du groupe de travail de l'AFSSAPS saisi le 6 août 2001 par la DGS et dont la version finale a été approuvée par la commission d'AMM de l'AFSSAPS le 17 octobre 2002. Ces recommandations confirment l'intérêt d'un traitement prophylactique lors d'une exposition au VIH. Elles en précisent les indications selon le risque encouru et les modalités thérapeutiques.
La présente circulaire a pour objet de faire connaître d'une part ces nouvelles recommandations thérapeutiques et d'autre part de préciser les modalités d'organisation du dispositif.
Les objectifs recherchés sont :
1. De mieux déterminer les indications du traitement.
2. De prévenir par un meilleur choix des médicaments la survenue d'effets indésirables graves.
3. D'améliorer le dispositif de prise en charge des accidents d'exposition pour toute personne en relevant.
4. De mettre à profit la prise en charge instituée à cette occasion pour rétablir ou renforcer les conduites préventives.
Il appartient aux services déconcentrés, pour permettre la réalisation de ces objectifs :
- d'assurer l'adaptation du dispositif local d'accueil et de prise en charge aux besoins en lien avec les différents partenaires ;
- d'informer les professionnels de santé et le public sur l'existence et le fonctionnement du dispositif ;
- de contrôler régulièrement la bonne marche du dispositif.
I. - LES MODALITÉS D'ÉVALUATION DU RISQUE ET LES RECOMMANDATIONS THÉRAPEUTIQUES
L'avis favorable rendu par la commission de l'AMM de l'AFSSAPS quant à l'utilisation d'antirétroviraux après exposition à un risque d'infection par le VIH est assorti de nouvelles recommandations concernant la mise en oeuvre d'un traitement antirétroviral et sa délivrance après un accident d'exposition qui tiennent compte des données de l'évaluation menée par l'INVS sur ce sujet. Ces recommandations en terme de prise en charge des accidents d'exposition au VIH, s'adressent aux médecins spécialistes et non spécialistes de l'infection par le VIH confrontés en urgence à une demande de conseils et de soins après risque d'exposition accidentelle au VIH. Elles doivent être relayées par les CISIH, les services référents dans la prise en charge de l'infection par le VIH et les Commissions du médicament et des dispositifs médicaux stériles (COMEDIMS) de chaque structure hospitalière en partenariat avec la médecine du travail et le Comité d'hygiène. Les discussions locales au sein de chaque CISIH sont vivement recommandées ainsi que les initiatives locales visant à une optimisation de la prise en charge des accidents d'exposition au VIH, tant sur le court que sur le long terme. Elles doivent permettre en particulier l'élaboration de protocoles de prise en charge par les CISIH qui seront mis à disposition des urgences.
I.1. Les indications au traitement (cf. annexe I)
L'indication du traitement est posée en prenant en compte le bénéfice lié à la possibilité d'une réduction du risque de transmission du VIH, et le risque d'effets indésirables graves liés au traitement.
Le traitement postexposition doit être réservé aux situations à risque identifiable de transmission du VIH.
Pour les autres situations, la balance entre le bénéfice escompté et le risque iatrogène n'est pas en faveur de la mise en route d'un traitement post-exposition.
I.2. La prise en charge thérapeutique (cf. annexe II)
Les effets indésirables graves doivent être impérativement déclarés aux centres de pharmacovigilance selon les procédures habituelles.
II. - L'ACCÈS AUX ANTIRÉTROVIRAUX
Prise en charge financière :
Les médicaments antirétroviraux prescrits après exposition au risque de transmission du VIH et délivrés aux patients par les pharmacies à usage intérieur sont pris en charge par l'assurance maladie en application de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002. Leur prix de vente au public sera fixé par arrêté interministériel en application de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale. Dans l'attente de la publication de cet arrêté, les conditions de droit commun relative au prix de cession s'appliquent. Les antirétroviraux prescrits après exposition au risque de transmission du VIH sont pris en charge à 100 % par l'assurance maladie. Par dérogation à l'article L. 162-4 du code de la sécurité sociale, les prescripteurs sont autorisés à ne pas mentionner sur l'ordonnance de prescription la mention « NR » signalant la prescription d'un médicament en dehors des indications thérapeutiques retenues pour l'inscription sur la liste des médicaments remboursables aux assurés sociaux, prévue à l'article R. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.
Délivrance :
La mise en oeuvre du traitement doit être la plus rapide possible et au mieux dans les 48 heures lorsque l'indication est posée. La dispensation des médicaments est faite par la pharmacie hospitalière. Il peut y avoir également mise à disposition par la pharmacie de l'établissement de trousses de prophylaxie dans les services identifiés pour la prescription en urgence.
En conséquence, il appartient aux CISIH, aux services prescripteurs et aux pharmaciens hospitaliers de vérifier l'organisation de procédures locales les plus adaptées à la rapidité de mise en oeuvre des traitements.
III. - PRISE EN CHARGE DU RISQUE DE CONTAMINATION PAR LE VHB, VHC
Les recommandations de la circulaire DGS/VS2/DH/DRT/99/680 du 8 décembre 1999 relative aux recommandations à mettre en oeuvre devant un risque de transmission du VHB et du VHC par le sang et les liquides biologiques sont maintenues.
IV. - AMÉLIORER LE DISPOSITIF LOCAL D'ACCUEIL ET DE PRISE EN CHARGE
Un dispositif existe dans tous les départements depuis 1998. Des adaptations peuvent être nécessaires selon la situation locale.
Ces adaptations ont pour but d'améliorer sur tout le territoire et à toute heure l'accueil et l'orientation des personnes. Le dispositif doit permettre l'analyse précoce du risque, l'administration d'un traitement s'il est jugé nécessaire et son suivi, le soutien dans l'observance, le conseil dans le domaine de la prévention et le recueil éventuel de données pour une évaluation.
IV.1. Le dispositif d'accueil hospitalier et de prise en charge
Ce dispositif doit permettre par l'accueil dans un service compétent de limiter le délai entre l'exposition au VIH et la mise sous traitement antirétroviral s'il est jugé nécessaire.
Il est rappelé qu'aux heures ouvrables, les consultations et les services hospitaliers qui assurent habituellement la prise en charge des personnes infectées par le VIH (dont certains CDAG hospitaliers) doivent être le site légitime d'accueil des personnes.
Aux heures non ouvrables, les services des urgences restent la seule filière de prise en charge.
Afin d'aider les urgentistes dans les décisions difficiles (en particulier aide à la réflexion sur l'évaluation du risque ou le choix des molécules si le sujet source est déjà traité), ceux-ci doivent pouvoir demander un avis téléphonique auprès d'un médecin référent. Des médecins référents sont désignés par les services hospitaliers qui assurent localement la prise en charge des personnes infectées par le VIH. Une permanence téléphonique doit être organisée en concertation avec les médecins référents et le CISIH. L'organisation du recours à un médecin référent peut se faire à un niveau département ou régional.
Les médecins référents pour la prophylaxie du VIH, qui appartiennent le plus souvent à un service prenant en charge les patients atteints par le VIH, confirment ou réexaminent dans les 3 à 4 jours suivants le bien-fondé et les modalités de prescription initiale faite aux urgences.
La parution récente d'un texte de loi (n° 2002-303 du 4 mars 2002) relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé devrait faciliter l'accès au dispositif de soins par les mineurs (art. L. 1111-5 du code de la santé publique) en dehors du cadre de l'autorité parentale.
IV.2. Les autres partenaires du dispositif
Les médecins généralistes, les médecins de réseaux, CDG, CDAG non hospitaliers, CPEF, DAV doivent être tenus informés du principe du traitement après exposition et de la conduite à tenir face à une demande pour orienter les personnes vers les services compétents.
Les médecins des services de médecine du travail interviennent en milieu professionnel, dans divers secteurs d'activités concernés par l'exposition d'un risque de transmission du VIH (établissements de soins, entreprises de nettoyage, déchetteries...).
Dans le cadre de ses missions, le médecin du travail :
- conseille le chef d'établissement sur l'évaluation du risque d'exposition des salariés à la transmission du VIH et sur les conditions de leur information ;
- contribue à l'élaboration par le chef d'établissement du protocole de prise en charge des cas d'accidents exposant au risque de transmission du VIH ;
- lorsqu'il est présent dans l'établissement au moment de l'accident, il peut assurer l'information et l'orientation de la victime, voire, dans certains établissements de soins, être intégré au dispositif de prise en charge.
Les comités de lutte contre les infections nosocomiales (CLIN) doivent être impliqués dans la prise en charge et la prévention des accidents professionnels.
Les médecins des UCSA, des établissements psychiatriques et des urgences médico-judiciaires doivent être informés de la conduite à tenir en cas d'exposition à un risque. Ils peuvent être amenés à initialiser un traitement post-exposition en fonction de la possibilité ou non d'une dispensation locale d'un traitement.
IV.3. L'organisation de la coopération locale
Les DDASS organisent, en lien avec les DRASS et les CISIH, l'adaptation du dispositif dans chaque département ou au niveau régional s'il y a lieu.
Cette concertation doit permettre de s'assurer :
1. Des lieux où sont les compétences et des modalités d'accès du public en cas d'exposition accidentelle au VIH.
2. Des lieux où le consultant doit être dirigé, après une première évaluation, pour une éventuelle prescription.
Les médecins des UCSA seront associés à la concertation afin que les personnes détenues aient accès si besoin aux urgences hospitalières pour la prescription ou la dispensation d'un traitement antirétroviral après exposition. Il sera fait de même pour les personnes hospitalisées dans un établissement psychiatrique avec les médecins somaticiens de ces établissements. La concertation locale doit également permettre la prise en charge des agressions sexuelles par des urgences médico-judicaires.
IV.4. L'information sur le dispositif et l'accès à des formations pour les professionnels
L'information sur le dispositif doit être précisée et amplifiée en direction des professionnels et acteurs de la lutte contre le VIH, d'une part, en direction du public, d'autre part.
1. En direction des professionnels et acteurs de la lutte contre le VIH
Les DDASS sont en charge de cette information en lien avec les CISIH. L'objectif est de permettre aux intervenants de jouer un rôle actif dans l'information du public pour permettre l'accès à une prise en charge dans une logique de recherche d'efficacité. L'information doit viser les médecins, les pharmaciens et les intervenants auprès des populations plus exposées, les acteurs de prévention tels que les associations et les réseaux de soutien aux personnes atteintes.
2. En direction du public
L'information doit être véhiculée par les relais professionnels et associatifs et être à disposition dans tous les lieux auxquels s'adresse la population (centres 15, pharmacies, Sida Info Service...).
Afin d'améliorer la surveillance ou le soin d'une personne consultant pour exposition au VIH, le médecin doit lui remettre la brochure « Vous venez de consulter un médecin à la suite d'une situation à risque pour la transmission du VIH », qu'il y ait ou non prescription médicale.
L'accès à des formations pour les professionnels de santé :
Les acteurs impliqués, en particulier le personnel soignant des urgences, devraient pouvoir bénéficier de formations sur l'évaluation du risque ou de remise à niveau, notamment sur les nouvelles molécules. Ces formations doivent être prévues en lien avec les DDASS et les CISIH en fonction des besoins locaux.
V. - FONCTION DE VEILLE DANS LE SUIVI DE CETTE ACTIVITE
Il vous appartient d'assurer une fonction de veille sur ce dispositif et notamment de contrôler régulièrement la bonne marche du dispositif et d'alerter les services de la direction générale de la santé sur d'éventuels dysfonctionnements (Dr Frédérique Delatour : 01-40-56-54-60). L'InVS pour sa part poursuit l'évaluation sur le nombre de patients ayant sollicité un TPE grâce à un réseau d'hôpitaux volontaires.
Vous veillerez à la diffusion immédiate de la présente circulaire auprès de l'ensemble des organismes et des professionnels concernés par la prise en charge des situations d'exposition au risque de transmission du VIH.
Le directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, E. Couty
Le directeur général de la santé, L. Abenhaïm
Le directeur des relations du travail, J.-D. Combrexelle
Le directeur de la sécurité sociale, D. Libault
INDICATIONS AU TRAITEMENT
Le traitement postexposition repose sur l'évaluation du risque individuel de transmission du VIH. Cette évaluation prend en compte le type d'exposition et le statut VIH de la personne source.
Lorsque le statut de la personne source est inconnu, tous les efforts doivent être consentis à la détermination de celui-ci.
A cet égard, il est nécessaire de recourir aux tests de diagnostic rapide qui devraient être accessibles dans tous les hôpitaux, donnant la sérologie en moins d'une heure ou, le cas échéant, à des tests classiques avec réponse dans les deux à trois heures. Leur délai de réponse rapide amène à proposer d'emblée une première prise de médicament dans les cas où le risque paraît élevé et de surseoir à la suivante dès lors que le test est négatif. Les résultats du test rapide fait en urgence doivent être contrôlés par un test de dépistage des anticorps anti-VIH selon les dispositions réglementaires.
Un rapport a été rendu par le Conseil national du SIDA (CNS) le 12 octobre 2000 sur « Le dépistage en milieu hospitalier en situation d'accident d'exposition au sang et d'impossibilité pour le patient de répondre à une proposition de test ». Selon les conclusions du CNS, il paraît raisonnable d'estimer que le consentement du patient pour la pratique du test de dépistage chez des patients dans des situations exceptionnelles telles que le coma ou la perte de conscience prolongée, et seulement dans ces situations d'exception, peut ne pas être requis. La délivrance du résultat du test au patient source, quel qu'il soit, doit être effectuée dans le cadre d'un entretien médical.
Le CNS considère cependant que le dépistage sans le consentement du patient doit être proscrit chaque fois que celui-ci a exprimé antérieurement une opposition à la recherche de son statut sérologique.
Les règlements intérieurs des hôpitaux doivent appuyer l'avis rendu par le CNS.
Lors des situations médico-judiciaires, il est nécessaire de proposer un test de dépistage en même temps qu'un examen clinique de l'agresseur.
Si le statut de la personne source reste indéterminé, l'évaluation du risque de transmission repose sur le type d'exposition, et sur la prévalence théorique de l'infection à VIH dans la population à laquelle la personne source appartient ou peut appartenir (estimations en France par méthode directe, fin 1997 : dans la population hétérosexuelle non UDIV 0,1 %, homosexuelle non UDIV 13 % et UDIV 17 %). Ces prévalences sont à pondérer en fonction des pratiques à risques.
A noter que lorsque le statut de la personne source est connu et séronégatif, il est nécessaire de chercher à obtenir la date de la dernière sérologie ; si celle-ci est ancienne et au moindre doute, la pratique d'un test rapide est recommandée.
L'indication du traitement est posée en prenant en compte le bénéfice lié à la possibilité d'une réduction du risque de transmission du VIH, et le risque d'effets indésirables graves liés au traitement.
Le traitement postexposition doit être réservé aux situations à risque identifiable de transmission du VIH.
Pour les autres situations, la balance entre le bénéfice escompté et le risque iatrogène n'est pas en faveur de la mise en route d'un traitement post-exposition.
Dans ce contexte, il est rappelé l'article L. 1110-5 alinéa 1 du code de la santé publique (issu de la loi du 4 mars 2002) qui reprend la notion de raison proportionnée : « Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de soins ne doivent pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. »
Des grilles d'aide à la décision thérapeutique ont été élaborées, par type d'exposition (professionnelle, sexuelle, par partage de matériel d'injection et autres expositions) en prenant en compte l'ensemble des éléments précités (cf. ci-après).
Cependant, toutes les situations d'exposition auxquelles le médecin est susceptible d'être confronté dans sa pratique ne peuvent être intégrées dans ces grilles (ex : agressions par seringues, projection cutanéo-muqueuse de VIH en culture).
Dans ces grilles d'aide à la décision thérapeutique, il est mentionné que le traitement est recommandé ou qu'un avis spécialisé est nécessaire. Dans le second cas, la décision thérapeutique ne doit en effet pas être systématique. En effet, le traitement ne devrait être considéré que si le spécialiste considère que certains facteurs sont susceptibles d'accroître le risque de contamination (tels qu'une muqueuse altérée, une charge plasmatique élevée...).
Dans ces situations particulières, la prise en charge devra être déterminée par le médecin, aidé dans sa décision par un médecin référent. A ce titre, l'importance de la mise en place d'une permanence téléphonique, telle que mentionnée précédemment, est rappelée.
L'agression sexuelle a été jugée comme une situation délicate dont la prise en charge est particulière. Il a été considéré que, compte tenu de la nature possiblement traumatique du rapport et la notion d'une appartenance de l'agresseur à un groupe de prévalence de l'infection à VIH potentiellement élevée (5 % environ selon les données recueillies auprès de différents services d'urgences médico-judiciaires), cette situation devrait conduire à une décision thérapeutique, sauf si le statut sérologique de l'agresseur est négatif, et à une prise en charge psychologique.
De façon plus générale, il est important de souligner que toute personne ayant été exposée à un risque de contamination du VIH, quel que soit le niveau de risque déterminé, doit être prise en charge avec un dépistage initial en l'orientant vers une filière de soins capable d'assurer un suivi clinique et sérologique. Par ailleurs, cette personne doit recevoir un conseil sur son comportement face au risque de contamination, afin de prévenir une nouvelle prise de risque. Ce conseil doit être donné sans considérations d'ordre moral. Cette démarche de soins, prise en charge globale du patient et du risque, est le garant de la qualité du dispositif et de sa cohérence.
L'information est un élément central dans la relation de confiance entre le médecin et le patient, et contribue à la participation active de ce dernier aux soins. L'information orale est primordiale, elle peut être adaptée au cas de chaque personne (cf. Recommandations ANAES, 2000). De plus, afin d'aider le prescripteur et le sujet exposé qui se trouvent réunis dans un contrat de surveillance ou de soins, il est important de prévoir une fiche d'information (telle qu'elle a été élaborée en 1998 : « vous venez de consulter un médecin à la suite d'une situation à risque pour la transmission du VIH » qui devrait être remise au sujet exposé qu'il y ait ou non une prescription associée.
Il est recommandé au prescripteur de mentionner dans le dossier médical qu'il a informé le sujet exposé et, si tel est bien le cas, qu'il a remis la fiche et en a expliqué le contenu. Il est également recommandé de mentionner les éléments de la discussion entourant la décision de traitement ou de non-traitement.
STATUT VIH DE LA SOURCE | ||
Positif Probabilité de transmission par acte (PTA) |
Inconnu | |
Piqûre avec aiguille après geste en IV ou IA | PTA : 0,18 % - 0,45 % (1) traitement recommandé | Traitement recommandé si sujet source UDIV ou ayant des pratiques sexuelles homosexuelles, bisexuelles ou à risques ou appartenant ou vivant dans une communauté (pays) où l'épidémie est généralisée* |
Autres expositions percutanées : - piqûre avec aiguille à suture ou après geste en IM ou SC ; - coupure par bistouri |
PTA : 0,18 % - 0,45 % (1), traitement recommandé | Traitement non recommandé** |
Expositions cutanéo-muqueuses : contact d'une quantité importante de sang sur muqueuse ou peau lésée | PTA : 0.009-0,19 % (1), traitement recommandé si durée d'exposition prolongée (> 15 minutes) | Traitement non recommandé** |
Autres cas : morsures, griffures, contacts sanguin sur peau intacte, contact de quelques gouttes de sans sur muqueuse ou peau lésée, contact avec un autre liquide biologique (exemples : salive, urine,...) | Traitement non recommandé** | Traitement non recommandé** |
(1) Evans BG et al. 1999.
*Pays dans lesquels la prévalence de l'infection est régulièrement supérieure à 1 % chez les femmes enceintes ; pays d'Afrique sub-saharienne, certains pays d'Asie du Sud-Est et du Sud, certains pays d'Amérique latine et centrale.
**La balance bénéfice risque n'est pas en faveur de la mise en route d'un traitement prophylactique, sauf dans des situations particulières qui sont à évaluer après consultation d'un avis spécialisé. Par ailleurs, il est recommandé que le sujet exposé soit pris en charge avec un dépistage initial et orienté pour un suivi clinique et sérologique, et, dans un souci pédagogique, de lui fournir un conseil sur son comportement face au risque d'infection à VIH.
(rapports non protégés ou avec rupture de préservatif)
STATUT VIH DE LA SOURCE | ||
Positif Probabilité de transmission du VIH par acte sexuel (PTAS) |
Inconnu | |
Rapport anal | PTAS : - réceptif : 0,3-3,0 % (1, 2) ; - insertif : 0,01-0,18 % (2) |
Traitement recommandé. Traitement recommandé si sujet source UDIV ou ayant des pratiques sexuelles homosexuelles, bisexuelles ou à risques ou appartenant ou vivant dans une communauté (pays) où l'épidémie est généralisée* |
Rapport vaginal | PTAS : - réceptif : 0,05-0,15 % (3) ; - insertif : 0,03-0,09 % (3) |
Traitement recommandé. Traitement recommandé si sujet source UDIV ou ayant des pratiques sexuelles homosexuelles, bisexuelles ou à risques ou appartenant ou vivant dans une communauté (pays) où l'épidémie est généralisées* |
Rapport vaginal | PTAS : - réceptif : 0,05-0,15 % (3) ; - insertif : 0,03-0,09 % (3) |
Traitement recommandé Traitement recommandé si sujet source UDIV ou ayant des pratiques sexuelles homosexuelles, bisexuelles ou à risques ou appartenant ou vivant dans une communauté (pays) où l'épidémie est généralisées* |
Rapport oral | PTAS : non qualifié. Traitement à évaluer au cas par cas*** |
Traitement à évaluer au cas par cas*** |
(1) Evans BG et al. 1999.
(2) Vittinghoff e et al. 1998.
(3) Downs A et al 1996.
*Pays dans lesquels la prévalence de l'infection est régulièrement supérieure à 1 % chez les femmes enceintes ; pays d'Afrique sub-saharienne, certains pays d'Asie du Sud-Est et du Sud, certains pays d'Amérique latine et centrale.
**La balance bénéfice risque n'est pas en faveur de la mise en route d'un traitement prophylactique, sauf dans des situations particulières qui sont à évaluer après consultation d'un avis spécialisé. Par ailleurs, il est recommandé que le sujet exposé soit pris en charge avec un dépistage initial et orienté pour un suivi clinique et sérologique, et, dans un souci pédagogique, de lui fournir un conseil sur son comportement face au risque d'infection à VIH.
***La consultation d'un avis spécialisé est particulièrement recommandée (risque accru notamment en cas de présence de sperme).
STATUT VIH DE LA SOURCE | ||
Positif Probabilité de transmission sur VIH (PT) |
Inconnu | |
Partage de seringues/aiguilles | PT : 0,67 % (1). Traitement recommandé | Traitement recommandé |
Partage du reste du matériel | PT : non qualifié. Traitement recommandé |
(1) Kaplan EH et al. 1992.
**La balance bénéfice risque n'est pas en faveur de la mise en route d'un traitement prophylactique, sauf dans des situations particulières qui sont à évaluer après consultation d'un avis spécialisé. Par ailleurs, il est recommandé que le sujet exposé soit pris en charge avec un dépistage initial et orienté pour un suivi clinique et sérologique, et, dans un souci pédagogique, de lui fournir un conseil sur son comportement face au risque d'infection à VIH.
STATUT VIH DE LA SOURCE | ||
Positif Probabilité de transmission du VIH (PT) |
Inconnu | |
Piqûre avec seringue abandonnée | Traitement non recommandée** | |
Contact d'une qualité importante de sang sur muqueuse ou peau lésée | PT : 0.006-0,19 % (1), traitement recommandé si durée d'exposition prolongée (> 15 minutes) | Traitement non recommandée** |
Autres cas : morsures, griffures, contacts sanguin sur peau intacte, contact de quelques gouttes de sans sur muqueuse ou peau lésée, contact avec un autre liquide biologique (exemples : salives, urines,...) | Traitement non recommandé** | Traitement non recommandé** |
(1) Evans BG et al. 1999.
** La balance bénéfice risque n'est pas en faveur de la mise en route d'un traitement prophylactique, sauf dans des situations particulières qui sont à évaluer après consultation d'un avis spécialisé. Par ailleurs, il est recommandé que le sujet exposé soit pris en charge avec un dépistage initial et orienté pour un suivi clinique et sérologique, et, dans un souci pédagogique, de lui fournir un conseil sur son comportement face au risque d'infection à VIH.
PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE
Le spécialiste du traitement antirétroviral reste le meilleur garant d'une prescription rationnelle et la mieux tolérée.
Si l'analyse de l'exposition par l'urgentiste conduit à une mise sous traitement, sa prescription devra être limitée à une courte durée (3 à 4 jours), pour permettre une réévaluation des modalités de traitement, en dehors du contexte de l'urgence, par un médecin référent.
Deux principales situations sont à distinguer dans la détermination des modalités thérapeutiques :
- la personne source est séropositive pour le VIH et son traitement antirétroviral est connu : dans ce cas le traitement de la personne exposée au risque de contamination par le VIH sera adapté au traitement de la personne source dans la mesure du possible, en tenant compte du profil de tolérance et des alternatives thérapeutiques possibles (interactions médicamenteuses, traitement du sujet source contenant de l'abacavir, un analogue non nucléosidique, de l'indinavir, l'association stavudine/didanosine). En cas de difficulté à l'adaptation du traitement, un avis spécialisé est recommandé ;
- dans tous les autres cas (personne source non connue, pas d'information sur le traitement de la personne source...) : le traitement à mettre en oeuvre aux urgences peut être un traitement standardisé qui pourra être disponible dans les services d'urgences sous forme de trousses prêtes à être délivrées.
1. La personne source est séropositive pour le VIH et son traitement antirétroviral (ou historique thérapeutique) est connu :
Différentes situations peuvent être rencontrées :
- la personne source est séropositive pour le VIH et sous traitement antirétroviral :
lorsque la personne source est séropositive sous traitement, mais que la charge virale reste détectable, il est nécessaire de prendre en compte l'historique du traitement du patient. Un avis spécialisé est particulièrement recommandé pour adapter le traitement de la personne exposée en fonction de l'historique des traitements de la personne source ;
enfin, il est nécessaire de rappeler que chez les personnes séropositives dont la charge virale est indétectable, le risque de contamination sexuelle est probablement diminué mais ne peut être exclu. L'avis spécialisé est particulièrement recommandé. En son absence, il est proposé d'instituer le même traitement que la personne source ;
- la personne source est séropositive pour le VIH et en interruption thérapeutique :
Le risque de contamination est majeur car la réplication du virus au-delà de la 2e semaine d'interruption est intense. Si la charge virale de la personne source était indétectable sous traitement, il est proposé d'instituer chez le sujet exposé le traitement pris par le patient avant l'interruption dans la mesure du possible, en tenant compte du profil de tolérance et des alternatives thérapeutiques possibles. En cas de difficulté à l'adaptation du traitement (interactions médicamenteuses, traitement du sujet source contenant de l'abacavir, un analogue non nucléosidique, de l'indinavir, l'association stavudine/didanosine) la demande d'un avis spécialisé est recommandé.
Si la charge virale de la personne source était détectable avant interruption du traitement, un avis spécialisé est nécessaire en particulier pour adapter le traitement de la personne exposée en fonction de l'historique des traitements de la personne source.
Il est nécessaire d'insister sur la nécessité formelle d'avoir des rapports protégés pendant cette période d'interruption de traitement.
2. Autres cas :
Un traitement standardisé peut être proposé et doit être accessible dans l'urgence.
Il est recommandé que les services de pharmacie de chaque établissement de santé possédant un service susceptible de prendre en charge un accident d'exposition au VIH élaborent et mettent à disposition de ces services des « trousses d'urgence », composées du traitement antirétroviral post-exposition standardisé pour une durée de 3 ou 4 jours ainsi que d'une fiche d'information à remettre au sujet. La composition de ce traitement antirétroviral prophylactique standardisé devrait être décidée par la Commission du médicament en fonction des présentes recommandations et de l'avis du CISIH dont dépend l'hôpital.
Un certain nombre de recommandations thérapeutiques peuvent être faites en tenant compte des points suivants :
En raison des effets secondaires graves, les médicaments suivants ne doivent pas être utilisés en dehors d'un avis spécialisé :
- abacavir (réactions d'hypersensibilité) ;
- les non nucléosidiques [nevirapine (hépatites, syndrome de Lyell) et efavirenz (angoisses, hallucination)], dans l'attente de nouveaux composés mieux tolérés.
De même, compte tenu du profil de tolérance, le recours aux traitements suivants n'est pas recommandé par le groupe d'experts, en dehors d'un avis spécialisé :
- association stavudine et didanosine (acidoses lactiques) ;
- indinavir (coliques néphrétiques).
Sur la base du traitement actuellement recommandé en cas d'infection par le VIH, il est recommandé une trithérapie antirétrovirale en prophylaxie en cas d'accident d'exposition au VIH.
Concernant la nature des constituants de cette trithérapie, il a été considéré que :
- la rapidité avec laquelle le virus pénètre dans ses cibles primaires au site d'inoculation suggère que, dès les premières heures post-exposition, des génomes proviraux sont en situation de s'exprimer. Ceci justifie l'utilisation d'emblée d'une antiprotéase en association avec les inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI), de manière à limiter les infections secondaires et à permettre, en théorie, au système immunitaire d'être en position d'éradiquer efficacement les sanctuaires viraux résiduels ;
- dès lors, une trithérapie composée de deux analogues nucléosidiques et d'une antiprotéase est recommandée en première urgence en dehors d'un avis spécialisé :
Les associations d'analogues nucléosidiques à recommander au sein de cette trithérapie sont les suivantes :
zidovudine / didanosine ;
zidovudine / lamivudine ;
stavudine / lamivudine.
L'association fixe de zidovudine / lamivudine (COMBIVIR) est la plus simple à prendre (2 comprimés par jour), d'autant plus qu'il est important de rappeler que :
- la prise de didanosine suppose que le sujet soit à jeun et, chez le sujet de poids inférieur à 60 kg, une adaptation posologique est recommandée ;
- la nécessité d'adaptation au poids avec une limite à 60 kg est également valable pour la stavudine.
Parmi les inhibiteurs de protéase, de par leur profil de tolérance et leurs modalités d'administration, le nelfinavir (VIRACEPT, 5 gélules matin et 5 gélules le soir) ou l'association fixe de ritonavir/lopinavir (KALETRA, 3 gélules le matin et 3 gélules le soir) ont été considérées comme étant particulièrement adaptées.
A noter que si la première prise de traitement est faite au milieu de la nuit, elle sera suivie d'une prise le matin (la prise de nuit, même si elle est rapprochée de la suivante, jouera le rôle de dose de charge).
Par ailleurs, pour les femmes en âge de procréer, il est nécessaire d'envisager un test de grossesse.
Certaines situations sont importantes à prendre en compte dans la détermination de la prise en charge thérapeutique et nécessitent un avis spécialisé : grossesse, prise de traitements connus pour interagir avec les antirétroviraux (contraceptifs oraux, antimigraineux, antiépileptiques, antivitamines K, benzodiazépines, traitement de substitution...)
Le médecin référent dans le cadre de la réévaluation du traitement initié dans l'urgence, pourra être amené à alléger le schéma thérapeutique (passage à une bithérapie de nucléosides), voire à l'interrompre selon le contexte qui apparaîtrait rassurant au vu du résultat du test rapide de diagnostic obtenu à cette date ou d'une réévaluation de la situation à risque avec le sujet exposé avec le recul du temps.
Durée de traitement et surveillance :
Dès lors qu'un traitement a été entrepris et poursuivi au delà du 4e jour par le spécialiste, il doit être maintenu pendant quatre semaines.
Il est proposé une période de 4 mois pour le suivi sérologique du sujet exposé, avec une sérologie initiale réalisée dans les 8 premiers jours.
Délai entre la première prise de médicament et l'accident d'exposition au VIH :
Le rationnel des traitements antirétroviraux dans cette situation impose qu'ils soient proposés le plus tôt possible, de façon optimale dans les 4 premières heures et au plus tard dans les 48 heures post-exposition au VIH.
Etant donné la rapide intégration du virus dans la cellule hôte et les résultats expérimentaux de prophylaxie post-exposition au VIH, l'efficacité potentielle d'un traitement prophylactique diminue avec le délai d'initiation du traitement. Par conséquent, il est souligné qu'il ne doit pas être proposé ou imposé de délai d'attente jusqu'à 48 heures aux sujets exposés à un risque de contamination au VIH.
Au-delà de 48 heures, un avis spécialisé est particulièrement nécessaire pour juger de la prise en charge thérapeutique la plus appropriée.