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Circulaire DGS/SQ2/DH/DAS n° 99-84 du 11 février 1999 relative à la mise en place de protocoles de prise en charge de la douleur aigue par les équipes pluridisciplinaires médicales et soignantes des établissements de santé et institutions médico-sociales

Un plan triennal de lutte contre la douleur (1998-2000) a été mis en place. Ce plan s'appuie sur la réflexion engagée depuis plusieurs années par les pouvoirs publics en faveur d'une meilleure prise en charge globale du patient à toutes les étapes de l'histoire de sa maladie et vise à ce que la douleur ne soit plus vécue comme une fatalité.

Le programme de lutte contre la douleur s'articule autour de quatre axes principaux :
- la prise en compte de la demande de la personne malade ;
- le développement de la lutte contre la douleur dans les structures de santé et les réseaux de soins ;
- le développement de la formation et de l'information des professionnels de santé sur l'évaluation et le traitement de la douleur ;
- l'information du public.

Dans le cadre de ce plan, la présente instruction entend inciter les équipes médicales et soignantes à élaborer des protocoles autorisant les infirmiers à utiliser certains antalgiques, conformément aux dispositions de l'article 8 du décret n° 93-345 du 15 mars 1993.

L'élaboration et la mise en oeuvre de protocole de soins constituent une des réponses que doivent apporter les établissements de santé dans le cadre de leur projet d'établissement à l'obligation qui leur est faite par l'article L. 710-3-1 du code de la santé publique de prendre en charge la douleur.

La base juridique

Au terme de l'article 8 du décret n° 93-345 du 15 mars 1993 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmier, 'l'infirmier est habilité, après avoir reconnu une situation comme relevant de l'urgence, à mettre en oeuvre des protocoles de soins d'urgence préalablement écrits, datés et signés par le médecin responsable. Dans ce cas, l'infirmier applique les actes conservatoires nécessaires jusqu'à l'intervention d'un médecin. Ces actes doivent obligatoirement faire l'objet, de sa part et dès que possible, d'un compte rendu écrit, daté, signé et remis au médecin. Lorsque la situation d'urgence s'impose à lui, l'infirmier décide des gestes à pratiquer en attendant que puisse intervenir un médecin. Il prend toutes mesures en son pouvoir afin de diriger le patient vers la structure de soins la plus appropriée à son état'.

Sur cette base, des protocoles de soins visant à la prise en charge rapide des personnes malades qui présentent des douleurs aigues peuvent être élaborés.

Cet appel à la prise en charge optimale de la douleur aigue par les établissements de santé et les institutions médico-sociales nécessite l'engagement des professionnels dans une démarche institutionnelle. C'est à ce titre qu'un guide méthodologique sera prochainement diffusé.

Cadre général de mise en place d'un protocole de soins

La mise en place de protocoles de soins repose sur un travail d'équipe et doit s'intégrer dans l'organisation des soins.

Le personnel médical et paramédical doit être systématiquement en possession des échelles d'évaluation analogique (EVA) de mesure de l'intensité de la douleur qui se présentent sous la forme d'une réglette. Dans certains contextes cliniques où le rapport verbal n'est pas possible, l'évaluation peut se fonder sur les manifestations comportementales observables.

Les protocoles de soins sont :
- élaborés conjointement par les personnels médicaux et infirmiers impliqués dans leur mise en oeuvre, avec, si besoin, l'aide de médecins expérimentés dans la prise en charge de la douleur ;
- validés par l'ensemble de l'équipe médicale, par le pharmacien hospitalier ou pharmacien gérant de l'établissement et par le directeur du service des soins infirmiers ;
- obligatoirement datés et signés par le médecin responsable et le cadre de santé du service ;
- diffusés à l'ensemble du personnel médical et non médical du service, au directeur de l'établissement, au directeur du service des soins infirmiers et au pharmacien hospitalier ;
- remis à chaque nouveau personnel dès son arrivée ;
- accessibles en permanence dans le service :
- placés dans un classeur identifié ;
- et, selon l'organisation du service, affichés ;
- évalués et si nécessaire réajustés et, dans ce cas, redatés et signés ;
- revus obligatoirement au moins une fois par an ;
- revalidés systématiquement à chaque changement de l'un des signataires et rediffusés.

Les actions mises en oeuvre par l'infirmier pour la prise en charge de la douleur doivent faire l'objet de transmissions écrites.

Le protocole établi doit annoncer explicitement, d'une part, qu'il peut être mis en oeuvre à l'initiative de l'infirmier et, dans ce cas, il doit en préciser les critères sur lesquels l'infirmier va fonder sa décision d'intervention et, d'autre part, il doit indiquer précisément les conditions dans lesquelles cette initiative de l'infirmer est autorisée.

Deux situations peuvent être distinguées dans la prise en charge de la douleur aigue

1. Dans les services d'urgence, services hospitalier et préhospitalier (SAMU et SMUR), l'organisation doit avoir pour objectif la prise en charge des personnes malades dans les meilleurs délais pour des raisons évidentes de qualité et de sécurité des soins mais aussi pour éviter au patient des délais d'attente dans un tableau clinique de douleur.

Pour résoudre les situations d'attente de personnes malades qui peuvent se produire en service d'urgence, l'infirmier peut mettre en oeuvre un protocole après autorisation du médecin ayant identifié l'origine de la douleur présentée par le patient. Dans ces cas, l'infirmier doit avoir procédé à l'évaluation de l'intensité de la douleur présentée par la personne malade au moyen de l'échelle EVA dont il dispose et avoir transmis ce résultat au médecin. Le protocole mis en oeuvre doit répondre aux exigences du cadre général énoncé ci-dessus. L'infirmier doit obligatoirement informer le médecin de son initiative et la consigner dans le dossier de soins.

2. Dans les services d'hospitalisation, la prise en charge de la douleur doit être un des axes du projet de service. C'est dans ce contexte que les infirmiers peuvent, sur leur propre initiative, mettre en oeuvre le protocole à visée antalgique pour la prise en charge des douleurs aigues. Le protocole doit répondre aux exigences du cadre général. L'infirmier doit obligatoirement informer le médecin de son initiative et la consigner dans le dossier de soins.

3. Dans les institutions médico-sociales, la prise en charge de la douleur doit être assurée chaque fois que l'état de la personne le nécessite, en collaboration avec les équipes hospitalières locales les plus compétentes et expérimentées, par le biais de conventions formalisées avec l'établissement sanitaire concerné pour l'utilisation des protocoles à visée antalgique adaptés.

Un mode de prise en charge qui fait appel à un personnel formé et à la notion d'équipe pluriprofessionnelle

Je vous demande de veiller à ce que les personnels infirmiers et infirmiers spécialisés concernés par la présente instruction puissent bénéficier d'une formation préalable à la mise en application de protocoles de soins visant à la prise en charge de la douleur et qu'ils réactualisent régulièrement leurs connaissances, conformément aux dispositions de l'article 10 du décret n° 93-221 du 16 février 1993, notamment sur les médicaments à visée antalgique et sur l'utilisation des outils d'évaluation de la douleur ainsi que la prise en charge de la douleur.

Ces dispositions s'appliquent quel que soit le lieu où séjourne la personne malade, dès lors que l'organisation le permet.

Vous trouverez en annexe des définitions et une liste indicative de textes résultant de conférences de consensus ainsi que de recommandations de sociétés savantes en matière de prise en charge de la douleur. Ces textes seront prochainement disponibles sur le site Internet du ministère à l'adresse 'www.sante.gouv.fr.'.

Références :

Article L. 710-3-1 du code de la santé publique ;
Loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales ;
Décret n° 93-221 du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles des infirmiers et infirmières ;
Décret n° 93-345 du 15 mars 1993 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmier ;
Circulaire DGS/DH n° 98-586 du 22 septembre 1998 sur les mesures ministérielles prises dans le cadre du plan de lutte contre la douleur.

ANNEXES

ANNEXE I
DEFINITIONS DES DIFFERENTS TYPES DE DOULEURS

Selon la définition de l'International Association for the Study of Pain (IASP), la douleur est 'une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire existante ou potentielle ou décrite en terme d'une telle lésion'.

La douleur aigue est une sensation vive et cuisante, qui s'inscrit dans un tableau clinique d'évolution rapide. Les exemples de douleur aigues sont classiquement les douleurs postopératoires, les douleurs viscérales abdominales ou pelviennes qui peuvent être des urgences chirurgicales ou qui peuvent simuler des tableaux d'urgences opératoires, elles sont alors dites pseudo-chirurgicales, les douleurs de fractures, les douleurs du travail en obstétrique, et toutes les douleurs aigues secondaires à une pathologie médicale (neurologie, rhumatologie...).

La douleur chronique est une douleur rebelle aux traitements antalgiques usuels qui évolue depuis au moins six mois. Les douleurs chroniques se répartissent en plusieurs catégories qui sont les douleurs cancéreuses provoquées par le cancer lui-même, les douleurs secondaires au cancer, d'origine iatrogènes ou encore dues à une maladie concomitante, les douleurs liées à l'infection par le VIH, les douleurs chroniques non cancéreuses et les douleurs psychogènes.

PROTOCOLES DOULEUR AIGUE

LA DOULEUR AUX URGENCES

Conférence de consensus

Le traitement médicamenteux de la douleur de l'adulte dans un service d'accueil et d'urgence.

4/04/1993

3e conférence de consensus en médecine d'urgence de la Société franco-phone d'urgences médicales, Créteil

Recommandations

Guidelines for monitorings and management of pediatric patients during and after sedation and therapeutic procedures

1992 (juin, 89 : 1110-5)

Americain Academy of Pediatrics

LA DOULEUR POSTOPERATOIRE

1. Adulte

Conférence de consensus

Prise en charge de la douleur postopératoire chez l'adulte et l'enfant

12/12/1997

Société française d'anesthésie réanimation

Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé

Recommandations

Clinical practice guidelines. Acute pain management : operative or medical procedures and trauma.

U.S. Department of health and human services. Public health service. Agence for health care policy and research.

Douleurs postopératoires : Recommandations

1996

Délégation à l'évaluation médicale. Direction de la prospective et de l'information médicale. Assistance publique - Hôpitaux de Paris

Analgésie postopératoire - Recommandations

08/1997

Société francophone d'étude de la douleur

Analgésie postopératoire - Recommandations personnel infirmier

10/1997

Société francophone d'étude de la douleur

Définition, techniques anesthésiques et analgésiques chez le patient ambulatoire

10/1997

Société francophone d'étude de la douleur

2. Enfant

Conférence de consensus

Prise en charge de la douleur postopératoire chez l'adulte et l'enfant

12/12/1997

Société française d'anesthésie réanimation

Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé

Conférence d'expert

Anesthésie loco-régionale chez l'enfant

1997

Société française d'anesthésie réanimation

Recommandations

Quick reference guide for clinician : acute pain management in infants, children and adolescent. Operative health procedure.

U.S. Department of health and human services. Public health service. Agence for health care policy and research.

Le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, Direction générale de la santé, Bureau SQ 2, Direction des hôpitaux, Direction de l'action sociale.

Mesdames et Messieurs les directeurs des agences régionales de l'hospitalisation (pour attribution) ; Madame et Messieurs les préfets de région (direction régionale des affaires sanitaires et sociales) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (direction départementale des affaires sanitaires et sociales).

Texte non paru au Journal officiel.