La Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) a été saisie pour le compte d’un collectif, à la suite du refus opposé par le directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) à la demande de communication des informations relatives à la consommation du Mediator entre 1999 – année de création de la base SNIIRAM (système national d’information inter-régimes de l’assurance maladie) – et 2009 (correspondant à l’année d’arrêt de commercialisation du médicament). La CADA considère que l’extraction des informations sollicitées par le collectif ne nécessite pas un traitement des données source de la base excédant « un usage courant, dès lors que ces informations correspondent (…) à l’agrégation de données que le SNIIRAM a pour vocation de répertorier » et estime « dans ces conditions, que la demande du collectif ne peut être regardée comme portant sur la constitution d’un nouveau document ». Elle relève également que le collectif peut demander, sur le fondement du droit d’accès prévu par la loi du 17 juillet 1978, la communication des documents administratifs résultant de l’extraction des données de ce système d’information dans les limites et conditions prévues par celle-ci.Par ailleurs, elle indique que l’existence d’instructions judiciaires actuellement en cours devant le Tribunal de grande instance de Paris dans l’affaire dite du Mediator ne suffit pas à faire regarder la communication de ces informations comme étant de nature à porter atteinte au déroulement des procédures engagées devant les juridictions. Elle précise que « cette restriction au droit d’accès ne trouve (…) à s’appliquer que lorsque la communication des documents serait de nature à porter atteinte au déroulement de l’instruction, à retarder le jugement de l’affaire, à compliquer l’office du juge, ou à empiéter sur ses compétences et prérogatives, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ». La CADA considère également que « les données dont le collectif sollicite la communication, si elles revêtent un caractère médical, ne constituent pas un extrait des données source de la base mais (…) correspondent, après traitement automatisé d’usage courant de ces données, à des informations anonymes et globales, par année et par département, ne permettant pas, compte tenu de leur niveau d’agrégation, l’identification, même indirecte, des patients ou des médecins concernés ». Elle émet ainsi un avis favorable à la demande de communication de ces informations au collectif,« sous la forme demandée par celui-ci, qui n’est pas de nature à porter atteinte au secret médical ou au secret en matière commerciale et industrielle, ni à aucun autre intérêt protégé par le II de l’article 6 par la loi du 17 juillet 1978 ». |
Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS)
avis 20134348 - Séance du 21/11/2013
Monsieur X, Mesdames X et X et Messieurs X, X et X, pour le compte du collectif Initiative Transparence Santé, ont saisi la commission d’accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 16 octobre 2013, à la suite du refus opposé par le directeur de la caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés à leur demande de communication des informations relatives à la consommation du Mediator® entre 1999, année de création par la CNAMTS de la base SNIIRAM, et 2009, année d’arrêt de commercialisation du médicament, notamment :
1) le nombre de patients consommateurs du Mediator® ;
2) la durée moyenne de traitement ;
3) le taux de prescriptions hors AMM ;
4) le nombre de boîtes remboursées et non remboursées ;
5) les cinq principales catégories de médecins initiateurs du traitement ainsi que, pour chaque catégorie, le nombre total de praticiens ;
6) le nombre de médecins responsables de la moitié des prescriptions rapporté au nombre total de médecins prescripteurs ;
7) le montant remboursé aux patients.
La commission rappelle que la base de données SNIIRAM (système national d’information inter-régimes de l’assurance maladie) a été instituée par l’article L. 161-28-1 du code de la sécurité sociale pour, notamment, contribuer à la connaissance des dépenses de l’ensemble des régimes d’assurance-maladie et assurer la transmission aux professionnels de santé d’informations relatives à leur activité, à leurs recettes et à leurs prescriptions. Un arrêté de la ministre des affaires sociales et de la santé du 19 juillet 2013, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), a précisé les conditions d’application de la loi en détaillant notamment les informations devant être recueillies dans la base de données et en fixant de manière limitative les personnes autorisées à la consulter et les motifs pour lesquels une consultation est possible.
En réponse à la demande qui lui a été adressée, la CNAMTS a indiqué à la commission qu’elle estimait que la demande de communication présentée par le collectif « Initiative Transparence Santé » ne portait pas sur des documents administratifs existants mais concernait des informations, non immédiatement disponibles sous la forme souhaitée, dont la communication supposerait de sa part un traitement, par requêtes multiples, des données sources de la base.
La commission rappelle toutefois que sont regardés comme des documents administratifs existants, les informations qui sont contenues dans des fichiers informatiques et peuvent en être extraites par un traitement automatisé d’usage courant. Il n’en va autrement que lorsque les informations sollicitées doivent, pour être extraites d’un fichier informatique, faire l’objet de requêtes informatiques complexes ou d’une succession de requêtes particulières qui diffèrent de l’usage courant pour lequel ce fichier a été créé (conseil n° 20133264 du 10 octobre 2013).
En l’espèce, il n’est pas apparu à la commission que l’extraction des informations sollicitées par le collectif nécessiterait un traitement des données source de la base qui excéderait un usage courant, dès lors que ces informations correspondent, non à des données spécifiques n’existant pas en tant que telles dans la base, mais à l’agrégation de données que le SNIIRAM a pour vocation de répertorier conformément à ce que prévoit l’arrêté du 19 juillet 2013, relatif à sa mise en œuvre. Elle estime, dans ces conditions, que la demande du collectif ne peut être regardée comme portant sur la constitution d’un nouveau document.
La commission considère également que si le collectif demandeur ne fait pas partie des personnes spécialement habilitées à consulter le SNIIRAM, en vertu de l’arrêté du 19 juillet 2013 précité, les dispositions de cet arrêté ne font toutefois pas obstacle à ce que le collectif puisse, conformément aux dispositions de l’article 37 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, demander, sur le fondement du droit d’accès prévu par la loi du 17 juillet 1978, la communication des documents administratifs résultant de l’extraction des données de ce système d’information dans les limites et conditions prévues par cette dernière loi.
Par ailleurs, si pour s’opposer à la communication des informations demandées, le CNAMTS fait valoir que des instructions judiciaires sont actuellement en cours devant le Tribunal de grande instance de Paris dans l’affaire dite du Mediator, la commission estime que cette circonstance ne suffit pas à faire regarder la communication de ces informations comme étant de nature à porter atteinte au déroulement des procédures engagées devant les juridictions au sens du f) du 2° du I de l’article 6 de la loi du 17 juillet 1978. Cette restriction au droit d’accès ne trouve en effet à s’appliquer que lorsque la communication des documents serait de nature à porter atteinte au déroulement de l’instruction, à retarder le jugement de l’affaire, à compliquer l’office du juge, ou à empiéter sur ses compétences et prérogatives, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
La commission relève enfin que les données dont le collectif sollicite la communication, si elles revêtent un caractère médical, ne constituent pas un extrait des données source de la base mais, ainsi qu’il a été dit précédemment, correspondent, après traitement automatisé d’usage courant de ces données, à des informations anonymes et globales, par année et par département, ne permettant pas, compte tenu de leur niveau d’agrégation, l’identification, même indirecte, des patients ou des médecins concernés.
Elle estime, dans ces conditions, que la communication de ces informations au collectif, sous la forme demandée par celui-ci, n’est pas de nature à porter atteinte au secret médical ou au secret en matière commerciale et industrielle, ni à aucun autre intérêt protégé par le II de l’article 6 par la loi du 17 juillet 1978.
Elle émet donc un avis favorable à la demande.