Le 22 août 2022, le Conseil constitutionnel a été saisi par le Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) s’agissant du troisième alinéa de l’article L.1111-11 du code de la santé publique (CSP) qui prévoit que « les directives anticipées s’imposent au médecin pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement, sauf en cas d'urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation et lorsque les directives anticipées apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale ».
Les requérantes et l’association Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés reprochaient à ces dispositions de permettre à un médecin d’écarter les directives anticipées par lesquelles un patient aurait exprimé sa volonté que soient poursuivis des traitements de maintien en vie. En effet, elles faisaient valoir qu’ « en permettant au médecin de prendre une telle décision lorsque les directives lui apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale, ces dispositions ne seraient pas entourées de garanties suffisantes dès lors que ces termes seraient imprécis et confèreraient au médecin une marge d'appréciation trop importante, alors qu'il prend sa décision seul et sans être soumis à un délai de réflexion préalable ». Il en résulterait par conséquent « une méconnaissance du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, dont découlerait le droit au respect de la vie humaine, ainsi que de la liberté personnelle et de la liberté de conscience ».
En premier lieu, le Conseil constitutionnel relève qu’en permettant au médecin d’écarter les directives anticipées, le législateur a estimé que ces dernières ne pouvaient s’imposer en toutes circonstances dans la mesure où au moment de leur rédaction, la personne ne se trouve pas encore confrontée à la situation particulière de fin de vie. De plus, le Conseil constitutionnel rappelle qu’il « ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, de substituer son appréciation à celle du législateur sur les conditions dans lesquelles un médecin peut écarter les directives anticipées d'un patient en fin de vie hors d'état d'exprimer sa volonté dès lors que ces conditions ne sont pas manifestement inappropriées à l'objectif poursuivi ».
En second lieu, il rappelle que les dispositions contestées ne permettent d’écarter les directives anticipées que dans le cas où elles lui apparaissent « inappropriées ou non conformes à la situation médicale » du patient et que par conséquent, ces dispositions ne sont ni ambiguës, ni imprécises.
En troisième lieu, il rappelle que la décision d’écarter les directives anticipées ne peut être prise qu’à l’issue d’une procédure collégiale destinée à l’éclairer. Cette décision est inscrite au dossier médical et portée à la connaissance de la personne de confiance désignée par le patient où à défaut, de la famille ou des proches.
Pour finir, le Conseil constitutionnel rappelle que la décision du médecin de limiter ou d’arrêter un traitement est soumise au contrôle du juge administratif qui pourra éventuellement la suspendre.
Par conséquent, le Conseil constitutionnel estime que les dispositions attaquées ne portent atteinte à aucun droit ou liberté garanti par la Constitution et doivent par conséquent être déclarées conformes à cette dernière.