Un praticien hospitalier titulaire a été affecté le 1er décembre 1993 par un arrêté du ministre chargé de la santé, dans un laboratoire d’un centre hospitalier universitaire. Un accord local prévoyant sa mise à disposition dans un autre laboratoire du CHU avait néanmoins été signé entre ce praticien hospitalier, le Directeur général de l’établissement de santé et deux chefs de services. A la suite de dix années d’exercice au sein de ce laboratoire, le directeur de l’établissement a mis fin à cette mise à disposition et l’a réintégré dans le laboratoire d’origine. Le praticien hospitalier contestait cette décision en faisant valoir qu’elle était illégale en raison de l’accord local. Le tribunal administratif de Toulouse puis le Conseil d’Etat, en appel, ont considéré cet accord local illégal et sans effet. La procédure de nomination en vigueur à l’époque des faits indiquait que « les nominations sont prononcés par arrêté du ministre chargé de la santé parmi les praticiens qui ont fait acte de candidature aux postes vacants, après avis de la commission statutaire nationale ». Il est rappelé par cet arrêt que l’affectation d’un praticien hospitalier, sur un poste et au sein d’un établissement doit se faire dans le cadre statutaire.
N° 319062
Inédit au recueil Lebon
8ème sous-section jugeant seule
M. Bachelier, président
M. Jean-Marc Anton, rapporteur
Mme Escaut Nathalie, rapporteur public
SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ, avocats
lecture du vendredi 14 janvier 2011
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu l'arrêt n° 07BX00880 du 17 juin 2008, enregistré le 1er août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, les conclusions autres qu'indemnitaires présentées à cette cour par Mme Ghislaine A, demeurant ... ;
Vu le pourvoi, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, le 20 avril 2007 et le mémoire enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 octobre 2008, présentés pour Mme A ; Mme A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0303336-0300554-0402629 du 7 février 2007 en tant que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, des décisions d'affectation du 3 février 2003 et du 29 juin 2004 du directeur général du centre hospitalier de Toulouse et, d'autre part, des décisions de ce même directeur du 21 février et du 22 juillet 2003 et de la décision implicite de rejet opposée à sa demande du 30 mai 2003 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes en ce qui concerne les décisions des 3 février 2003 et 29 juin 2004, celles des 21 février et 22 juillet 2003 et la décision implicite de rejet opposée à sa demande du 30 mai 2003 et d'enjoindre au centre hospitalier universitaire de Toulouse de régulariser sa situation en la nommant dans le service d'anatomie et de cytologie pathologiques dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous peine d'une astreinte de 250 euros par jour ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
Vu le décret n° 84-131 du 24 février 1984 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Marc Anton, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme A et de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du centre hospitalier universitaire de Toulouse,
- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme A et à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat du centre hospitalier universitaire de Toulouse ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A, titulaire du certificat d'études spécialisées d'anatomie et de cytologie pathologique humaine, a été affectée, après son admission au concours de praticien hospitalier en 1992, dans le laboratoire de biologie cellulaire et de cytologie du professeur D au centre hospitalier universitaire de Toulouse-Purpan par un arrêté ministériel du 1er décembre 1993 ; qu'en vertu d'un protocole d'accord signé par le directeur général du centre hospitalier universitaire, Mme A et les deux chefs des services concernés, elle a été affectée dans le laboratoire d'anatomie et cytologie pathologiques du professeur C où elle a exercé ses fonctions pendant dix ans, tout en demeurant administrativement maintenue dans les effectifs du laboratoire du professeur D ; que Mme A se pourvoit en cassation contre le jugement du 7 février 2007 par lequel le tribunal administratif de Toulouse, d'une part, a estimé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 3 février 2003 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire a mis fin à son affectation dans le laboratoire du professeur C et lui a enjoint de rejoindre le laboratoire du professeur B, successeur du professeur D, d'autre part, a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 29 juin 2004, par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire a confirmé son affectation au sein du laboratoire du professeur B et, enfin, a rejeté ses demandes d'annulation des décisions des 21 février et 22 juillet 2003 du directeur général du centre hospitalier universitaire, ainsi que de la décision implicite opposée à sa demande du 30 mai 2003, lui refusant la protection juridique prévue par les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Sur le jugement en tant qu'il est relatif aux décisions des 3 février et 29 juin 2003 :
Considérant que le tribunal administratif a relevé que si, par son ordonnance du 11 avril 2003, le juge des référés avait ordonné la suspension de la décision du 3 février 2003 mettant fin à l'affectation de Mme A dans le laboratoire du professeur C, cette ordonnance n'entraînait pas nécessairement l'affectation de Mme A dans ce service mais impliquait que le centre hospitalier réexaminât cette affectation en se fondant sur la prise en compte de l'intérêt du service et en écartant l'application d'actes dépourvus de valeur juridique tels que le protocole d'accord de 1993 ; qu'il a également relevé que le directeur du centre hospitalier avait accompagné sa décision du 29 juin 2004 d'une redéfinition des attributions du laboratoire du professeur B afin de permettre à Mme A de conserver une partie substantielle des compétences qu'elle avait acquises ; qu'en déduisant de ces faits, qu'il a souverainement appréciés, que le directeur du centre hospitalier avait respecté l'autorité qui s'attachait à l'ordonnance du 11 avril 2003, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit ni inexactement qualifié les faits de l'espèce ; qu'il n'a pas entaché son jugement de contradiction de motif en relevant, pour juger qu'il n'y avait pas méconnaissance de l'autorité attachée à l'ordonnance de référé, qu'il devait être tenu compte de l'intérêt du service et que le protocole de 1993 devait être écarté comme dépourvu de valeur juridique et en jugeant pour écarter comme inopérants les moyens autres que celui tiré de la méconnaissance de l'autorité attachée à cette ordonnance, que compte tenu des dispositions des articles 11, 12 et 14 du décret du 24 février 1984, Mme A ne pouvait qu'être affectée dans le laboratoire dans lequel elle avait été nommée en 1993 ;
Considérant qu'aux termes des dispositions, applicables au litige, de l'article 12 du décret du 24 février 1984 portant statut des praticiens hospitaliers : Peuvent faire acte de candidature aux postes vacants de praticien hospitalier : 1° Les praticiens hospitaliers candidats à la mutation, comptant au moins trois années de fonctions effectives dans un même service, sauf dérogation exceptionnelle accordée par le ministre chargé de la santé. Toutefois, ce temps de fonction n'est pas opposable aux praticiens en fonctions dans l'établissement où survient la vacance... ; qu'aux termes de l'article 13 du même décret : Les nominations sont prononcées par arrêté du ministre chargé de la santé parmi les praticiens qui ont fait acte de candidature aux postes vacants, après avis de la commission statutaire nationale ; que le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le changement d'affectation de Mme A ne pouvait intervenir que dans le cadre de ces dispositions et qu'en l'absence de nouvelle procédure de nomination, elle ne pouvait être légalement mise à disposition d'un autre laboratoire du centre hospitalier universitaire de Toulouse que celui où elle avait été affectée en 1993 ;
Sur le jugement en tant qu'il est relatif aux décisions des 21 février et 22 juillet 2003 et à la décision implicite de rejet opposée à la demande du 30 mai 2003 :
Considérant que s'il résulte de son article 2 que la loi du 13 juillet 1983 s'applique aux fonctionnaires civils des établissements mentionnés à l'article 2 du titre IV du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales, lesquels comprennent les établissements publics de santé, ce renvoi ne vise pas les médecins praticiens hospitaliers mentionnés à l'article L. 6152-1 du code de la santé publique, auxquels les dispositions de ce titre IV, issues de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires applicables à la fonction publique hospitalière, ne sont pas applicables en vertu des termes mêmes du dernier alinéa de l'article 2 de cette loi,; que, par suite, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que Mme A ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ; qu'après avoir relevé par une argumentation souveraine non arguée de dénaturation que les agissements du professeur C que dénonçait la requérante constituaient des mesures prises par ce dernier dans l'exercice de son pouvoir hiérarchique, le tribunal n'a pas inexactement qualifié ces faits en en déduisant qu'à supposer qu'en vertu d'un principe général du droit, tout agent public victime de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages doive être protégé par son employeur, ces actes ne constituaient pas de telles atteintes et n'a pas commis d'erreur de droit en rejetant les conclusions de Mme A tendant à l'annulation des décisions lui refusant cette protection ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de Mme A doit être rejeté, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire de Toulouse au titre de ces mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme A est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire de Toulouse au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Ghislaine A et au centre hospitalier universitaire de Toulouse.