Mme B, âgée de 21 ans, a été victime d’une chute sur le dos à la suite de laquelle des examens ont permis de diagnostiquer une discopathie dégénérative L5 - S1 avec petite hernie discale médiane sous-ligamentaire. Lors d’une consultation à l’hôpital neurologique X, dépendant de l’établissement hospitalier Y, la réalisation d’une arthrodèse L5 - S1 par voie antérieure a été proposée à Mme B qui a donné son consentement. L’équipe médicale de l’hôpital X a pratiqué, en lieu et place de l’opération initialement envisagée, une arthroplastie prothétique discale L5 – S1. Faisant valoir que ses douleurs s’étaient aggravées à la suite de cette intervention chirurgicale, Mme B a saisi le Tribunal administratif de Lyon en vue d’obtenir une condamnation de l’établissement hospitalier Y à lui verser la somme de 83 335 euros en réparation des préjudices subis.
Par jugement en date du 26 mars 2013, le Tribunal administratif de Lyon a accueilli la demande de Mme B et a condamné l’établissement hospitalier à lui verser la somme de 76 300 euros. L’établissement a interjeté appel de cette décision devant la Cour administrative d’appel de Lyon qui, par un arrêt du 6 novembre 2014, a ramené le montant de l’indemnité à la somme de 3 000 euros correspondant à son préjudice moral. La Cour administrative d’appel refuse de mettre à la charge de l’établissement la réparation des préjudices d’incapacité temporaire, du déficit fonctionnel et du préjudice esthétique, au motif que l’intervention à laquelle la patiente avait consenti aurait nécessairement entrainé des effets équivalents.
Mme B s’est pourvue en cassation et a demandé au Conseil d’État d’annuler l’arrêt de la Cour administrative d’appel en tant qu’il rejette le surplus de ses conclusions indemnitaires.
Le Conseil d’Etat considère « qu’en dehors des cas d’urgence ou d’impossibilité de recueillir le consentement, la réalisation d’une intervention à laquelle le patient n’a pas consenti oblige l’établissement responsable à réparer tant le préjudice moral subi de ce fait par l’intéressé que, le cas échéant, toute conséquence dommageable de l’intervention. »
Il en déduit que, dans la mesure où les chirurgiens ont pratiqué une intervention substantiellement différente de celle à laquelle Mme B avait consenti, et que cette intervention s’est révélée n’avoir aucun effet bénéfique sur la patiente, celle-ci est en droit d’obtenir la réparation par l’établissement hospitalier de l’ensemble des préjudices résultant de l’intervention. Le Conseil d’Etat précise à ce titre que « la circonstance que les troubles dont la requérante demandait réparation n’excédaient pas ceux qu’aurait nécessairement entrainés l’intervention pour laquelle le consentement avait été recueilli, ne dispensait pas l’établissement d’en assurer la réparation ». Dès lors, l’établissement est tenu de réparer l’incapacité temporaire, le déficit fonctionnel et le préjudice esthétique subis par Mme B du fait de l’intervention.
En outre, le Conseil d’État considère que « si l’intervention pratiquée inutilement avait rendu impossible la réalisation ultérieure d’une autre intervention en vue de remédier aux troubles de l’intéressée, l’obligation de réparation s’étendait aux préjudices résultant de la perte définitive de toute chance d’amélioration et de la conscience de cette situation ». Les troubles psychiatriques endurées par Mme B liés à sa conscience du caractère définitif des douleurs lui ouvrent dès lors un droit à réparation par l’établissement.