Une association a demandé au Conseil d’Etat d’annuler le décret n° 2016-94 du 1er février 2016 portant application des dispositions de la loi du 27 septembre 2013 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, notamment son article 4.
Le Conseil d’Etat rappelle le contexte particulier dans lequel ce décret a été édicté. « A la suite de l'abrogation, par la loi du 27 septembre 2013, de l'article L. 3222-3 du code de la santé publique prévoyant la possibilité de prendre en charge les personnes faisant l'objet de soins psychiatriques dans une unité pour malades difficiles, l'article 4 du décret du 1er février 2016 […] a modifié les articles R. 3222-1 et suivants du même code, relatifs à ces unités ».
Il décide d’une part que par ce décret, le pouvoir réglementaire n’a pas adopté des règles relatives aux garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques, relevant de la seule compétence du législateur.
A son sens, ses dispositions « ne modifient pas le régime juridique de privation de liberté auquel sont soumises les personnes prises en charge dans une telle unité, qui reste défini par les dispositions applicables à l'ensemble des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques sans leur consentement sous la forme d'une hospitalisation complète ». Elles sont également « sans incidence sur la procédure au terme de laquelle le préfet […] maintient l'hospitalisation complète, décide d'une prise en charge sous une autre forme ou ordonne la levée de la mesure de soins sans consentement, s'agissant des personnes admises en soins psychiatriques sur décision du préfet, ou bien maintient l'hospitalisation complète ou ordonne la levée de la mesure, s'agissant des personnes détenues atteintes de troubles mentaux ». De surcroit, elles n’ont pas non plus d’incidence « sur le régime applicable aux personnes admises en soins psychiatriques en cas de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. Enfin, si l'admission dans une unité pour malades difficiles est susceptible d'éloigner le patient de sa famille, les dispositions attaquées sont, par elles-mêmes, dépourvues d'incidence sur le droit au respect de la vie privée et le droit de mener une vie familiale normale ».
Il décide d’autre part que le décret ne fait « en rien obstacle à la saisine du juge des libertés et de la détention prévue par les articles L. 3211-12 ou L. 3211-12-1 du code de la santé publique et au respect de la procédure applicable devant lui ». Par ailleurs, « en prévoyant l'existence d'une commission du suivi médical, qui peut, d'office ou sur demande notamment du patient ou de l'un de ses proches, le cas échéant assisté ou représenté par un avocat en vertu de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1971, saisir le préfet du département d'implantation de l'unité pour malades difficiles afin qu'il prononce la sortie du patient de cette unité, le décret attaqué n'a exclu, contrairement à ce que soutient l'association requérante, ni la possibilité d'exercer un recours devant le juge compétent, ni le droit à l'assistance d'un avocat lors de l'exercice de ce recours ».
La requête est rejetée.