Par cet arrêt, le Conseil d’Etat considère qu’une convention, réalisant la cession d’une entité économique dans le contexte des difficultés financières que connaissait la clinique privée, alors même qu’elle est conclue avec un établissement public de santé et qu’elle a pour effet de concourir à la rationalisation de l’offre locale de soins, n’a pas pour objet de faire participer la clinique au service public hospitalier. Par ailleurs, le Conseil d’Etat souligne également qu’elle ne comporte aucune clause exorbitante de droit commune à un centre hospitalier. Dès lors, il estime que la nature de cette convention est celle d’un contrat de droit privé et qu’elle ne relève pas d’une juridiction de droit public. La Haute juridiction administrative laisse ainsi le soin au Tribunal des conflits de décider sur la question de la juridiction compétente.
Conseil d'État
N° 307773
Inédit au recueil Lebon
1ère et 6ème sous-sections réunies
M. Daël, président
M. Alain Boulanger, rapporteur
M. Derepas Luc, commissaire du gouvernement
SCP WAQUET, FARGE, HAZAN ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, avocats
lecture du mardi 21 juillet 2009
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juillet et 4 octobre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU, représenté par son directeur, dont le siège est 1, quai Georges Lefèvre B.P. 405 à Château-Gontier (53204) ; le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 30 mars 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, à la demande de M. Michel A, d'une part, a annulé le jugement du 4 juillet 2006 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. A tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU à lui verser une indemnité de 499 136,22 euros représentative d'un préavis de rupture de contrat de 2 ans et, d'autre part, l'a condamné à verser à M. A la somme de 80 000 euros ;
2°) de mettre à la charge de M. A la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié déterminant les formes de procédure du Tribunal des conflits ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alain Boulanger, chargé des fonctions de Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. A ;
Considérant qu'aux termes de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849, reproduit à l'article R. 771-1 du code de justice administrative : Lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif a, par une décision qui n'est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l'ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l'autre ordre, saisie du même litige, si elle estime que ledit litige ressortit à l'ordre de juridiction primitivement saisi, doit, par un jugement motivé qui n'est susceptible d'aucun recours même en cassation, renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu'à la décision de ce tribunal ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le litige opposant le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU à M. A porte exclusivement sur les droits et obligations nés des stipulations de la convention du 30 septembre 1997 par laquelle la société anonyme Clinique de l'Espérance , gestionnaire d'un établissement de santé à Château-Gontier, a vendu l'ensemble de ses biens au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU ; que cette convention, réalisant la cession d'une entité économique dans le contexte des difficultés financières que connaissait la clinique, alors même qu'elle est conclue avec un établissement public de santé et qu'elle a pour effet de concourir à la rationalisation de l'offre locale de soins, n'a pas pour objet de faire participer la clinique au service public hospitalier ; qu'en outre, elle ne comporte aucune clause exorbitante du droit commun ; que, dès lors, la nature de cette convention est celle d'un contrat de droit privé ; qu'ainsi, il apparaît qu'il n'appartient pas à la juridiction administrative de connaître de ce litige ;
Considérant toutefois que la cour d'appel d'Angers a, par un arrêt du 21 octobre 2003 passé en force de chose jugée, décliné la compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire ; qu'il convient, dans ces conditions et par application de l'article 34 du décret du 26 octobre 1849, de renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et de surseoir à toute procédure jusqu'à la décision de ce tribunal ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'affaire est renvoyée au Tribunal des conflits.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur le pourvoi présenté pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU jusqu'à ce que le Tribunal des conflits ait tranché la question de savoir quel est l'ordre de juridiction compétent pour statuer sur ce litige.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DU HAUT-ANJOU et à M. Michel A.
Copie en sera adressée pour information à la ministre de la santé et des sports.