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Conseil d'Etat, 26 février 2003, Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (indemnité de sujétion spéciale - indemnité dite des 13 heures)

Voir AJFP du 1er juillet 2003, pages 28-29

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 7 août et 7 décembre 2000, présentés pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, dont le siège est situé 3, avenue Victoria, à Paris RP (75100) ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 25 mai 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé, d'une part, le jugement du tribunal administratif de Paris du 17 mai 1999 et, d'autre part, la décision par laquelle le directeur général de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS a supprimé le versement à Mme X... de l'indemnité dite des "treize heures supplémentaires fixes" pendant la durée de ses congés maladie ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
2°) statuant au fond, de rejeter la demande de Mme X... ;
3°) de condamner Mme X... à lui payer la somme de 12 000 F en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Vu le décret n° 89-613 du 1er septembre 1989 portant statuts particuliers des personnels médico-techniques de la fonction publique hospitalière ;
Vu le décret n° 90-693 du 1er août 1990 relatif à l'attribution d'une indemnité de sujétion spéciale aux personnels de la fonction publique hospitalière ;
Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Wauquiez-Motte, Auditeur ;
- les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat de L'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS et de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme X..., technicienne de laboratoire à l'hôpital Pitié-Salpétrière à Paris, a pris des congés de maladie de 1991 à 1994 et que le directeur général de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS lui a supprimé le versement de l'indemnité dite des "treize heures supplémentaires fixes" pendant la durée de ces congés ; que le recours gracieux par lequel Mme X... a demandé le 10 juillet 1995 à l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS que lui soit versé le montant de cette indemnité a fait l'objet d'une décision implicite de rejet ; que l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS se pourvoit en cassation contre l'arrêt en date du 25 mai 2000 de la cour administrative d'appel de Paris en tant que, par celui-ci, la cour a annulé, d'une part, le jugement du tribunal administratif de Paris rejetant la demande présentée par Mme X..., et d'autre part, les décisions du directeur général de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS supprimant à l'intéressée le versement de l'indemnité litigieuse et rejetant son recours gracieux ;

Sur la légalité externe de l'arrêt attaqué :

Considérant, d'une part, que la cour, qui avait déclaré irrecevables, comme nouvelles en appel, les conclusions de Mme X... tendant à faire condamner l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS à lui verser le montant de l'indemnité en cause, n'était pas tenue de répondre au moyen de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS tiré de ce que ces conclusions étaient également irrecevables faute d'être assorties de précisions chiffrées ;

Considérant, d'autre part, que la cour, qui a mentionné les périodes de congé de maladie de Mme X..., a interprété, sans la dénaturer, la requête dont elle était saisie par celle-ci comme tendant à l'annulation de la décision lui ayant refusé le versement de l'indemnité litigieuse pour l'ensemble de ces périodes de congé et a ainsi implicitement rejeté le moyen de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS tiré de ce que la requérante n'aurait demandé que le reversement de la retenue opérée sur son traitement du mois d'avril 1991 ;

Sur la légalité interne de l'arrêt attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 1 du décret du 1er août 1990 : "Les fonctionnaires et stagiaires des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, à l'exception des personnels de direction et des pharmaciens, et les personnels contractuels exerçant des fonctions similaires à celles des personnels titulaires précités bénéficient d'une indemnité de sujétion spéciale" ; qu'aux termes de l'article 3 de ce décret : "L'indemnité de sujétion spéciale (à) suit le sort du traitement et ne peut être réduite que dans la proportion où le traitement lui-même est réduit" ; et qu'aux termes de l'article 6 du même décret : "Sont abrogées toutes dispositions antérieures ayant le même objet que le présent décret" ;

Considérant que l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS soutient, en premier lieu, que la cour administrative d'appel aurait commis une erreur de droit en reconnaissant à Mme X... le droit au bénéfice de l'indemnité de sujétion spéciale, dès lors que celle-ci ne se serait pas substituée à l'indemnité dite des "treize heures supplémentaires fixes", prévue par les arrêtés du 13 août 1946 et du 26 février 1951 et applicable aux personnels relevant de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris ; que, cependant, il résulte des dispositions mêmes du décret du 1er août 1990 que celui-ci, en instituant une indemnité de sujétion spéciale en faveur des personnels de la fonction publique hospitalière et en abrogeant les dispositions antérieures qui avaient le même objet, a entendu, notamment, remplacer l'indemnité dite des "treize heures supplémentaires fixes" par la nouvelle indemnité qu'il créait et dont l'objet était identique ; que, dès lors, le moyen susanalysé doit être écarté ;

Considérant que l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS soutient toutefois, en deuxième lieu, que Mme X... n'était pas, en tout état de cause, en droit de bénéficier durant ses congés de maladie de l'indemnité de sujétion spéciale prévue par les dispositions précitées, dès lors qu'elle aurait relevé d'un statut spécial fixé par le directeur général de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris, en application de l'article 103 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et que l'indemnité de sujétion spéciale prévue par le décret du 1er août 1990 ne pouvait bénéficier aux personnels de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS faute d'avoir été instaurée selon la procédure prévue à l'article 103 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 13 juillet 1983 : "Les corps et cadres d'emplois de fonctionnaires sont régis par les statuts particuliers à caractère national ( ...)" ; qu'aux termes des premier et deuxième alinéas de l'article 4 de la loi du 9 janvier 1986 : "Les fonctionnaires appartiennent à des corps. Toutefois, certains emplois hospitaliers, eu égard aux fonctions exercées et au niveau de recrutement, peuvent ne pas être organisés en corps" ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 103 de la même loi : "Par dérogation à l'article 13 du titre Ier du statut général, les corps et emplois de fonctionnaires de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris peuvent être régis par des statuts particuliers à cette administration. Ces statuts sont fixés par décret en Conseil d'Etat sur avis du directeur général de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris, après consultation du conseil administratif supérieur. Le directeur général de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris peut formuler des propositions. Ces statuts ne peuvent apporter de dérogations au présent titre que pour maintenir les dispositions statutaires et de rémunération qui existaient à la date de publication de la présente loi ou pour les adapter aux conditions d'organisation spécifiques à cette administration" ; qu'aux termes des deuxième et troisième aliénas de ce même article 103 : "Jusqu'à l'adoption des statuts particuliers relatifs aux personnels relevant de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris, occupant les emplois mentionnés au deuxième alinéa de l'article 4, les règles concernant ces personnels sont fixées par le directeur général après avis du conseil administratif supérieur. Le régime indemnitaire propre aux fonctionnaires mentionnés à l'alinéa ci-dessus est fixé par décret pris sur avis du directeur général de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris, après consultation du conseil administratif supérieur ; le directeur général de l'administration générale de l'Assistance publique à Paris peut formuler des propositions" ;

Considérant que le décret du 1er septembre 1989, portant statuts particuliers des personnels médico-techniques de la fonction publique hospitalière, a fixé notamment le statut particulier de corps des techniciens de laboratoire ;

Considérant que la cour administrative d'appel, après avoir constaté que Mme X... relevait du corps des techniciens de laboratoire régi par un statut particulier à caractère national, en a déduit, sans commettre d'erreur de droit, que ne lui étaient pas applicables les dispositions précitées de l'article 103 de la loi du 9 janvier 1986, lesquelles sont relatives aux statuts particuliers à l'administration générale de l'Assistance publique à Paris pouvant régir des corps et emplois de fonctionnaires de cette administration ainsi qu'aux règles et au régime indemnitaire concernant les personnels relevant de cette administration et occupant des emplois hospitaliers qui ne sont pas organisés en corps ;

Considérant, enfin, qu'en déduisant des dispositions précitées de l'article 3 du décret du 1er août 1990, selon lesquelles l'indemnité de sujétion spéciale suit le sort du traitement et ne peut être réduite que dans la proportion où le traitement lui-même est réduit, que cette indemnité était due pendant les périodes de congé de maladie, la cour a fait une exacte application de ces dispositions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS à payer à Mme X... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :
Article 1er : La requête de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS est rejetée.
Article 2 : L'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS est condamnée à verser à Mme X... une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, à Mme Isabelle X... et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.