REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 juillet et 18 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Patrick X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 10 avril 2003 par laquelle la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins a rejeté sa demande tendant à ce qu'elle constate que la sanction d'interdiction d'exercer la médecine pendant un mois qui lui a été infligée par la décision du 25 mars 2000 de la même section est amnistiée par la loi du 6 août 2002 ;
2°) de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins d'Ille-et-Vilaine la somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 ;
Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié ;
Vu le code de déontologie médicale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bernard Pignerol, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. X et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du conseil national de l'ordre des médecins,
- les conclusions de Mme Anne-Françoise Roul, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'en application de l'article 11 de la loi du 6 août 2002, sont notamment amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des faits passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles, à l'exception de ceux ayant le caractère de manquement à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs ; qu'aux termes de l'article 11 de cette même loi : Les contestations relatives au bénéfice de l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles définitives sont portées devant l'autorité ou la juridiction qui a rendu la décision. L'intéressé peut saisir cette autorité ou juridiction en vue de faire constater que le bénéfice de l'amnistie lui est effectivement acquis... ;
Considérant que, par une décision devenue définitive du 25 mai 2000, la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins a infligé à M. X la sanction d'interdiction d'exercer la médecine pendant un mois ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X a porté des appréciations mettant en cause la pratique professionnelle et la réputation d'un confrère, dans un rapport d'expertise établi, à la demande d'une patiente, dans le cadre d'une procédure judiciaire ; qu'eu égard notamment à la circonstance que l'activité de M. X consiste essentiellement en la production de tels rapports d'expertise, la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins, en estimant que les faits reprochés à M. X constituaient un manquement à l'honneur professionnel et se trouvaient, par suite, exclus du bénéfice de l'amnistie, a fait une inexacte application des dispositions de la loi du 6 août 2002 ; que M. X est dès lors fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-1 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les faits ayant donné lieu à la sanction infligée à M. X par la décision du 25 mai 2000 n'avaient pas le caractère d'un manquement à l'honneur professionnel ; qu'ils sont donc amnistiés par l'effet des dispositions de la loi du 6 août 2002 ; que, dès lors, le requérant est fondé à demander la constatation du bénéfice de cette amnistie ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du conseil départemental de l'ordre des médecins d'Ille-et-Vilaine, la somme demandée par le requérant, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Décide :
Article 1er : La décision du 10 avril 2003 de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins est annulée.
Article 2 : Il est constaté l'amnistie des faits qui ont donné lieu à la sanction infligée à M. X par la décision de la section disciplinaire du conseil national de l'ordre des médecins du 25 mai 2000.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Patrick X, au conseil national de l'ordre des médecins, au conseil départemental de l'ordre des médecins d'Ille-et-Vilaine et au ministre de la santé et de la protection sociale.