Un patient, atteint d'une plaie crâno-faciale à la suite d'une agression par arme à feu, a été admis dans le service de neurochirurgie. Désorienté, celui-ci a chuté depuis la fenêtre de sa chambre située au deuxième étage du bâtiment. Le tribunal administratif et la Cour administrative d’appel de Paris ont rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à lui verser une indemnité en réparation des conséquences dommageables de cet accident. En effet, la CAA en s'appuyant sur le rapport d'expertise estimait que "compte tenu de l'état du patient, ces mesures étaient les mesures habituelles de vigilance dans un service de neurochirurgie" et que le patient n'apportait pas la preuve que "le dispositif de sécurité bloquant l'ouverture des fenêtres de sa chambre aurait été défectueux, ni que ces fenêtres auraient été laissées grandes ouvertes, ni qu'il serait tombé de la fenêtre d'une autre chambre que la sienne". Le Conseil d’Etat en annulant l'arrêt de la CAA a considéré « qu'un tel accident impliquait nécessairement, soit que le dispositif de sécurité destiné à empêcher l'ouverture de la fenêtre n'avait pas été enclenché, soit qu'il n'avait pas correctement fonctionné ; que l'une ou l'autre de ces circonstances révélait, eu égard aux précautions qu'imposaient l'état et le comportement de l'intéressé dans les jours ayant précédé l'accident, une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service ». Dans ces conditions, le requérant est fondé à soutenir que l’hôpital a commis une faute. |
Conseil d'État
N° 357046
lecture du mercredi 30 avril 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 février et 22 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X..., demeurant... ; M. X...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n° 10PA03343 du 6 octobre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre l'article 1er du jugement n° 0509288/6-3 du 21 janvier 2010 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à l'indemniser des préjudices résultant de l'accident dont il a été victime le 20 juin 2001 au cours de son hospitalisation à l'hôpital de La Pitié-Salpêtrière ;
2°) de mettre à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris le versement à son avocat, …, d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Gautier-Melleray, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à …, avocat de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.X…, qui était atteint d'une plaie crâno-faciale à la suite d'une agression par arme à feu et avait été admis le 5 mai 2001 dans le service de neurochirurgie du groupe hospitalier de La Pitié Salpêtrière à Paris, a été retrouvé, le 20 juin suivant, vers 8 heures 30, gisant, à la suite d'une chute, sous les fenêtres de sa chambre située au deuxième étage ; que, par un jugement du 21 janvier 2010, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à lui verser une indemnité en réparation des conséquences dommageables de cet accident ; que M. X...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 octobre 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel contre ce jugement ;
2. Considérant que l'arrêt attaqué relève qu'il ressort du rapport d'expertise que M. X...avait présenté, dans les jours précédant l'accident, un état d'agitation et de désorientation qui, associé à sa cécité, à sa surdité et aux autres séquelles de sa blessure, l'exposait particulièrement à un risque de chute ; qu'il écarte néanmoins l'existence d'une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service au motif que le requérant " n'établit ni que le dispositif de sécurité bloquant l'ouverture des fenêtres de sa chambre aurait été défectueux, ni que ces fenêtres auraient été laissées grandes ouvertes, ni qu'il serait tombé de la fenêtre d'une autre chambre que la sienne " ;
3. Considérant que la cour administrative d'appel n'a pas mis en doute le fait que M. X...était tombé par une fenêtre de sa chambre et n'aurait d'ailleurs pu le faire sans dénaturer les pièces du dossier ; qu'un tel accident impliquait nécessairement soit que le dispositif de sécurité destiné à empêcher l'ouverture de la fenêtre n'avait pas été enclenché, soit qu'il n'avait pas correctement fonctionné ; que l'une ou l'autre de ces circonstances révélait, eu égard aux précautions qu'imposaient l'état et le comportement de l'intéressé dans les jours ayant précédé l'accident, une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service ; que, dans ces conditions, le requérant est fondé à soutenir qu'en écartant l'existence d'une telle faute la cour a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis et à demander, pour ce motif, l'annulation de son arrêt ;
4. Considérant que M. X...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que …, avocat de M.X..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris la somme de 3 000 euros à verser à cette SCP ;
D E C I D E :
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 6 octobre 2011 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris versera à …, avocat de M. X..., la somme de 3 000 euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.