La commune A., à laquelle l'Etat a accordé pour une durée de douze ans la concession de plages naturelles sur son territoire avec la possibilité d'octroyer des sous-concessions, a lancé un appel à candidatures pour l'attribution de l'exploitation des lots numéros 6 et 7 de la plage dite du Casino. Le conseil municipal a confié, au terme de la procédure, l'exploitation de ces deux lots respectivement à la SARL X. et à l'EURL Y., avec lesquelles deux conventions de sous-concession de plage ont été conclues. La société Z., candidate évincée pour les lots numéros 6 et 7, a saisi le tribunal administratif de Toulon de demandes tendant, d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération attribuant les lots numéros 6 et 7 et de la décision rejetant ses offres, d'autre part, à l'annulation de la convention de sous-concession du lot n° 7. Par jugement du 17 décembre 2009, le tribunal administratif de Toulon a, d'une part, rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre la convention de sous-concession du lot n° 7 et, d'autre part, statuant sur la seule décision rejetant les offres de la société Z., a annulé celle-ci et enjoint à la commune de saisir le juge du contrat afin qu'il prononce la résolution des conventions litigieuses. Par un arrêt du 4 mars 2013, la Cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, confirmé l'annulation de la décision rejetant les offres de la société Z. dans le cadre de la procédure d'attribution des lots en cause et, d'autre part, enjoint à la commune A. de résilier les conventions de sous-concession litigieuses avec un effet différé au 1er novembre 2013. La SARL X. et l'EURL Y. se sont pourvues en cassation. L’arrêt est annulé. Le Conseil d’Etat a rappelé qu’une illégalité du contrat entache la délibération qui désigne son attributaire. En revanche, elle n'a aucune incidence sur la régularité de la décision de rejet des offres écartées. En l’espèce, l'illégalité de la durée du contrat peut seulement atteindre le contrat lui-même et la décision de l'attribuer à un candidat. Elle ne peut asseoir l'illégalité du rejet des offres des autres candidats. |
Conseil d’Etat, 4 juin 2014, n° 368254
Vu 1°, sous le n° 368254, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 mai et 25 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société X., dont le siège est …, représentée par son gérant en exercice ; la société X. demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt nos 10MA00503-10MA00649-10MA00747 du 4 mars 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, sur les requêtes de l'EURL Y., de la SARL X. et de la commune A. dirigées contre le jugement nos 0801998-0801944 du 17 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulon a, à la demande de la société Z., annulé la décision rejetant son offre dans le cadre de la procédure d'attribution des lots nos 6 et 7 de la délégation de la plage du Casino de la commune A. et enjoint à la commune A. de tirer les conséquences de cette annulation en saisissant, si elle ne pouvait obtenir de son cocontractant la résolution du contrat passé à la suite de cette décision, le juge du contrat d'une demande de résolution, a, en premier lieu, enjoint à la commune A. de résilier la convention de sous-concession conclue avec la société X. relative à l'exploitation du lot n° 6 de la plage du Casino et celle conclue avec l'EURL Y. relative à l'exploitation du lot n° 7 de la plage du Casino, avec effet différé au 1er novembre 2013, en deuxième lieu, réformé, en conséquence, l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 décembre 2009 et, en dernier lieu, rejeté le surplus des conclusions des requérants ;
2°) statuant au fond, de faire droit à son appel ;
Vu 2°, sous le n° 368427, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 mai et 12 août 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'EURL Y., dont le siège est … ; l'EURL Y. demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt nos 10MA00503-10MA00649-10MA00747 du 4 mars 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, sur les requêtes de l'EURL Y., de la SARL X. et de la commune A. dirigées contre le jugement nos 0801998-0801944 du 17 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulon a, sur la demande de la société Z., annulé la décision rejetant son offre dans le cadre de la procédure d'attribution des lots nos 6 et 7 de la délégation de la plage du Casino de la commune A. et enjoint à la commune A. de tirer les conséquences de cette annulation en saisissant, si elle ne pouvait obtenir de son cocontractant la résolution du contrat passé à la suite de cette décision, le juge du contrat d'une demande de résolution, a, en premier lieu, enjoint à la commune A. de résilier la convention de sous-concession conclue avec la société X. relative à l'exploitation du lot n° 6 de la plage du Casino et celle conclue avec l'EURL Y. relative à l'exploitation du lot n° 7 de la plage du Casino, avec effet différé au 1er novembre 2013, en deuxième lieu, réformé, en conséquence, l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 décembre 2009 et, en dernier lieu, rejeté le surplus des conclusions des requérants ;
2°) de mettre à la charge de la société Z. une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le décret n° 2006-608 du 26 mai 2006 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Marion, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la société X., à Me Le Prado, avocat de l'EURL Y., et à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat de la commune A. ;
1. Considérant que les pourvois de la SARL X. et de l'EURL Y. sont dirigés contre le même arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune A., à laquelle l'Etat a accordé pour une durée de douze ans la concession de plages naturelles sur son territoire avec la possibilité d'octroyer des sous-concessions, a lancé un appel à candidatures pour l'attribution de l'exploitation des lots nos 6 et 7 de la plage dite du Casino ; que le conseil municipal a confié, au terme de la procédure, l'exploitation de ces deux lots respectivement à la SARL X. et à l'EURL Y., avec lesquelles deux conventions de sous-concession de plage ont été conclues ; que la société Z., candidate évincée pour les lots nos 6 et 7, a saisi le tribunal administratif de Toulon de demandes tendant, d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération attribuant les lots nos 6 et 7 et de la décision rejetant ses offres, d'autre part, à l'annulation de la convention de sous-concession du lot n° 7 ; que par jugement du 17 décembre 2009, le tribunal administratif de Toulon a, d'une part, rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre la convention de sous-concession du lot n° 7 et, d'autre part, statuant sur la seule décision rejetant les offres de la société Z., a annulé celle-ci et enjoint à la commune de saisir le juge du contrat afin qu'il prononce la résolution des conventions litigieuses ; que la société Z. n'a pas formé appel contre ce jugement ; que la SARL X. et l'EURL Y. se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 4 mars 2013 de la cour administrative d'appel de Marseille ayant, d'une part, confirmé l'annulation de la décision rejetant les offres de la société Z. dans le cadre de la procédure d'attribution des lots en cause et, d'autre part, enjoint à la commune A. de résilier les conventions de sous-concession litigieuses avec un effet différé au 1er novembre 2013 ;
3. Considérant que les sociétés X. et Y. ne sont recevables à contester l'arrêt attaqué qu'en tant que celui-ci porte sur des décisions relatives au lot dont elles étaient attributaires ; que, par suite, les conclusions du pourvoi de la société X., titulaire du lot n° 6, relatives à des décisions portant sur le lot n° 7, d'une part, et les conclusions du pourvoi de la société Y., titulaire du lot n° 7, relatives à des décisions portant sur le lot n° 6, d'autre part, sont irrecevables ;
4. Considérant que la cour administrative d'appel de Marseille a estimé que la commune A., en attribuant l'exploitation des lots nos 6 et 7 sur la plage dite du Casino pour une durée de douze ans aux sociétés X. et Y., avait méconnu les dispositions de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales limitant la durée des délégations de service public et en a déduit que la décision rejetant les offres de la société Z., candidate à l'attribution de ces deux lots, était par voie de conséquence entachée d'illégalité ; qu'en statuant ainsi la cour a commis une erreur de droit dès lors que le moyen tiré de l'illégalité de la délégation de service public à raison de sa durée excessive, s'il était opérant à l'encontre de la délibération attribuant la délégation aux sociétés X. et Y., était, en revanche, inopérant à l'encontre de la décision contestée par laquelle le maire de la commune A. avait rejeté les offres de la société Z. relatives aux lots nos 6 et 7, seule en litige devant la cour ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens des pourvois, il y a lieu d'annuler l'arrêt attaqué ;
5. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la société Z. la somme demandée par l'EURL Y. ;
D E C I D E :
Article 1er : Les conclusions du pourvoi de la société X., dirigées contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il porte sur le lot n° 7, d'une part, et celles de la société Y., dirigées contre l'arrêt en tant qu'il porte sur le lot n° 6, d'autre part, sont rejetées.
Article 2 : L'arrêt du 4 mars 2013 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 3 : Les conclusions présentées par l'EURL Y. au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 5 : La présente décision sera notifiée aux sociétés X., Y., Z. et à la commune A.