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Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 13 février 2024, n°460187 (Dossier médical, communication, délai raisonnable, préjudice moral, présomption, responsabilité de l'hôpital)

Le Conseil d’Etat s’est prononcé sur la demande de réparation du préjudice moral subit par les ayants droit d’une patiente décédée pour la communication tardive du centre hospitalo-universitaire (CHU) de Caen d’éléments du dossier médical permettant de connaître les causes de sa mort.

En l’espèce, la famille reprochait divers manquements dans la prise en charge de la patiente. En première instance, puis en appel, les juridictions ont reconnu ces manquements mais ont écarté les demandes d’indemnisation de l’époux qui invoquait un double préjudice lié au retard à mettre en place une assistance nutritionnelle pour la patiente et au délai particulièrement long pour communiquer certaines informations médicales.

C’est sur ces deux éléments que le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes considérant qu’elle avait commis une erreur de droit en n’établissant pas ces préjudices.

Après un rappel des dispositions relatives à la communication d’informations médicales aux ayants droit (articles L. 1110-4 et L. 1111-7, CSP), le juge a considéré qu’à travers ces dispositions « éclairées par les travaux parlementaires préparatoires à la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé dont elles sont issues », « l'absence de communication aux ayants droit des informations nécessaires pour éclairer les causes du décès comme le retard à les communiquer dans un délai raisonnable constituent des fautes et sont présumés entraîner, par leur nature même, un préjudice moral, sauf circonstances particulières en démontrant l'absence. ».

En l’espèce, la radiographie prise le jour du décès de la patiente ainsi que la feuille de dispensation de médications, demandés pour permettre de connaître les causes de son décès, ont été communiqués par le CHU plus de dix-huit mois après la demande initiale des ayants droit.

Statuant au fond sur ce point, le Conseil d’Etat a considéré qu’en l’absence de circonstances particulières, le CHU a commis une faute de nature à leur causer un préjudice moral en communiquant aux demandeurs les pièces nécessaires pour connaitre les causes de la mort près de dix-huit mois après leur demande. Le CHU a donc été condamné à verser aux ayants droit la somme de 2 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral.