En l’espèce, un patient atteint d’un mélanome lombaire gauche métastasé a fait l’objet de plusieurs opérations, de chimiothérapies et d’immunothérapies. En raison d’une récidive du mélanome, le patient a nécessité une radiothérapie qui a été à l’origine d’une dermo-hypodermite grave, infectieuse puis nécrosante, avec une perte de substance de la fesse et de la cuisse gauches, nécessitant de nombreuses greffes, les multiples hospitalisations ainsi qu’un lourd traitement antalgique. Faisant suite au changement de sa pompe intrathécale d’antalgiques, le patient a présenté un syndrome qui a causé une cécité corticale temporaire et laissé comme séquelles définitives une paralysie des muscles du pied ainsi que des troubles de la mémoire et de la concentration.
Dans le rapport d’expertise de la Commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux (CCI) saisie à cette occasion, les experts ont estimé que la radiothérapie était indiquée, mais que les doses délivrées, excessives comparativement à un traitement classique, avaient majoré le risque de radiolésions tardives et diminué les possibilités de restauration tissulaire.
Toutefois, la CCI a considéré que compte tenu de l’échec des deux premières lignes de traitement et de la gravité de la maladie, les praticiens avaient pu légitimement fixer le dosage de la radiothérapie en considération du risque d’échec du traitement, et que le choix thérapeutique, qui avait permis au patient de bénéficier d’une rémission, ne pouvait être considéré comme fautif.
La CCI a tout de même retenu un défaut d’information sur ce risque, générant un préjudice d’impréparation devant être assuré par l’assureur du centre hospitalier.
Le requérant a refusé la proposition d’indemnisation présentée par le centre hospitalier et a saisi le tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté sa demande d’indemnisation au motif que le centre hospitalier n’avait pas commis de faute. Il a interjeté appel devant la cour administrative d’appel de Bordeaux.
Dans un arrêt du 15 février 2024, la cour a rappelé que les experts de la CCI avaient considéré que les doses administrées, en comparaison aux doses habituelles de radiothérapie, s’écartaient des bonnes pratiques et devaient de ce fait être regardées comme fautives.
Cependant, la cour en vient à la conclusion suivante : « Toutefois, il appartient aux médecins d’apprécier l’utilité de s’écarter des bonnes pratiques pour donner au patient les meilleures chances de survie, et les experts n’ont pas suggéré que la rémission aurait pu être obtenue avec des doses moindres. Dans ces circonstances, c’est à bon droit que le tribunal a jugé qu’aucune faute ne pouvait être reprochée au centre hospitalier dans le choix du traitement ».