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Cour Administrative d'Appel de Nancy, 4 mars 2004, Marie-Laure H. (mise en disponibilité d'office - privation involontaire d'emploi - droit à l'allocation chômage)

[...] Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'un agent visé au 1° de l'article L. 351-12 du code du travail a droit aux allocations d'assurance chômage dès lors qu'apte au travail, il peut être regardé comme ayant été involontairement privé d'emploi et à la recherche d'un emploi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue d'une période de détachement, du 1er février 1988 au 31 janvier 1994, Mme X, sage-femme au CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE, a été placée en disponibilité d'office du 1er février au 30 octobre 1994 en raison de l'absence d'emploi vacant permettant sa réintégration ; qu'elle doit ainsi être regardée comme ayant été, durant cette période, non seulement involontairement privée d'emploi, mais aussi à la recherche d'un emploi, au sens de l'article L. 351-1 du code du travail ; que, dès lors, en se fondant, pour refuser de lui verser les allocations d'assurance chômage, sur le fait qu'elle n'avait pas la qualité de demandeur d'emploi, le directeur du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE a commis une erreur de droit ; [...]

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 19 janvier 1998 sous le n° 98NC00122, présentée pour Mme Marie-Laure X, demeurant ..., par la société civile professionnelle Petit et Boh-Petit, avocats au barreau de Metz, complétée par des mémoires enregistrés les 16 mars 1999, 23 septembre 1999, 15 mai 2000 et 7 octobre 2003 ;

Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 961826 du 18 novembre 1997 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de la décision du directeur du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE du 20 décembre 1995, lui refusant le bénéfice des allocations pour perte d'emploi ;
2°) d'enjoindre audit centre hospitalier, sous astreinte de 1 000 francs par jour de retard, de lui verser les allocations pour perte d'emploi dans un délai d'un mois ;
3°) de le condamner à lui verser 5 980 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient qu'ayant été placée en disponibilité d'office après avoir été en détachement, elle s'est trouvée involontairement privée d'emploi et que, dans l'attente d'une proposition de réintégration, elle n'avait pas l'obligation de s'inscrire à l'agence nationale pour l'emploi, une telle inscription étant incompatible avec sa qualité d'agent public ;

Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires, enregistrés les 16 avril 1998, 24 mars 2000 et 8 juin 2000, présentés par le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE, représenté par son directeur en exercice, qui conclut au rejet de requête ; il soutient qu'aucun des moyens de celle-ci n'est fondé ;
Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre de la Cour du 25 septembre 2003, fixant au 24 octobre 2003 la date de clôture de l'instruction ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 83-364 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
Vu le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 relatif à certaines positions des fonctionnaires hospitaliers ;
Vu l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs, ensemble le décret n° 2001-373 du 27 avril 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2004 :
- le rapport de M. CLOT, Président,
- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 351-12 du code du travail : Ont droit à l'allocation d'assurance dans les conditions prévues à l'article L. 351-3 : 1° Les agents non fonctionnaires de l'Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires de collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs (...) ; qu'aux termes de l'article L. 351-3 du même code : L'allocation d'assurance est attribuée aux travailleurs mentionnés à l'article L. 351-1 qui satisfont à des conditions d'âge et d'activité antérieure (...) ; qu'aux termes de l'article L. 351-1 susmentionné : En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les travailleurs involontairement privés d'emploi, aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent chapitre ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'un agent visé au 1° de l'article L. 351-12 du code du travail a droit aux allocations d'assurance chômage dès lors qu'apte au travail, il peut être regardé comme ayant été involontairement privé d'emploi et à la recherche d'un emploi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue d'une période de détachement, du 1er février 1988 au 31 janvier 1994, Mme X, sage-femme au CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE, a été placée en disponibilité d'office du 1er février au 30 octobre 1994 en raison de l'absence d'emploi vacant permettant sa réintégration ; qu'elle doit ainsi être regardée comme ayant été, durant cette période, non seulement involontairement privée d'emploi, mais aussi à la recherche d'un emploi, au sens de l'article L. 351-1 du code du travail ; que, dès lors, en se fondant, pour refuser de lui verser les allocations d'assurance chômage, sur le fait qu'elle n'avait pas la qualité de demandeur d'emploi, le directeur du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 20 décembre 1995 lui refusant le bénéfice des allocations d'assurance chômage au titre de la période du 1er février au 30 octobre 1994 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ;

Considérant que le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE, qui se borne à opposer à Mme X la circonstance qu'elle n'avait pas la qualité de demandeur d'emploi, ne conteste pas que l'intéressée remplissait l'ensemble des autres conditions requises pour bénéficier, au titre de la période du 1er février au 30 octobre 1994, des allocations d'assurance chômage ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre audit centre hospitalier de verser à l'intéressée ces allocations, dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions relatives aux frais exposés par Mme X à l'occasion du litige et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, reprenant celles de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de condamner le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE à payer à Mme X une somme de 800 euros au titre des frais exposés par elle à l'occasion du litige et non compris dans les dépens ;

Décide :
Article 1er : Le jugement du 18 novembre 1997 du Tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : La décision du directeur du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE du 20 décembre 1995 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE de verser à Mme Marie-Laure X, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, les allocations d'assurance chômage afférentes à la période du 1er février au 30 octobre 1994.
Article 4 : Le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE versera à Mme Marie-Laure X la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme Marie-Laure X est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-Laure X et au CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE METZ-THIONVILLE.