En l'espèce, Mme Y a été opérée le 8 avril 2003 au sein d'une clinique privée par un praticien de cet établissement ainsi que deux praticiens hospitaliers mis à la disposition de cette clinique par un CHU dans le cadre d'une convention de partenariat signée entre les deux établissements. A la suite de cette intervention, des complications sont apparues et Mme Y a dû subir une seconde intervention. Mme Y conservant des séquelles de ces interventions a recherché directement la responsabilité du CHU. Par un jugement en date du 2 juin 2010, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à sa demande.Le CHU mis en cause a donc fait appel de cette décision. La Cour administrative d'appel de Nantes annule ce jugement et considère que « ces deux praticiens hospitaliers avaient été mis à la disposition de la polyclinique dans le cadre d'une convention spécifique passée le 3 avril 2003 entre les deux établissements ; que le concours de ces deux praticiens, sans lien avec le fonctionnement du service public hospitalier, n'a pu avoir d'incidence sur la nature privée des relations contractuelles existant entre la patiente et son médecin, le docteur X, de telles relations relevant, en cas de litige, de la compétence des juridictions judicaires ; que si la convention précitée du 3 avril 2003 prévoyait, en son dernier article, que "leCHU s'engageait à assurer la couverture en responsabilité civile de cette intervention", elle ne pouvait être invoquée par Mme Y qui n'y avait pas été partie, et n'avait pas d'autre objet que de permettre à la clinique de mettre en jeu la responsabilité du CHU par la voie de l'action récursoire dans le cas où sa responsabilité viendrait à être engagée devant le juge judiciaire pour des fautes commises par les médecins provenant du secteur public ; qu'ainsi c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'alors même qu'elle n'était pas partie à la convention en cause Mme Y était fondée à rechercher elle-même et directement devant le juge administratif la responsabilité du CHU. » |
Cour Administrative d’Appel de Nantes
N° 10NT01684
Inédit au recueil Lebon
3ème Chambre
Mme PERROT, président
M. Olivier COIFFET, rapporteur
M. DEGOMMIER, rapporteur public
LE PRADO, avocat(s)
lecture du jeudi 8 mars 2012
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 30 juillet et 8 novembre 2010, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS, par Me Le Prado, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ; le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement n° 05-5079 du 2 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Nantes l’a condamné à verser, d’une part, à Mme X la somme de 18 386,95 euros en réparation des préjudices résultant pour elle de l’intervention subie le 8 avril 2003, d’autre part, les sommes de 119 532,94 euros et 966 euros à la caisse primaire d’assurance maladie de Loire Atlantique au titre des débours exposés au profit de Mme X et de l’indemnité forfaitaire de gestion ;
2°) de rejeter les demandes présentées par Mme X et la caisse primaire d’assurance maladie de Loire Atlantique, au besoin après avoir ordonné une nouvelle expertise ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 16 février 2012 :
- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;
- les observations de Me Orain, avocat de Mme X ;
Considérant que Mme X, alors âgée de 39 ans, a été opérée, le 8 avril 2003, d’un prolapsus génito-urinaire à la polyclinique de l’Atlantique, établissement privé d’hospitalisation ; que cette intervention, qui lui avait été proposée par le docteur Y, gynécologue qu’elle avait consulté le 20 mars 2003, a été réalisée par une équipe médicale composée de ce praticien, assisté du professeur A, chef du service de gynécologie obstétrique du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE (CHU) D’ANGERS et du docteur Z, praticien hospitalier dans le même service, tous deux ayant été mis à la disposition de la polyclinique de l’Atlantique par le CHU D’ANGERS ; qu’à la suite de cette intervention, conduite selon une technique récente d’hystéropexie par prothèse combinant la voie vaginale et la voie coelioscopique, Mme X a souffert d’inflammations et d’infections urinaires et que deux fistules vésico-vaginales ont été diagnostiquées ; que ces troubles ont nécessité une nouvelle intervention chirurgicale ; que Mme X, qui conserve des séquelles de ces interventions, a sollicité du président du tribunal de grande d’instance de Nantes la désignation d’un expert judiciaire ; que l’expert a déposé son rapport le 12 février 2005 ; que Mme X a recherché la responsabilité du CHU D’ANGERS devant le juge administratif et demandé sa condamnation à réparer les préjudices qu’elle estime avoir subis du fait de l’intervention chirurgicale qui s’est déroulée le 8 avril 2003 à la polyclinique de l’Atlantique ; que le CHU D’ANGERS relève appel du jugement du 2 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Nantes l’a condamné à verser, d’une part, à Mme X la somme de 18 386,95 euros en réparation des préjudices qu’elle a subis, d’autre part, les sommes de 119 532,94 euros et 966 euros à la caisse primaire d’assurance maladie de Loire Atlantique au titre des débours exposés au profit de Mme X et de l’indemnité forfaitaire de gestion ;
Sur la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS :
Considérant, ainsi qu’il a été rappelé ci-dessus, qu’après avoir consulté le 20 mars 2003 le docteur Y, gynécologue, Mme X a accepté l’intervention proposée par ce médecin au sein de la polyclinique de l’Atlantique, qui est un établissement privé ; que cette intervention a été réalisée par ce médecin, qui a pratiqué une coeliochirurgie avec pose de prothèses sous le contrôle et l’assistance du professeur A, chef du service de gynécologie obstétrique du CHU D’ANGERS, et du docteur Z ; que ces deux praticiens hospitaliers avaient été mis à la disposition de la polyclinique dans le cadre d’une convention spécifique passée le 3 avril 2003 entre les deux établissements ; que le concours de ces deux praticiens, sans lien avec le fonctionnement du service public hospitalier, n’a pu avoir d’incidence sur la nature privée des relations contractuelles existant entre la patiente et son médecin, le docteur Y, de telles relations relevant, en cas de litige, de la compétence des juridictions judiciaires ; que si la convention précitée du 3 avril 2003 prévoyait, en son dernier article, que “le CHU D’ANGERS (s’engageait) à assurer la couverture en responsabilité civile de cette intervention”, elle ne pouvait être invoquée par Mme X qui n’y avait pas été partie, et n’avait pas d’autre objet que de permettre à la clinique de mettre en jeu la responsabilité du CHU D’ANGERS par la voie de l’action récursoire dans le cas où sa responsabilité viendrait à être engagée devant le juge judiciaire pour des fautes commises par les médecins provenant du secteur public ; qu’ainsi c’est à tort que les premiers juges ont estimé qu’alors même qu’elle n’était pas partie à la convention en cause Mme X était fondée à rechercher elle-même et directement devant le juge administratif la responsabilité du CHU D’ANGERS ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le CHU D’ANGERS est fondé à demander l’annulation du jugement attaqué ; que les demandes présentées par Mme X et par la CPAM de Loire-Atlantique ne peuvent qu’être rejetées ; que les conclusions présentées en appel par cette caisse tendant à ce que la somme accordée par le tribunal au titre de l’allocation forfaitaire de gestion soit réévaluée doivent également être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge du CHU D’ANGERS le versement des sommes que Mme X et la CPAM de Loire-Atlantique demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 05-5079 du tribunal administratif de Nantes en date du 2 juin 2010 est annulé.
Article 2 : Les demandes présentées par Mme X et par la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique devant le tribunal administratif de Nantes ainsi que les conclusions présentées par elles en appel au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE D’ANGERS, à Mme Marie-Pierre X et à la caisse primaire d’assurances maladie de Loire-Atlantique.