REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2003, présentée pour Mme Ulla X, élisant domicile ..., par Me Tsouderos ; Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0004920 en date du 3 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à obtenir l'exécution du jugement n° 97-3848 rendu le 24 septembre 1999 par cette juridiction ;
2°) d'ordonner au centre hospitalier d'Orsay de communiquer, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours après la notification de l'arrêt, l'entier dossier médical qu'il détient sur Mme X accompagné d'un bordereau énumérant précisément les pièces détenues dans le dossier ;
3°) de condamner le centre hospitalier d'Orsay à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 septembre 2004 :
- le rapport de Mme Lecourbe, rapporteur ;
- les observations de Me Planchou, pour le centre hospitalier d'Orsay ;
- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme X relève appel du jugement en date du 3 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à obtenir l'exécution du jugement n° 97-3848 rendu le 24 septembre 1999 par cette juridiction ;
Considérant que par jugement en date du 24 septembre 1999, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision par laquelle le centre hospitalier d'Orsay a refusé de communiquer à Mme X son dossier médical ; qu'en exécution de ce jugement, le centre hospitalier a adressé le dossier médical au médecin traitant qu'elle avait désigné et qui le lui a remis en main propre ; que Mme X considérant que certains éléments de son dossier n'avaient pas été communiqués, a saisi le Tribunal administratif de Versailles à fin de faire exécuter complètement le jugement du 24 septembre 1999 ; qu'elle fait appel du jugement en date du 3 mars 2003 par lequel le tribunal a rejeté cette demande ;
Considérant qu'aux termes de l'article 6 bis de la loi du 17 juillet 1978 dans sa rédaction alors applicable : Les personnes qui le demandent ont droit à la communication... des documents de caractère nominatif les concernant...toutefois, les informations à caractère médical ne peuvent être communiquées à l'intéressé que par l'intermédiaire d'un médecin qu'il désigne à cet effet ;
Considérant que le dossier médical transmis par le centre hospitalier d'Orsay au médecin désigné par Mme X n'était constitué que d'un résumé, non signé et non daté, des éléments sémiologiques caractéristiques relevés par le praticien consulté régulièrement par l'intéressée entre 1989 et 1995 ; qu'il n'est pas contesté par l'hôpital que ce résumé a été établi a posteriori à partir des notes du médecin ; qu'ainsi, dès lors que lesdites notes n'ont pas été elles-mêmes transmises, Mme X est fondée à soutenir que le dossier médical communiqué était incomplet et que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a considéré, par le jugement attaqué, que le jugement du 24 septembre 1999 était exécuté et a rejeté la demande tendant à son exécution ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public... prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;
Considérant qu'eu égard aux motifs de la présente décision, l'exécution de celle-ci implique normalement d'enjoindre au centre hospitalier d'Orsay de communiquer à Mme X l'intégralité des pièces de son dossier médical constitué, ainsi que l'a indiqué l'hôpital, des notes manuscrites du médecin consultant ; que toutefois, il appartient au juge administratif, lorsqu'il est saisi sur le fondement des dispositions précitées, de conclusions tendant à ce que soit prescrite une mesure d'exécution dans un sens déterminé, de statuer sur ces conclusions en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.1111-7 du code de la santé publique issu de la loi nº 2002-303 du 4 mars 2002 : Toute personne a accès à l'ensemble des informations concernant sa santé détenues par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées et ont contribué à l'élaboration et au suivi du diagnostic et du traitement ou d'une action de prévention, ou ont fait l'objet d'échanges écrits entre professionnels de santé, notamment des résultats d'examen, comptes rendus de consultation, d'intervention, d'exploration ou d'hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en oeuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé, à l'exception des informations mentionnant qu'elles ont été recueillies auprès de tiers n'intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant un tel tiers. ; qu'aux termes de l'article R.1112-2 du même code : Un dossier médical est constitué pour chaque patient hospitalisé dans un établissement de santé public ou privé. Ce dossier contient au moins les éléments suivants, ainsi classés : 1º Les informations formalisées recueillies lors des consultations externes dispensées dans l'établissement, lors de l'accueil au service des urgences ou au moment de l'admission et au cours du séjour hospitalier, et notamment : a) La lettre du médecin qui est à l'origine de la consultation ou de l'admission ; b) Les motifs d'hospitalisation ; c) La recherche d'antécédents et de facteurs de risques ; d) Les conclusions de l'évaluation clinique initiale ; e) Le type de prise en charge prévu et les prescriptions effectuées à l'entrée ; f) La nature des soins dispensés et les prescriptions établies lors de la consultation externe ou du passage aux urgences ; g) Les informations relatives à la prise en charge en cours d'hospitalisation : état clinique, soins reçus, examens para-cliniques, notamment d'imagerie ; h) Les informations sur la démarche médicale, adoptée dans les conditions prévues à l'article L. 1111-4 ... ;
Considérant que les notes manuscrites du médecin traitant qui ont contribué à l'élaboration et au suivi du diagnostic et du traitement de l'intéressée au cours des années 1989 à 1995 et qui ont été conservées par l'hôpital font partie du dossier médical au sens des dispositions sus-rappelées du code de santé publique ; qu'il y a lieu d'enjoindre au centre hospitalier d'Orsay de communiquer à Mme X l'intégralité de son dossier médical dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de prononcer contre lui une astreinte de 100 euros par jour à compter de l'expiration de ce délai s'il ne s'est pas acquitté de cette obligation ;
Sur les conclusions de Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative de condamner le centre hospitalier d'Orsay à payer à Mme X la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle ;
Décide :
Article 1er : Le jugement n° 0004920 en date du 3 mars 2003 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au centre hospitalier d'Orsay de communiquer à Mme X l'intégralité de son dossier médical dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Une astreinte est prononcée à l'encontre du centre hospitalier d'Orsay s'il ne justifie pas avoir, dans le mois suivant la notification de la présente décision, exécuté de façon complète le jugement en date du 24 septembre 1999 du Tribunal administratif de Versailles. Le taux de cette astreinte est fixé à 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai d'un mois suivant la notification de la présente décision.
Article 4 : Le centre hospitalier d'Orsay versera à Mme X la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme X est rejeté.