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Cour de Cassation, 27 février 2013, n° 11-20405 (Hospitalisation sans consentement - Procédure de sortie immédiate - Délai de rendu d'ordonnance du Juge des libertés et de la détention - Absence de sanction)

M. X a fait l’objet d’une mesure d’hospitalisation d’office en exécution d’un arrêté préfectoral du 20 juin 1995, renouvelée par la suite.

Il a formulé une première demande de sortie immédiate, reçue le 21 juin 2010, et rejetée par le juge des libertés et de la détention le 12 juillet 2010.

M. X. a alors formé une demande de mainlevée de la mesure d’hospitalisation d’office, fondée sur sur l'inobservation du délai de 12 jours prévu par l'ancien article R. 3211-9 du code de la santé publique, qui précise que « l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, statuant sur une demande de sortie immédiate d'une personne hospitalisée sans son consentement, est rendue dans un délai de 12 jours à compter de l'enregistrement de la requête au greffe, ce délai étant porté à 25 jours si une expertise est ordonnée ». Cette demande a été rejetée, au motif que le respect de ce délai de 12 jours n’est assortie d’aucune sanction.

La Courde Cassation estime en revanche que « en statuant ainsi, alors qu'aucune expertise n'avait été ordonnée », le texte susvisé a été violé.

 

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 27 février 2013
N° de pourvoi: 11-20405

Publié au bulletin Cassation sans renvoi

M. Pluyette (conseiller doyen faisant fonction de président), président
Me Ricard, avocat(s)


REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article R. 3211-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2011-846 du 18 juillet 2011 ;

Attendu que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, statuant sur une demande de sortie immédiate d'une personne hospitalisée sans son consentement, est rendue dans un délai de 12 jours à compter de l'enregistrement de la requête au greffe, ce délai étant porté à 25 jours si une expertise est ordonnée ;

Attendu, selon les deux ordonnances attaquées rendues par le premier président d'une cour d'appel, statuant sur renvoi après cassation (1re Civ., 8 avril 2011, pourvoi n° 10-25. 354), que M. X. a fait l'objet d'une mesure d'hospitalisation d'office en exécution d'un arrêté préfectoral du 20 septembre 1995, ultérieurement renouvelé ; que sa demande de sortie immédiate, reçue le 21 juin 2010, a été rejetée par une décision d'un juge des libertés et de la détention du 12 juillet 2010, dont il a relevé appel ; que, par ordonnance du 13 mai 2011, le premier président a rejeté sa demande de mainlevée de la mesure fondée sur l'inobservation du délai de 12 jours prévu par l'article R. 3211-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2011-846 du 18 juillet 2011, et, avant dire droit, a ordonné une expertise psychiatrique en application de l'article L. 3213-8 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 ; qu'après dépôt du rapport de l'expert, la demande de sortie de M. X. a été rejetée par ordonnance du 27 mai 2011 ; que, le 21 octobre 2011, le Conseil constitutionnel a déclaré ce dernier article non conforme à la Constitution et a dit que cette abrogation était applicable à toutes les instances non définitivement jugées à la date de la publication de sa décision ;

Attendu que, pour maintenir la mesure d'hospitalisation sans consentement de M. X., la première ordonnance retient que le respect du délai de 12 jours n'est pas assorti d'une sanction ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'aucune expertise n'avait été ordonnée, le premier président a violé le texte susvisé ;

Et attendu que la cassation de l'ordonnance du 13 mai 2011 entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de celle du 27 mai 2011 ;

Vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;

Et attendu qu'il a été mis fin à l'hospitalisation d'office de M. X., il ne reste plus rien à juger ;

 

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 13 mai 2011, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel d'Angers ;

CONSTATE L'ANNULATION de l'ordonnance du 27 mai 2011 ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des ordonnances cassée et annulée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille treize.

 

 

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour M. X..

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée du 13 mai 2011 d'avoir rejeté la demande de mainlevée de la mesure pour non respect du délai de 12 jours prévu par l'article R. 3211-9 du code de la santé publique.

AUX MOTIFS QUE :

*sur le non-respect du délai prévu par l'article R. 3211-9 du code de la santé publique

M. X. soulève à titre liminaire le non-respect des dispositions de l'article R. 3211-9 du code de la santé publique reprochant au juge des libertés et de la détention de n'avoir pas statué dans le délai de 12 jours à compter de l'enregistrement de la requête au greffe.

Ce moyen qui n'avait pas été soulevée devant la cour d'appel de Rennes est recevable dans la mesure où la cour d'appel d'Angers sur renvoi est saisie dans l'état où les parties se trouvaient avant l'ordonnance objet de la cassation.

Ce délai édicté par l'article R. 3211 du CSP n'est pas assorti d'une sanction.

M. X. fait alors référence à l'article 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour suppléer cette absence de sanction, lequel dispose que « toute personne a droit à la liberté et à la sûreté ; nul ne peut être privée de sa liberté sauf dans les cas suivants et selon les voies légales... s'il s'agit de la détention régulière... d'un aliéné... »

En l'espèce la durée de 10 jours supplémentaires mis par le juge des libertés et de la détention pour rendre sa décision n'est pas déraisonnable au regard du texte susvisé.

Le moyen est donc rejeté.

ALORS QUE l'ordonnance du juge des libertés et de la détention statuant sur la demande de mainlevée d'hospitalisation d'office est rendue dans un délai de 12 jours à compter de l'enregistrement de la requête au greffe ; qu'il en résulte qu'au-delà de ce délai l'internement sort de tout cadre légal et constitue le délit de séquestration ; qu'en décidant que la durée de 10 jours supplémentaires mise par le juge des libertés et de la détention pour rendre sa décision n'est pas déraisonnable, le Premier président de la cour d'appel de renvoi a violé ensemble l'article R. 3211-9 du code de la santé publique ainsi que les articles 5-2, 5-4 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, ensemble l'article 224-1 du code pénal.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée du 13 mai 2011 d'avoir infirmé l'ordonnance déférée du juge de la liberté et de la détention du tribunal de grande instance de Rennes uniquement en ce qu'elle a rejeté la requête de M. X. sans examiner sa demande relative à son état de santé psychiatrique, et partant d'avoir rejeté sa demande de sortie immédiate

AUX MOTIFS QUE :

*Sur la situation médicale justifiant l'hospitalisation d'office

M. X. soutient que l'hospitalisation d'office dont il a fait l'objet le 20 septembre 1985 a été ordonnée alors qu'aucune décision de non-lieu n'avait été rendue à son encontre et qu'en conséquence la mesure d'hospitalisation d'office qui a été prise est une mesure d'hospitalisation d'office de droit commun au sens de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique et non une hospitalisation d'office prise à la suite d'une décision de non-lieu en application de l'article L. 3213-7 du code de la santé publique (ancien article L. 348 du même code).

L'arrêté du préfet en date du 20 septembre 1995 est intervenu en application de l'article L. 348 en vigueur en 1965, texte qu'il vise expressément, et est en fait pris à la suite de la décision de non-lieu intervenue le même jour dans une affaire de destruction ou dégradation de biens privées ou menaces du 15 mai 1993 ainsi que cela ressort de l'extrait du bureau d'ordre pénal du parquet du tribunal de grande Instance de Rennes (pièce du 22 parquet général) : cette situation est corroborée par les termes du dernier arrêté du préfet en date du 19 juillet 1996 qui indique que l'hospitalisation sera maintenue « jusqu'à ce qu'il en soit ordonné autrement » en effet dans un tel cas, l'article L. 3213-8 (dont la rédaction est quasi identique à celle de l'article L. 348-1 en vigueur jusqu'au mois de juin 2000) prévoit que « il ne peut être mis fin aux hospitalisations d'office intervenues en application, de l'article L. 3213-7 que sur les décisions conformes de psychiatre n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le représentent de l'État dans le département sur une liste établie par le procureur de la république après avis du directeur général de l'agence régionale de la santé de la région dans laquelle est situé l'établissement. Ces deux décisions résultant de deux examens séparés et concordants doivent établir que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui ».

Ainsi M. X. ne peut solliciter la mainlevée de son hospitalisation motifs pris que la décision d'hospitalisation dont il fait l'objet n'a pas été prise dans les trois jours précédents l'expiration du premier mois d'hospitalisation qui ne s'applique pas à l'hospitalisation d'office d'ordre médico-légal dont il fait l'objet. L'article L. 348 du code de la santé publique au regard duquel il convient d'apprécier la demande de sortie présentée par M. X. exclut toute nécessité de renouvellement de l'arrêté contrairement aux modalités fixées pour les hospitalisations d'office de droit commun auquel fait référence inopportunément M. X..

A titre subsidiaire M. X. demande qu'il soit constaté l'absence d'éléments concernant sa dangerosité actuelle et ordonné la mainlevée de son hospitalisation d'office.

L'article L. 3211-12 du code de la santé publique prévoit que le juge des libertés et de la détention statue après débat contradictoire et après vérifications nécessaires, en l'espèce celles-ci ne peuvent s'entendre, à défaut d'autres éléments médicaux sur la dangerosité actuelle de M. X., que de l'examen médical visé par l'article L. 3213-8 du code de la santé publique qui ne pose qu'une exigence relative aux modalités de choix des médecins.

Ainsi il y a lieu d'ordonner une expertise psychiatrique qui devrait être dès lors confiée à deux psychiatres extérieurs à l'établissement de soins selon les modalités de l'article L. 3213-8 du code de la santé publique et dans le délai fixé par l'article R. 3211-14 du même code

ALORS QUE la main levée d'une hospitalisation doit pouvoir être levée en toutes circonstances par le juge judiciaire s'il estime la mesure non fondée ; qu'aux termes de l'article L. 3213-8 (anc. L. 348-1) du code de la santé publique, il ne peut être mis fin aux hospitalisations d'office intervenues en application de l'article L. 3213-7 (anc. L. 348) que sur les décisions conformes de deux psychiatres n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le préfet sur une liste établie par le procureur de la République après avis de la direction de l'action sanitaire et sociale du département dans lequel est situé l'établissement, ces deux décisions résultant de deux examens séparés et concordants doivent établir que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui ; que ces dispositions méconnaissent les exigences de l'article 66 de la Constitution ; que la déclaration de non-conformité à la Constitution de ces dispositions prononcée par le Conseil constitutionnel dans sa décision 2011-185 QPC du 21 octobre 2011 prive de toute base légale la décision attaquée.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée du 13 mai 2011 d'avoir commis un seul expert

AUX MOTIFS QUE

À titre subsidiaire M. X. demande qu'il soit constaté l'absence d'éléments concernant sa dangerosité actuelle et ordonné la mainlevée de son hospitalisation d'office.

L'article L. 3211-12 du code de la santé publique prévoit que le juge des libertés et de la détention statue après débat contradictoire et après vérifications nécessaires, en l'espèce celles-ci ne peuvent s'entendre, à défaut d'autres éléments médicaux sur la dangerosité actuelle de M. X., que de l'examen médical visé par l'article L. 3213-8 du code de la santé publique qui ne pose qu'une exigence relative aux modalités de choix des médecins.

Ainsi il y a lieu d'ordonner une expertise psychiatrique qui devrait être dès lors confiée à deux psychiatres extérieurs à l'établissement de soins selon les modalités de l'article L. 3213-8 du code de la santé publique et dans le délai fixé par l'article R. 3211-14 du même code.

Toutefois la Cour après avoir pris attache avec les différents experts psychiatres de la liste établie par la préfecture d'Ille et Vilaine en application de l'article sus visé et avec d'autres experts dans les départements périphériques se heurte à une impossibilité de nommer 2 experts, ceux contactés invoquant pour la majorité une surcharge de travail les empêchant d'assurer leur mission dans le délai jugé très court posé par le texte.
Ainsi un seul expert est nommé.

ALORS QUE le juge doit statuer conformément à la loi et user des pouvoirs qui lui sont conférés à cette fin ; qu'en ne désignant qu'un seul expert au lieu de deux, l'ordonnance a commis un excès de pouvoir négatif en violation de l'article L. 3213-8 du code de la santé publique.

ALORS QU'il ne peut être mis fin aux hospitalisations d'office intervenues en application de l'article L. 348 que sur les décisions conformes de deux psychiatres n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le préfet sur une liste établie par le procureur de la République après avis de la direction de l'action sanitaire et sociale du département dans lequel est situé l'établissement, ces deux décisions résultant de deux examens séparés et concordants doivent établir que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui ; que le Premier président de la cour d'appel n'a nommé qu'un seul expert ; qu'en statuant comme il l'a fait, le Premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 3213-8 du code de la santé publique.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'ordonnance du 27 mai 2011 d'avoir rejeté les moyens tirés de l'absence de renouvellement de l'arrêté d'hospitalisation et partant d'avoir rejeté la demande de sortie immédiate

AUX MOTIFS QUE

Sur l'absence d'arrêté préfectoral d'hospitalisation d'office :
M. X. conteste le fait que les dispositions de l'article L. 3213-8 CSP retenues dans l'arrêt du 13 mai 2011 soient applicables dans la mesure où il n'est pas démontré qu'antérieurement à l'arrêté d'hospitalisation d'office du 20 septembre 1995 une ordonnance de non-lieu ait été rendue à son égard ; il convient de souligner qu'il a déjà été répondu par l'arrêt du 13 mai 2011 sur ce moyen.

Il poursuit que, quand bien même les dispositions des articles L. 3213-7 et L. 3213-8 du CSP auraient eu vocation à s'appliquer, elles ne dispensaient aucunement le préfet d'Ille-et-Vilaine de renouveler les arrêtés d'hospitalisation d'office selon les modalités prévues à l'article L. 3213-4 du dit code, et en s'abstenant de renouveler les mesures d'hospitalisation d'office pour laquelle un dernier arrêté a été pris il y a 15 ans, il ne pourra qu'être constaté qu'il est aujourd'hui retenu en dehors de toute forme légale.

Le texte invoqué n'a pas vocation à s'appliquer aux hospitalisations d'office pris dans un cadre judiciaire et dont te régime de levée a été précédemment détaillé dans l'arrêt du 13 mai 2011 par référence aux dispositions des articles L. 3213-7 et L. 3213-8 du CSP lesquelles ne posent pas d'obligation de renouvellement périodiques.

M. X. est débouté de ce moyen.

Sur l'expertise
M. X. soutient que l'expertise réalisée en exécution de l'ordonnance du 13 mai 2011 aurait dû respecter les règles du code de procédure civile notamment de l'article 160 qui fait obligation à expert de convoquer les parties aux opérations d'expertise et d'en aviser leurs conseils.
S'il est exact que l'article R. 3211 crée par le décret n° 2010-526 du 20 mai relatif à la procédure de sortie immédiate des personnes hospitalisées sans leur consentement indique que la procédure de sortie immédiate des personnes hospitalisées sans leur consentement dans les établissements accueillant les malades soignés pour troubles mentaux prévus à l'article L. 3211-12 est régie par le code de procédure civile il indique également sous réserve des dispositions de la présente section dont fait partie l'article R. 3211-6, qu'il a été jugé au demeurant sans que cela soit depuis démenti, que l'entretien personnel pour les experts judiciaires avec une personne soumise à un examen mental revêt un caractère intime et confidentiel qui n'est pas compatible avec la présence d'un tiers s'agissant même de son conseil.
Par ailleurs le caractère contradictoire de cette mesure est préservée par la communication des résultats de l'examen aussi bien à la personne maintenue en hospitalisation d'office qu'à son conseil, résultats qui peuvent être débattus à l'occasion de l'audience postérieure au dépôt du rapport d'expertise.
Ainsi M. X. est débouté de sa demande de nullité de l'expertise menée par le Dr Y..

Sur l'existence de troubles mentaux justifiant l'hospitalisation d'office
M. X. soutient que si l'expertise du docteur Y. n'était pas annulée il conviendrait de constater que les éléments relevés dans le corps de cette expertise ne concluent pas à sa dangerosité actuelle, l'expert se contentant de relever des épisodes des actions passées alors qu'il était sans traitement psychotrope en employant le conditionnel ce qui caractérise nullement une dangerosité actuelle. Le docteur Y. fait effectivement un historique du passé psychiatrique de M. X., comme il est d'usage en toute matière médicale :
Il rappelle notamment qu'en juillet 1995 une expertise a conclu à une psychose délirante chronique avec des comportements antisociaux graves et répétitifs notoirement dangereux pour la sécurité publique : il note par ailleurs : " alors que dans les premières hospitalisations on parte surtout de personnalité paranoïaque il semble que ce soit dans les années 1980 qu'insidieusement les troubles basculent dans la psychose paranoïaque avec un noyau délirant à thème de persécutions qui ramènent à avoir des comportements antisociaux répétitifs ".
Il indique encore :
- malgré le traitement psychotrope mis en place M. X. présente toujours un syndrome délirant à thème de persécutions avec quelques persécuteurs désignés (M. Z., son ancien employeur, les témoins de Jéhovah, victimes le premier et les seconds de ses agissements délictueux), un mécanisme interprétatif, avec une extension en réseau portant entre autres sur l'axe administration, la psychiatrie.
- Les actes délictueux qu'il a commis ne témoignent pas d'une dangerosité extrême ; ils étaient dirigés contre des biens et pas contre des personnes, hormis la pulvérisation de bombes lacrymogènes en 1985. Cependant les actes antisociaux et les troubles de l'ordre public seraient les uns après les autres, mus par une construction délirante inébranlable entre 1975 et 1995. L'absence de critiques, la résistance aux traitements, la non reconnaissance des troubles et le refus des soins sont autant d'arguments laissant à penser que M. X. pourraient tout à fait commettre de nouveaux actes délictueux au cours desquelles il pourrait être dangereux.
Cet expert conclut à l'indicatif et au présent que les conditions de l'hospitalisation de M. X. sous contrainte prévue par l'article L. 3213-7 du code de la santé publique sont toujours réunies Il convient de remarquer que ces conclusions rejoignent celles d'un certificat de situation établi le 18 mars 2010 à l'occasion de la demande initiale de sortie par le chef du service où il est hospitalisé qui indiquent que " M. X. présente des traits de personnalité paranoïaque avec rigidité de la pensée raisonnement pathologique. Il existe chez lui un déni total de la maladie ainsi qu'un délire mystique et mégalomaniaque, de mécanismes imaginatifs et interprétatifs. Il bénéficie d'un traitement par neuroleptiques retards qui diminuent la sthénicité du délire et améliore le comportement, toutefois aucune alliance thérapeutique n'a pu s'instaurer, M. X. ne concevant pas sa position existentielle autrement qu'en tant que victime ". Il est ajouté à titre d'exemple que " M. X. a toujours jusque-là refusé de bénéficier de la double expertise prévue par la toi pour l'aménagement éventuel de son hospitalisation alors qu'il entame des procédures pour la contester ".
L'ensemble de ces éléments médicaux amènent à rejeter la demande de mainlevée de son hospitalisation sous contrainte faite par M. X..

ALORS QUE la cassation de l'ordonnance du 13 mai 2011 emportera annulation de l'ordonnance du 27 mai 2011 qui en est la suite et la conséquence, en application de l'article 625 du code de procédure civile ;

ALORS QUE la main levée d'une hospitalisation doit pouvoir être levée en toutes circonstances par le juge judiciaire s'il estime la mesure non fondée ; qu'aux termes de l'article L. 3213-8 (anc. L. 348-1) du code de la santé publique, il ne peut être mis fin aux hospitalisations d'office intervenues en application de l'article L. 3213-7 (anc. L. 348) que sur les décisions conformes de deux psychiatres n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le préfet sur une liste établie par le procureur de la République après avis de la direction de l'action sanitaire et sociale du département dans lequel est situé l'établissement, ces deux décisions résultant de deux examens séparés et concordants doivent établir que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui ; que ces dispositions méconnaissent les exigences de l'article 66 de la Constitution ; que la déclaration de non-conformité à la Constitution de ces dispositions prononcée par le Conseil constitutionnel dans sa décision 2011-185 QPC du 21 octobre 2011 prive de toute base légale la décision attaquée.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée du 27 mai 2011 d'avoir rejeté le moyen tiré de l'irrégularité de l'expertise au visa de l'article 160 du code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE

Sur l'expertise

M. X. soutient que l'expertise réalisée en exécution de l'ordonnance du 13 mai 2011 aurait dû respecter les règles du code de procédure civile notamment de l'article 160 qui fait obligation à expert de convoquer les parties aux opérations d'expertise et d'en aviser leurs conseils.

S'il est exact que l'article R. 3211 crée par le décret n° 2010-526 du 20 mai 2010 relatif à la procédure de sortie immédiate des personnes hospitalisées sans leur consentement indique que la procédure de sortie immédiate des personnes hospitalisées sans leur consentement dans les établissements accueillant les malades soignés pour troubles mentaux prévus à l'article L. 3211-12 est régie par le code de procédure civile il indique également sous réserve des dispositions de la présente section dont fait partie l'article R. 3211-6, qu'il a été jugé au demeurant sans que cela soit depuis démenti, que l'entretien personnel pour les experts judiciaires avec une personne soumise à un examen mental revêt un caractère intime et confidentiel qui n'est pas compatible avec la présence d'un tiers s'agissant même de son conseil.

Par ailleurs le caractère contradictoire de cette mesure est préservée par la communication des résultats de l'examen aussi bien à la personne maintenue en hospitalisation d'office qu'à son conseil, résultats qui peuvent être débattus à l'occasion de l'audience postérieure au dépôt du rapport d'expertise.

Ainsi M. X. est débouté de sa demande de nullité de l'expertise menée par le Dr Y..

ALORS QUE l'expert a l'obligation de convoquer les parties aux opérations d'expertise et d'en aviser leur conseil ; qu'en l'espèce, l'examen psychiatrique a été mené sans que le conseil n'en soit avisé et l'intéressé n'a pu être assisté ni de son avocat ni du médecin de son choix ; qu'en décidant que l'entretien personnel pour les experts judiciaires avec une personne soumise à un examen mental revêt un caractère intime et confidentiel qui n'est pas compatible avec la présence d'un tiers s'agissant même de son conseil et que le caractère contradictoire de cette mesure est préservée par la communication des résultats de l'examen aussi bien à la personne maintenue en hospitalisation d'office qu'à son conseil, résultats qui peuvent être débattus à l'occasion de l'audience postérieure au dépôt du rapport d'expertise, le Premier président de la cour d'appel a méconnu le droit de la personne d'être assistée, sinon de son conseil du moins du médecin de son choix, et partant a violé l'article 160 du code de procédure civile.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée du 27 mai 2011 d'avoir, au visa du rapport et de l'expertise du docteur Y., constaté que les conditions de l'hospitalisation sous contrainte de M. X. prévue par l'article L. 3213-7 du code de la santé publique sont toujours réunies et d'avoir rejeté la demande de mainlevée de cette mesure ;

AUX MOTIFS QUE

Sur l'existence de troubles mentaux justifiant l'hospitalisation d'office

M. X. soutient que si l'expertise du docteur Y. n'était pas annulée il conviendrait de constater que les éléments relevés dans le corps de cette expertise ne concluent pas à sa dangerosité actuelle, l'expert se contentant de relever des épisodes des actions passées alors qu'il était sans traitement psychotrope en employant le conditionnel ce qui caractérise nullement une dangerosité actuelle.

Le docteur Y. fait effectivement un historique du passé psychiatrique de M. X., comme il est d'usage en toute matière médicale :

Il rappelle notamment qu'en juillet 1995 une expertise a conclu à une psychose délirante chronique avec des comportements antisociaux graves et répétitifs notoirement dangereux pour la sécurité publique : il note par ailleurs : " alors que dans les premières hospitalisations on parte surtout de personnalité paranoïaque il semble que ce soit dans les années 1980 qu'insidieusement les troubles basculent dans la psychose paranoïaque avec un noyau délirant à thème de persécutions qui ramènent à avoir des comportements antisociaux répétitifs ".

Il indique encore :

- malgré le traitement psychotrope mis en place M. X. présente toujours un syndrome délirant à thème de persécutions avec quelques persécuteurs désignés (M. Z., son ancien employeur, les témoins de Jéhovah, victimes le premier et les seconds de ses agissements délictueux), un mécanisme interprétatif, avec une extension en réseau portant entre autres sur l'axe administration, la psychiatrie.

- Les actes délictueux qu'il a commis ne témoignent pas d'une dangerosité extrême ; ils étaient dirigés contre des biens et pas contre des personnes, hormis la pulvérisation de bombes lacrymogènes en 1988. Cependant les actes antisociaux et les troubles de l'ordre public seraient les uns après les autres, mus par une construction délirante inébranlable entre 1975 et 1995. L'absence de critiques, la résistance aux traitements, la non reconnaissance des troubles et le refus des soins sont autant d'arguments laissant à penser que M. X. pourraient tout à fait commettre de nouveaux actes délictueux au cours desquelles il pourrait être dangereux.

Cet expert conclut à l'indicatif et au présent que les conditions de l'hospitalisation de M. X. sous contrainte prévue par l'article L. 3213-7 du code de fa santé publique sont toujours réunies.

Il convient de remarquer que ces conclusions rejoignent celles d'un certificat situation établi le 18 mars 2010 à l'occasion de la demande initiale de sortie par le chef du service où il est hospitalisé qui indiquent que " M. X. présente des traits de personnalité paranoïaque avec rigidité de la pensée raisonnement pathologique. Il existe chez lui un déni total de la maladie ainsi qu'un délire mystique et mégalomaniaque, de mécanismes imaginatifs et interprétatifs. Il bénéficie d'un traitement par neuroleptiques retards qui diminuent la sthénicité du délire et améliore le comportement, toutefois aucune alliance thérapeutique n'a pu s'instaurer, M. X. ne concevant pas sa position existentielle autrement qu'en tant que victime ". Il est ajouté à titre d'exemple que « M. X. a toujours jusque-là refusé de bénéficier de la double expertise prévue par la loi pour l'aménagement éventuel de son hospitalisation alors qu'il entame des procédures pour la contester ».

L'ensemble de ces éléments médicaux amènent à rejeter la demande de mainlevée de son hospitalisation sous contrainte faite par M. X..

ALORS QU'il ne peut être mis fin aux hospitalisations d'office intervenues en application de l'article L. 348 que sur les décisions conformes de deux psychiatres n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le préfet sur une liste établie par le procureur de la République après avis de la direction de l'action sanitaire et sociale du département dans lequel est situé l'établissement, ces deux décisions résultant de deux examens séparés et concordants doivent établir que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui ; qu'un seul expert a été nommé et le rejet de la demande de mainlevée n'est fondée que sur les conclusions d'un seul psychiatre ; qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'appel a violé L. 3213-8 (anc. L. 348-1) du code de la santé publique.