En l’espèce, un homme a été mis en examen le 18 juillet 2008 des chefs de tentative d’homicide volontaire, tentative de vol avec arme et infraction à la législation sur les armes. En raison de son état de santé, l’interrogatoire de première comparution a eu lieu dans un hôpital. Cette personne a présenté à la chambre de l'instruction une requête aux fins d'annulation de son interrogatoire de première comparution et des actes subséquents, en invoquant la violation de l'article 116-1 du code de procédure pénale. Le demandeur invoque ainsi une méconnaissance de ces dispositions aux motifs qu'il avait été procédé à cet interrogatoire, sans enregistrement audiovisuel, et sans qu'il soit fait mention dans le procès-verbal d'une éventuelle circonstance technique qui aurait rendu impossible un tel enregistrement. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi en considérant que les dispositions de l'article 116-1 du code de procédure pénale n'imposent l'enregistrement audiovisuel des interrogatoires des personnes mises en examen, en matière criminelle, que lorsqu'ils sont réalisés dans le cabinet du juge d'instruction.
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 1 avril 2009
N° de pourvoi: 08-88549
Publié au bulletin Rejet
M. Pelletier, président
Mme Leprieur, conseiller rapporteur
M. Di Guardia, avocat général
SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 20 novembre 2008, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative d'homicide volontaire, tentative de vol avec arme et infraction à la législation sur les armes, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 9 février 2009, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 80-1, 116-1 du code de procédure pénale, 111-4 du code pénal, 6 § 1 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation de la loi, du principe du procès équitable, des droits de la défense et du principe constitutionnel d'égalité ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en nullité et les demandes subséquentes présentées par X... ;
" aux motifs qu'il ressort des termes de l'article 116-1 du code de procédure pénale que, si les interrogatoires des personnes mises en examen, y compris l'interrogatoire de première comparution, y compris les confrontations, doivent, en matière criminelle, faire l'objet d'un enregistrement, ce texte précise expressément que les actes visés sont ceux réalisés dans le cabinet du juge d'instruction ; qu'en l'espèce, il convient de constater que l'interrogation de première comparution n'a pu, compte tenu de l'état de santé de X..., se dérouler dans le cabinet du magistrat instructeur, lequel s'est en conséquence transporté à l'hôpital Edouard Herriot pour procéder à cette mesure ; qu'il est, de ce fait, sans intérêt de s'interroger sur les incidences de l'absence, dans l'interrogatoire de première comparution, de mentions relatives à l'impossibilité technique de procéder à l'enregistrement, dès lors que cette absence d'enregistrement ne s'est pas faite pour des raisons d'impossibilité technique, au sens de l'alinéa 6 du texte, mais du fait que la mesure était réalisée hors du cabinet du magistrat instructeur ; que, par ailleurs, il ne peut être ajouté audit texte en prétendant que la notion de « cabinet du juge d'instruction » doit être appréciée de manière extensive, pouvant ainsi viser tout lieu dans lequel le magistrat pourrait être amené à procéder à l'une des mesures énumérées, l'article susvisé ayant expressément limité l'enregistrement aux mesures réalisées dans le cabinet du juge et le décret d'application en son article 14, se référant à l'aménagement ou l'équipement du cabinet du juge pour permettre l'enregistrement ; que, si l'intention du législateur avait été de prévoir l'enregistrement de tous les interrogatoires menés par le magistrat instructeur, indépendamment de leur lieu de réalisation, aucune mention relative à celui-ci n'aurait été spécifiée ; qu'il ne saurait, enfin, être considéré que l'absence d'enregistrement dans un lieu autre que le cabinet du magistrat instructeur, aurait pour incidence une rupture du principe d'égalité, ce principe ne pouvant s'appliquer qu'à l'égard d'individus placés dans des conditions identiques, de sorte que ne peut être comparée l'audition réalisée dans le bureau du juge à l'audition réalisée dans un autre lieu, au nombre desquels une chambre d'hôpital ; qu'il convient, en conséquence, de rejeter la requête en nullité et les demandes subséquentes, de constater que le dossier, arrêté à la côte D70, n'est pas entaché de nullité, et de le renvoyer au juge d'instruction pour poursuite de l'information ;
" alors qu'en matière criminelle, les interrogatoires des personnes mises en examen dans le cabinet du juge d'instruction font l'objet d'un enregistrement audiovisuel sauf en cas d'impossibilité technique dont il est fait mention dans le procès-verbal d'interrogatoire qui précise la nature de cette impossibilité ; que la seule circonstance que l'interrogatoire n'ait pas lieu dans les locaux du palais de justice ne saurait dispenser le juge de procéder à cet enregistrement, ou à tout le moins de préciser les raisons pour lesquelles celui-ci est techniquement impossible ; qu'en jugeant, néanmoins, que l'enregistrement d'un interrogatoire réalisé par un juge d'instruction dans un hôpital n'est jamais obligatoire, quand bien même il serait techniquement possible de procéder à cet enregistrement, la cour d'appel a violé les textes précités ;
" alors que le juge d'instruction ne saurait être délié des obligations de l'article 116-1 du code de procédure pénale par le seul fait qu'il déciderait de procéder à un interrogatoire en dehors des locaux du palais de justice ; que la notion de cabinet du juge d'instruction ne se limite pas en effet aux seuls bureaux du tribunal de grande instance, mais s'entend de tous lieux où le juge d'instruction se transporte avec son greffier pour les besoins de son enquête ; qu'en décidant, néanmoins, qu'un interrogatoire de première comparution mené dans un hôpital ne pouvait être assimilé à un acte d'enquête réalisé dans le cabinet du juge d'instruction, la cour d'appel a violé les textes précités ;
" et alors que, enfin, le déroulement d'un interrogatoire de première comparution dans ou hors les locaux du palais de justice ne place pas la personne interrogée et mise en examen dans une situation différente ni au regard de la protection de ses droits ni au regard de la manifestation de la vérité ; qu'en affirmant, au contraire, que l'audition réalisée dans le bureau du juge d'instruction ou hors ce bureau ne « plaçait pas » les individus concernés dans des situations identiques pour écarter l'application de l'article 116-1 du code de procédure pénale au seul motif que l'interrogatoire n'a pas eu lieu dans les locaux du palais de justice, l'arrêt attaqué a violé le principe constitutionnel d'égalité " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que X... a été mis en examen le 18 juillet 2008 des chefs de tentative d'homicide volontaire, tentative de vol avec arme et infraction à la législation sur les armes ; qu'en raison de l'état de santé de l'intéressé, l'interrogatoire de première comparution a eu lieu dans un hôpital ;
Attendu que Kujtim X... a présenté à la chambre de l'instruction une requête aux fins d'annulation de son interrogatoire de première comparution et des actes subséquents, en invoquant la violation de l'article 116-1 du code de procédure pénale ; qu'il a soutenu qu'il avait été procédé à cet interrogatoire, d'une part, sans enregistrement audiovisuel et, d'autre part, sans qu'il soit fait mention dans le procès-verbal d'une éventuelle circonstance technique qui aurait rendu impossible un tel enregistrement ;
Attendu que, pour rejeter cette requête, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction n'a pas méconnu le sens et la portée des textes et des principes susvisés ;
Qu'en effet, les dispositions de l'article 116-1 du code de procédure pénale n'imposent l'enregistrement audiovisuel des interrogatoires des personnes mises en examen, en matière criminelle, que lorsqu'ils sont réalisés dans le cabinet du juge d'instruction ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pelletier président, Mme Leprieur conseiller rapporteur, Mmes Chanet, Ponroy, M. Arnould, Mme Koering-Joulin, MM. Pometan, Foulquié, Bloch, Monfort conseillers de la chambre, Mmes Lazerges, Harel-Dutirou conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Di Guardia ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Publication :
Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon du 20 novembre 2008
Titrages et résumés : INSTRUCTION - Interrogatoire - Matière criminelle - Enregistrement audiovisuel - Domaine d'application
Les dispositions de l'article 116-1 du code de procédure pénale n'imposent, en matière criminelle, l'enregistrement audiovisuel des interrogatoires des personnes mises en examen, que lorsqu'ils sont réalisés dans le cabinet du juge d'instruction.
Justifie, dès lors, sa décision la chambre de l'instruction qui, pour rejeter la requête aux fins d'annulation d'un interrogatoire de première comparution n'ayant pas fait l'objet d'un enregistrement audiovisuel, retient que cet interrogatoire a eu lieu à l'hôpital en raison de l'état de santé du mis en examen
Textes appliqués : article 116-1 du code de procédure pénale