M. X a été admis en soins psychiatriques sans consentement en hospitalisation complète sur la base d’un certificat médical affirmant un péril imminent pour sa personne. Sa demande de mainlevée de cette mesure de soins sous contrainte ayant été rejetée par le premier président du TGI, il saisit la Cour de cassation, reprochant notamment que l’unique certificat médical établi le 19 août 2013 n’est pas circonstancié et ne vise pas le péril imminent. La cour de cassation rejette son pourvoi en soulignant que peu importe que la mention du péril imminent soit pré-imprimée au sein du certificat médical, le médecin y a fait expressément référence après avoir décrit de façon manuscrite, individualisée et circonstanciée, les constations faites sur l’état clinique et les manifestations comportementales de M. X. En conséquence, le certificat médical tel qu’il a été rédigé répond à toutes les obligations imposées par la loi du 5 juillet 2011 et la décision administrative du directeur de l’établissement psychiatrique ayant accueilli le patient est régulière. |
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du jeudi 18 décembre 2014
N° de pourvoi: 13-24924
Mme Batut (président), président
SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée (Bordeaux, 9 septembre 2013), qu'au vu d'un certificat médical affirmant le péril imminent pour la santé de la personne au sens de l'article L. 3212-1 II 2 du code de la santé publique, établi par Mme Y..., médecin-chef de pôle du centre hospitalier C. à Paris le 19 août 2013, M. X... a été admis le même jour en hospitalisation complète par la directrice du groupe public de santé A. , avant d'être transféré au centre hospitalier spécialisé psychiatrique B. ;
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance de rejeter sa demande de mainlevée de la décision ordonnant son hospitalisation complète en psychiatrie, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte de l'article L. 3212-1-II du code de la santé publique que lorsqu'aucun membre de la famille du malade ne la requiert, l'hospitalisation d'office de l'intéressé ne peut être prononcée par le directeur de l'établissement qu'à la condition qu'un certificat médical circonstancié constate l'état de péril imminent pour la santé de la personne, et indique en quoi l'hospitalisation assortie d'une surveillance médicale constante est seule à même de prévenir un tel péril ; qu'en l'espèce, pour statuer comme elle l'a fait, la décision attaquée a relevé, par motifs propres, qu'il importe peu que le médecin se soit borné à cocher une mention préimprimée faisant état d'un péril imminent, dès lors que le praticien a décrit l'état clinique et les manifestations comportementales de M. X..., et par motifs adoptés du premier juge, que s'il n'est pas prétendu, en l'espèce, qu'il y ait eu danger pour la vie même de M. X..., les troubles du comportement médicalement constatés permettent de caractériser le danger que présentait son état pour sa santé, à défaut de soins immédiats et que ces soins ne pouvaient recueillir son consentement, en l'absence de conscience de ses troubles ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher concrètement en quoi les observations manuscrites du médecin, dont certaines n'ont aucun caractère médical, caractérisaient effectivement, pour la santé de M. X..., un péril imminent, le premier président a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé ;
2°/ qu' il résulte de l'article L. 3212-1-II du code de la santé publique que lorsqu'aucun membre de la famille du malade ne la requiert, l'hospitalisation d'office de l'intéressé ne peut être prononcée par le directeur de l'établissement qu'à la condition qu'un certificat médical circonstancié constate l'état de péril imminent pour la santé de la personne, et indique en quoi l'hospitalisation assortie d'une surveillance médicale constante est seule à même de prévenir un tel péril ; qu'en l'espèce, pour statuer comme elle l'a fait, la décision attaquée a relevé, par motifs propres, qu'il importe peu que le médecin se soit borné à cocher une mention préimprimée faisant état d'un péril imminent, dès lors que le praticien a décrit l'état clinique et les manifestations comportementales de M. X.., et par motifs adoptés du premier juge, que s'il n'est pas prétendu, en l'espèce, qu'il y ait eu danger pour la vie même de M. X.., les troubles du comportement médicalement constatés permettent de caractériser le danger que présentait son état pour sa santé, à défaut de soins immédiats et que ces soins ne pouvaient recueillir son consentement, en l'absence de conscience de ses troubles ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher concrètement en quoi, à supposer que l'état de M. X... justifiât la délivrance de soins, seule une hospitalisation complète permettait de les prodiguer sans exposer le malade à un péril imminent pour sa santé, le premier président a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'ordonnance relève que le médecin chef du centre psychiatrique spécialisé, signataire du certificat du 19 août 2013, n'a coché, sur un formulaire préimprimé, le critère de péril imminent pour la santé du patient nécessitant son hospitalisation complète, qu'après avoir procédé, de façon manuscrite, individualisée et circonstanciée, à la description des symptômes présentés par M. X..., tenant notamment à un « discours dispersé », « des idées délirantes de persécution ou mégalomaniaques », des troubles du comportement sexuel et un épisode schizophrénique faisant suite à plusieurs autres ; qu'ayant ainsi effectué les recherches prétendument omises, le premier président a légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 3211-12-1 II du code de la santé publique ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X.. tendant à la mainlevée de la décision ordonnant son hospitalisation complète en psychiatrie ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur la régularité de la décision prise le 19 août 2013, le conseil de Monsieur X... soutient que la directrice du groupe de santé de A. a pris une décision ne respectant pas les prescriptions de l'article L 3212-1-2° du Code de la santé publique ; il soutient notamment que l'unique certificat médical établi par le docteur Y... le 19 août 2013 n'est pas circonstancié et ne vise pas le péril imminent, de sorte que la décision se fondant exclusivement sur ce certificat n'est pas valide, ceci ayant pour conséquence la mainlevée immédiate de la mesure d'hospitalisation prise à l'encontre de Monsieur X... ; il sera relevé que le certificat critiqué a été établi par le médecin chef de Pôle du centre hospitalier C. à PARIS, lequel est un centre psychiatrique spécialisé en matière d'orientation et d'accueil des personnes atteintes de troubles mentaux ; il contient toutes les mentions exigées par la loi et vise expressément le péril imminent contrairement à ce que soutient l'appelant, peu important que la mention de ce péril soit pré-imprimée, le médecin y a fait expressément référence après avoir décrit de façon manuscrite, individualisée et circonstanciée, les constatations faites sur l'état clinique et les manifestations comportementales de Monsieur X... ; ainsi, c'est par de justes motifs auxquels nous nous référons expressément et que nous adoptons que le juge des libertés et de la détention a analysé le contenu du certificat médical critiqué, au regard de chacun des critères exigés par le texte susvisé et a constaté sa conformité aux prescriptions de l'article L 3212-1-2° du Code de la santé publique ; en conséquence, il convient de dire que la décision prise le 19 août 2013 par la directrice du groupe de santé de A. est régulière et qu'il n'y a donc pas lieu de ce chef d'ordonner la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète concernant Monsieur X... ; que sur le fond, Monsieur X.. n'a formulé aucune critique à l'encontre des autres certificats médicaux ; les certificats médicaux exigés par les textes figurent au dossier, ils ont été établis dans les délais requis et contiennent les indications propres à répondre aux prescriptions légales ; il en résulte que lors de son admission à l'hôpital, Monsieur X... présentait des idées délirantes à thème sexuel et de persécution, ainsi que des hallucinations cénesthésiques de la sphère sexuelle ; il ressort de l'ensemble de ces éléments médicaux et en particulier de l'avis conjoint émis le 26 août 2013, en application des dispositions de l'article L 3211-12-1 du Code de la santé publique, par deux médecins psychiatres exerçant à l'hôpital B. que Monsieur X... après plusieurs jours d'hospitalisation est plus calme mais toujours dans le déni total de tout trouble, formulant encore des idées délirantes de persécution à l'encontre de la police, du personnel soignant, de son voisin ; ils ont donc conclu que son hospitalisation complète reste nécessaire s'agissant d'un patient souffrant d'une pathologie schizophrénique paranoïde en rupture de traitement depuis plusieurs mois ; Monsieur X ne fournit aucun élément de nature à remettre en cause l'ensemble de ces constatations médicales ; en conséquence, il convient de maintenir l'hospitalisation complète de Monsieur X..., sa prise en charge dans un cadre contenant et sécurisant apparaissant indispensable pour garantir la poursuite du traitement que nécessite son état par des soins appropriés auxquels il n'est pas en mesure de consentir ; la décision entreprise sera donc confirmée (ordonnance du Premier Président, pages 4 et 5) ;
ET AUX MOTIFS, ADOPTES DU PREMIER JUGE, QUE pour solliciter la mainlevée de l'hospitalisation complète de Monsieur X..., il est soutenu que son admission, le 19 août 2013, n'a pas été ordonnée conformément aux exigences des dispositions des articles L 3212-1 et L 3212-2 du Code de la santé publique, en ce que un seul certificat médical, celui du docteur Y... en date du 19 août 2013, le certificat médical n'est pas circonstancié, n'est pas caractérisé le péril imminent pour la santé de Monsieur X., le certificat procédant par généralités ; qu'il résulte des dispositions de l'article L 3212-1 du Code de la santé publique que le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission : 1°/ soit sur la demande d'un tiers, membre de la famille ou proche du malade. La décision d'admission est alors accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés ; 2°/ en cas d'impossibilité d'obtenir une demande émanant d'un tiers et qu'il existe, à la date de l'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical qui constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins ; qu'il résulte, en l'espèce, de la lecture des éléments médicaux produits que le certificat médical établi par le docteur Y... le 19 août 2013 fonde l'admission sur les dispositions précitées de l'article L 3212-1-II-2°, après avoir relevé la situation de péril imminent ; que ce choix ne peut être en lui-même discuté et suppose l'absence de toute demande émanant d'un proche du patient, lequel se trouvait à distance de son lieu de vie habituel et pour lequel aucune famille ou aucun proche n'apparaît dans la procédure ;
qu'ainsi, la présence d'un seul certificat médical fondant l'admission apparaît conforme au texte de référence précité ; que Monsieur X... conteste le contenu du certificat médical du docteur Y... comme étant insuffisamment circonstancié et ne caractérisant pas le péril imminent pour sa santé ; que toutefois le contenu du certificat médical discuté apparaît conforme aux exigences légales qui imposent les constatations suivantes : l'état mental de la personne malade : il est relevé le « comportement sexuel bizarre » de l'intéressé, son « discours dispersé », exprimant des « idées délirantes de persécution », son « amnésie » ainsi que des « idées mégalomaniaques » (projet de départ en Chine), « d'autosuffisance » ; qu'ainsi, l'état mental de X... apparaît suffisamment circonstancié au moment de l'examen ; les caractéristiques de sa maladie : il est clairement fait référence à la « notion de trouble schizophrénique avec nombreux troubles du comportement et nombreuses ruptures de soins », ainsi qu'à un « état de nouvel épisode schizophrénique » ; que ces éléments suffisent à caractériser la maladie du patient, sans interdiction de faire référence à des informations médicales ou précédents transmis par l'établissement d'origine ; la nécessité de recevoir des soins : celle-ci résulte des constatations précédemment rappelées caractérisant les troubles du comportement et la nécessité d'une prise en charge médicale pour les faire cesser et stabiliser le patient ; qu'à l'audience, Monsieur X.. décrit sans aucune critique son comportement au moment de son interpellation ayant précédé son admission, comme celui d'un homme appuyé contre une vitrine, tenant d'une main dans la poche un pantalon trop grande ; qu'il dit aussi s'être retrouvé au commissariat la braguette ouverte ; que s'agissant de la notion de péril imminent, celui-ci est défini comme « l'immédiateté du danger pour la santé ou la vie du patient » ; qu'en l'espèce, s'il n'est pas prétendu qu'il y ait eu danger pour la vie même de Monsieur X..., les troubles du comportement médicalement constatés permettent de caractériser le danger que présentait son état pour sa santé, à défaut de soins immédiats ; que ces soins ne pouvaient recueillir son consentement, en l'absence de conscience de ses troubles ; qu'en conséquence, la décision d'admission est parfaitement conforme aux dispositions légales précitées ; qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de mainlevée ; que les certificats établis postérieurement à son admission et notamment l'avis conjoint des deux psychiatres, confirment que Monsieur X.., connu pour une schizophrénie paranoïde, était en rupture de soins depuis sa dernière hospitalisation il y a un an et demi ; qu'à son admission, il présentait des idées délirantes à thème sexuel et de persécution ainsi que des hallucinations ; qu'il décrivait lui-même des préoccupations concernant sa sexualité avec des pulsions sexuelles difficilement contrôlables et faisant craindre, au vu de ses antécédents, un passage à l'acte ; que Monsieur X... n'a aucune conscience de ses troubles et demeure dans le déni de tout trouble du comportement, ce que confirme ses déclarations à l'audience quant aux circonstances de son interpellation et de son admission ; que la poursuite des soins dans un cadre contenant demeure, pour l'ensemble de ces raisons, indispensable ; que dans ces conditions, et alors même que la prise en charge dans un cadre contenant et sécurisant apparaît encore, à ce jour, indispensable pour la poursuite du traitement, l'état de santé de l'intéressé, dont les troubles rendent impossible son consentement aux soins, impose toujours des soins assortis d'une surveillance médicale constante en milieu hospitalier ; qu'ainsi, le maintien de l'hospitalisation complète de l'intéressé apparaît à ce jour justifié (ordonnance du juge des libertés et de la détention, pages 2 à 4) ;
1°/ ALORS QU'il résulte de l'article L 3212-1-II du Code de la santé publique que lorsqu'aucun membre de la famille du malade ne la requiert, l'hospitalisation d'office de l'intéressé ne peut être prononcée par le directeur de l'établissement qu'à la condition qu'un certificat médical circonstancié constate l'état de péril imminent pour la santé de la personne, et indique en quoi l'hospitalisation assortie d'une surveillance médicale constante est seule à même de prévenir un tel péril ; qu'en l'espèce, pour statuer comme elle l'a fait, la décision attaquée a relevé, par motifs propres, qu'il importe peu que le médecin se soit borné à cocher une mention préimprimée faisant état d'un péril imminent, dès lors que le praticien a décrit l'état clinique et les manifestations comportementales de Monsieur X..., et par motifs adoptés du premier juge, que s'il n'est pas prétendu, en l'espèce, qu'il y ait eu danger pour la vie même de Monsieur X..., les troubles du comportement médicalement constatés permettent de caractériser le danger que présentait son état pour sa santé, à défaut de soins immédiats et que ces soins ne pouvaient recueillir son consentement, en l'absence de conscience de ses troubles ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher concrètement en quoi les observations manuscrites du médecin, dont certaines n'ont aucun caractère médical, caractérisaient effectivement, pour la santé de Monsieur X.., un péril imminent, le magistrat délégué a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé ;
2°/ ALORS QU'il résulte de l'article L 3212-1-II du Code de la santé publique que lorsqu'aucun membre de la famille du malade ne la requiert, l'hospitalisation d'office de l'intéressé ne peut être prononcée par le directeur de l'établissement qu'à la condition qu'un certificat médical circonstancié constate l'état de péril imminent pour la santé de la personne, et indique en quoi l'hospitalisation assortie d'une surveillance médicale constante est seule à même de prévenir un tel péril ; qu'en l'espèce, pour statuer comme elle l'a fait, la décision attaquée a relevé, par motifs propres, qu'il importe peu que le médecin se soit borné à cocher une mention préimprimée faisant état d'un péril imminent, dès lors que le praticien a décrit l'état clinique et les manifestations comportementales de Monsieur X..., et par motifs adoptés du premier juge, que s'il n'est pas prétendu, en l'espèce, qu'il y ait eu danger pour la vie même de Monsieur X..., les troubles du comportement médicalement constatés permettent de caractériser le danger que présentait son état pour sa santé, à défaut de soins immédiats et que ces soins ne pouvaient recueillir son consentement, en l'absence de conscience de ses troubles ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher concrètement en quoi, à supposer que l'état de Monsieur X... justifiât la délivrance de soins, seule une hospitalisation complète permettait de les prodiguer sans exposer le malade à un péril imminent pour sa santé, le magistrat délégué a privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé.