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Cour Administrative d'Appel de Bordeaux, 21 avril 2005, Pierre-Henri X (compétence du directeur - sécurité - interdiction d'accéder aux locaux)

Il appartient au directeur d'un établissement hospitalier de prendre toutes les mesures nécessaires au bon fonctionnement du service placé sous son autorité et au maintien de l'ordre dans les locaux de l'établissement.

A cet effet, le directeur peut légalement interdire à titre conservatoire l'accès de l'établissement à un visiteur en se fondant sur :
- la nécessité de garantir la sécurité des patients et le bon fonctionnement des services hospitaliers ;
- l'urgence à prévenir les troubles suscités par la présence de ce visiteur ;
- l'absence d'autres moyens.

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 5 juin 2001 sous le n° 01BX01405 présentée pour M. Pierre-Henri X demeurant ... par Me Jean-François Sestier ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 30 mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Fort de France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 9 avril 1998 par laquelle le directeur adjoint du centre hospitalier de Fort de France lui a interdit l'accès aux différents services du centre hospitalier et toute activité professionnelle dans cet établissement ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2005,
- le rapport de Mme Hardy ;
- les observations de M. X ;
- et les conclusions de M. Bec, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par une décision du 9 avril 1998 le directeur général adjoint du centre hospitalier a interdit à M. X l'accès aux différents services du centre hospitalier universitaire de Fort de France ainsi que toute activité professionnelle dans l'établissement ; que M. X interjette appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Fort de France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 714-12 du code de la santé publique alors applicable, devenu l'article L. 6143-7 du même code : Le directeur... est compétent pour régler les affaires de l'établissement autres que celles qui sont énumérées à l'article L. 714-4. Il assure la gestion et la conduite générale de l'établissement, et en tient le conseil d'administration informé. A cet effet, il exerce son autorité sur l'ensemble du personnel dans le respect des règles déontologiques ou professionnelles qui s'imposent aux professions de santé, des responsabilités qui sont les leurs dans l'administration des soins et de l'indépendance professionnelle du praticien dans l'exercice de son art... ; qu'en vertu de ces dispositions il appartient au directeur d'un établissement hospitalier de prendre toutes les mesures nécessaires au bon fonctionnement du service placé sous son autorité et au maintien de l'ordre dans les locaux de l'établissement ; que, par suite, c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Fort de France a estimé que l'arrêté contesté avait été pris par une autorité compétente ;

Considérant qu'à la date de la décision contestée, d'une part, il existait des présomptions sérieuses de manipulation, par M. X, de la seringue électrique d'une patiente du centre hospitalier, manipulation qui aurait été à l'origine d'une chute de tension artérielle de la patiente, et, d'autre part, de graves tensions étaient apparues au sein de l'équipe médicale à la suite de ces faits ; que, dans ces conditions, et alors même qu'aucun élément ultérieur n'a permis d'établir la réalité des faits reprochés à l'intéressé et à supposer même que ladite manipulation n'aurait pas été de nature à porter atteinte à la sécurité de la patiente, le directeur a pu légalement, en se fondant sur la nécessité de garantir la sécurité des patients et le bon fonctionnement des services hospitaliers et eu égard à l'urgence à prévenir les troubles suscités par la présence de M. X et, dès lors qu'il n'est pas allégué que le centre hospitalier aurait été en mesure d'y faire face par d'autres moyens, lui interdire à titre conservatoire l'accès de l'établissement ;

Considérant que, si M. X fait valoir que cette décision est en réalité motivée par la volonté de mettre un terme à son activité en raison des difficultés relationnelles qu'il pouvait avoir avec d'autres médecins n'approuvant pas le développement de sa clientèle libérale, le détournement de pouvoir ainsi allégué n'est pas établi par les pièces du dossier ;

Considérant qu'en se bornant à se référer, pour le surplus de son argumentation, à ses écritures de première instance s'agissant des moyens relatifs au vice de procédure, au vice de forme et à la violation de la loi, des principes généraux du droit et de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sans indiquer en quoi le tribunal aurait commis des erreurs en les écartant, M. X ne met pas le juge d'appel en mesure de se prononcer sur lesdits moyens ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Fort de France a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur général adjoint du centre hospitalier universitaire de Fort de France en date du 9 avril 1998 ;

Considérant que le paragraphe figurant à la page 11 du mémoire en défense produit par le centre hospitalier universitaire de Fort de France, enregistré le 7 septembre 2001, commençant par les mots de nombreux éléments et finissant par les mots administrée à Mme Faustin revêt, dans les circonstances de l'espèce, un caractère diffamatoire à l'égard de M. X ; que, dès lors, il y a lieu d'en prononcer la suppression par application des dispositions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier universitaire de Fort de France, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à payer au centre hospitalier universitaire de Fort de France la somme qu'il demande sur le même fondement ;

DECIDE :
Article 1er : Le paragraphe figurant à la p.11 du mémoire en défense produit par le centre hospitalier universitaire de Fort de France, enregistré le 7 septembre 2001, commençant par les mots de nombreux éléments et finissant par les mots administrée à Mme Faustin est supprimé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Pierre-Henri X est rejeté.
Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Fort de France tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.