La Cour administrative d’appel de Versailles rappelle qu’en vertu de l’article L. 4151- 3 du Code de la santé publique, lors d’un accouchement dystocique, la sage femme doit faire appel à un médecin, qui doit être présent au moment de l’accouchement. Cependant, la Cour précise que la sage femme ne commet pas de faute dans l’organisation du service si, en cas de circonstances d’extrême urgence, elle ne peut faire appel au praticien. " (...) Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 369 du code de la santé publique devenu l'article L. 41513 : « En cas d'accouchement dystocique ( ) [les sages-femmes] ( ) doivent faire appeler un médecin. » ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque survient une dystocie pendant un accouchement se déroulant sous la surveillance d'une sage-femme, celle-ci a l'obligation d'appeler un médecin ; que l'absence d'un médecin dans de telles circonstances est constitutive d'un défaut dans l'organisation et le fonctionnement du service engageant la responsabilité du service public hospitalier, à moins qu'il ne soit justifié d'une circonstance d'extrême urgence ayant fait obstacle à ce que la sage-femme appelle le médecin ou que le médecin appelé ait été, pour des motifs légitimes, placé dans l'impossibilité de se rendre au chevet de la parturiente ; (...) " |
Cour Administrative d'Appel de Versailles
statuant
au contentieux
N° 04VE01378
Inédit au Recueil Lebon
3ème Chambre |
M. Sébastien DAVESNE, Rapporteur
M. BRUNELLI, Commissaire du gouvernement
Mme VETTRAINO, Président
BALORIN-MASSE
Lecture du 3 avril 2007
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu l'ordonnance du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. et Mme Kodjovi X, demeurant ..., par Me Balorin-Masse ;
Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M. et Mme X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9901368 en date du 9 février 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier de Corbeil-Essonnes soit condamné à leur verser une somme de 1 715 000 francs en réparation des préjudices subis par eux-mêmes et par leur fils Christophe du fait des conditions dans lesquelles s'est déroulé l'accouchement de Mme X, et à verser à leur fils une rente mensuelle de 9 000 francs ;
2°) d'ordonner une nouvelle expertise ;
Ils soutiennent que c'est à tort que les premiers juges ont refusé d'ordonner une nouvelle expertise alors que l'expert désigné par le tribunal ne s'est pas prononcé sur la faute commise dans l'organisation du service lors de l'accouchement ; que l'absence d'un obstétricien lors de l'accouchement de Mme X, qui a été effectué par une sage-femme, laquelle a pratiqué une manoeuvre d'abaissement du bras de l'enfant à l'origine d'une dystocie des épaules du nouveau-né, est constitutive d'une telle faute ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2007 :
- le rapport de M. Davesne, premier conseiller ;
- les observations de Me Balorin-Massé, avocat de M. et Mme X et de Me Capdevila, avocat du centre hospitalier de Corbeil- Essonnes ;
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 369 du code de la santé publique devenu l'article L. 41513 : « En cas d'accouchement dystocique ( ) [les sages-femmes] ( ) doivent faire appeler un médecin. » ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque survient une dystocie pendant un accouchement se déroulant sous la surveillance d'une sage-femme, celle-ci a l'obligation d'appeler un médecin ; que l'absence d'un médecin dans de telles circonstances est constitutive d'un défaut dans l'organisation et le fonctionnement du service engageant la responsabilité du service public hospitalier, à moins qu'il ne soit justifié d'une circonstance d'extrême urgence ayant fait obstacle à ce que la sage-femme appelle le médecin ou que le médecin appelé ait été, pour des motifs légitimes, placé dans l'impossibilité de se rendre au chevet de la parturiente ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise remis aux premiers juges, que Mme X a été admise le 24 avril 1995 au centre hospitalier de Corbeil-Essonnes et y a donné naissance à un fils prénommé Christophe pesant 4,770 kilos ; qu'est survenue pendant l'accouchement une dystocie des épaules ayant conduit la sage-femme présente à effectuer seule une manoeuvre destinée à dégager les épaules de l'enfant ; que cette manoeuvre a entraîné pour celui-ci une atteinte physique se traduisant par une paralysie du plexus brachial droit ; que si aucun médecin n'est venu prêter son concours à l'accouchement de Mme X, il résulte de l'instruction que la dystocie des épaules n'a été constatée par la sage-femme qu'à 7 heures du matin, soit quinze minutes seulement avant la naissance, et qu'aucun médecin de garde n'était, au moment de l'accouchement, présent au centre hospitalier de Corbeil-Essonnes, lequel n'était pas tenu réglementairement d'assurer une telle présence ; que, dans ces conditions, et alors que la suspicion de macrosomie foetale diagnostiquée au cours de la grossesse ne constituait pas, à elle seule, un facteur de risque suffisant d'accouchement dystocique, la sage-femme s'est trouvée de façon imprévisible confrontée à une situation d'extrême urgence qui faisait obstacle à ce qu'elle appelle un médecin afin qu'il vienne lui-même pratiquer les gestes médicaux ou chirurgicaux adaptés à la gravité de la situation de cette patiente ; qu'ainsi, dans de telles circonstances, l'absence d'un médecin n'a pas été constitutive d'un défaut dans l'organisation et le fonctionnement du service de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier de Corbeil-Essonnes envers M. et Mme X ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner la nouvelle expertise sollicitée par les requérants, que M. et Mme X ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner M. et Mme X, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser au centre hospitalier de Corbeil-Essonnes la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Corbeil-Essonnes présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.