REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, enregistré le 5 mars 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 28 décembre 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy, après avoir annulé le jugement du 4 octobre 1994 du tribunal administratif de Strasbourg rejetant la demande de M. X., gardien de la paix, tendant à l'annulation de l'arrêté ministériel du 17 septembre 1993 le mettant d'office à la retraite, a annulé cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 86-592 du 18 mars 1986 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Seners, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de M. X.,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par arrêté du 17 septembre 1993, le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a prononcé la mise à la retraite d'office de M. X., gardien de la paix, au motif qu'ayant prélevé, en plusieurs fois, quatre-vingt litres d'essence pour son usage personnel à la pompe du garage de sa compagnie et falsifié, à chaque fois, le registre de perception de carburant, il avait eu un comportement incompatible avec la "fonction policière" ; que par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Nantes a jugé que ces agissements constituaient une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire, mais que la sanction infligée était entachée d'erreur manifeste d'appréciation, eu égard au comportement antérieur de l'intéressé et à l'absence d'atteinte, en l'espèce, à la considération du corps auquel il appartenait ;
Considérant que la méconnaissance de l'obligation d'intégrité que rappellent, en ce qui concerne les fonctionnaires de la police nationale, les dispositions de l'article 7 du décret n° 86-592 du 18 mars 1986, est de nature à justifier l'application d'une sanction disciplinaire ; que le caractère, absolu dans son principe, de cette obligation ne fait cependant pas obstacle à ce que le juge de l'excès de pouvoir contrôle si le choix de la sanction infligée n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas commis d'erreur de droit en recherchant si la sanction de la mise à la retraite d'office infligée à M. X. était ou non, dans les circonstances de l'espèce, qu'elle a souverainement appréciées, entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, l'unique moyen invoqué par le MINISTRE DE L'INTERIEUR doit être écarté ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat, par application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, à payer à M. X la somme qu'il demande, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. X. au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. X..