REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
(PremièreChambre)
Vu la requête, enregistrée le 11 mars 1996 sous le n 96NC00826, présentée pour Mme X. divorcée Y., agissant en qualité de représentante légale de sa fille mineure Z, domiciliée (...), par Me Patrice Vicq, avocat près la cour d'appel de Nancy ;
Mme X. demande à la Cour :
1 / d'annuler le jugement en date du 13 février 1996 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 octobre 1995 de l'inspecteur d'académie, confirmant celle du directeur de l'établissement régional d'enseignement adapté pour handicapés moteurs (E.R.E.A.) de (...) , refusant d'accueillir la jeune Z. accompagnée de son chien "Igor" ;
2 / d'annuler les décisions susmentionnées ;
Mme X. soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que l'article 88 de la loi n 87-588 du 30 juillet 1987 permettant l'accès, dans les lieux ouverts au public, de chiens d'accompagnement de personnes invalides, n'était pas applicable en l'espèce ; aucune exception a ce droit d'accès n'est prévue pour les établissement comme l'E.R.E.A. ; il est en outre admis que les établissements scolaires sont ouverts au public ;
- l'administration allègue la présence d'un personnel susceptible de répondre aux besoins de la vie courante de la jeune élève, à partir de certificats de spécialistes qui n'ont pas examiné l'enfant ; l'aide proposée n'est pas équivalente à celle fournie par le chien "Igor" ;
- les motifs de sécurité et de salubrité également invoqués par l'E.R.E.A. ne seraient valables que pour le centre de soins, et non pour les salles de classe qui en sont nettement distinctes ; les autres élèves avaient donné leur accord à la présence du chien "Igor" ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 87-588 du 30 juillet 1987 ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 1999 :
- le rapport de M. BATHIE, Premier Conseiller ;
- les observations de Me LAFFON, substituant Me VICQ, avocat de Mme X.,
- et les conclusions de Mme ROUSSELLE, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que Mme X. fait appel d'un jugement en date du 13 février 1996 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'annulation d'une décision de l'inspecteur d'académie de Nancy confirmant la décision du directeur de l'établissement régional d'enseignement adapté pour handicapés moteurs de Flavigny-sur-Moselle (E.R.E.A.) qui lui a refusé la présence du chien "Igor", accompagnateur de sa fille Z alors âgée de 13 ans, au sein des locaux de l'établissement ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 88 de la loi n 87-588 du 30 juillet 1987, portant diverses mesures d'ordre social " :"L'accès des lieux ouverts au public est autorisé aux chiens accompagnant les personnes titulaires de la carte d'invalidité prévue à l'article 174 du code de la famille et de l'aide sociale ... " ; qu'il est constant que l'E.R..E.A. de (...) accueille des élèves préalablement inscrits en fonction de critères liés à leurs difficultés de déplacement ; qu'ainsi, les locaux de cet établissement, du moins lorsqu'ils sont affectés à l'accueil et au séjour des seules personnes inscrites, ne peuvent être regardés comme des "lieux ouverts au publics" au sens de cette disposition législative ; que, dès lors, Mme X. n'est pas fondée à soutenir qu'en application de ce même texte, le directeur de l'E.R.E.A. était tenu d'admettre l'accès du chien accompagnateur de la jeune Z auxdits locaux ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en se fondant sur le certificat d'un médecin de l'établissement, lequel pouvait émettre un avis sur ce point sans examiner la jeune Z alors qu'il connaissait déjà la nature et l'importance de son handicap, pour affirmer que l'établissement disposait de personnels de soins et d'accompagnement spécialisé susceptibles de répondre à l'ensemble des besoins de l'intéressée, l'autorité administrative n'a pas entaché sa décision d'une erreur de fait ;
Considérant, en troisième lieu, que Mme X. n'apporte pas d'éléments de nature à démontrer que les risques invoqués par l'administration, qui ne se limitent pas aux lieux de soins, mais concernent aussi les salles de classes, et relatifs à la sécurité et la salubrité des autres élèves, de santé particulièrement fragile du fait de leurs lourds handicaps, révéleraient une erreur manifeste d'appréciation, alors qu'un certificat du médecin chef de l'établissement atteste que la présence d'un chien "présente des risques potentiels vis-à-vis des élèves handicapés qui sont traités dans l'établissement", et quand bien même d'autres élèves auraient donné leur accord à la présence du chien Igor ; qu'en outre, en estimant que la présence permanente de l'animal aux côtés de Z pour des motifs d'ordre affectif et psychologique n'était pas compatible avec l'une des finalités de l'enseignement dispensé par l'école, qui est de faire acquérir aux élèves une meilleure autonomie afin de les placer dans une situation aussi proche que possible que celle des autres enfants, l'inspecteur d'académie ne peut être regardé comme ayant, également sur ce point, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X. n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;
DECIDE :
Article 1er : La requête susvisée de Mme X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X et au ministre de l'éducation nationale.