En l’espèce, une patiente est admise dans le service de chirurgie digestive du CHU de Bordeaux pour une ablation de la vésicule biliaire. Avant l’intervention, elle informe l’équipe médicale de son refus de recevoir des transfusions sanguines et de sa demande de bénéficier, le cas échéant, de techniques alternatives. Toutefois lors de l’opération, une perforation accidentelle de l’artère iliaque droite cause une hémorragie massive ne pouvant être compensée par le mécanisme d’autotransfusion mis en place conformément à la volonté de la patiente. Le pronostic vital étant engagé, deux transfusions sont réalisées. Suite à l’intervention, la patiente souffre d’une anémie sévère et de plusieurs complications, mais réitère son refus de recevoir une nouvelle transfusion. Toutefois, sur la décision collégiale de deux médecins, une nouvelle transfusion sanguine est néanmoins réalisée à l’insu de l’intéressée qui a été préalablement sédatée. Elle ne l’apprendra qu’un an plus tard, lorsque son dossier médical lui sera communiqué à sa demande.
Suite au jugement de 1ère instance qui n'a pas reconnu le caractère fautif des transfusions, la patiente interjette appel devant la Cour administrative d’appel de Bordeaux qui articule son raisonnement en deux temps :
- Les deux premières transfusions ne sont pas fautives car le respect de la volonté de la patiente mettait sa vie en danger alors qu’elle était inconsciente et dans l’incapacité de réitérer son refus dans un délai raisonnable comme le prévoit l’article L.1110-4 du code de la santé publique et alors que la technique alternative d’autotransfusion ne suffisait pas à assurer sa survie ;
- La troisième transfusion est en revanche fautive car la patiente avait repris connaissance et réitéré à plusieurs reprises son refus d’être transfusée malgré les explications des médecins sur le risque vital encouru. En outre, le juge relève que le fait d’avoir réalisé une transfusion contre le gré de la patiente, de surcroît en procédant préalablement à une sédation pour l’empêcher de s’y opposer, constitue un manquement aux dispositions de l’article L.1110-4 du code de la santé publique. Par conséquent, il estime que « dans ces circonstances, et sans qu’il soit besoin de rechercher si cette intervention était justifiée par une urgence vitale, cette troisième transfusion est de nature à engager la responsabilité du CHU de Bordeaux ».
Le CHU de Bordeaux est condamné à verser à la requérante une somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d’existence, somme qui s’ajoute à l’indemnité de 1 000 euros accordée par le tribunal au titre d’un défaut d’information.