Instaurés par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 et par le décret d’application n° 2002-886 du 3 mai 2002, les CRCI ont pour objectif de permettre une indemnisation plus rapide des victimes et d’éviter, dans la mesure du possible, les procédures contentieuses.
La CRCI, correspondant à un dispositif alternatif de règlement des litiges par rapport aux tribunaux n’a aucun caractère juridictionnel. Le recours à cette instance est facultative dans la mesure où le demandeur peut toujours opter pour la voie contentieuse. Lorsque les conditions fixées par la loi pour accéder à ce nouveau mode ne sont pas réunies, le demandeur pourra soit transiger avec l’assureur de l’établissement de santé soit engager un recours contentieux. De plus, la personne qui s’estime victime d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins est libre de choisir entre les voies de règlement amiable et contentieuse qui lui sont ouvertes avec toutefois l’obligation d’en informer chacune des institutions saisies. La saisine de la CRCI suspend en outre les délais de prescription et de recours contentieux jusqu’au terme de la procédure de règlement amiable en cas d’accidents médicaux, d’affections iatrogènes ou d’infections nosocomiales. |
1. L’organisation des CRCI
1.1 Composition
Chaque CRCI comprend 21 membres nommés pour une durée de 3 ans renouvelable :
1 président qui est un magistrat de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif nommé par arrêté du ministre de la justice
6 représentants des usagers proposés par les associations d’usagers du système de santé
2 représentants des professionnels de santé exerçant à titre libéral
1 praticien hospitalier
1 responsable d’établissement public de santé proposé par les organisations d’hospitalisation publique les plus représentatives au plan régional
2 responsables d’établissement de santé privés désignés par les organisations d’hospitalisation privée les plus représentatives au plan régional
2 représentants de l’ONIAM
2 représentants des assureurs en responsabilité civile médicale
4 personnalités qualifiées dans le domaine de la réparation des préjudices corporels
1.2 Fonctionnement
Il existe en France 23 CRCI. Les secrétariats permanents de ces CRCI sont regroupés en 4 pôles interrégionaux à savoir :
Bagnolet
Lyon
Bordeaux
Nancy.
2. Les missions de la CRCI
2.1 La CRCI siégeant en formation de conciliation
Les CRCI ont la faculté d’organiser, directement ou indirectement en désignant un médiateur, des conciliations destinés à résoudre les conflits entre les usagers du système de santé et les professionnels et/ou établissements de santé.
2.2 La CRCI siégeant en formation de règlement amiable
La CRCI se réunit en formation de règlement amiable et est chargée d’instruire les dossiers lorsqu’une personne s’estimant victime d’un accident médical, d’une affection iatrogène ou d’une infection nosocomiale souhaite obtenir l’indemnisation de ces dommages. La saisine de la CRCI est toutefois soumise à conditions (voir 3. procédure de règlement amiable devant la CRCI).
La suite de cette fiche technique va se cantonner à l’étude de la procédure de règlement amiable devant la CRCI, procédure la plus utilisée en pratique.
3. La procédure de règlement amiable devant la CRCI
3.1. Saisine de la CRCI
Auprès de qui s’adresser ?
La CRCI compétente est celle dans le ressort de laquelle a été effectué l’acte de prévention, de diagnostic ou de soin susceptible d’être à l’origine du dommage.
Qui peut saisir la CRCI ?
- Toute personne s’estimant victime d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins
- Le cas échéant, son représentant légal
- Les ayants droit d’une personne décédée
Peuvent être mis en cause devant la CRCI les acteurs de santé publics et privés (exemple : établissements de santé privés, professionnels de santé libéraux ou laboratoires d’analyse ainsi que les établissements publics de santé).
A noter que l’accès à la CRCI est gratuit (aucun frais de procédure et gratuité de l’expertise médicale) et que la présence d’un avocat n’est pas obligatoire.
Quels sont les critères de recevabilité pour saisir la CRCI d’une demande d’indemnisation ?
- Le dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins dont se plaint la victime doit être survenu à compter du 5 septembre 2001. Dans l’hypothèse où la demande d’indemnisation est antérieure à cette date, la victime conserve toujours la possibilité de s’adresser à un juge (compétence du juge administratif si l’établissement mis en cause est un établissement public de santé et celle du juge judiciaire si l’établissement concerné est un établissement de santé privé).
- Le dommage doit présenter un certain seuil de gravité. Un expert ou un collège d’experts se prononce sur la gravité du dommage. Les critères de gravité donnant compétence à la CRCI sont :
Un taux d’incapacité permanente égal ou supérieur à 24% ;
Une durée d'incapacité temporaire de travail au moins égale à 6 mois consécutifs ou à 6 mois non consécutifs sur une période de 12 mois.
A titre exceptionnel, une inaptitude définitive à exercer l'activité professionnelle avant la survenue de l'accident médical, de l'affection iatrogène ou de l'infection nosocomiale.
A titre exceptionnel, des troubles dans les conditions d’existence particulièrement grave.
Afin d’apprécier si les dommages subis présentent le caractère de gravité requis, la CRCI peut soumettre à ses experts pour observation les pièces justificatives accompagnant le formulaire de demande d’indemnisation auprès de la CRCI. Les parties concernées sont informées de l’identité et des titres du ou des experts. Lorsque la CRCI estime que les dommages ne présentent pas ce seuil de gravité, elle se déclare incompétente. Les parties en sont alors informées par lettre recommandée avec accusé de réception. Dans cette hypothèse, il peut être procédé, à la demande de la victime, à une procédure de conciliation devant la CRCI ou par son intermédiaire. La victime peut également se tourner vers la voie contentieuse et saisir le juge compétent.
Pour aller plus loin :
Formulaire de demande d’indemnisation auprès de la CRCI, disponible sur le site www.commissions-crci.fr |
3.2 Instruction de la demande
Lorsque la CRCI s’est assurée que le dossier était complet et recevable, une expertise médicale est diligentée par ses soins. Un ou plusieurs experts est alors désigné dont l’un est obligatoirement inscrit sur la liste nationale des experts en accidents médicaux établie par la Commission nationale des accidents médicaux (CNAMed). Le rapport d’expertise est ensuite transmis aux différentes parties qui sont invitées à formuler leurs observations avant la réunion de la CRCI.
En application de l’article R. 1142-16 du Code de la santé publique, « A tout moment, les parties sont informées, à leur demande, de l’état de la procédure. Les parties sont entendues sur leur demande ou à la demande de la commission. Elles peuvent se faire assister ou représenter par une personne de leur choix ».
4. Avis de la CRCI et ses suites
A la suite du dépôt du rapport d’expertise, la CRCI se réunit en formation plénière à l’issue de laquelle elle est tenue de rendre un avis motivé sur les circonstances, les causes, la nature et l’étendue des dommages ainsi que sur le régime d’indemnisation applicable dans un délai de 6 mois à compter de sa saisine.
L’avis de la CRCI peut être favorable ou défavorable à la victime et conclure soit à l’existence d’une faute soit à l’absence de faute :
Lorsque l’avis est défavorable à la victime :
La CRCI émet un avis de rejet en considérant soit qu’aucune faute n’est à l’origine du dommage invoqué par le demandeur soit que le dommage, sans avoir une origine fautive, ne constitue pas une conséquence anormale au regard de l’état de santé initial du patient comme de l’évolution prévisible de celui-ci.
Lorsque l’avis est favorable à la victime :
La CRCI émet un avis de proposition d’indemnisation et considère que les dommages répondent aux critères de recevabilité du dispositif, qu’ils sont consécutifs à un accident médical fautif ou non mais dans ce cas anormal au regard de l’état de santé du patient. La CRCI détermine alors le débiteur de l’indemnisation suivant les postes de préjudices qu’elle retient sur la base du rapport d’expertise et transmets cet avis aux organismes en charge du paiement de l’indemnisation :
- à l’assureur du professionnel de santé ou de l’établissement de santé en cas de faute ou d’une infection nosocomiale engendrant une IPP inférieure à 24 %.
Si l’AP-HP est mise en cause, il reçoit directement cet avis dans la mesure où l’AP-HP est son propre assureur en application de l’article L. 1142-2 du Code de la santé publique et de l’arrêté du 3 janvier 2003 (voir : Le principe de l’obligation d’assurance de responsabilité applicable à l’AP-HP).
- à l’ONIAM en cas d’aléa thérapeutique ou d’infection nosocomiale grave engendrant une IPP supérieure à 24% (il peut être considéré dans ce cas comme un fonds d’indemnisation).
- un partage de responsabilité entre les assureurs des acteurs de santé et l’ONIAM.
5. L’indemnisation
Les assureurs des acteurs de santé ou l’ONIAM disposent de 4 mois à compter de la réception de l’avis de la CRCI pour faire une offre à la victime, que celle-ci soit définitive ou seulement provisionnelle. Cette offre doit indiquer l’évaluation retenue pour chaque chef de préjudice ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime ou à ses ayants droit, déduction faite des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d’autres débiteurs du chef du même préjudice. La victime a le choix de l’accepter ou de la refuser.
En cas d’acceptation de l’offre d’indemnisation par la victime
L’acceptation de l’offre par la victime vaut transaction au sens du code civil et met fin à toute procédure contentieuse postérieure pour les mêmes chefs de préjudices. Toutefois, la victime a la possibilité de présenter un nouveau dossier devant la CRCI en cas d’aggravation de son état de santé. En tout état de cause, en cas d’acceptation de l’offre, le paiement doit intervenir dans un délai d’un mois à compter de la réception par l’assureur de l’acceptation de son offre par la victime, que son offre ait un caractère provisionnel ou définitif.
En cas de refus de l’offre d’indemnisation par la victime
La victime peut saisir le tribunal compétent afin de présenter sa demande devant un juge ou bien demander la réparation de son préjudice à l’ONIAM (à charge pour lui d’effectuer par la suite un recours subrogatoire contre l’assureur de l’acteur de santé).
En cas de silence oude refus de l’assureur de l’acteur de santé d’indemniser
Lorsque l’assureur de l’acteur de santé mis en cause garde le silence ou refuse explicitement d’indemniser, ou bien lorsque le responsable des dommages n’est pas assuré ou que la couverture d’assurance est épuisée, l’ONIAM vient se substituer à l’assureur. A charge pour l’ONIAM, une fois la victime indemnisée, d’effectuer un recours subrogatoire contre cet assureur afin d’obtenir le remboursement des sommes versées.
En cas d’absence de faute : indemnisation par la solidarité nationale
Lorsque la responsabilité d’un professionnel de santé, d’un établissement, service ou organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ou d’un producteur de produit n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale. L’article L. 1142-1 II du Code de la santé publique pose les conditions de l’indemnisation des accidents médicaux non fautifs par l’ONIAM (le critère déterminant étant le taux d’IPP). En cas d’absence d’offre de la part de l’ONIAM, la victime peut saisir le tribunal compétent.
Pour aller plus loin :
- Schéma relatif à la procédure de règlement amiable devant la CRCI |