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Ordonnance n° 2005-855 du 28 juillet 2005 relative aux opérations funéraires

Le Président de la République,

Sur le rapport du Premier ministre et du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire,

Vu la Constitution, notamment son article 38 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'environnement, notamment ses articles L. 123-1 à L. 123-16 et L. 651-3 ;

Vu la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 modifiée relative à Mayotte, notamment son article 3 ;

Vu la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, notamment son article 10 ;

Vu l'avis du Conseil national des opérations funéraires en date du 24 mars 2005 ;

Vu l'avis du conseil général de Mayotte en date du 19 mai 2005 ;

Le Conseil d'Etat entendu ;

Le conseil des ministres entendu,

Ordonne :

Article 1

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

I. - Au deuxième alinéa de l'article L. 2223-1, les mots : « la création et l'agrandissement d'un cimetière » et les mots : « la création d'un cimetière et son agrandissement » sont remplacés par les mots : « la création, l'agrandissement et la translation d'un cimetière ».

II. - L'article L. 2223-13 est modifié comme suit :

1° Il est ajouté à la fin de la première phrase du premier alinéa les mots suivants : « en y inhumant cercueils ou urnes » ;

2° Après le premier alinéa, il est inséré un deuxième alinéa ainsi rédigé :
« Il peut être également concédé des espaces pour le dépôt ou l'inhumation des urnes ou la dispersion des cendres dans le cimetière. »

III. - A l'article L. 2223-18, il est ajouté un 4° ainsi rédigé :
« 4° Les conditions dans lesquelles les articles L. 2223-14 à L. 2223-17 sont applicables aux concessions des espaces pour le dépôt ou l'inhumation des urnes ou la dispersion des cendres dans le cimetière. »

IV. - A l'article L. 2223-19, le 5° est supprimé.

V. - A l'article L. 2223-25, les 1° et 2° sont remplacés par les dispositions suivantes :
« 1° Non-respect des dispositions du présent code auxquelles sont soumises les régies, entreprises ou associations habilitées conformément à l'article L. 2223-23 ; »

VI. - L'article L. 2223-40 est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale sont seuls compétents pour créer et gérer, directement ou par voie de gestion déléguée, les crématoriums et les sites cinéraires destinés au dépôt ou à l'inhumation des urnes ou à la dispersion des cendres.
« Les sites cinéraires inclus dans le périmètre d'un cimetière doivent être gérés directement. »

2° Au dernier alinéa, les mots : « enquête de commodo et incommodo » sont remplacés par les mots : « enquête publique conduite selon les modalités prévues aux articles L. 123-1 à L. 123-16 du code de l'environnement. »

VII. - Le b du 5° de l'article L. 5215-20 est ainsi rédigé :
« b) Création, extension et translation des cimetières et sites cinéraires hors de l'emprise des cimetières ainsi que création et extension des crématoriums. »

Article 2

I. - Les modifications introduites par la présente ordonnance aux articles L. 2223-1 et L. 2223-40 du code général des collectivités territoriales sont applicables aux communes de Mayotte.

II. - A l'article L. 2573-10 du même code, le 5° est supprimé.

III. - L'article L. 2573-15 du même code est ainsi modifié :
1° Les 1° et 2° sont remplacés par un 1° ainsi rédigé :
« 1° Non-respect des dispositions du présent chapitre auxquelles sont soumises les régies, entreprises ou associations habilitées conformément aux dispositions de l'article L. 2573-10 ; »

IV. - L'article L. 2573-22 est complété par un III ainsi rédigé :
« III. - Pour l'application à Mayotte du troisième alinéa de l'article L. 2223-40, la référence aux articles L. 123-1 à L. 123-16 du code de l'environnement est remplacée par la référence à l'article L. 651-3 du même code. »

Article 3

Le Premier ministre, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, et le ministre de l'outre-mer sont responsables, chacun en ce qui le concerne, de l'application de la présente ordonnance, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 28 juillet 2005.

Source : Journal officiel de la République française n° 175 du 29 juillet 2005 page 12348

ANNEXE
Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2005-855 du 28 juillet 2005 relative aux opérations funéraires

Monsieur le Président,

La loi du 8 janvier 1993 relative à la législation dans le domaine funéraire a profondément modifié l'organisation du service extérieur des pompes funèbres en mettant fin au monopole communal. Ainsi, le service extérieur des pompes funèbres est, désormais, assuré concurremment par les communes, les entreprises et les associations, dûment habilitées par le préfet. Il regroupe notamment le transport des corps avant et après mise en bière, l'organisation des obsèques, les soins de conservation, la fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires intérieurs et extérieurs et des urnes cinéraires, la gestion et l'utilisation des chambres funéraires, la fourniture des corbillards et la fourniture du personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations.

Plus de dix années s'étant écoulées depuis cette réforme, force est de constater que les textes en vigueur nécessitent une adaptation afin de répondre aux évolutions de la société et remédier à la grande complexité du droit funéraire.

Dans ce contexte, le Gouvernement a proposé au Parlement un projet de loi, adopté le 9 décembre 2004, l'habilitant à simplifier le droit dont l'article 10 dispose :

« I. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnance, toutes dispositions de nature à :

« 1° Aménager la législation applicable aux cimetières, aux opérations funéraires et à la police des funérailles ; »

« La présente ordonnance, prise sur le fondement de l'article précité, vise tout d'abord à aménager la législation face au développement de la crémation en France et à offrir ainsi plus de lieux de sépulture pour accueillir les urnes ou disperser les cendres. Elle vise également à simplifier le droit et à tirer les conséquences, pour les opérateurs funéraires, de cette simplification.

« Le Gouvernement travaille également à l'adoption d'un décret en Conseil d'Etat simplifiant le droit applicable aux opérations funéraires, notamment dans le domaine des autorisations.

« Conformément aux dispositions de l'article L. 1241-1 du code général des collectivités territoriales, le Conseil national des opérations funéraires (CNOF) a été consulté sur ces deux projets de texte. Tous deux ont reçu un avis défavorable lors de la séance plénière tenue le 24 mars 2005. Sans méconnaître les réserves formulées par les membres de cette instance, le Gouvernement souhaite toutefois poursuivre la démarche d'adoption de la présente ordonnance afin qu'il soit mis un terme à la création de sites cinéraires privés qui ne présentent pas de garantie de pérennité pour les familles et sont susceptibles de créer des troubles à l'ordre public en cas de dépôt de bilan de l'entreprise. »

I. - L'aménagement de la législation relative à la crémation

La crémation concerne aujourd'hui 23 % des décès contre moins de 1 % en 1980. Après la crémation, dans 68 % des cas, les cendres sont remises à la famille et, dans 25 % des cas, elles sont dispersées ou immergées, le droit français étant très libéral, par rapport aux autres droits européens, s'agissant de la dispersion des cendres.

Toutefois, si on assiste à une forte augmentation de la crémation, au bout de quelques années, certaines familles n'accordent plus à ces urnes suffisamment d'intérêt, certaines urnes pouvant être retrouvées dans des décharges ou sur une plage après une tentative d'immersion. Dans ce contexte, un groupe de travail s'est constitué, au sein du Conseil national des opérations funéraires, sur la crémation pour réfléchir au statut des cendres. Les travaux de ce groupe ont permis de constater à la fois un consensus autour de la nécessité de mieux protéger les cendres et des clivages quant aux solutions à retenir dès lors qu'on envisage une approche juridique, morale ou philosophique de la question. En conséquence, au vu des travaux de ce groupe, les mesures proposées ne bouleversent pas le statut actuel des cendres et en aucun cas ne remettent en cause la liberté des funérailles et la libre dispersion des cendres ; elles visent à améliorer les conditions de conservation des cendres et à multiplier les lieux de dépôt
ou d'inhumation des urnes ou de dispersion des cendres.

La présente ordonnance prévoit ainsi :
- de permettre aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale, et à eux seuls, de créer et de gérer un site cinéraire directement ou par voie de gestion déléguée, et en maintenant la gestion directe du site cinéraire situé dans le cimetière ;
- de régulariser la pratique, qui n'est pas prévue par les textes mais à laquelle ont recours les communes et les familles endeuillées, d'inhumer l'urne dans le caveau familial ;
- de sécuriser les modalités d'attribution de concessions d'espaces pour le dépôt ou l'inhumation de l'urne ou la dispersion des cendres dans le cimetière.

1° La création et la gestion de sites cinéraires par les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale, directement ou par voie de gestion déléguée

Aujourd'hui, la création d'équipements cinéraires dans les cimetières (jardin du souvenir pour procéder à la dispersion des cendres, columbarium ou « caveaux d'urnes ») est facultative et relève de la libre appréciation du maire, autorité de police des funérailles et des lieux de sépulture. Il n'est pas proposé de revenir sur le caractère facultatif de la création de ces équipements cinéraires car cela ne répondrait pas à un besoin de la population dans chacune des communes, et notamment dans les petites communes rurales où les pratiques crématistes sont moins fréquentes.

Toutefois, il semble utile d'aménager la législation afin d'offrir aux familles davantage de lieux pour accueillir les urnes ou disperser les cendres. Il est donc proposé de faire évoluer le droit en donnant aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale, et à eux seuls, la compétence pour la création et la gestion d'un site cinéraire directement ou par voie de gestion déléguée. S'agissant du site cinéraire dans le cimetière, il est proposé de maintenir la gestion directe, prenant ainsi en compte les observations formulées par certains professionnels craignant, par ce biais, que le cimetière s'ouvre à la gestion déléguée.

Ainsi, le terrain sur lequel sera installé un site cinéraire deviendra, à l'expiration d'une convention de délégation de service public, la propriété de la personne publique et intègrera le domaine de la commune.

Cette mesure fait l'objet du paragraphe VI de la présente ordonnance qui modifie l'article L. 2223-40 du CGCT.

2° Le dépôt ou l'inhumation de l'urne dans le cimetière

Aujourd'hui, une ambiguïté subsiste sur la possibilité d'inhumer, dans le caveau familial, une urne, les textes ne prévoyant que la possibilité de la sceller sur le monument funéraire. Afin de lever cette ambiguïté, la présente ordonnance redéfinit le mot « sépulture » visé à l'article L. 2223-13 du code général des collectivités territoriales comme le lieu où l'on inhume cercueils et urnes, l'urne devenant partie intégrante de la sépulture (paragraphe II de l'ordonnance).

Par ailleurs, devant la très forte augmentation de la crémation, les communes ont créé des columbariums et ont institué des concessions de cases de columbarium pour le dépôt de l'urne ; elles ont également mis en place des concessions de « caveaux d'urnes » pour l'inhumation de l'urne en pleine terre ou la dispersion privative des cendres, sur le modèle des concessions de terrains.

Les propositions de modification de l'article L. 2223-13 du CGCT (paragraphe II de l'ordonnance) visent à régulariser cette pratique à laquelle ont recours les communes et les familles endeuillées et à sécuriser les modalités d'attribution de ces concessions (paragraphe III de l'ordonnance modifiant l'article L. 2223-18 du CGCT).

II. - Simplification du droit funéraire

1° Simplification du droit et responsabilisation des opérateurs funéraires

La réforme envisagée devrait, en outre, faciliter le déroulement de la procédure aboutissant à l'inhumation des personnes décédées, en proposant notamment la suppression d'un certain nombre de formalités.

Cet assouplissement de la réglementation a pour contrepartie une plus grande responsabilisation des opérateurs funéraires qui conserveront dans tous les cas l'obligation de déclarer en mairie les diverses opérations funéraires qui donnaient lieu précédemment à autorisations.

Cette responsabilisation se traduit par un renforcement des motifs de suspension ou de retrait visés à l'article L. 2223-25 du code général des collectivités territoriales. En effet, une extension des missions confiées aux opérateurs funéraires doit s'accompagner d'une réévaluation de la procédure d'habilitation dans le sens d'une garantie professionnelle et déontologique plus grande donnée aux familles.

Tel est l'objet de la modification de l'article L. 2223-25 dudit code (paragraphe V de l'ordonnance).

2° Simplification des missions du service extérieur des pompes funèbres

Les éléments du service extérieur des pompes funèbres sont énumérés à l'article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales. Il est proposé de supprimer de cette liste la fourniture des tentures extérieures des maisons mortuaires qui est obsolète et n'est plus mise en oeuvre (paragraphe IV de l'ordonnance).

3° Aménager la procédure de l'enquête de commodo et incommodo

L'enquête de commodo et incommodo est une procédure préalable et nécessaire à la délivrance d'autorisations par le préfet pour les projets de création et d'agrandissement d'un cimetière (articles L. 2223-1 et R. 2223-1 du code général des collectivités territoriales), de création ou d'extension d'un crématorium (article L. 2223-40 du même code) ou d'une chambre funéraire (article R. 2223-74 du code).

Cette enquête permet d'informer la population concernée par l'installation de tels équipements funéraires. Elle vise également à consulter la population et à recueillir les observations émises sur les éventuelles nuisances susceptibles d'être apportées par ces équipements.

Toutefois, aucun texte législatif ou réglementaire ne définit ce type d'enquête et ne précise de manière explicite son organisation et son mode de financement. Seules les circulaires du ministre de l'intérieur du 20 août 1825 et du 15 mai 1884 ont prescrit certaines recommandations.

Le caractère obsolète des textes entraîne une grande incertitude juridique qui pose de nombreuses difficultés quant aux modalités de mise en oeuvre de cette enquête.

Par conséquent, les dispositions de la présente ordonnance visent à substituer à l'enquête de commodo et incommodo le régime juridique de l'enquête publique définie aux articles L. 123-1 et suivants du code de l'environnement pour ce qui concerne les crématoriums (paragraphe VI de l'ordonnance). Des dispositions réglementaires viendront adapter le dispositif applicable lors de la création d'une chambre funéraire ou d'un cimetière.

4° Simplifier le dispositif applicable en matière de translation de cimetières

Enfin, dans un souci de simplification et de clarification du droit funéraire, l'ordonnance propose de simplifier le dispositif applicable en matière de translation des cimetières, en transférant expressément cette compétence du préfet au conseil municipal déjà compétent en matière de création et d'agrandissement d'un cimetière.

A cet égard, il est utile de rappeler que le décret n° 2000-318 du 7 avril 2000 relatif à la partie réglementaire du code général des collectivités territoriales a abrogé les dispositions des articles R. 361-1 et R. 361-2 de l'ancien code des communes portant sur la translation des cimetières, relevant de la compétence du préfet, suite à l'avis du Conseil d'Etat confirmant leur nature législative. Depuis la procédure de translation de cimetière n'a plus de fondement juridique.

La création et l'extension des cimetières relevant de la seule compétence du conseil municipal hormis le cas où le cimetière doit être implanté dans une commune urbaine à l'intérieur du périmètre d'agglomération et à moins de 35 mètres des habitations, le paragraphe I de l'ordonnance modifiant l'article L. 2223-1 du code général des collectivités territoriales vise à donner au conseil municipal, et non plus au préfet, la compétence en matière de translation de cimetière. Par voie de conséquence, cette modification doit être introduite dans les articles L. 5215-20 et L. 5215-20-1 (paragraphes VIII et IX de l'ordonnance).

Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.

Source : Journal officiel de la République française n° 175 du 29 juillet 2005 page 12346