Le jugement ci-dessous du Tribunal administratif de Caen a été annulé par l'arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes, 15 octobre 2009, n° 09NT00165. |
En l’espèce, un patient a recherché la responsabilité d’un établissement public de santé devant le tribunal administratif de Caen en vue de réparer le préjudice moral qui aurait résulté pour lui de la connaissance par ses parents de sa séropositivité. Hospitalisé au sein d’un centre hospitalier universitaire (CHU), le requérant fait valoir qu’il avait précisé au service hospitalier qu’ils tenaient à ce que ses parents ne soient pas informés de sa séropositivité au VIH. Or, sa mère lui a indiqué lors d’une de ses visites à l’hôpital qu’elle savait qu’il souffrait du SIDA pour l’avoir lu sur sa fiche médicale posée selon elle sur le chariot de soins laissé dans le couloir par l’équipe soignante. Par ce jugement, le tribunal administratif de Caen relève que le patient n’établit pas que la feuille d’exécution des soins aurait été placée à la vue de quiconque circulant dans le couloir et non pas, comme le fait valoir le centre hospitalier, recouverte par un autre document. Il précise également que selon la commission des relations avec les usagers, le service de dermatologie avait parfaitement pris en compte le souhait du requérant de ne pas faire connaître à ses parents la pathologie dont il était affecté et que, conformément aux consignes de confidentialité définies par le centre hospitalier, le protocole ainsi mis en place, eu égard aux contraintes inhérentes à l’exécution des soins hospitaliers, était de nature à assurer le respect de la confidentialité, souhaitée par le requérant, par l’ensemble des agents hospitaliers amenés à intervenir au titre des soins. Le tribunal considère, dans ces conditions, qu’aucun manquement ne peut, dans les circonstances de l’espèce, être reproché à ce CHU.
DE CAEN
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M...
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Mme MURAT
Rapporteur
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M. DI PALMA
Commissaire du gouvernement
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Audience du 18 novembre 2008
Lecture du 2 décembre 2008
Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2007, présentée pour M..., demeurant ..., par Me Ndiaye, avocat ;
M. demande que le tribunal :
1°) déclare le centre hospitalier universitaire de Caen responsable du préjudice subi par lui du fait de la négligence fautive commise le service hospitalier et qui a permis la découverte, par sa mère, de ce qu’il était séropositif au VIH ;
2°) condamne le centre hospitalier universitaire de Caen à lui verser la somme de 40 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
3°) mette à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen la somme de 1 500 euros par application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision en date du 20 décembre 2006 par laquelle le bureau d’aide juridictionnelle auprès du Tribunal de grande instance de Paris a accordé l’aide juridictionnelle partielle à M... et fixé la contribution de l’Etat à 40 % ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2008 :
- le rapport de Mme MURAT ;
- les observations de Me NDIAYE, avocat au barreau de Caen, pour
M... ;
- les observations de Me BOUTHORS, avocat au barreau de Caen, substituant
Me Labrusse, pour le centre hospitalier universitaire de Caen ;
- et les conclusions de M. DI PALMA, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par la présente requête, M... recherche la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Caen pour la faute qu’aurait commise le service hospitalier et qui aurait permis la découverte, par sa mère, de sa séropositivité au VIH ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 1112-1 du code de la santé publique :
« … Les établissements sont tenus de protéger la confidentialité des informations qu’ils détiennent sur les personnes qu’ils accueillent … » ;
Considérant que M..., hospitalisé au centre hospitalier universitaire de Caen du 23 mai au 7 juin 2006, où il avait été admis au service dermatologique pour des problèmes de peau et des douleurs articulaires, fait valoir qu’il avait précisé au service hospitalier qu’il tenait à ce que ses parents ne soient pas informés de sa séropositivité au VIH ; que si le requérant soutient que sa mère lui a indiqué, le 4 juin 2006, lors d’une de ses visites à l’hôpital, qu’elle savait qu’il souffrait du SIDA pour l’avoir lu sur sa fiche médicale posée selon elle sur le chariot de soins laissé dans le couloir par l’équipe soignante le 30 mai 2006, le centre hospitalier affirme que, conformément aux consignes de confidentialité données au personnel, la feuille d’exécution des soins - sur laquelle figurait la mention signalant la pathologie de M... et le fait que cette pathologie était ignorée de ses parents - était recouverte par le cahier de soins infirmiers disposé à l’envers et que la mère de M... n’a pu prendre connaissance de cette inscription que par une action délibérée, active et intentionnelle ; que M..., qui se borne à rapporter les propos de sa mère, n’établit pas que la feuille d’exécution des soins aurait été placée à la vue de quiconque circulant dans le couloir et non pas, comme le fait valoir le centre hospitalier, recouverte par un autre document ; que, d’ailleurs, la commission des relations avec les usagers, après enquête auprès du service concerné, a considéré que le service de dermatologie avait parfaitement pris en compte le souhait du requérant de ne pas faire connaître à ses parents la pathologie dont il était affecté et que, conformément aux consignes de confidentialité définies par le centre hospitalier, le service avait pris les dispositions nécessaires pour préserver la confidentialité de cette information en recouvrant par le cahier des soins infirmiers la fiche d’exécution des soins ; que le protocole ainsi mis en place par le centre hospitalier universitaire, eu égard aux contraintes inhérentes à l’exécution des soins hospitaliers, était de nature à assurer le respect de la confidentialité, souhaitée par le requérant, par l’ensemble des agents hospitaliers amenés à intervenir au titre des soins ; que, dans ces conditions, aucun manquement ne peut, dans les circonstances de l’espèce, être reproché au centre hospitalier universitaire de Caen ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M... n’est pas fondé à soutenir que la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Caen est engagée en raison de la connaissance que sa mère a pu avoir de la pathologie qu’il désirait lui cacher ; que, dès lors, il n’est pas fondé à demander la condamnation du centre hospitalier universitaire de Caen à réparer le préjudice moral qui aurait résulté pour lui de la connaissance par ses parents de cette pathologie ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M... doivent, dès lors, être rejetées ;
Article 1er : La requête de M... est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M... et au centre hospitalier universitaire de Caen.
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2008, à laquelle siégeaient :
M. HEU, président,
M. HOMMERIL, premier conseiller,
Mme MURAT, premier conseiller,