La commission d’accès aux documents administratifs (CADA) rappelle dans cet avis relatif à l’accès au dossier médical d’une personne décédée qu’afin d’attester de sa qualité d’ayant droit, le demandeur doit rapporter le preuve qu’il est successeur testamentaire du défunt ou qu'il n'existe pas de successeurs légaux le précédant dans l'ordre des héritiers déterminé conformément aux articles 731 et s. du code civil. La CADA rappelle que si l'objectif relatif aux causes de la mort n'appelle, en général, pas de précisions supplémentaires de la part du demandeur, il en va différemment des deux autres objectifs (faire valoir ses droits, défendre la mémoire du défunt).
Madame ... a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 17 octobre 2011, à la suite du refus opposé par le directrice générale de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (Hôpital ...) à sa demande de communication du dossier médical de son oncle Monsieur ... dont elle est l'ayant droit, décédé à l'hôpital ... le 20 mars 2010, afin de faire valoir ses droits.
En l'absence de réponse de l'administration, la commission relève que le dernier alinéa de l'article L.1110-4 du code de la santé publique, auquel renvoie l'article L.1111-7 du même code, prévoit que le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations médicales concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire opposée par la personne avant son décès.
La commission précise que le Conseil d'Etat, dans une décision du 26 septembre 2005, Conseil national de l'ordre des médecins, n° 270234, a interprété les dispositions de l'article L. 1110-4 du code de la santé publique comme ayant entendu autoriser l'accès des ayants droit aux seules informations nécessaires à l'objectif qu'ils poursuivent. L'application de ces dispositions à chaque dossier d'espèce relève de l'équipe médicale qui a suivi le patient décédé, seule compétente pour apprécier si un document composant le dossier se rattache à l'objectif invoqué.
En outre, la commission souligne que, par ces dispositions, le législateur a clairement entendu restreindre aux seules personnes qui peuvent se prévaloir de la qualité d'ayant droit, à l'exclusion de toute autre catégorie de tiers tels que la famille et les proches, la dérogation ainsi aménagée au secret médical du défunt. C'est donc uniquement dans les cas où Ils justifient de la qualité d'ayant droit que les membres de la famille peuvent obtenir communication du dossier médical.
En ce qui concerne la notion d'ayant droit, la commission considère que sont ainsi visés, en premier lieu, les successeurs légaux du défunt, déterminés conformément aux articles 731 et suivants du code civil, comme l'a rappelé l'arrêté du 3 janvier 2007 portant modification de l'arrêté du 5 mars 2004 portant homologation des recommandations de bonnes pratiques relatives à l'accès aux informations concernant la santé d'une personne. La commission rappelle que l'article 734 de ce code prévoit qu'en l'absence de conjoint successible, les parents sont appelés à succéder ainsi qu'il suit : / 1° Les enfants et leurs descendants ; / 2° Les père et mère ; les frères et sœurs et les descendants de ces derniers ; / 3° Les ascendants autres que les père et mère ; / 4° Les collatéraux autres que les frères et sœurs et les descendants de ces derniers. Chacune de ces quatre catégories constitue un ordre d'héritiers qui exclut les suivants.
La commission considère que doivent être regardés en second lieu comme des ayants droit au sens et pour l'application de l'article L. 1110-4 du code de la santé publique, les successeurs testamentaires du défunt. La commission rappelle que cette qualité d'ayant droit, qu'il appartient à l'administration de vérifier, peut être établie par tout moyen, par exemple par un acte de notoriété ou par un certificat d'hérédité.
En l'espèce, la commission observe que les documents produits par Madame ... pour justifier de sa qualité d'ayant droit, en particulier l'attestation rectificative à un précédent acte de notoriété établie le 29 mars 2010, ne permettent que d'établir un lien de parenté entre elle-même et le défunt mais non de prouver sa qualité d'ayant droit au sens des dispositions précitées.
La commission estime par conséquent que les informations demandées ne sont pas communicables en l'état à Madame ... aussi longtemps que cette dernière n'aura pas apporté la preuve qu'elle est le successeur testamentaire du défunt ou qu'il n'existe pas de successeurs légaux la précédant dans l'ordre de succession (enfants du défunt ou leurs descendants).
Dans l'hypothèse où le notaire chargé du suivi de cette affaire refuserait de produire un tel certificat, la commission précise qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer et qu'il appartiendrait dans ce cas à l'intéressée de saisir le juge judiciaire.
Par ailleurs, la commission rappelle que si l'objectif relatif aux causes de la mort n'appelle, en général, pas de précisions supplémentaires de la part du demandeur, il en va différemment des deux autres objectifs. Invoqués tels quels, ils ne sauraient ouvrir droit à communication d'un document médical. Il appartient au demandeur de préciser les circonstances qui le conduisent à défendre la mémoire du défunt ou la nature des droits qu'il souhaite faire valoir, afin de permettre à l'équipe médicale d'identifier le ou les documents nécessaires à la poursuite de l'objectif correspondant.
La commission émet donc, en l'état, un avis défavorable.